mardi 10 mars 2015 - par
L’euro cher et l’austérité étaient bien les problèmes de l’Europe
Nous étions un certain nombre à le dire depuis des années, mais les récentes prévisions de la BCE, pour laquelle la croissance devrait atteindre 1,5% en 2015 et près de 2% en 2016, démontrent de facto que l’euro cher et l’austérité étaient bien les causes de la dépression européenne.
Euro moins cher, allègement de l’austérité
Il faut rappeler ici que, a priori paradoxalement, la zone euro est entrée en récession deux trimestres avant les Etats-Unis en 2008. Il faut dire que l’euro touchait alors des sommets, à 1,6 dollars au plus haut. Cela avait pesé sur les économies européennes. Les économistes estiment généralement qu’à parité de pouvoir d’achat, l’euro devrait coter entre 1 et 1,15 dollars. Etant donné le décalage dans le cycle économique mais aussi celui dans les politiques monétaires, l’euro devrait rester bon marché. Jusqu’à mi-2014, il cotait pourtant entre 1,25 et 1,4 dollars et on peut se dire que cela a joué un rôle dans l’atonie des économies européennes. La récente baisse apporte un bol d’air frais.
Le deuxième bol d’air frais pour les économies européennes, c’est incontestablement le desserrement des politiques d’austérité. Même s’il reste une pression des instances européennes sur les budgets nationaux, illustrée par les échanges avec la Grèce ou même la France, le ryhtme de baisse des déficits et l’ampleur des mesures budgétaires est bien plus raisonnable qu’en 2011 ou 2012. Initialement, le déficit de la France devait passer de 5,2 à 3% de 2011 à 2013. Finalement, nous aurons quatre ans de plus pour le faire, ce qui signifie une austérité atténuée. En outre, beaucoup de pays européens sont déjà sous les 3%. Bref, le vent mauvais de l’austérité ne souffle plus aussi fort qu’avant.
Aucune leçon n’a été tirée
Malheureusement, aucune leçon sérieuse n’a été tirée de ces années de récession. La légère reprise, permise par la baisse de l’euro et du pétrole ainsi que le léger desserrement des politiques d’austérité, est seulement une réaction conjoncturelle, et en aucun cas un changement de cap structurel. C’est parce que les Etats-Unis ont mis fin à leur politique d’assouplissement quantitatif et devraient remonter les taux cette année, alors que la BCE a été contrainte de mettre en place un nouveau programme que l’euro s’est, assez logiquement, effondré par rapport au dollar. Nous ne sommes que dans un ajustement aux vents du moment sans véritable réflexion sur les grands courants qui nous affectent.
Cette évolution des choses est inquiétante à plusieurs titres. D’abord, il y a le sentiment que nous persistons dans l’erreur sans tirer les leçons du passé. Ensuite, alors que nous n’avons pas réussi à faire émerger une alternative au plus fort de la crise, contrairement à la Grèce, comment espérer, demain, que les choses finissent par changer alors que le climat pourrait devenir un peu moins défavorable ? Les gouvernements aux affaires vont tenter de faire passer l’amélioration de la météo pour le résultat de leur action alors qu’il ne s’agira que d’un changement de cap des vents de la conjoncture. Il risque d’être encore plus difficile de dissiper les intox des néolibéraux monétaristes et austéritaires.
Cela est d’autant plus paradoxal que leurs politiques ont été mises en échec et que c’est un changement extérieur de la conjoncture qui pourrait permettre une amélioration des choses. A moins que ce qui se passe en Grèce et en Espagne ne soit annonciateur d’une accélération du changement.