samedi 9 mai 2015 - par
La Grande-Bretagne votera pour sortir de l’UE en 2017
Il y a cinq ans, les Conservateurs l’avaient emporté de justesse, ne remportant pas une majorité des sièges seuls, leur imposant une inhabituelle coalition avec les Libéraux-Démocrates. Jeudi, alors que l’on anticipait l’absence de majorité pour un parti, David Cameron gagne plus de la moitié des sièges.
Pourquoi Cameron gagne ?
Cette élection est marquée par un effondrement des Libéraux-Démocrates, victime de leur coalition avec les Conservateurs, et qui tombent de 23 à 8% des suffrages et de 57 à 8 députés ! Le premier vainqueur pour le nombre de voix est UKIP, qui passe de 3 à 12,6%, mais ne gagne qu’un siège. Les nationalistes écossais, s’ils ne passent que de 1,6 à 4,7% des voix, passent de 6 à 56 sièges, emportant la quasi totalité des sièges en Ecosse, démontrant que l’unité du Royaume est toujours fragile. Paradoxalement, les travailliste gagnent un peu plus de voix que les conservateurs (1,5 point contre 0,8) mais le parti de David Cameron arrive bien en tête (36,9% contre 30,4%) et surtout gagne 24 sièges, à 331 sur 650, alors que le parti d’Ed Milliband en perd 26 à 232 sièges, du fait de sa déroute en Ecosse.
Les raisons de cette victoire sont multiples. La relative reprise économique, malgré ses innombrables limites, valide en partie la politique économique de la majorité. La première force de David Cameron a peut-être été la faiblesse de son premier adversaire, qui n’a jamais réussi à vraiment convaincre, d’autant plus que la crise de 2008 a sérieusement entamé la crédibilité des travaillistes en matière économique. Son pari de promettre un référendum en 2017 sur la sortie de l’UE s’est avéré gagnant, d’autant plus que les travaillistes ont refusé de faire de même. David Cameron récolte peut-être aussi les fruits de sa politique à l’égard des personnes âgées, largement épargnées par les coupes, comme l’avait dénoncé The Economist dans un dossier très intéressant, malgré sa prise de position en faveur des Tories.
Nouvelle crise en vue pour l’UE
Alors que la situation en Grèce est à nouveau extrêmement tendue et que les risques d’une sortie d’Athènes de la zone euro semblent au plus haut, un nouveau front s’ouvre pour l’UE, puisque David Cameron a pris l’engagement solennel de consulter les électeurs en 2017 sur le maintien dans l’Union, conditionnant son soutien à une renégociation des traités pour répondre aux attentes des britanniques, qui disposent pourtant déjà de nombreuses exemptions, ne faisant ni partie de l’espace Schengen ou de la zone euro. En posant publiquement les termes du débat, David Cameron impose aux dirigeants européens de vrais changements, sans quoi Londres aurait des chances de quitter l’UE.
Bien évidemment, si les Conservateurs obtenaient de vraies concessions, s’ils organisaient le référendum en appellant à voter pour le maintien dans l’UE, la sortie serait sans doute peu probable. Il est difficilement imagineable que David Cameron organise un référendum en appelant les électeurs à voter pour la sortie de l’UE. Néanmoins, dans une construction en crise quasi permanente depuis 2005, cette nouvelle épreuve de force pourrait bien contribuer à déstabiliser plus encore une union bien fragile. Tout ceci montre que cette construction est mal conçue et qu’il faudrait la concevoir de manière modulaire, avec un périmètre révisable régulièrement au lieu d’imposer la lourdeur de traités immuables.
David Cameron a remporté une belle victoire. Mais le plus important est la nouvelle négociation qui va être lancée entre Londres et les dirigeants européens. Ce chantier sera-t-il une simple péripétie réglée par quelques mesures superficielles ou le coup de vent qui fera s’effondrer ce château de carte ?