vendredi 26 juin 2015 - par Laurent Herblay

Lettre ouverte à Syriza : la rupture est possible et nécessaire

Depuis cinq mois, la situation est tendue entre vous et vos créanciers. Votre gouvernement alterne les chauds et froids au point qu’il est difficile de savoir quelle pourrait être l’issue de cette nouvelle crise. A quelques jours de la fin de ce chapitre, j’espère que les intérêts du peuple Grec vont prévaloir.

 
De l’indécence des créanciers
 
Sans doute encouragée par ce que vous avez semblé céder dernièrement, l’ex-Troïka a cru bon renvoyer vos propositions corrigées en rouge, façon professeur, comme le révèle Marianne. On peut comprendre des discussions sur les objectifs, le phasage attendu, ou la crédibilité des mesures proposées. Mais ici, non seulement la troïka prétend fixer les objectifs mais aussi la manière dont ils sont atteints. Et cette manière a un sens, entre protection des entreprises (réduction de la hausse de l’impôt sur les sociétés, suppression de la taxe exceptionnelle sur les profits et protection des labos pharmaceutiques), et ménages qui règleront la nouvelle hausse de la TVA et subiront la baisse des retraites.
 
Bien sûr, certaines réformes ne sont peut-être pas inutiles. Mais la plupart de ceux qui pointent le coût trop élevé des retraites (16% du PIB), oublient que les plans inhumains et inefficaces ont réduit le PIB de votre pays de 25%, augmentant le poids relatif des retraites. Et puis, il est totalement indécent et infantilsant de traiter votre pays comme un il est depuis 5 ans, comme vous l’aviez dit dans votre campagne gagnante en janvier. Le document de la troïka est un nouvel exemple de ce qui doit être refusé, autant pour le fond que pour la forme. La crise de votre pays est le fruit des plans conçus par ces cerveaux malades et inhumains, malgré les avertissements donnés par beaucoup d’entre nous.
 
Courage d’Achille, ruse d’Ulysse ?
 
Jacques Sapir, qui dénonce les politiques d’austérité depuis le début, soutient que ceux qui vous critiquent « oublient sciemment de prendre en compte la complexité de la lutte conduite  ». Pour lui, vous avez « bien fait des concessions importantes depuis le mois de février dernier, mais ces concessions sont toutes conditionnelles à un accord général sur la question de la dette  ». J’avais l’impression, sans doute fausse, que vous sembliez prêt à un signer un accord sans régler cette question. Pour lui, « jusqu’à présent, (vous avez) défendu les intérêts du peuple grec, et au-delà, les intérêts des européens, avec la force d’un lion. Nous n’avons pas le droit d’oublier cela et nous nous en souviendrons quel que soit le résultat final de cette négociation  ». Mais là, je ne partage pas l’avis de Sapir.
 
D’abord, je ne partage pas le « quel que soit le résultat final  ». Proposer un plan qui augmente l’excédent budgétaire primaire de 8 milliards d’euros, 4% du PIB peut-il être acceptable, humainement comme même plus froidement (car cela pourrait ranimer le cycle dépressioniste), surtout avec des mesures qui pèsent plus largement sur les ménages ou sans réduction de la dette ? Après, peut-être que vous jouez un jeu destiné à rendre acceptable la rupture pour le peuple Grec, comme semble l’envisager Romaric Godin, le meilleur chroniqueur de cette crise, dans la Tribune. Le ton des défenseurs des euro-austéritaires devient d’autant plus nauséabond quand il rajoute à l’inhumanité un déni de démocratie, pour ne pas dire le souhait du Monde d’un putsch contre Tsipras, épinglé par Jack Dion.
 
Dans quelques jours, nous connaîtrons la conclusion de cette crise. Au bout de cinq mois, seule la rupture complète est une issue cohérente avec votre refus de l’austérité et de la tutelle auxquelles votre pays était soumis depuis cinq ans. J’espère que mes craintes étaient infondées et que vous choisirez le chemin de l’humanité, de la démocratie et de l’indépendance. Pour la Grèce, pour l’Europe, pour l’Humanité.


7 réactions


  • Dwaabala Dwaabala 26 juin 2015 12:51

    De quoi je me mêle ?


  • doctorix, complotiste doctorix 26 juin 2015 16:39

    Mais qu’ils se barrent en claquant la porte !

    Qu’ils retrouvent une monnaie propre, certes affaiblie, mais qui soit la leur.
    Une monnaie faible dans un premier temps gênera leurs importations, oui, mais d’une part c’est une bonne chose pour l’économie de ne pas claquer son fric à l’étranger quand on en a peu, d’autre part leurs exportations prendront des ailes, avec des entreprises étrangères qui viendront s’installer et réduire leur chômage, et leur tourisme, ressource majeure, explosera.
    En plus, ils seront débarrassés des conneries de Bruxelles et des diktats des banques et des multinationales : le rêve !
    C’est simpliste ? Non, c’est simple.
    Oui, les Grecs, tirez vous de ce merdier, on vous suivra de près. 
    Donnez l’exemple. 

  • zygzornifle zygzornifle 26 juin 2015 17:37

    Il faut que la Grèce sorte de l’EU ça donnera du courage à d’autres pays qui en ont marre de se faire plumer mais qui pour l’instant courbent l’échine et ça mettra une bonne claque a ces politico-technocrates incompétents mais hautement néfastes de Bruxelles .....


  • leypanou 26 juin 2015 17:54

    Tant qu’A Tsipras n’ose pas dire ouvertement au peuple grec, qui semble vouloir rester majoritairement dans l’euro, que c’est entre le choix entre rester dans l’euro et accepter les recommandations de la Troika et quitter l’euro avec ses conséquences dont le pouvoir d’orienter le pays dans une direction qui libérera définitivement la Grèce d’une politique économique et sociale imposée de l’extérieur ainsi que le bradage des biens publics, il donnera l’impression de quelqu’un qui veut une chose et son contraire.

    Pire, il donne aussi l’impression de vouloir « faire jouer » la Russie contre l’Europe, mais en perdant sur les 2 tableaux, i.e mécontenter les uns et les autres.


  • BA 27 juin 2015 06:40

    Tsipras vient de rejeter les propositions de la troïka.

    Conséquences :

    – il n’y aura pas d’accord entre la troïka et la Grèce ;

    – la Grèce sera incapable de rembourser le FMI le mardi 30 juin ;

    – la Grèce sera en défaut de paiement vis-à-vis du FMI le 30 juin ;

    – la troïka ne prêtera pas 7,2 milliards d’euros à la Grèce ;

    – les conséquences de la faillite de la Grèce sont tellement gigantesques que Tsipras a besoin de montrer que c’est tout le peuple grec qui dit « non » aux propositions de la troïka ;

    – Tsipras va demander par référendum au peuple si il dit « oui » ou « non » aux propositions de la troïka ;

    – samedi 27 juin, le vice-premier ministre Yannis Dragassakis et le vice-ministre des Affaires étrangères Euclide Tsakalotos vont rencontrer le Président de la BCE Mario Draghi pour préparer le plan B ;

    – dans les semaines qui viennent, le peuple grec va répondre « non », et l’Europe va devoir gérer la sortie de la Grèce de la zone euro ;

    – les peuples européens vont maintenant devoir préparer l’après-euro ;

    – en Europe, nous sommes en train de vivre les journées les plus importantes depuis l’effondrement de l’URSS.

    Samedi 27 juin 2015 :

    Grèce : Tsipras annonce un référendum pour le dimanche 5 juillet.

    http://www.romandie.com/news/Grece–Tsipras-annonce-un-referendum-pour-le-dimanche-5-juillet/606633.rom


    • CN46400 CN46400 27 juin 2015 08:06

      @BA


      Le peuple grec va donc intervenir, Tsipras a décidé un référendum pour le 5 juillet prochain. Les mines des consuls de Bruxelles se sont brusquement allongées. A noter que les « merdias » de service profitent des attentats d’hier, pour camoufler l’info..... 

  • alinea alinea 27 juin 2015 09:14

     Le gouvernement grec organise un référendum le 5 juillet : êtes-vous pour ou contre les propositions des créanciers ?
    Voilà, c’est très bien.
    Faites tous vos bagages et allez balader en Grèce en n’oubliant pas de claquer votre fric !
     smiley  smiley  smiley


Réagir