PESD vs OTAN, ou la fin de l’A 400 M
" Ce n’est plus celui qui a la plus grosse bombe qui l’emportera dans les conflits de demain, mais celui qui racontera la meilleure histoire", cette affirmation a été faite par John Arquilla et David Rumsfeldt, deux spécialistes de la guerre de réseaux à la Rand Corporation.

Les Etats-Unis ne supporteront pas la remise en cause de leur suprématie militaire ou diplomatique qui s’est construite depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, sous couvert d’alliances diverses avec presque tous les pays d’Europe. La montée en puissance de l’Europe crée une confrontation inévitable, dans une guerre qui reste invisible, du moins difficilement identifiable : la soft strategy ou quand la guerre des psy ops se met au service du marketing de "l’american way of life".
Le rachat de Gemplus : réalité économique d’obtention de bases de données ou écran de fumée ?
Il existe un précédent : Certplus, le leader français de la certification, racheté par Verisign, un grand groupe lui aussi proche des services secrets américains. Mais là encore, Certplus était sur un marché, l’authentification des parties dans un environnement électronique (notamment pour la conclusion de contrats en ligne), assez peu rentable. "L’intérêt n’est pas tant dans la technologie que l’on achète ou les backdoors (portes dérobées dans les logiciels sécurisés, NDLR) que l’on pourrait placer, mais dans le contenu des bases de données", précise notre spécialiste de ce marché. Les listes de fichiers, notamment de clients, sont en effet un enjeu pour le renseignement économique.
En 2002, peu avant le Conseil d’administration qui avait marqué le départ du fondateur Marc Lassus, quelques personnes avaient volontairement poussé des journalistes à se focaliser sur le problème des brevets. Cette tentative de manipulation rappelle aux spécialistes la Maskirovka, une technique similaire chère aux employés des services soviétiques du KGB, qui consiste à créer un écran de fumée pour attirer l’attention et servir de paravent à une autre action. Aujourd’hui, on évoque une main-mise de la CIA et de la NSA, les deux principales agences de renseignement américaines.
Dans le rapport du Sénat N° 261 de la séance du 10 avril 2003 enregistré à la Présidence du Sénat le 16 avril 2003, on peut lire :
"Les montages financiers et les restructurations capitalistiques d’une complexité inextricable se sont multipliés depuis 1999. Les législations fiscales et commerciales françaises ont été contournées notamment via des pays assimilables à des paradis fiscaux.
Citons entre autres des transferts de brevets vers des filiales étrangères à des fins d’évasion fiscale, l’utilisation d’une filiale basée à Gibraltar pour octroyer des droits de vote au Conseil d’administration puis d’importantes plus-values à deux dirigeants dont le fondateur Marc Lassus, le transfert du siège de la société en 1999 au Luxembourg...
Des soupçons plus que sérieux sont, en effet, autorisés quant aux intentions du Fonds de pension américain, Texas Pacific Group (TPG), qui a pris le contrôle de Gemplus et du PDG, Alex MANDL, dont les liens avec la CIA, via la société InQtel sont avérés.
En tout état de cause, les menaces pesant sur Gemplus en France mettent en cause l’avenir de l’industrie française de la cryptologie et des cartes à puce, son développement ainsi que le maintien de l’avance technologique française.
Les auteurs de la résolution font remarquer que ces technologies ouvrent des possibilités d’application dans de multiples domaines notamment en matière de sécurisation de documents, comme les cartes d’identité, les comptes bancaires... en particulier dans le domaine stratégique du renseignement militaire.
Ce dernier élément pourrait expliquer, encore davantage avec le renforcement de la doctrine de sécurité économique des États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001, une convoitise américaine sur Gemplus..."
Lien : http://strategique.free.fr/archives/textes/ech/archives_ech_18.htm
Comment donc l’Europe peut-elle chercher à se construire en combattant sur le terrain économique des pays comme les Etats-Unis qui sont à la fois des partenaires ? L’Europe peut-elle arriver à faire avec ce principal paradoxe ?
Depuis la chute du mur de Berlin, l’Europe n’a plus à jouer le rôle de premier rempart contre une hypotétique invasion de chars Russe. Alors pourquoi donc maintenant se mettre sous le commandement de l’Otan ? L’Europe a plus à gagner à rester maître de sa défense, ce qui contribue certainement plus à un réel équilibre géostratégique mondial. Celà nous permet de garder notre indépendance mais n’empêche nullement les coopérations dans les conflits actuels.
Au-delà de l’engagement de troupe sur le terrain, il y a cette liberté d’information et de positionnement face à certains conflits, pour ne citer que l’Irak en 1991, où le fait d’être indépendant nous permet d’être encore les garants d’une certaine idée de liberté et de démocratie.
EADS, ou l’entente franco-allemande, fondement de l’entité Europe, sacrifié sur l’autel de l’OTAN-rentabilité ?
"Dassault et Thales, associés à l’israélien IAI et à l’espagnol Indra, veulent tuer le projet "Advanced UAV" d’EADS. Quitte à mettre encore plus à mal la relation franco-allemande. Les deux industriels français ont présenté à Paris leur solution de drone MALE, qui fait l’objet d’une offre non sollicitée aux armées de l’air française et espagnole. Dans le collimateur du quatuor : le projet "Advanced UAV", fruit d’une coopération entre Paris, Berlin, et Madrid, sous la maîtrise d’oeuvre d’EADS" (Les Echos 22 février 2008).
Pour notre président, faire confiance à l’Allemagne était un risque :
"Tout serait parti d’une rencontre informelle entre Serge Dassault, Serge Tchuruk et Nicolas Sarkozy. Serge Tchuruk alors président d’Alcatel aurait fait état de son besoin de liquidités pour son groupe. Joignant l’utile au stratégique, Nicolas Sarkozy aurait alors suggéré à Serge Dassault de reprendre les 20,8% d’Alcatel dans Thalès. Pour Nicolas Sarkozy, l’hypothèse Dassault avait alors le mérite d’éloigner EADS de Thalès. Pour le Président de la République, confier ce pan critique de la défense (missiles, drones, frégates, chiffrement...) au groupe franco-allemand est en effet un risque. Dans les rangs du gouvernement et de la défense, l’attitude allemande, suspecte de privilégier ses propres intérêts au détriment d’un équilibre franco-allemand, irrite." (L’Usine Nouvelle).
Natixis, dans une note parue en octobre, s’interroge : "Nous ne comprenons pas quel serait l’intérêt de Dassault d’entrer comme actionnaire minoritaire au capital de Thales, sans en avoir le complet contrôle capitalistique et opérationnel". D’ailleurs, pour cette maison de courtage, cette opération soulèverait un autre problème : "les conflits d’intérêt entre Dassault et les autres constructeurs mondiaux d’avions de combat et d’avions d’affaires avec lesquels Thales travaille". Si effectivement, Dassault rentrait dans le capital de Thalès –aux côtés de l’Etat qui détient 26,6%- "tous les scénarios seront possibles sur l’évolution du capital de Thalès : montée progressive au capital, revente à EADS, découpage du groupe…".
La PESD figurait à l’origine parmi les 4 priorités de la PFUE. A cet égard, au vu des objectifs qui étaient fixés, on ne peut qu’être déçu par le résultat : l’A 400 M.
http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/2009/01/a-400m-vers-un.html
http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/2009/01/a-400m-lincroya.html
détail de construction de l’A 400 M