jeudi 16 août 2012 - par Albert Ricchi

Traité budgétaire européen : Hollande et Debré main dans la main pour déterminer à minima les modalités de ratification…

Après le feu vert du Conseil constitutionnel, le chef de l'Etat a demandé au gouvernement de préparer rapidement un projet de loi pour la ratification du traité budgétaire européen et la mise en place de la « règle d'or ».

Ce futur texte qui est un héritage direct du précédent quinquennat sera examiné à la rentrée par le parlement, au cours d'une session extraordinaire, et sans doute voté par la grande majorité des parlementaires PS et une partie de la droite…

Le Conseil constitutionnel vient de rendre son avis : la ratification du pacte budgétaire et de la règle d'or ne nécessiteront pas de changement de la Constitution et donc pas de vote du congrès, en session extraordinaire à Versailles, vote à la majorité des 3/5 cinquièmes qui aurait pu s’avérer délicat pour le président de la République, et encore moins de référendum.

Le président n’a pas pris beaucoup de risque en demandant au conseil constitutionnel de statuer sur la constitutionnalité de ce traité. Ses douze membres, farouches partisans du libéralisme économique dont Jean-Louis Debré président et VGE membre de droit, n'ont pas voulu compliquer l'action de François Hollande en préconisant une ratification par majorité simple de l'Assemblée nationale et du Sénat.

La ratification de ce traité engagera la France à un équilibre budgétaire perpétuel, au détriment des politiques et des investissements publics avec la menace de sanctions européennes automatiques si une majorité décidait une autre politique. Mais le Conseil constitutionnel a jugé, en dépit de l'évidence, que ce traité n'impliquait pas d'abandons supplémentaires de souveraineté du Parlement français.

Pourtant le pacte budgétaire introduit un tel renforcement du pouvoir des instances européennes - Commission, Conseil et Cour de justice -, qu'il devrait sans aucun doute imposer un vaste débat démocratique et une consultation populaire.

Le futur projet de loi indiquera que le déficit public ne pourra excéder 0,5% du produit intérieur brut (PIB). Cette nouvelle règle succédera ainsi aux critères de convergences du traité de Maastricht que les pays européens ont été incapables de respecter jusqu’ici.

Pour mémoire en 1992, deux critères portaient sur la "stabilité des finances publiques" : déficit public annuel inférieur à 3% du PIB et dette publique inférieure à 60% du PIB. Parmi les 27 pays européens membre de l'union, seuls 10 pays ont respecté en 2011 la règle fixant le déficit public inférieur à 3%. Les 17 autres pays sont hors jeu et pour certains la situation est dramatique pour leurs peuples qui vivent dramatiquement chaque jour.

Maintenant, avec cette nouvelle règle de 0,5%, on s'aperçoit que seulement 3 pays (Finlande, Hongrie, Suède) satisfont à la nouvelle "règle d'or". Même l'Allemagne d'Angela Merkel est Out !

Et on ne peut que s'interroger sur le futur. Comment croire en effet que les 17 pays qui ne respectaient pas la norme de 3% de déficit public, respecteront demain un taux de 0,50% comme nouveau marqueur et cela en pleine crise ? Sur qui reposeront les sacrifices, rigueur, austérité à mettre en place pour respecter cette nouvelle mesure ? Quand on voit ce qui se passe en Grèce, en Espagne ou au Portugal, on a déjà plutôt la réponse…

Avant son élection François Hollande s'était pourtant engagé à une vraie renégociation. Il lui aura suffi d'un pseudo "pacte de croissance" qui n'équilibre en rien l'austérité massivement mise en œuvre en Europe pour abandonner cet engagement. Cette décision marque la victoire des fanatiques de l'équilibre budgétaire au détriment de toute perspective de transformation sociale et de transition écologique.

Au moment où les licenciements se multiplient, où le chômage et la pauvreté augmentent, c'est une autre politique qui est nécessaire en France comme en Europe : solidarité, partage du travail et des richesses, politiques de justice et de convergence sociales et fiscales, plans massifs d'investissements publics pour la transition énergétique.

Si on est encore loin des clivages qui avaient traversé en profondeur les partis de droite et de gauche lors des référendums sur le traité de Maastricht (1992) ou sur la Constitution européenne (2005), certains parlementaires ont annoncé néanmoins qu’ils ne voteront pas ce traité. Pour certains membres du PS, le député Razzy Hammadi ou la sénatrice Marie-Noëlle Lienemman, ce texte fait « peser une menace sur la démocratie ». Pour François de Rugy, coprésident du groupe écologiste (EELV) à l’Assemblée nationale, la mise en œuvre du texte « va plonger la France dans une grande austérité  ».

C’est pourquoi, dans les semaines qui viennent, toutes les forces démocratiques qui refusent un tel coup de force, doivent faire entendre leurs voix pour refuser ce pacte budgétaire et exiger la tenue d’un référendum. A défaut, c'est le peuple français qui en paiera le prix, et au-delà tous les peuples d'une Europe prise dans une logique libérale dévastatrice…

 

Petit rappel :

- TUE : traité sur l’Union européenne, première partie du traité de Lisbonne

- TFUE : traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, deuxième partie du traité de Lisbonne

- Conseil européen : réunion des Chefs d’Etat et de gouvernement

- TSCG  : Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire.

Le 30 janvier dernier, 25 des 27 pays européens sans la Grande-Bretagne et la République tchèque, ont signé un traité sur "la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire" instituant notamment la "règle d'or".

- MES : Mécanisme européen de stabilité (une sorte de FMI européen)

Le texte définitif du traité instituant le MES a été adopté par les représentants des Etats membres de la zone euro le 2 février 2012. Le MES est destiné à prendre, à partir de juin 2013, la suite des instruments créés en 2010 pour faire face à la crise de la dette. A partir du 1 mars 2013, pour avoir accès aux aides du MES un Etat devra avoir accepté toutes les dispositions sur l’austérité budgétaire contenues dans le TSCG.

Photo Creative Commons : parlement européen (http://www.flickr.com/)



14 réactions


  • JP94 16 août 2012 16:04

    Le TSCG dénie à la Nation le droit de décider de son budget .
    C’est un formidable instrument de chantage et d’austérité des Européens et des Français en particulier .
    Il délègue un pouvoir de contrôle et de sanctions à des instances supranationales non élues !

    A part ça , pas d’abandon de souveraineté à en croire le CC . Et pas de reniement ds engagements , à en croire F. Hollande .

    FH a tablé sur le rejet de Sarkosy pour mieux relayer la politique ultralibérale européenne .

    Tout doit être fait par les citoyens pour exiger un référendum et des débats , faute de quoi FH prendra la responsabilité de durablement saper toute velléité citoyenne en notre pays et d’ouvrir ainsi la voie toute grande au FN et à l’abstention . Mais c’est un choix politique . Je pense qu’il a déjà choisi cette voie : le verrouillage des choix économiques et libéraux est un enjeu trop décisif pour que FH déçoive ses commanditaires qui ont le vrai pouvoir .

    Il a précisément été élu pour mettre en place ce TSCG . le reste , ce sont les broutilles .

    Les élites européennes n’ont toujours pas digéré 2005 et le le rejet massif du TCE .

    Au sein des forces de gauche , le PS avait pour vocation de le faire passer et il a failli . Là il fait amende honorable . Mais étant en position de force à l’AN et au Sénat surtout vis-à-vis de la Gauche , il a les mains libres de ce côté .

    C’était le but de cette campagne parfaitement orchestrée pour donner un rapport de forces politiques nécessaire : PS hégémonique à gauche pour éviter débats et mises en cause sur sa politique . Droite en attente mais pas morte . Extrême-droite en épouvantail mais qu’on n’entend plus passée le moment électoral .

    Après ça , la Nation n’existe plus et doit assister impassible aux politiques mises en oeuvre . Curieuse conception de la Démocratie ... mais attention , ailleurs , il n’y a que de méchants dictateurs nous assène-t-on , alors on devrait croire qu’ici c’en est une vraie .

    Le peuple de Gauche ne sera même pas surpris , mais il existe d’autres choix . Cette politique est un choix qui n’a rien d’inéluctable sinon , autant donner le pouvoir directement au Medef et à l’UIMM et se passer d’être citoyen .


  • noodles 16 août 2012 16:10

    >@Albert Ricchi

    Bonjour, j’approuve votre texte

    il fait suite à celui que j’ai écrit il y a qq jours

    vous terminez par le même appel à une mobilisation démocratique.

    On est au creux de la vague d’août. J’ai des doutes sur un mouvement de masse ! 

    Tout ça me rappelle quand,,peu de temps après son succès, F. Mitterand nous a obligés à aller fdans la rue défendre l’Ecole Laïque Peut-être étiez-vous sur la Canebière vous aussi ?

    J’ai trouvé alors que c’était un comblepour un gouvernement qui s’était formellement engagé sur ces valeurs...d’ailleurs ça a mal fini.

    Et là, qu’il faille obliger par une mobilisation, rue comprise, F. Hollande à respecter la parole donnée, à prendre le courage de « bousculer le pot de fleurs », ça me paraît én0000orme...je dis ça à la manière de Farice Luchini car mieux vaudra en rire. Ah quand les français se réveilleront cocus !

    Bien cordialement

    noodles

    Lucvhini chez Drucker se lâche sur la Gaujche.

    http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=86oX9S-6gy8# ! 


  • bigglop bigglop 16 août 2012 19:57

    Bonjour à tous,

    Merci @Albert Ricchi pour ce très bon article, mais il est très dommage que nos concitoyens continuent à ne pas vouloir s’intéresser à la « construction européenne », bien aidés, il est vrai, par le silence assourdissant de la gent médiatique.

    Depuis bien longtemps, je n’ai de cesse de dire que Sarko et Hollande ne sont que les mains droite et gauche de l’oligarchie financière mondialiste.

    Depuis la claque monumentale du TCE en 2005, le très libéral PS a trahi les citoyens par son abstention massive lors de la ratification du Traité de Lisbonne en 2008 et en suivant pour celle du Mécanisme Européen de Stabilité en février 2012 (une abstention agressive et dynamique....pour « renégocier » le TSCG dixit JM Ayrault).

    Ils vont faire adopter en urgence ce Pacte Budgétaire, à la rentrée parlementaire, fin août, sans débat public, sans information pour nous soumettre plus tard aux réformes structurelles (austérité) dont on peut constater l’efficacité en Grèce, Portugal, Irlande, Espagne, Italie.... Lisez attentivement cet interview de Draghi annonçant que « le modèle social européen est mort »

    Pour compléter ce très bon article, je vous propose d’ouvrir les liens suivants :
    Analyse de la décision du Conseil Constitutionnel
    Règle d’or : la girouette socialiste
    Silence sur le Pacte Budgétaire

    Mercredi, Angela Merkel est arrivée à Toronto pour finaliser un accord de libre-échange Europe-Canada, lequel est pour certains responsables politiques canadiens « un abandon de souveraineté économique ». A mon avis, cet accord s’inscrit dans le Traité de Grand Marché Transatlantique discrètement voté par le Parlement Européen le 26 mars 2009.

    Des lettres ouvertes, pétitions, contre le Pacte Budgétaire existent :
    ATTAC et la Fondation Copernic
    Le Front de Gauche

    Merci d’ouvrir les liens car ils sont essentiels


  •  C BARRATIER C BARRATIER 16 août 2012 21:48

    SARKO doit bien rire. Il a gaspillé, gaspillé, vidé les caisses de l’état, emprunté comme jamais, et a décrété dès qu’il a compris qu’il y aurait une alternance, la règle d’or des financiers pleins d’or, ses copains...Imposant à son successeur ce qu’il n’a pas fait ! Une belle peau de banane pour que l’actuelle majorité se fasse chasser du pouvoir à coups de balais, j’ai voté pour eux mais je participerai à leur mise dehors s’ils font cette énorme connerie. Ce n’est pas la première fois dans les sphères socialistes qu’on se fait joyeusement avoir.

    J’attendais d’eux une rupture, constater d’abord la réalité de la relance économique européenne promise, puis attendre encore un an ou deux avant de ratifier.

    Car bien sûr, HOLLANDE sera incapable de tenir cette stupide promesse.

    Ne pas ratifier était important pour acculer l’Europe à une autre politique. Jusqu’ici les malins de l’Europe savent ne pas accepter ceci ou cela, et sont quand même là pour profiter de l’Europe. La politique française est stupide.

    Exigeons un référendum...Vive Chirac finalement !


  • zappa zappa 16 août 2012 22:29

    Merci pour l"article,

    L’ état Francçais devient une province gouvernée de l’Union Europeénne, gouverné par les Etas Unis qui sont eux gouverné par Israel qui est gouverné à distance par une poignée de multi millardaires. Notre existance n’a peu de cas à figurer dans leurs agendas. Merci Francois pour le peu de cas que vous accordez à cette situation qui pourtant vous enflammée dans les discours de campagnes. Encore un dopé de promesses qui sort de nos grandes écoles et formations particuliéres et dont la mémoire flanche déjàs.


  • Jean Jolly Jean Jolly 17 août 2012 00:08

    Mais non nous ne sommes pas manipulés, les « veaux » aiment être dirigés à coups de bâtons... sinon ce ne seraient pas des veaux !


  • 59jeannot 17 août 2012 08:13

    le peuple s’en fout ; « aprés moi, le déluge ». tant pis pour lui


  • sandre08 17 août 2012 09:13

    Le PS , ses députés et sénateurs trahissent une partie de leurs électeurs.Ils vont tous perdre leur crédibilité et laisser des plumes.
    Ils nous ont roulés avec leur vote utile mais gare à la prochaine consultation électorale !


  • Yvance77 17 août 2012 12:35

    Pipole 1er a fait monter le peuple sur l’échafaud... Normal ca libérer la guillotine !!!

    Peuple de France (et d’Europe) ... c’est toi qu’on exécute via ces traités scélérats !!!


  • alizé12 17 août 2012 18:19

    C’est trop facile de dire à ceux qui ont voté Hollande que c’est à cause d’eux que tout va mal. Bien entendu qu’on ne s’attendait pas à ce qu’il applique le programme du FDG mais au moins à ce qu’il renégocie sérieusement le TSCG, comme il l’avait promis. 

    Il est tenu aussi bien vis à vis de ses électeurs que des autres citoyens de respecter ses engagements.
    bien sûr je connais la formule attribuée, je crois, à Pasqua:les promesses n’engagent que ceux qui y croient Pasqua .Mais je ne suis pas d’accord avec ceux qui , forts d’avoir voté pour ce qu’ils appellent la « vrai gauche »,voudraient que ceux qui , malgrè des préférences pour les programmes FDG ou EELV, ont fini par voter« utile » par crainte d’un résultat similaire à 2002 doivent la boucler , comme complices des "sociaux -traitres .
    Q’on vote pour un tel ou pas, voter ne consiste pas à donner un chèque en blanc à celui qui est élu et le droit à manifester son désaccord , de la simple indignation à l’insurrection si nécessaire est un droit de l’homme imprescriptible, et cela que celui qui est élu soit celui pour qui on a voté ou non.Les isoloirs ne sont pas faits pour les chiens . Nous ne sommes pas les clients-esclaves des candidats et des élus.

  • alizé12 17 août 2012 18:24

    Par erreur de manip probablement,les corrections n’ont pas été enregistrées : dans la phrase il est tenu:supprimer Pasqua en fin de phrase.Vraie gauche et non vrai. « Sociaux -traîtres ».


  • Jean-Louis CHARPAL 18 août 2012 09:35

    J’espère que les zozos qui ont donné tous les pouvoirs aux sociaux libéraux vont enfin réaliser leur erreur.

    Faire alterner au pouvoir des ultra libéraux de droite et des ultra libéraux de gauche ne sert rigoureusement à rien.

    L’austérité est exactement le contraire de ce qu’il faut faire. Laisser tous les pouvoirs aux spéculateurs et aux banquiers est suicidaire.

    Sans partage équitable des richesses produites, c’est la clochardisation du peuple assurée ! 


  • Blé 19 août 2012 04:45

    Il serait temps de dire, les média dominants se taisent et c’est bien dommage, que le P.S n’est pas un parti de gauche, il ne l’a jamais été et ne le sera jamais. Ce sont les membres de ce parti qui vont enterrer définitivement tous les acquis sociaux des salariés. Comment les militants P.S. de base peuvent-ils se faire avoir à ce point sans rien dire ?


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