jeudi 13 octobre 2005 - par Didier Vincent

La République, l’Etat et le pouvoir

La tenue d’une modeste information d’arrondissement et l’intérêt que nous avons dans la politique nous amènent à partager avec vous quelques constatations sur la réalité du pouvoir en France, c’est-à-dire sur les lieux et sur les conditions de son exercice. Il ne s’agit pas d’une analyse exhaustive, mais de quelques impressions.

Le IXe arrondissement de Paris est de taille modeste et compte aujourd’hui un peu moins de 60 000 habitants. Cela en fait l’équivalent d’une ville moyenne. Les fameuses dispositions PLM (Paris Lyon Marseille) donnent aux habitants de l’arrondissement la possibilité d’élire au suffrage universel leur maire et l’équipe municipale. Quelle est la réalité du pouvoir de ces élus ? Bien sûr, notre arrondissement ne peut, ni ne doit, être déconnecté de Paris, mais dans les affaires purement locales, quelles sont les marges de manœuvre d’un maire d’arrondissement ?

Les questions de sécurité sont hors de son champ de compétence, restant l’exclusivité absolue du préfet de police sous la tutelle du ministère de l’intérieur. Les grands travaux de réaménagement, de modernisation, sont décidés et financés par la Ville de Paris. Idem en ce qui concerne l’attribution de subventions aux associations par exemple. Certes, le maire peut dire son mot, une concertation existe, mais le pouvoir, et surtout les moyens, restent ailleurs.

Prenons deux exemples.

D’abord, sur un sujet emblématique. Au mois de juin dernier, la Ville de Paris, l’Hôtel de Ville, a organisé le Printemps de la démocratie. Il s’agissait, pendant une semaine, de parler de démocratie, de son fonctionnement, avec les acteurs concernés, élus bien sûr, mais aussi avec associations et citoyens. La semaine se terminait par une journée regroupant les acteurs de cette démocratie à Bercy. Il aurait été logique de mettre en place un système décentralisé, demandant à chaque mairie d’arrondissement de mobiliser les acteurs locaux. Eh bien non. D’implication des mairies d’arrondissement, point, ou très peu. Tout a été organisé et géré du centre, par l’Hôtel-de-Ville. Il y a d’ailleurs beaucoup de questions à se poser sur les relations entre les équipes siégeant à l’Hôtel de Ville et celles des mairies d’arrondissement, comme il y en a aussi beaucoup à se poser sur les relations entre les politiques - les élus - et les services techniques de la Ville. Qui a le pouvoir ?

Ensuite, un détail. Lors du dernier conseil d’arrondissement, le maire du IXe a informé les élus de l’arrondissement des prochaines délibérations du Conseil de Paris sur des sujets touchant directement à notre arrondissement. Donc, être conseiller d’arrondissement, élu au suffrage universel, ne signifie pas que l’on soit informé de toutes les décisions concernant l’arrondissement. Le simple citoyen s’interroge. A-t-il mal compris ?

Le député est, lui aussi, élu au suffrage universel. Quelles sont ses marges de manoeuvre en l’état actuel de nos pratiques institutionnelles ? Dire qu’elles sont limitées est un euphémisme. Coincé qu’il est entre le pouvoir exécutif et son parti politique, son champ d’intervention, c’est-à-dire de pouvoir, reste très restreint.

Alors où est le pouvoir ?

A Paris, chez le maire, dont on oublie souvent qu’il n’est pas élu au suffrage universel, mais par ses pairs, les conseillers de Paris. Chez le préfet de police, nommé.

En régions, chez les préfets, nommés. Chez les présidents de conseil régional ou général, un peu, élus eux aussi par leurs pairs, pas au suffrage universel.

En France, confié au premier ministre et aux ministres, qui ne sont pas élus.

Reste le président de la République, qui fait alors exception.

Il n’est bien sûr pas question de contester un instant la légitimité de ceux qui détiennent le pouvoir, nous restons malgré tout une démocratie. Mais il nous faut bien aussi pondérer, hélas à la baisse, le poids du suffrage universel dans notre organisation actuelle.




Réagir