samedi 29 octobre 2022 - par Sylvain Rakotoarison

Brésil 2022 : grande incertitude électorale

« À partir de l'incertitude avancer tout de même. Rien d'acquis, car tout acquis ne serait-il pas paralysie ? L'incertitude est le moteur, l'ombre est la source. » (Philippe Jaccottet).



Le second tour de l'élection présidentielle au Brésil se tient ce dimanche 30 octobre 2022 et le moins qu'on puisse observer, c'est que la plus grande incertitude est au rendez-vous. Initialement, ce scrutin aurait dû être le retour triomphal de l'ancien Président Lula (Luiz Inacio Lula da Silva) dont la popularité n'a jamais cessé d'être élevée depuis la fin de son second mandat il y a douze ans, même lorsqu'il a été incarcéré (de manière injustifiée).

Issu du Parti des travailleurs (à gauche dans l'échiquier politique), il était aussi soutenu par une frange du centre droit et Geraldo Alckmin, le candidat Vice-Président avec lequel Lula s'est associé, fait même partie des milieux d'affaires. Dans les sondages, il bénéficiait avant le premier tour d'entre 10 et 15 points d'avance, et la polarisation du débat électoral autour des deux seuls candidats Lula et Jair Bolsonaro (le Président sortant du "Parti libéral", considéré populiste sinon d'extrême droite) a même laissé probable son élection dès le premier tour.

Mais il en a été tout autrement : Jair Bolsonaro a su se redresser, remonter et profiter de nombreux "votes cachés", notamment auprès de ses réseaux religieux. Au premier tour le 2 octobre 2022, seulement 5 points les séparaient, Lula en tête avec 48,4% et Jair Bolsonaro 43,2%.

La situation a été même très profitable au Président sortant puisque, en même temps que le premier tour de l'élection présidentielle, ont eu lieu aussi les élections parlementaires, le renouvellement des 513 sièges de la Chambre des députés et d'un tiers des 81 sièges du Sénat. Or, ces élections parlementaires ont été une grande victoire du parti de Jair Bolsonaro qui est devenu la première formation du pays avec 99 sièges sur 513, soit 66 sièges de plus qu'aux précédentes élections parlementaires du 7 octobre 2018. Le parti de Lula, le Parti des travailleurs, avec 68 sièges, a gagné aussi en sièges, mais seulement 12, et sa coalition Brésil de l'espoir, formée avec les communistes et le Parti vert n'a obtenu que 80 sièges, deuxième formation du pays, bien loin du PL. La Chambre des députés restera très divisée et obtenir des majorités sera difficile dans ce pays au régime présidentiel. Les performances électorales au Sénat étaient de même proportion qu'à la Chambre des députés, avec le PL en tête avec 8 sièges sur 27 et le PT avec 4 sièges sur 27.

Les quatre semaines de la campagne du second tour de l'élection présidentielle ont renforcé l'âpreté du combat électoral et divisé profondément le Brésil en deux camps très différents, sociologiquement, géographiquement. Sur le papier, Lula restait le favori puisqu'il était en tête du premier tour et que les deux principaux candidats arrivés après les deux premiers l'ont soutenu, Simone Tebet, candidate du Mouvement démocratique brésilien, qui a eu 4,2% des suffrages exprimés, ainsi que Ciro Gomes du Parti démocratique travailliste qui a eu 3,0% des suffrages exprimés, ont tous les deux, bien que du bout des lèvres, apporté leur soutien à Lula pour le second tour.


Mais sur le terrain, cela semble tout autre. Les électeurs de Simone Tebet et de Ciro Gomes auraient, selon des analystes électoraux, déserté leur candidat pour porter leur vote à Jair Bolsonaro dès le premier tour pour faire barrage au Parti des travailleurs. Ce serait le cas aussi des électeurs sociaux-démocrates. La très bonne performance parlementaire du parti de Jair Bolsonaro pourrait être un excellent levier pour le second tour de la présidentielle malgré le bilan désastreux de son mandat, une gestion désastreuse de la crise du covid-19 ayant entraîné près de 700 000 décès, une augmentation des inégalités sociales, une image internationale déplorable avec la remise en cause de tous les engagements écologiques, etc.

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Les sondages l'ont d'ailleurs mesuré et l'écart s'est considérablement resserré entre les deux candidats. La véritable question pourrait être celle-ci : y aura-t-il un vainqueur dès le dimanche soir ? Ou risquerait-il d'y avoir toute une polémique postélectorale pour savoir qui a gagné si l'écart de voix était très faible. Jair Bolsonaro, à l'instar de Donald Trump en 2020, a déjà fait savoir qu'il ne pouvait pas perdre cette élection et reconnaître sa défaite électorale serait donc pour lui très difficile à assumer personnellement.

De son côté, Lula jouit d'une excellente image à l'étranger ; lorsqu'il était Président, il s'est lié d'amitié avec le Président français Jacques Chirac au cours de leur travail sur les questions touchant à la lutte contre les bouleversements climatiques, ce dernier trouvant dans le combat écologique un exutoire personnel tandis que la politique intérieure était préemptée par son héritier et rival Nicolas Sarkozy, ministre incontournable.

L'histoire des peuples du monde a souvent montré qu'une élection n'est jamais acquise avant le vote. Celle du 30 octobre 2022 au Brésil plus que toute autre...


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (28 octobre 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Brésil 2022 : grande incertitude électorale.
Au Brésil, le choc des titans...
Jair Bolsonaro.
Carlos Ghosn.

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2 réactions


  • charlyposte charlyposte 29 octobre 2022 13:15

    Imaginons LULA donnant la main à PAPY BIDEN au milieu d’un champ de ruine !!! smiley


  • sirocco sirocco 29 octobre 2022 14:00

    L’incertitude concerne moins le choix des Brésiliens que l’honnêteté des résultats qui seront annoncés.

    Depuis la fraude ayant abouti à l’investiture du sénile Biden aux USA, on constate que les élections nationales dans les pays occidentaux sont extrêmement suspectes, même si ce n’est pas le même procédé qui est utilisé partout. 

    Pour la réélection de Macron, on a assisté en direct à une manipulation des totaux.

    Dans d’autres pays, on ne sait pas trop comment ça s’est passé. Mais le fait que des va-t-en-guerre fous furieux comme la camée Sanna Marin en Finlande et l’hystérique Liz Truss en GB sont systématiquement déclarés élus alors que tous les peuples aspirent à la paix, laissent à penser que ces élections ont été truquées.

    À l’approche des élections de mi-mandat aux States, RT nous dit que la moitié des Américains n’ont plus confiance dans leur système électoral et craignent une nouvelle manipulation des résultats...


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