vendredi 6 septembre 2013 - par Anémone C. HUBERT

Chili : Diego Vela, leader de cran

Nouveau président des étudiants de l'Université Catholique du Chili (FEUC), Diego Vela suit les pas de Giorgio Jackson. Sa victoire à la tête de la fédération étudiante, a évité le retour du conservatisme de droite. Alors que le pays va commémorer les 40 ans du coup d'Etat, les étudiants de la prestigieuse université ont choisi un leader progressiste et pragmatique.

The Clinic Online.

Il faisait chaud cette nuit de novembre 2012 à Santiago, capitale du Chili. L'ancien leader étudiant Giorgio Jackson, rejoint ses amis sur le campus de "la catolica". Heureux, il laisse échapper un cri de victoire à la vue de son ami, Diego Vela. Les deux hommes partagent un même bonheur. Pour la cinquième année consécutive, leur mouvement étudiant politique, Nouvelle Action Universitaire (NAU) a gagné les élections. Les journalistes sont présents en nombre. Cette élection opposant un candidat progressiste à un candidat néoconservateur, soutenu par l'Opus Dei, est suivie jusque dans les hautes sphères. Les chiffres donnant la victoire à NAU parlent d'eux-mêmes. Le dauphin de Jackson sera le prochain président Feuc. Les étudiants chiliens auront pour leader, un étudiant en Ingénierie Commerciale, et en Master d'Economie. A 25 ans, Vela Grau a déjà connu les blessures de la vie. Son destin rejoint celui d'un pays. Diego perdra dans le tragique accident d'avion de Juan Fernandez, sa soeur ainéee Catalina. Son frère Patricio sera abusé par le prêtre Cristian Precht, ayant déclenché un scandal sexuel dans l' Eglise Catholique Chilienne.

"Ma soeur m'a toujours conseillé de vivre le moment présent, de vivre la vie. Elle m'a toujours soutenu dans ce que je faisais pour NAU ou quand je militais pour les sans-abris." déclare-t-il, ému. Aux cérémonies publiques de la tragédie aérienne, sa famille a choisi de vivre le deuil en privé. "Avec la mort, je me sens très libre. Je sais que la mort fait partie de la vie. Je la vois comme une transformation d'énergie." Avant d'arriver à la présidence de la Feuc, Diego a été à des postes publiques de décisions, en interne à l'université. Face à l'abus sexuel vécu par son frère ainé, Vela assure : "Je pense que ce sont des choses très graves qui arrivent dans la vie humaine et qui dépendent de la structure du pouvoir entre les personnes (...)". Comme il le confiait au journal chilien La Tercera, il aide sa famille dans les investigations : "Je voudrais que le Vatican s'assure que des choses ainsi n'arrivent plus. C'est très important. Plus que des gestes personnels, il faut que l'Eglise prenne des mesures de fonds pour les prévenir." Le jeune explique qu'il a été proche de victimes d'abus sexuels : "Certains se sont confiés à moi. J'ai tenté de les aider. Donc, je suis fort intéressé à cela.

Dans ses premières déclarations publiques, Vela Grau se distingue des autres nouveaux leaders étudiants. Il suit sa vision progressiste de l'Université et de la société chilienne. Il n'hésite pas à questionner le retour de Michelle Bachelet (Parti Socialiste) comme candidate à la présidence du pays pour 2014. Il défend la remobilisation étudiante, malgré une période électorale chargée : "Les mobilisations ont changé de paradigme." assure-t-il. Flinguant la candidate de droite, Evelyn Matthei, il dévoile que cette dernière aurait pu être élue Ministre de l'Education, après les trois précédentes démissions. Se référant à l'ex-bras droit du dictateur Augusto Pinochet, il critique Jaime Guzman devant les autorités de l'Université, pour qui cet homme est un héros. Les médias chiliens lui assurent qu'il peut devenir l'une des figures phares du mouvement étudiant 2013. Reste que Diego Vela assure parfaitement son nouveau rôle. Récemment, son université a reconnu les diplômes posthumes des étudiants assassinés durant le Coup d'Etat de 1973. Un geste symbolique. Mais il ne faut pas s'y tromper. Comme l'assure le nouveau leader Feuc : "Il reste encore certains secteurs de la UC (Universidad Catolica), très conservateurs." Durant le mois de juillet, il a martelé que le Chili est le plus ségrégationniste dans son système éducatif supérieur. Ce 5 septembre 2013, les étudiants chiliens seront de retour dans les rues du pays, avec le même slogan "Pour une éducation gratuite, publique et de qualité." A leur tête, il y aura Diego Vela, le leader étudiant. Et Diego Vela, l'homme.




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