vendredi 6 décembre 2013 - par Laurent Herblay

Coalition Merkel-SPD : l’Allemagne avant tout

Le projet d’accord de coalition entre la CDU d’Angela Merkel et le SPD, suite à la large victoire de cette dernière devra être validé le 14 décembre par les adhérents du parti social-démocrate. En attendant, petit décryptage du sens de l’accord signé le 27 novembre.

Plus de protection sociale
 
Le principal élément est l’accord pour mettre fin à l’absence de salaire minimum. Les deux partenaires se sont entendus pour mettre en place un SMIC à 8,5 euros l’heure en 2015 (contre 9,43 euros en France en 2013), applicable à l’ensemble des salariés en 2017, après deux années où les partenaires sociaux de chaque filière conserveront une certaine liberté. Pas moins de 17% des salariés sont edéloyale allemande. Autre point de l’accord, comme en France, les salariés qui ont cotisé assez longtemps (45 ans outre-Rhin), pourront partir à la retraite dès 63 ans, au lieu de 67 ans aujourd’hui.
 
La réaction de The Economist est plus que révélatrice. L’hebdomadaire des élites néolibérales condamne de manière outrancière l’accord, parlant de « retour en RDA » et annonçant « une grosse stagnation  ». Il trouve le niveau du SMIC « relativement élevé, notamment pour l’Est  » annonçant des conséquences négatives pour l’emploi. Mais son raisonnement est aussi absurde que dogmatique. Avec un budget équlibré, Berlin peut faire un geste pour ses retraités. Et la mise en place du SMIC permettra de baisser le niveau très préoccupant de pauvreté (supérieur à celui de la France), ce qui, bien au contraire de ses prévisions, générera une croissance de la demande interne par les bas salaires.
 
Le refus de toute solidarité européenne

L’autre point important de l’accord, très bien souligné par Romaric Godin dans un papier de la Tribune, c’est la convergence sur la politique européenne de la chancelière avec le refus absolu de contribuer davantage à l’Union Européenne, aux plans de sauvetage, ou même à des euro obligations. Les partenaires disent refuser la restructuration des dettes des pays aidés et ne voient de salut que dans l’austérité, à travers des contrats contraignants. Le SPD a aussi accepté que les plans d’aide à l’avenir imposent une participation des pays aidés, une validation du modèle chypriote de saisie sur l’épargne  ! Enfin, le SPD s’est aligné sur la vision d’une union bancaire a minima d’Angela Merkel.

Romaric Godin signale la réaction d’un journaliste, Martin Heller : « Chers Grecs, Espagnols et Italiens : ainsi nous partirons plus tôt en retraite et noua allons relever les salaires et augmenter la dette  ». Selon que vous serez riche et puissant… Bien sûr, le projet de la coalition peut sembler égoïste pour les autres européens. Mais il faut noter que l’établissement d’un SMIC va limiter la concurrence déloyale venue d’outre-Rhin et que la hausse des salaires devrait augmenter les importations. Ensuite, les euro obligations, c’était une caution solidaire de 4000 milliards d’euros, un an et demi de PIB. Comment croire que les Allemands accepteraient, alors que leur patrimoine est un des plus faibles d’Europe ?
 

Malgré tout, rien n’est joué car les adhérents du SPD pourraient refuser le projet d’accord. Outre l’intérêt qu’il y a à voir le pays le plus souverain de la zone euro mener une politique plus progressiste, la confirmation d’une ligne dure sur l’Europe porte en germe la fin de l’euro et de l’Union Européenne.



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