jeudi 29 septembre 2016 - par Marisa Andreas-Salomé

La Colombie, indécise après la signature de l’accord de paix

Après une minute de silence en mémoire des victimes de la guerre, Juan Manuel Santos, président de la Colombie et Rodrigo Londoño, alias Timochenko, chef des FARC (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie) se sont serrés la main pour finaliser l’accord de paix sous les yeux plein d’espoir d’une population traumatisée par un conflit qui a duré plus de 50 ans*. Réunis à Carthagène ce lundi 26 septembre 2016 *, devant un cortège de 16 Chefs d’Etats et de 2500 invités, les deux intéressés ont prononcé des discours dans lequel Timochenko a demandé pardon au nom des FARC pour toutes les victimes tandis que le Président a assuré que cet accord allait permettre une paix durable, davantage d’équité et de progrès pour le pays.

Initiées en 2012, les négociations semblent enfin être terminées, toutefois, elles n'étaient pas les premières. Avant celle-ci, trois tentatives en 1984, en 1991 et en 2012 avaient échoué mais aujourd’hui, l’entrée en vigueur de l’accord de paix le 29 août dernier et la réduction des hostilités depuis quelques années, permettent à la population d’être plutôt optimiste. Une combattante des FARC a annoncé avec enthousiasme qu’il s’agissait “d’un jour unique dans lequel nous disons au peuple colombien de s’unir à la paix. Nous voulons la paix pour tous”.

Cet accord de paix sera soumis à référendum le 2 octobre, date à laquelle les colombien confirmeront l’accord de paix négocié ou le refuseront. Même si une grande partie de la population est en faveur du “oui”, comme on peut le voir à travers les différents événements qui sont organisés depuis quelques semaines (concerts pour la paix*, conférences..), une autre partie est elle, plutôt hostile. Certains considèrent qu’il est bien trop laxiste envers les bourreaux et que les peines ne sont pas assez fortes pour les crimes qui ont été perpétrés. Selon Álvaro Uribe Vélez, ancien président, et figure actuelle de l’opposition, cet accord n’apportera pas réellement la paix et les FARC n’ont pas démontré suffisamment de regrets. Les personnes qui le soutiennent estiment en effet qu’accepter l’accord serait une façon de “donner” le pays à la guérilla. Ainsi, une “guerre”, cette fois-ci d’images, de chiffres et d’arguments en faveur et en défaveur de l’accord agitent la population ballotée et indécise.

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Photographie prise lors d’un concert pour la paix à Bogota, en septembre 2016 (photographie de Pablo Leonardo Uncos)
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Photographie prise lors d’un concert pour la paix à Bogota, en septembre 2016 (photographie de Pablo Leonardo Uncos)

En réalité, que se passera-t-il en cas de majorité de oui ? L’accord a été négocié, signé et cela signifie que la guérilla acceptera de déposer les armes, sous le contrôle de l’ONU et pourra réintégrer la société, créer un parti et participer librement aux élections. Si l’accord est refusé, les choses semblent se compliquer. Uribe affirme que cela impliquerait une renégociation de l’accord avec les FARC, mais rien n’est garanti. Certains militants ont d’ores et déjà affirmé qu’il n’y aurait pas de renégociation possible et d’autres auraient peur de rendre les armes. Le Gouvernement, quant à lui ; a souligné que cela aurait pour conséquence la continuation de la guerre.

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Photographie prise lors d’un concert pour la paix à Bogota, en septembre 2016 (photographie de Pablo Leonardo Uncos)

Pour conclure, à quelques jours du référendum, le pays vit au rythme des affiches et des publicités en faveur du “si” et du “no” qui jonchent les trottoirs. Malgré une Société Internationale en faveur du oui, ce sera aux colombiens de prendre une décision et de choisir s’ils veulent la réconciliation ou s’embourber dans le conflit en espérant une paix hypothétique. Le pardon n’est pas une chose aisée, mais elle permettrait de mettre fin au cercle mortel et vicieux de la guerre et de pouvoir bâtir de nouvelles fondations plus démocratiques, stables, et pacifiques pour ce pays.

 

Photographies : Pablo Leonardo Uncos



5 réactions


  • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 29 septembre 2016 09:01
    Ne pas oublier Uribe, prédécesseur de Santos à la tête du pays, aujourd’hui sénateur, riche propriétaire et sponsor d’une milice para-militaire. 
    Au cours d’une tentative d’enlèvement ratée en 1983, lesFARCS avaient assassiné son père qui servait de prête-nom pour couvrir certaines activités du Cartel de Medellín . 
    Deux décennies plus tard,il est devenu président de la république de Colombie (2002-2010), et a entraîne le gouvernement dans une guerre civile contre le groupe rebelle qu’il tenait pour responsable de la mort de son père.
    Maintenant, il représente la principale résistance à l’accord.

    • JP94 29 septembre 2016 21:24

      @Jeussey de Sourcesûre
      Tout à fait !


      Ecrire benoîtement « Alvaro Uribe, ancien président de Colombie », c’est ne pas être vraiment au courant du personnage.

      Il y a quelques années, il devait être fait docteur honoris causa d’une école d’ingénieurs française en cheville avec les milieux d’affaires colombiens ... il a dû renoncer devant le tollé provoqué par venue .

      Uribe est considéré comme un néofasciste par beaucoup de Colombiens réfugiés en France ( et aussi en Colombie) . Il est lié aux Para-militaires responsables de nombreux crimes impunis et lorsque la Justice colombienne s’en charge ça finit mal pour le juge !

      Retour à la vie civile de guérilleros FARC ? Très bien, mais ce sera la ... 7ème fois . Bilan des fois précédentes : 3500 assassinats de leader politiques et syndicaux, y compris Jaime Perdo Leal , candidat ( communiste ) de l’Union Patriotique ( gauche colombienne) .
      Il n’est guère de candidats de la Gauche ( aux municipales , aux présidentielles, etc ) qui n’aient été assassinés par le Pouvoir ou son auxiliaire occulte, les Paramilitaires qui, comme Uribe et les criminels de la même eau ( les grands latifundiaires ) ne reconnaissent pas les accords et font tout pour les saboter et ont déjà commis, au moment même de la signature des accords, de nouveaux crimes .
      Une réfugiée politique colombienne, vivant depuis des décennies en Suède, a tenté de revenir : quelques jours après, en pleine réunion, elle est victime d’une tentative d’assassinats.

      La Population veut la Paix. Les FARC aussi.
      Mais la population est victime de la propagande ( quasiment tous les médias sont aux mains de la Droite dure ( journaux et revues ) .
      Il y a donc encore des gens pour voter Uribe qui est mis en cause dans plein d’affaires ... ( mais a des appuis parmi la caste dirigeante) .

      Santos lui-même est l’ancien ministre de l’Intérieur d’Uribe.
      Les précédents accords ont surtout servi à repérer les ex-FARC pour les assassiner.

      D’où vient de conflit armé ? de l’accaparement des terres de petits paysans par le crime. Mais les Multinationales usent des mêmes procédés de terreur ( assassinats de leader syndicaux , etc ) .
      Une situation d’extrême violence dont on ne parle jamais .

      4 600 000 Colombiens déplacés .
      350 000 morts , essentiellement de petits paysans ( toute la famille peut se faire liquider si elle résiste aux gros propriétaires terriens.)
      Les paysans qui résistent incorporent les FARC.

      Ceux qui vont en ville pour échapper au crime sont dans la misère et l’exploitation. 


  • leypanou 29 septembre 2016 09:11

    Un accord avec un laquais de l’empire ? Il faut vraiment être naïf pour y faire confiance.
    En tout cas, ceci m’a fait rire : Rodrigo Londoño, alias Timochenko . On connait la blonde Yulia mais celui-là non.


    • JP94 29 septembre 2016 21:28

      @leypanou
      Rien à voir avec les laquais de l’Empire ... les laquais de l’Empire sont la Bourgeoisie compradore colombienne : Uribe et même Santos sont à leur tête ...


      Ne pas oublier aussi que le Panama est un morceau de Colombie piqué par les Etats-unis suite à un refus des députés colombiens de ... valider un accord de Libre-échange avec les USA .
      ( la Bourgeoisie à la tête de l’Etat se vendait aux USA ) .

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