jeudi 26 octobre 2017 - par
Le cauchemar étasunien, partie 4 : une société violente
Est-il vraiment étonnant qu’un pays où le port des armes est un droit constitutionnel soit si violent ? Mais ce qui est peut-être le plus terrifiant avec ce pays, c’est la relative absence de débat sur le niveau de violence et les moyens d’y mettre fin. Les faits s’accumulent dans tous les sens, mais personne ne semble vouloir proposer un autre modèle à ce pays qui semble se complaire dans la loi de la jungle.
La violence, à tous les étages
Pour qui prend un peu de recul sur les dix dernières années, il est difficile de ne pas avoir le vertige. Entre les 10% de la population sans couverture de santé, ces retraités qui avaient perdu la moitié de leur retraite en 2008-2009 du fait du krach financier, et contraints à retravailler, ces propriétaires victimes des pratiques folles du monde de la finance, qui perdent leur maison, quand les financiers fous sont sauvés par l’Etat, alors que des « prix Nobel d’économie » proposent plutôt de sauver les hommes plutôt que les banques, ou tous ceux que le système économique appauvrit, au point de les désespérer et les pousser vers la mort, par les drogues, l’alcoolisme, le suicide ou l’homicide…
Quelle drôle de société également qu’un pays où 100 personnes meurent par arme à feu tous les jours. Quelle drôle de société que ce pays qui compte 35 000 victimes d’accident de la route, malgré des limites de vitesse plus basses que chez nous, l’équivalent du double de victimes qu’en France ! Toutes les données dressent un portrait horrifiant des Etats-Unis. La violence de cette société se retrouve évidemment dans le nombre considérable d’homicides, digne d’un pays en voie de développement violent, avec 3,7 homicides par balle pour 100 000 habitants, quatre fois plus qu’en Europe, et plus de 10 dans les grandes villes. Et pour couronner le tout, le nombre d’homicides repart à la hausse.
Cette violence est d’autant plus extravagante que près de 0,7% de la population est en prison, contre 0,2% en moyenne en Europe et même 0,045% au Japon, 15 fois moins ! A quoi bon mettre autant de personnes en prison si c’est pour avoir un tel niveau d’homicides ? Dans un papier vantant l’exemple de la Norvège, The Economist pointaint que le niveau d’incarcération y était presque dix fois plus faible (74 pour 100 000), et que pourtant, leur taux de récidive sous deux ans, à 20%, y est deux fois inférieur à celui des Etats-Unis, qui cumulent décidément le pire de chaque monde, et où, « la prison devient un moyen très cher pour rendre de mauvaises personnes encore plus mauvaises ».
Sans pour autant tomber dans l’angélisme relativiste et libertaire, il est tout de même frappant de constater l’impasse dans laquelle les Etats-Unis sont aujourd’hui, une forme de cercle vicieux de la violence, même en étant le pays qui met le plus grand nombre de ses concitoyens en prison, plus de 2 millions, un chiffre plus élevé que la Chine, qui compte pourtant plus de 4 fois plus d’habitants ! 3% des enfants y ont un parent en prison ! Il est tout de même effarant que la forte propension à emprisonner les individus ne garantisse pas au pays un fort niveau de sécurité, la violence exercée par les individus au sein de la société semblant être la copie de la violence exercée par l’Etat sur ses citoyens.
Naturellement, la question des armes à feu devrait se poser, avec les 100 morts par jour qu’elles permettent, mais là encore, la société étasunienne semble incapable de se remettre en question et d’affronter les questions que toutes ces statistiques devraient lui imposer. La violence est endémique, mais trop de sujets restent tabou dans une société peut-être trop individualiste.