vendredi 8 juillet 2011 - par Le Bulletin d’Amérique

Présidentielle américaine : Ron Paul est-il crédible ?

Alors que la lutte politique s’intensifie pour conquérir la Maison Blanche, le Représentant du Texas Ron Paul jouit toujours d’un certain succès. Connu pour incarner le courant libertarien du parti républicain, le tranchant de ses positions le rend populaire auprès du mouvement Tea Party.

Le Bulletin d'Amérique —

Alors que la lutte politique s’intensifie pour conquérir la Maison Blanche, le Représentant du Texas Ron Paul jouit toujours d’un certain succès. Connu pour incarner le courant libertarien du parti républicain, le tranchant de ses positions le rend populaire auprès du mouvement Tea Party.

Ron Paul, c’est d’abord la réputation de ‘‘Docteur No’’ du Congrès. Ce sobriquet fait référence à sa formation de médecin – ayant pratiqué en tant qu’obstétricien et gynécologue – ainsi qu’à sa propension à ne pas voter comme tout le monde. Il apparaît comme un franc-tireur, déterminé à promouvoir vigoureusement la liberté individuelle et à recentrer l’État sur l’essentiel. Un tireur de sonnettes d’alarme, mais aussi une figure marginale de la scène politique. En 2008, il prônait une « révolution » politique et libérale lors des primaires. Il n’a obtenu qu’environ 10% des voix – ce qui reste un score honorable, – d’autant qu’il a su créer tout un phénomène autour de lui, abondamment relayé dans les réseaux sociaux et sur Internet. Aujourd’hui, il atteint 6,5% des intentions de vote.

Le Représentant du Texas situe son choix d’entrer en politique après la décision prise le 15 août 1971 par l’administration Nixon de faire sortir les États-Unis de l’étalon-or. Ron Paul a perçu cet événement comme la reprise en main politique d’une monnaie, le dollar, qui aurait dû rester indexée sur un élément neutre – reflétant une juste appréciation de sa valeur. Ce positionnement reflète une sensibilité marquée sur les questions économiques, dont il fait parfois son fer de lance. Il a pu revenir régulièrement sur le cas de l’étalon-or, notamment dans un livre, The Case for Gold, en 1982.

« End the Fed » !

Ron Paul prône aussi la fin de l’impôt sur le revenu, au profit d’autres formes de taxation et d’un allégement conséquent de la pression fiscale. Il n’a, au reste, aucune sympathie pour la Réserve Fédérale. En septembre 2009, il a publié End the Fed. Sous ce titre provoquant, on retrouve la critique d’une institution jugée corrompue et inefficace. Par ses actions, elle augmenterait artificiellement le prix du dollar – la monnaie risquant, à force, de ne plus rien valoir. Ron Paul craint ainsi l’hyperinflation, qui a fait des ravages au Zimbabwe ou dans la République de Weimar.

Par ailleurs, l’élu du Texas reste un féru de discipline budgétaire. À tel point qu’il n’a, par exemple, pas voté pour la proposition de budget élaborée par les Républicains pour 2012, et promue par Paul Ryan. Ce choix montre une nature de cavalier solitaire – ils n’étaient que quatre à ne pas adopter le Path to Prosperity ! Dans tous les cas, il s’est engagé auprès de ses électeurs à ne pas soutenir d’augmentation d’impôts ni des budgets non-équilibrés.

Ron Paul adopte de surcroît une lecture stricte de la Constitution — ou constitutionnalisme, — orientée aussi vers la défense des droits des états fédérés. En cela, il épouse certains traits du Texas dont il est élu, l’état étant connu pour son esprit d’indépendance farouche, de liberté, et sa méfiance envers Washington.

Un candidat isolé

De cet État du sud, et à la tête d’une circonscription plus grande que le Massachusetts, il est élu depuis la fin des années 70 – après avoir remporté, après quelques premières déboires, des campagnes en 1976 puis en 1978. Ses affiliations partisanes ont néanmoins connu quelques secousses. En 1988, il pense que la Présidence Reagan est un échec, notamment sur le front des déficits qu’il juge trop élevés. Ron Paul devient ainsi le candidat du petit Parti Libertarien à la présidentielle, et effectue une performance marginale – environ 0,5% des voix. En 1992, il conseille Pat Buchanan lors de la primaire Républicaine et contre le Président sortant, George Bush père.

Pour lui, être candidat à la présidentielle, de la même manière qu’aux primaires, reste avant tout une occasion d’éclairer l’opinion. Ses positions fortes en faveur de la liberté économique l’isolent des compromis politiques traditionnels. Elles donnent aussi à son message une force inédite. En témoigne la foi de ses partisans. Le financement des campagnes de Ron Paul se fait ainsi en grande majorité à partir de dons individuels. Par exemple, 700 000 dollars ont été levés en une journée, le 21 février 2011, à l’initiative de supporters « grassroots » qui ont relayé le message autour d’eux. Cette popularité se diffuse par ondes de chocs au sein de nombreux cercles. Elle explique qu’en mars 2011, au sommet des Tea Parties organisé à Pheonix, dans l’Arizona, il ait remporté le sondage de popularité. Ce fut le cas dans de nombreux rassemblements comparables – où la pureté de ses positions séduit les militants de terrain.

Mais ses positions bien moins conservatrices sur les questions sociales ne devraient pas lui permettre de concurrencer efficacement l’égérie du mouvement Tea Party, Michelle Bachmann. Par exemple, sa conception de la non-ingérence de l’Etat fédéral dans la vie privée des individus se reflète dans sa position face au mariage homosexuel : « Je suis favorable à toutes les associations volontaires, et les gens peuvent les appeler comme ils le veulent ».

Un héritier de Robert Taft & de Friedrich Hayek

Sur un autre plan, le courant libertarien promeut néanmoins une vision bien spécifique des relations internationales, qui reste peu embrassée dans le monde politique. Ron Paul dit s’inspirer de Robert Taft, figure du parti républicain des années trente et quarante, opposant notoire au New Deal et à tout interventionnisme à l’étranger – les relations commerciales avant tout. Ron Paul reprend cette ligne et la considère comme le seul moyen d’atteindre la paix et la prospérité. Il s’est en cela opposé frontalement au courant néo-conservateur [à lire, "les Néoconservateurs demeurent une des principales écoles de pensée"] et aux actions entreprises par les États-Unis au Moyen-Orient. Le « docteur » Ron Paul préconise au même moment de sortir de l’ONU, de l’OTAN, de l’OMC, de l’ALENA : ces institutions, supranationales, nuisent selon lui à l’indépendance des États.

En termes de références personnelles, Ron Paul cite volontiers Hayek, Ayn Rand, ou Mises. Son intérêt pour l’École autrichienne est ancien, et fondateur quant à son engagement en politique. Il exhibe fièrement les portraits de ces figures emblématiques dans son bureau, ainsi que celle de Murray Rothbard qu’il a côtoyé. En plus de publier régulièrement des livres sur les sujets qui lui portent à coeur, Ron Paul est le fondateur d’un think-tank, la Foundation for Rational Economics and Education (FREE). Tout bien considéré, l’élu du Texas reste une figure marquante, un législateur prolixe quoique peu suivi, ainsi qu’un défenseur infatigable de la liberté individuelle la plus absolue. Il reste néanmoins à savoir si sa capacité à mobiliser ses partisans lui permettra, cette fois-ci, d’élargir son audience et de présenter la cause qu’il défend d’une manière plus fédératrice que par le passé.

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A lire, sur les primaires républicaines :

Quel Républicain face à Obama ? Les chances de Pawlenty, par Kenneth R. Weinstein ;

Quels atouts pour Mitt Romney ? par Philippe Deswel



7 réactions


  • Kalki Kalki 8 juillet 2011 10:50

    Un suceur d’oligarque , une marionnette du spectacle

    qui fera la meme politique que BUSH junior, des conceptions politiques , débiles et SURTOUTa coté de la plaque ,avec les risques que cela inclut

    on casse l’état on casse l’économie, oh il y a plus de travail  : oh tant pis, crevez TOUS

    allez tuons tout le monde, finissons dans l’absurdité et la folie qui vous habite dans la nef des fous

    « devenir des dieux immortel » tout ça , tout ça et bien vous allez avoir une surprise

    ( oui monsieur trouvez moi une personne qui travaille , j’attend toujours )

    Ploutocracie : La plus grande disparité économique aux U.S.A depuis 1928
    LES GENS CREVENT DE FAIM, DE VIOLENCE, DE STRESS, DE MEURTRISSURE, DANS LES PAYS RICHES : C’EST UN GENOCIDE et C’est Votre REALITE : C’est un problème de partage, la production est là
    On tue tout le monde : oh pas de problème pense le fou, la folie va stopper là en bas de chez vous

    en fait non


    • Piotrek Piotrek 8 juillet 2011 22:54

      Non c’est justement, dans son programme, tout l’inverse d’un suceur d’oligarques.

      Ensuite quant a la singularité, a mon humble avis, elle se sera pas determinée par la politique (ou autre chose) mais elle redistribura les cartes et redeterminera la politique (et tout le reste).
      Et elle est prevue pour 2029, cad apres la fin du monde en 2012...


  • Mmarvinbear Mmarvinbear 8 juillet 2011 15:01

    La réponse est « non ».


    40 ans de politique et il reste un politicien marginal, avec des scores même pas dignes de ceux de Besancenot ici, c’est dire.

    Quand à ses convictions... il est amusant de voir qu’il combat ce que son mentor politique a institué, l’ impot sur le revenu...

  • Piotrek Piotrek 8 juillet 2011 22:46

    On cherche souvent les raisons de l’échec de la mise en pratique de certaines idéologies dans l’histoire (communisme, capitalisme...)

    Ce type est un pur et dur du capitalisme. D’un cote, son absolue conviction dans le « laisser-faire » peut faire peur, d’un autre cote il explique comment sa vision des choses pourrait supprimer les effets pervers du système capitaliste américain actuel (les couts exorbitants et abus du secteur de la sante, la mauvaise alimentation, la connivence des banques avec le pouvoir) car il reconnait que le problème est que le jeu est faussé

    Il est anti-expansionniste et a la précédente élection il avait fait de son cheval de bataille le retrait de toutes les troupes américaines a l’étranger (1200 bases)
    Il a refusé la médaille du congres avec comme prétexte qu’il était injuste que les contribuables paient pour une médaille en or.

    On peut ne pas être d’accord sur ses idées, mais il faut reconnaitre que le bonhomme a des principes en béton (Chose bien rare de nos jours)

    Si il avait été élu, sa réussite ou son échec nous en aurait apprit beaucoup sur la valeur du système capitaliste, dont nous avons eu, comme pour le communisme, essentiellement des effets pervers.

    Je ne pense pas qu’il ait la moindre chance pour la prochaine élection : son mouvement s’est deja fait pirater par des fachos de tous bords il y a bien longtemps (Fox News, Bachman, Palin)


  • Brath-z Brath-z 9 juillet 2011 02:03

    Ron Paul est un personnage assez sympathique qui est surtout le porteur d’une image : celle de la pureté idéologique. Il agglomère autour de lui des individualités disparates (libertariens, conservateurs, anarchistes, socialistes, etc.) séduites par son indéniable charisme (fait de foucade et d’un culot à tout épreuve) mais qui ne forment pas un fond idéologique cohérent.
    De plus, son langage et ses références sont celles de la fin du XVIIIème siècle et du début du XIXème siècle. Il s’inscrit dans la droite ligne théorique d’un Jefferson ou d’un Madison, c’est-à-dire qu’il place le statut fédéral des États Unis d’Amérique au-dessus de toute autre considération politique. Cela le pousse à des maladresses, par exemple lorsqu’il a répondu « je ne pense pas que ça soit à l’état fédéral de décider si on doit ou non le faire » lorsqu’un journaliste lui avait demandé s’il pensait que le système de santé devait permettre à un enfant leucémique (oui, je sais, l’exemple utilisé était volontairement propre à faire pleurer dans les chaumières... USA is USA, hein) de se soigner.

    D’un point de vue français, ça serait plutôt une bonne nouvelle que ses idées soient mises en application, étant donné que c’est un anti-impérialiste patenté et qu’il veut la mort du turbo-capitalisme. Mais ça n’a aucune chance d’arriver.


  • Le péripate Le péripate 9 juillet 2011 07:36

    Ron Paul est simplement cohérent.


  • Mor Aucon Mor Aucon 21 juillet 2011 22:17

    Cohérent ? Oui, dans sa nullité dans l’analyse économique et son manque criminel d’humanité et de solidarité en proposant de réduire les taxes sur les fortunes dans un pays où la couverture sociale est déjà plus que précaire.
    On ressort l’école autrichienne à chaque fois que l’on veut libérer le capital de l’intervention de l’êtat. Dites aussi, école intuitive ou psychologique, cette école est née au sein d’une société viennoise ( comme par hasard en même temps que la psychanalyse ) avide de redorer le blason autrichien en pleine décadence et de revanche sur la florissante science prussienne. Ce fut le bastion européen des théories pseudoscientifiques et on voudrait la remettre à la mode aujourd’hui. N’importe quoi, vraiment.


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