mercredi 28 août 2013 - par D.BENCHENOUF

Sait-on pourquoi les occidentaux menacent d’intervenir en Syrie ?

En Syrie, contrairement à ce que prétendent d'aucuns, ce n'est pas une guerre civile, mais une guerre contre les civils, menée dans l'impunité la plus totale par le régime des Assad, qu'il n'est même pas utile de présenter. Ses crimes innombrables parlent pour lui. Depuis les décennies que ça dure. 

Encouragé par les autres révolutions arabes, émerveillé par cette formidable lame de fond qui avait emporté des despotes parmi les plus sanguinaires de l'histoire de l'humanité, le peuple syrien était descendu dans la rue, pacifiquement, aux cris de "salmiya, salmiya !"

Il ne voulait que la liberté, la démocratie, la justice, plus de droit, moins de répression. Il voulait juste le bonheur, la dignité.

Le régime a répondu de façon atroce, par le feu par le sang, par la manipulation de l'information, dès le premier jour de l'insurrection pacifique.

Huit mois durant, le peuple syrien continua de protester, de façon pacifique, les mains au ciel, malgré une épouvantable répression, qui fit des milliers de morts, des dizaines de milliers d'arrestations, en plus de la torture, des viols, et de toutes les exactions possibles, imaginables, et inimaginables, menées par le régime et ses affidés contre la résistance du peuple syrien. Jusqu'au moment où il devint absolument nécessaire pour les manifestants de se défendre et de défendre leurs familles. Ils s'armèrent comme ils purent, et s'engagèrent dans une lutte très inégale, mais ô combien admirable. Une résistance qui marquera l'histoire de l'humanité. Parce qu'elle est immense d'abnégation, de sacrifice et de courage. 

Le régime criminel déclencha alors contre toute la population, sans aucun discernement si ce n'est celui clanique et religieux, une véritable guerre. Bombardements par l'aviation, pilonnage des quartiers par l'artillerie lourde, et par les chars, carnages contre des familles entières, et autres exactions massives confiées à des sadiques recrutés parmi la jeunesse alaouite, que les syriens surnomment les "chabbiha".

Ce fut indescriptible d'horreur. La Syrie fut ravagée, de fond en comble, sauf les quartiers de la minorité alaouite, et certains quartiers huppés damascènes. Plus de 100 000 morts, des centaines de milliers de blessés, d'estropiés de torturés, de viols. Des millions de civils ont fui leur pays, pour se réfugier dans des camps improvisés à la hâte, dans tous les pays limitrophes, dans des conditions infrahumaines. 

Pourtant, malgré ces carnages et cette immense dévastation, dont le régime criminel ne se cache même pas, les sempiternelles démocraties occidentales, si promptes à dégainer quand il est question de leurs propres interets, se sont contentées de brasser de l'air, et de noyer le poisson dans la salive de leurs ministres des affaires étrangères, et autres porte-jactance.

Ils ont même poussé le bouchon jusqu'à envoyer un message non codé aux Assad. Un message on ne peut plus clair. Sans aucune ambigüité, si ce n'est pour les habituels gogos.

Il a donc été signifié au régime syrien que la seule ligne rouge qu'il ne devait pas dépasser était l'usage des armes chimiques. Sinon, il avait toute latitude pour continuer de massacrer ses populations. Toute latitude... Parce qu'il n'était plus question de permettre à d'éventuels islamistes de prendre le pouvoir en Syrie. Les expériences précédentes dans les autres pays s'étaient révélées contreproductives, et il avait été décidé de ne plus laisser passer les islamistes, voire même de débarquer ceux qui avaient été élus, comme en Egypte et en Tunisie. On efface tout et on recommence. H'mida doit redonner les dominos. Surtout en Egypte où les enjeux étaient trop importants, puisque ce pays est un partenaire top stratégique pour Israël. Les maîtres du jeu voulaient essayer la formule islamiste, pour voir si elle était capable de renouveler la servilité, sous une autre forme. Un peu comme lorsqu'il a été question de laisser passer un Obama, pour faire croire à un changement de fond. Mais les islamistes se sont révélés tout à fait incontrôlables. Contrairement à Obama. Alors, les patrons ont sifflé la fin de la partie, et annulé l'expérience. 

Et donc, la bride avait été laissée sur le cou de Assad, pour qu'il éradique les islamistes qui le combattaient, quitte à exterminer des centaines de milliers de civils par la même occasion. Des effets collatéraux sans grande importance pour tout ce beau monde. La seule ligne rouge étant donc l'usage des armes chimiques.

Mais pourquoi diable cette curieuse disposition, cette étrange exception ? Quelle est donc la différence pour les masses de quidams qui sont tués en gros et en détail, entre une bombe qui réduit les gens et leur habitat en poussière, et des gaz chimiques ? Est-ce que mourir sous des bombardements est différent de mourir asphyxié ? Le feu et le fer sont-ils plus doux, plus souhaitables que le gaz Sarin ? Pourquoi laisser le boucher tuer les gens par tas entiers sous les bombes, et monter sur ses grands chevaux pour quelques dizaines tués au gaz ? 

La réponse est pourtant toute simple. Pour les centaines de millions de pauvres naïfs qui ne s'en sont même pas doutés, parce que leurs médias ne leur diront jamais, cette ligne rouge des armes chimiques, qui a été fixée à Assad n'est motivée que pour la simple raison que c'est Israël qu'il faut protéger. Voici où se joue l'essentiel de la partie.

C'est parce que ces armes peuvent atteindre les populations israéliennes qu'elles ont été interdites à l'égorgeur de masse. Cette ligne rouge ne procède pas d'autres craintes. Les occidentaux ont fixé un curseur de sécurité juste pour préserver leurs amis dont la vie a de l'importance, du moindre courant d'air qui pourrait les importunuer. .

Ils ont voulu s'assurer qu'en cas de défaite face aux révolutionnaires syriens, le régime des Assad ne doit pas s'imaginer qu'il pourrait utiliser les armes chimiques pour rétablir la situation à son avantage, ou du moins faire craindre qu'il pourrait se retourner contre Israël, pour brouiller les cartes.

Ces curieuses démocraties, qui nous pompent l'air avec leurs professions de foi ripipi-blicaines, et leurs droits de l'omelette à deux balles sont en train de dire à Bachar el Assad qu'il est nul de chez nul. Ils lui ont laissé tout le temps, et l'ont laissé hacher menu le malheureux peuple syrien, jusqu'à plus soif. Ils se sont même arrangé pour qu'il soit massivement aidé par la Chine, la Russie, l'Iran et le Hezbollah, face à un peuple qui n'a que de faux amis, pour le compromettre encore plus qu'il ne l'est, aux yeux d'une pseudo élite arabe progressiste. Mais malgré tous ces moyens, ce minable de Assad n'a pas réussi à mâter la résistance d'un peuple lâché par tous, y compris par lcette soi-disant gauche arabe, qui a rallié massivement le boucher. 

C'est ça le vrai topo ! Ces bruits de bottes, et ces chuintement de babouches qu'on entend, et qui pourraient annoncer une intervention contre le boucher de Damas, ne sont qu'un signe d'agacement de quelqu'un à qui les maitres du jeu ont offert toute la latitude pour exterminer son peuple, et qui n'a pas été capable de briser la résistance d'un peuple seul, d'un peuple désarmé, d'un peuple abandonné par tous, jusque par ses propres frères. Et en plus d'être très compromettant, pour ceux qui l'ont laissé assassiner tout un peuple, presque méthodiquement, le criminel par procuration ose violer le seul interdit qui lui a été fixé. Troubler la sieste du grand allié sioniste. Alors là non ! Pas question ! Il faut le moucher le boucher ! Mais pas trop cependant. Il ne doit pas être question de trop l'affaiblir, parce qu'il doit rester suffisamment fort pour continuer à tuer les bicots, les bougnoules et les muzz ! Rien de mieux qu'une racaille méchante pour éliminer la menace racaille. Il faut les laisser se bouffer entre-eux, et faire en sorte que le plus salaud, donc l'allié objectif, puisse rester le plus fort. CQFD !

Voilà donc pourquoi les démokhrassis occidentales menacent de donner une raclée à leur boucher consulaire. Mais l'intervention sera pesée au trébuchet de l'ignominie internationale. Le régime syrien ne sera pas affaibli plus que de raison. Juste du baroud de fantasia, et quelques grappes de quidams sans importance qui seront envoyés ad patres. Des gens qui ne comptent pas, de toute façon, dans ce pays où la mort se conjugue en milliers. Après le feu d'artifice, ce sera même l'occasion de permettre aux potes chinois, russes, iraniens et hezbollahis d'aller consoler leur protégé, et de lui perfuser d'autres moyens, pour finir le boulot. Et ça, Assad le sait. C'est pour ça que ses nuits sont paisibles, et que ses mioches continuent de faire des rêves sympas. Leur papa est un double-six, dans une partie sans importance pour ses joueurs. Parce qu'ils savent que les crépuscules des peuples allongent l'ombre des nains.

DB



13 réactions


  • jaja jaja 28 août 2013 16:46

    "Zéro soutien pour Bachar et zéro soutien à l’impérialisme ! Non aux interventions occidentales en Syrie, stop aux crimes de guerre d’Al Assad, oui à la révolution sociale et populaire !"

    Quand à l’utilisation des gaz chimiques qui se souvient des USA inondant le Vietnam d’agent orange ou Israël usant de phosphore blanc à Gaza ? Quelles représailles ?


    • Pingouin094 Pingouin094 28 août 2013 17:03

      Dans l’absolu, je suis tout à fait d’accord.

      Maintenant, dans la pratique, on fait comment pour stopper les crimes de guerre d’Al Assad et favoriser une révolution sociale et populaire ?

      Parceque pour le moment, reformer les brigades internationales pour sauver la révolution syrienne, je le sent moyen, moyen...

      Donc, une intervention armée, sous mandat de l’ONU (et non pas unilatéralement par l’OTAN) me paraît la meilleure des solutions.
      Mandat possible si le secrétaire général de l’ONU convoquait une assemblée générale extraordinaire, au vu de l’incapacité du conseil de sécurité à résoudre le conflit. (Cf ; mon article, qui date mais reste valable d’un point de vu juridique) :
      http://pensees-politiques.over-blog.net/article-crise-syrienne-l-indispensable-reforme-de-l-onu-110511373.html


  • Pingouin094 Pingouin094 28 août 2013 17:00

    Un article très intéressant et qui change du ton habituel de défense du pauvre Bachar Al Assad victime d’un complot international, alors qu’effectivement, il est surtout le grand bénéficiaire de la très grande passivité de la communauté internationale.

    Un tout peu de ré-équilibrage me paraît néanmoins nécessaire.

    La rebellion syrienne était peut être au début aussi admirable que le prétend l’auteur. Malheureusement, les choses se sont compliqués depuis.

    Les syriens ont été laché par tous. Par tous sauf ... par Dieu. Ou du moins par Allah sous la forme de jihadistes étrangers, bien entraînés, bien armés, bien discipliné. Beaucoup plus en tout cas que les civils en armes et les déserteurs de l’ASL.
    Résultat, un partie non négligeable du peuple syrien s’est tourné - malheureusement - vers l’intégrisme musulman. Quant on n’a plus que la prière comme espoir, il ne faut pas s’etonner que ça donne des jihadistes.

    Résultat la rebellion d’aujourd’hui a une très forte composante de jihadistes, pour partie étrangers et pour partis de Syriens ralliés à eux et qui n’ont rien de très enviable ni de très sympahtique.

    Et ça contribue effectivement à freiner les ardeurs pour voler au secours du peuple syrien. Les bonnes âmes voudraient le faire, mais si c’est pour installer un pouvoir clamant ouvertement ses liens avec le terrorisme international, il vaut effectivement mieux y réfléchir à deux fois.

    Bref oui, pour la condamnation du régime de Bachar, et de la passivité de la communauté internationale. Mais un peu de mesure dans la glorification de la résistance syrienne, qui en était sans doute digne au début, beaucoup moins depuis que les islamistes y sont devenus prépondérants.


  • D.BENCHENOUF D.BENCHENOUF 28 août 2013 17:13

    1/ Les Syriens qui résistaient pouvaient-ils se permettre de faire la fine bouche, et de dire « non, on ne veut pas être aidé par les islamistes. » ? « Non, on ne veut pas être aidés par les très réactionnaires quataris » « Non, on préfère crever tous seuls, face aux chars des Assad », qui lui est massivement aidé par l’Iran, la Chine, la Russie, le Hezbollah, les Chiites irakiens, et d’une manière générale par la passivité du monde entier, qui regarde le carnage se perpétrer, sans bouger le petit doigt. 


    2/ Presque personne ne trouve à redire que des combattants du Hezbollah, des volontaires d’Iran, et des volontaires chiites irakiens viennent prêter main-forte au régime syrien, et en profitent pour commettre des carnages en veux-tu, en voilà. Mais tout le monde semble s’offusquer que des djihadistes non syriens viennent aider les résistants syriens à lutter contre leurs oppresseurs. On peut être contre ces gens, et contre leur projet de société, mais on ne peut pas leur dénier le droit de combattre pour leurs idées, aux côtés de l’opprimé, contre l’oppresseur. 

    Il faut donc remettre les choses dans leur contexte. 

  • Dr Rached Trimèche Dr Rached Trimèche 28 août 2013 17:43

    il ne fallait tout simplement, depuis deux ans déjà, armer les Salofistes, les bandits, les insurgés !

    Aujourd’hui Al Quaida sera encore plus forte !!


  • Fahim Issad 28 août 2013 18:59

    Les armes chimiques n’en sont qu’alibi. Tout le monde connait les intentions des états unis dans cette région ! Quand au frappes chimiques, personne n’est sûr du commanditaire ou de celui qui a osé gazer ces innocents ! Le camps de rébellion n’est pas un ange non plus. Le Qatar et l’Arabie Saoudite, pour ne citer que ces deux monarchies satanique, sont capables de vendre tous les arabes pour satisfaire leur maitre. Tout est bon pour démembrer la Syrie !! Bachar est un criminel, l’opposition armé ( en particulier les djihadistes ) est complice de ce stratagème Israélo Americain...
    Ben Gourian n’avait il pas dit, quand la Grande Bretagne lui avait proposé d’accueillir les enfants juifs allemands :
    « Si je savais qu’il était possible de sauver tous les enfants de juifs d’Allemagne en les amenant en Angleterre, et seulement la moitié d’entre eux en les transportant en Israël, je choisirais la deuxième solution » !


  • smilodon smilodon 28 août 2013 21:20

    @ l’auteur : Bel article !... Mais je demande si ce n’est pas un peu plus compliqué que çela !..... Je me demande !..... Adishatz .


  • willy 29 août 2013 11:39

    je comprends que tout le monde roule pour Israel ????? l’auteur de l’article aussi ??? encore un obsede par les sages de Sion ? les arabes sont dans la merde a cause d’Israel ? la tunisie, l’algerie , la lybie, ......vraiment les arabes sont des malheureux bloques par Israel.....


  • berry 29 août 2013 12:58
    Sait-on pourquoi les occidentaux menacent d’intervenir en Syrie ?

    Pour servir les intérêts d’Israël d’après l’écrivain Hervé Ryssen

    http://www.youtube.com/watch?v=PZX6xjaIQlU&nbsp ;

    Sinon comment expliquer qu’on aille faire la guerre à un pays situé à des milliers de kms de nos frontières, avec lequel nous n’avons aucun contentieux ?


  • travelworld travelworld 29 août 2013 14:18

    Votre titre est faux, il n’y a pas que le les occidentaux qui veulent intervenir !


  • travelworld travelworld 29 août 2013 14:24

    Si la France était intervenue en Espagne en 1935, il n’y aurais peut être pas eu de 2 ème guerre mondiale, réoccupation de la Ruhr pas de réaction (par peur des perdre des élections cause mobilisation générale impopulaire). Résultat Hitler fonce et nous défonce quelques années après !!!


  • agent orange agent orange 29 août 2013 14:29

    Sait-on pourquoi les occidentaux menacent d’intervenir en Syrie ?

    Manifestement pour une histoire de gaz...

    Israel Grants Oil Rights in Syria to Murdoch and Rothschild

  • Komastes 9 septembre 2013 16:39

    http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/intervention-francaise-en-syrie-140707

     

    De la capacité à dépenser l’argent que l’on a pas !

     

    La volonté du Président Hollande d’intervenir en Syrie soulève de nombreuses questions et mérite quelques éclaircissements :

    - au moment où le gouvernement demande aux français de faire des efforts

    - au moment où l’insécurité explose partout en France

    - au moment où les responsables politiques n’arrivent pas à venir à bout d’une augmentation de la pauvreté parmi les français

     

    A ce même moment, le Président Hollande explique qu’il y a suffisamment d’argent dans les caisses pour financer une intervention qui coûtera des centaines de millions d’euros (à court terme) et probablement des milliards à moyen terme en tenant compte des effets collatéraux… et sans compter le coût d’un enlisement d’un conflit et des multiples répercussions qu’il aura au Moyen Orient…

     

    Tout cela est-il bien raisonnable ?

     

    http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/intervention-francaise-en-syrie-140707


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