jeudi 22 novembre 2018 - par Clark Kent

« Si nous annulons ces contrats de façon stupide, la Russie et la Chine en seront les principales bénéficiaires »

Trump ne fait pas de politique : il fait des affaires. Les relations internationales sont des rapports client/fournisseur. Et il préfère jouer le rôle de fournisseur.

Le président américain vient de déclarer que les Etats-Unis avaient l’intention de rester un "partenaire indéfectible" de l’Arabie Saoudite, même s'il "se peut très bien" que MbS soit impliqué : "Nous ne connaîtrons peut-être jamais tous les faits entourant le meurtre de M. Jamal Khashoggi. De toute façon, nos relations resteront bonnes avec le Royaume d'Arabie saoudite". Et il a ajouté qu'il n'avait pas l'intention d'annuler les accords de livraison de matériel militaire au royaume : "si nous annulons ces contrats de façon stupide, la Russie et la Chine en seront les principales bénéficiaires".

Si l’homme qui préside aux destinées du pays le plus puissant de la planète n’est pas en mesure de se faire une opinion sur ce qui ressemble à un piège à tiroirs sans fond dans lequel on sait plus qui est le piégeur et le piégé entre les frères musulmans, la CIA, les réseaux maffieux et les fabriques du consentement capables de fabriquer n’importe quelle « fake new », ce n’est pas une détective amateur bénévole comme votre serviteur qui va pouvoir révéler la vérité toute nue, et là n’est pas le but de cet article.

La question est de savoir combien de temps les parlementaires américains, la presse et peut-être également de temps en temps les citoyens américains, pourront supporter d’entendre des justifications moralisantes exhibant liberté, démocratie, droits de l’homme et tout le tralala en constatant que les actes qui accompagnent ces discours réalisent exactement le contraire.

Des parlementaires américains, républicains et démocrates, reprochent à Donald Trump, en paraphrasant son slogan fétiche, de pratiquer une forme de "Saudi Arabia first" (faire passer l'Arabie saoudite en premier) en décidant finalement de ne pas prendre de mesures punitives à l'encontre du royaume ou du prince héritier Mohammed bin Salman pour le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi.

Ces déclarations ont été faites malgré les pressions des sénateurs Bob Corker et Bob Menendez qui avaient appelé le gouvernement à tirer les conséquences de cette affaire qui défraie la chronique après que la presse américaine ait publié des éléments nouveaux en invoquant la loi Magnitski, loi qui autorise le gouvernement américain à sanctionner les personnes reconnues coupables de violations "flagrantes" des droits de l'homme : "À la lumière des récents développements, y compris la reconnaissance par le gouvernement saoudien que des responsables saoudiens ont tué M. Khashoggi dans son consulat à Istanbul, nous vous demandons de déterminer précisément si [MBS] est responsable du meurtre de M. Khashoggi".

Il "se pourrait très bien que le prince héritier ait eu connaissance de cet événement tragique - peut-être qu'il l'a fait et peut-être qu'il ne l'a pas fait !", a répondu Trump. Puis il a ajouté que l'évaluation par la CIA des renseignements concernant le meurtre n'était pas "définitive" (terminée ?).

L’Arabie Saoudite avait commencé par rejeter le fait que ses ressortissants fussent à l’origine du meurtre, mais la divulgation de preuves par les autorités turques a contraint Riyad à admettre que ses agents avaient effectivement perpétré le meurtre en fournissant une série d’explications contradictoires.

Le procureur adjoint de l'Arabie Saoudite a déclaré qu’il demandait la peine de mort pour les cinq suspects accusés de l’assassinat, mais que MbS ne savait rien de l'opération.

Plusieurs sénateurs américains ont alors proposé d'imposer "des sanctions sévères" à l'Arabie saoudite : "Nous devrions pour le moins ne pas récompenser l'Arabie Saoudite en lui accordant l’utilisation de nos armements sophistiqués pour bombarder des civils", a tweeté le sénateur républicain Rand Paul

Un autre sénateur républicain, Lindsey Graham, allié de Trump, a déclaré : "'il n'est pas dans l'intérêt de la sécurité nationale de détourner le regard" (en ce qui concerne le meurtre de Khashoggi). "Je crois fermement qu'il y aura un fort soutien bipartite en faveur de sanctions sévères contre l'Arabie saoudite, y compris les membres concernés de la famille royale, pour cet acte barbare qui a défié toutes les normes civilisées. Bien que l'Arabie saoudite soit un allié stratégique, le comportement du prince héritier a montré un manque de respect pour cette relation et l'a amenée, à mon avis, au-delà de la toxicité."

La semaine dernière, un groupe bipartite de sénateurs américains avait présenté un projet de loi visant à punir l’Arabie saoudite du meurtre de Khashoggi et de son rôle dans la guerre dévastatrice au Yémen. Cette proposition intervient peu de temps après que les États-Unis aient imposé des sanctions économiques à 17 Saoudiens qui seraient impliqués dans le meurtre du journaliste. De nombreux sénateurs ont déploré que ces sanctions n'incluent pas MbS et ont appelé les États-Unis à prendre des mesures plus sévères.

Le projet de loi vise à suspendre les ventes d'armes à l'Arabie saoudite et à interdire le ravitaillement en vol des avions de la coalition saoudienne qui effectuent des raids aériens au Yémen par des avions américains. Cette loi imposerait également des sanctions à quiconque bloquerait l'accès des organisations humanitaires au Yémen et à toute personne soutenant les rebelles houthis.

Le sénateur Bernie Sanders (démocrate) a déclaré qu'un vote du Sénat pourrait avoir lieu dès la semaine prochaine. 

La sénatrice démocrate Dianne Feinstein a fait part de son intention de voter contre toute vente d'armes dans l’avenir à l'Arabie saoudite : "Les droits de l'homme sont plus qu'une simple formule, ils signifient quelque chose. Et cela implique qu'il faut se mobiliser pour condamner un meurtre odieux commis par un gouvernement dans un pays étranger".

Dans sa déclaration mardi, Trump a déclaré qu'il savait que certains membres du Congrès "aimeraient aller dans une direction différente" et qu'ils étaient "libres de le faire" : "J’examinerai toutes les idées qui me seront présentées, mais uniquement si elles sont compatibles avec la sécurité absolue et la sécurité de l'Amérique", a-t-il ajouté.

Les sénateurs s'attendent, parait-il, à recevoir la décision de Trump dans les 120 jours suivant la demande initiale du 10 octobre. Cela nous amène au 10 Février 2019 !

De l’eau sera passée sous les ponts du Potomac.



17 réactions


  • Clark Kent NEMO 22 novembre 2018 08:24

    Après tout, il a simplement transformé la Maison Blanche en Chambre de Commerce et l’armée américaine en force de vente.


    • Clark Kent NEMO 22 novembre 2018 13:23

      @Jelena

      Moi je n’en doute pas : ils continuent à faire ce qu’ils ont toujours fait
      la différence, c’est que Trump ne s’embarrasser plus de la mauvaise conscience de ses prédécesseurs qui se sentaient obligés de se justifier soit pour des raisons idéologiques héritées de leur éducation religieuse plus ou moins hypocrite, soit pour donner bonne conscience aux électeurs en leur expliquant qu’ils étaient du côté du bien contre le mal.

      Trump est amoral, ou cynique, si vous préférez. Il conduit le pays comme une entreprise, considère la planète comme un marché et ses adversaires comme des concurrents. La question est seulement de savoir si cette posture est supportable par un troupeau de bigots qui ont été élevés en mettant leur main sur le coeur tous les matins à l’école au lever de la bannière étoilée.

      Peut-on conditionner une masse à des réflexes pavloviens et lui supprimer brutalement la gamelle quand elle salive ?


    • signéfurax 22 novembre 2018 13:24

      @NEMO
      il ne peut pas se retourné contre le fils quand c’ est le pére qui a donné l’ autorisation pour déclencher l’ organigramme qui justifie ces memes ventes ...


    • picpic 22 novembre 2018 15:48

      @NEMO

      Trump, c’est le masque d’Obama arraché pour qu’on voit ce qu’il y a en dessous.
      Trump incarne à la perfection les usa.
      Les usa, c’est le symbole du capitalisme et Trump l’incarne parfaitement.
      Un individu qui n’aime pas Trump, est forcément incohérent avec lui même, puisqu’à chaque élection, qui que l’on soit, on vote capitalisme.
      la gauche et la droite n’étant qu’une illusion de choix, on vote toujours capitalisme...donc, on vote tous, Trump.


    • baldis30 22 novembre 2018 21:18

      @NEMO

      bonsoir,
      « l’armée américaine en force de vente »
      Il y a un gros oublie, c’est qu’) côté de la force de vente il y a l’achat forcé ...
      forcé comment ?

      « Si tu veux pas me vendre tes matières premières au prix que je fixe tu vas voir comment ça se passe à la récré ».

       La récré est toute préparée du côté de Langley ... et est-ce par hasard que le créateur de cet organisme était diplômé de géologie de Stanford .....
      BEN VOYONS !
       Alors « force de vente  » .... et « achat forcé »...
       


  • leypanou 22 novembre 2018 08:46

    Ils font toujours sourire les Démocrates et les Républicains : les uns ne valent pas mieux que les autres.

    Quant aux liberté, démocratie, droits de l’homme et tout le tralala 

    comme vous dites, ce sont seulement des concepts de PR pour le pékin lambda, le plus important étant les intérêts du complexe militaro-industriel qui, in fine, dans tous les cas, dicte ce qu’il faut faire.

    Ce qui est à peu près certain, c’est que Trump n’en fera pas une jaunisse et continuera comme avant malgré les échecs annoncés de sa politique d’après cet article.

    Chacun avance ses pions dans cette affaire et la seule-démocracie-au-moyen-orient-qui-n’a-jamais-été-une-démocracie n’est pas le dernier.


    • Clark Kent NEMO 22 novembre 2018 08:53

      @leypanou

      je ne vois pas ce que vous voulez dire
      vous voulez peut-être parler de la succursale franchisée par le lobby-qui-n’existe-pas dans la zone de chalandise de l’est méditerranéen ?


    • leypanou 22 novembre 2018 10:05

      @NEMO
      chacun veut dire tous ceux qui sont impliqués dans l’affaire syrienne : la Russie, dont on a peu entendu parler dans cette affaire n’a rien dit car des ventes de S-400 sont dans les tuyaux et à son habitude, ne veut pas jouer les donneurs de leçon de démocratie et de droits de l’homme, la Turquie qui a intérêt à tirer le maximum (n’oublions pas que J Khashoggi est un « frère ») et tout ce qui affaiblit le KSA la renforce, l’empire toujours égal à lui-même à géométrie variable et the last but not the least qui vous savez qui est copain comme cochon avec MbS -les kasheriens et les halaliens ne vont pas apprécier mon petit jeu de mots— espère que MbS s’en tire à bon compte sinon son plan sur le MO tombe à l’eau.

      L’Iran regarde tout çà de très loin, il en a assez à faire avec ses propres problèmes et puis MbS ou non, ce sera toujours un ennemi mortel.


    • Laurent 47 25 novembre 2018 14:05

      @leypanou
      A la différence de la « coalition internationale » ( les Etats-Unis et leurs esclaves européens ) qui intervient illégalement en Syrie au mépris des lois de l’O.N.U., la Russie a été appelée à la rescousse par le régime syrien en 2011, aux termes d’un accord de défense qui existe depuis de nombreuses années.
      Récemment l’Iran, qui a voulu aider la Syrie, a obtenu l’autorisation de Bachar El Assad.
      Il n’y a donc que deux pays qui ont le droit d’être en Syrie : la Russie et l’Iran.
      Si l’on a peu entendu parler de la Russie, c’est qu’il s’agit d’un pays qui a pour principe de ne pas lancer de guerre sans y avoir été obligé !
      Pour autant, Moscou a d’autant plus de facilité à vendre son matériel militaire, que de nombreux pays font la queue pour l’acheter ( la vente des batteries S-400 n’est que la partie émergée de l’iceberg ).
      Rien à voir avec le « fer à repasser volant » qui fait l’admiration du monde entier.
      Rapport qualité-prix oblige !


  • Zolko Zolko 22 novembre 2018 10:09

    Je ne regarde plus les Guignols, les politiciens sont devenus encore plus caricaturaux que leur caricatures. Défendre la vente d’armes à un pays entrain de massacrer son voisin pauvre avec ces mêmes armes pour la seule raison que ça rapporte des sous est de la complicité de crime de guerre ... hum, en même temps, les USA ont déjà eux-même massacré des millions dans d’autres guerres, donc, kekpart, ils restent logique avec eux-mêmes.

     

    Ce n’est pas « USA first » mais « Money first ». La mort de ce journaliste servira peut-être de réveil à ceux qui ne voulaient pas voir : là, ça va devenir impossible de nier que les USA sont un mal qu’il va falloir éradiquer comme le fascisme en son temps. Et les islamistes Wahabites avec.


  • microf 22 novembre 2018 14:54

    Albert EINSTEIN « Si vous avez un problème et que vous comptez sur la classe politique pour le resoudre á votre place, vous avez deux problèmes. On ne règle pas les problèmes avec ceux qui les ont crées. »


  • izarn izarn 22 novembre 2018 16:54

    Je ne vois pas en effet pourquoi les USA pretendent défendre les « droits de l’homme » sur la planète.

    C’est illégal.

    Bref Trump, pour le coup n’a pas tord.

    Ceci dit on se demande alors pourquoi il contine les sanctions contre la Russie et l’Iran...

    Bon c’est du grand n’importe quoi...

    Trump=Pognon.

    Basta.


  • Laurent 47 22 novembre 2018 18:44

    Tant que les dirigeants européens n’auront pas compris qu’il faut cesser d’utiliser le dollar comme monnaie dans les transactions, la Communauté Européenne ( dont la France ) continuera son petit bonhomme de chemin...droit dans le mur !

    Nettoyez-vous les yeux, débouchez-vous les oreilles, et rincez-vous le cerveau, vous qui nous dirigez !

    Prenez exemple sur des pays qui ont trouvé la parade, comme la Chine, la Russie, l’Inde, le Venezuela, et faites vos affaires en yuans, en roubles, en roupies, ou en d’autres monnaies locales, comme le permet le commerce international !

    Sinon, nous allons crever, ce qui est de toute évidence le but économique recherché par les Etats-Unis !

    Il va falloir qu’un jour nous finissions par comprendre que notre ennemi n’est pas à l’Est de l’Europe, mais de l’autre côté de l’Atlantique, comme le disait le général De Gaulle, montrant qu’il avait un cerveau et savait s’en servir !


  • damocles damocles 22 novembre 2018 21:45

    La mort d’un collabo du regime saoudite ,récemment passé à une certaine contestation du nouvel homme fort du regime , vaudrait que l’on rompe avec ce pays immoral ...pourquoi pas ? 

    Mais par contre ,les exactions des dirigeants moyennageux de ce pays sur son propre peuple( surtout les femmes ) ,ne justifient aucune volonté de représailles , de même que leur soutient au terrorisme islamiste , les dizaines de milliers de civils tués dans les bombardements au YEMEN , les multitudes d’enfants morts de faim du fait du blocage de tout approvisionnement dans ce même pays …

    INDIGNATION A GEOMETRIE VARIABLE ,et largement DISPROPORTIONNEE !

    La vie humaine n’a pas la même valeur si vous êtes connu ou un vulgaire quidam ...

    HYPOCRISIE MAXIMALE des pays occidentaux et de la Turquie !!!


  • Eric F Eric F 23 novembre 2018 09:33

    Ce qu’il dit pour l’Arabie Saoudite (voir le titre de l’article) est vrai aussi pour la Russie et l’Iran, pourquoi les autres pays occidentaux s’alignent-ils sur le diktat US ?


  • zygzornifle zygzornifle 23 novembre 2018 15:13

    C’est vrai que la France dans l’histoire est inexistante face aux poids lourds Russe et Américain , ha si on construit des mosquées pour que leurs Imams déglingués du cerveau puissent déverser la haine du français chrétien a leurs ouailles sous le sourire béat de la gauche islamo-compatible .....


  • captain beefheart 24 novembre 2018 00:41

    La réaction la plus tape-dans-le mille est de la bouche de la réprésentante démocrate de l’état du Hawaï qui twitte "Hey ,therealdonaldtrump,being SaudiArabia’s bitch is not America first ! donc « être la salope de larabie saouidite n’est pas »America first"


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