Société de l’information : l’ONU ne livre pas la marchandise
Selon le récent rapport Global Information Society Watch 2007, cinq institutions internationales qui devraient contribuer à l’avancement de la société de l’information dans le monde ne jouent pas pleinement leur rôle. Coproduit par The Association for Progressive Communications et The Third World Institute, ce rapport met en doute leur volonté de permettre à la société civile et à toutes les parties prenantes de participer pleinement aux décisions qui pourraient faire en sorte que la technologie de l’information soit utilisée au profit de millions de personnes dans le monde en développement.
Les auteurs du rapport sont conscients que l’accès aux
technologies de l’information et de la communication (TIC) ne réduit pas à lui seul la pauvreté, mais soulignent que « le manque d’accès aux TIC risque fort d’aggraver l’exclusion sociale et de créer de nouvelles formes d’exclusion ».
Les cinq organisations internationales sont pointées du doigt dans la section Institutional Overviews du rapport. Les auteurs prennent soin de mentionner qu’il manque dans leur rapport une sixième organisation jouant un rôle majeur, ne serait-ce que par les nombreuses négociations qui s’y déroulent et qui influencent le développement des TIC : l’Organisation mondiale du commerce. Ils promettent que cette omission sera corrigée dès 2008, le Global Information Society Watch se voulant annuel.
L’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN), l’Union internationale des télécommunications (UIT), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) couvrent dans leurs missions et mandats à la fois les infrastructures technologiques, la production et la propriété des contenus et l’intégration des TIC dans les politiques de développement (rapport, page 27). C’est dire l’importance de leur rôle.
Déjà en 2005, les médias soulignaient le maigre bilan du Sommet mondial sur la société de l’information qui s’est tenu en deux temps, en 2003 à Genève et en 2005 à Tunis.
Le sommet avait tout de même accouché d’un mécanisme de mise en oeuvre au plan international de la société de l’information en fonction de grandes orientations :
- С1. Le rôle des instances publiques chargées de la gouvernance et de toutes les parties prenantes dans la promotion des TIC pour le développement [en anglais]
- С2. L’infrastructure de l’information et de la communication [en anglais]
- C3. L’accès à l’information et au savoir [en anglais]
- C4. Le renforcement des capacités [en anglais]
- C5. Établir la confiance et la sécurité dans l’utilisation des TIC [en anglais]
- C6. Créer un environnement propice [en anglais]
- C7. Les applications TIC : administration électronique [en anglais) ; commerce électronique [en anglais] ; téléenseignement [en anglais] ; télésanté [en anglais] ; cybertravail [en anglais] ; cyberécologie [en anglais] ; cyberagriculture [en anglais] ; cyberscience [en anglais] ;
- C8. Diversité et identité culturelles, diversité linguistique et contenus locaux [en anglais]
- C9. Média [en anglais]
- C10. Dimensions éthiques de la société de l’information [en anglais]
- C11. Coopération internationale et régionale [en anglais]
Une fois tombée l’effervescence autour du sommet, les belles promesses ont été suivies de peu d’engagements et de moyens de mises en oeuvre des orientations, ont constaté les auteurs du rapport.
Selon eux, l’organisation qui semble avoir le plus pris à coeur les orientations qui la concernent est l’UNESCO. Son engagement ferme à faire progresser la société du savoir et surtout l’intégration des orientations du sommet dans sa stratégie à court terme (2007-2013), pourraient produire des résultats positifs pour les pays en voie de développement. On en attend toujours autant du côté de l’UIT et du PNUD.
Quand à l’ICANN et à l’OMPI, leur présence au sommet s’est bornée à veiller au grain afin que les puissants intérêts qu’elles défendent (notamment ceux des grandes corporations qui poussent pour le développement de l’Internet commercial et qui tiennent mordicus à renforcer la propriété intellectuelle) ne soient pas menacés.
En somme, la société civile a été pieusement écoutée à Genève et à Tunis, mais ceux qui dictent les règles n’ont vraiment pas l’intention de se laisser embarrasser par leur présence. Une autre preuve que l’entreprise privée tient le haut du pavé à l’ONU.