jeudi 7 janvier 2016 - par C’est Nabum

Chanteur populaire

Le dernier repère …

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C'était bien, c'était chouette

Michel Delpech a chanté son dernier refrain. Il a pris la clef des chants pour un monde plus enchanteur. L'actualité, ayant besoin d'un peu de quiétude en ce début d'année, sa disparition a mobilisé les médias, occupant ainsi de très longues minutes d'antenne, de reportages en micro-trottoirs, d'extraits de chansons et d' inévitables entretiens avec des amis célèbres du cher disparu. C'est la terrible loi des médias qui impose désormais de bien choisir la date de sa mort pour partir en beauté. Mais laissons-là ces mesquineries et examinons d'un peu plus près la trace de la chanson populaire.

La chanson scande nos vies ; elle sème des cailloux qui fixent les époques et les générations. Ces chansons qui ont marqué notre enfance et plus encore notre jeunesse, sont des repères indéfectibles qui nous reviennent en vagues de nostalgie. Même l'odieuse maladie de la mémoire ne parvient pas à les extraire de notre disque dur. Elles sont sans doute le dernier vestige qui reste alors d'un passé en miettes pour ceux qui sont atteints d'Alzheimer.

Plus encore que les vedettes de cinéma, les chanteurs populaires sont l'expression d'une époque tout autant que le marqueur de souvenirs intimes, familiers ou collectifs. La ritournelle a fait son trou : elle a influencé les manières de penser, elle a libéré les énergies, elle a bouleversé quelques idées reçues. Insidieusement, tranquillement, sans avoir l'air d'y toucher, une belle chanson peut changer la société en douceur.

C'est une étrange alchimie qu'aucune autre expression artistique ne parvient à réaliser à aussi grande échelle. La chanson est porteuse de sens derrière ses bluettes apparemment inoffensives. Sans même chercher à être subversive, elle impose inconsciemment un nouvel éclairage sur ce qu'on nomme aujourd'hui les sujets de société.

Michel Delpech, comme tant d'autres, a porté sa part. Sa chanson sur le divorce, notamment, fut un délicat détonateur pour repenser la procédure qui avait cours à l'époque. C'est presque rien et c'est énorme à la fois que de changer les opinions sans discours ni manifestation. Quelques notes, un joli refrain, un texte simple et émouvant et le tour de magie est en place. C'est du moins ce qui pouvait se réaliser en une époque où la chanson n'était pas qu'un simple objet de commerce à grande échelle.

Nous croulons sous les textes anglo-saxons ; les radios et les télévisions jouent le jeu de la grande industrie et laissent dans l'ombre de vrais perles, d'authentiques chanteurs et chanteuses populaires qui ourlent notre vie quotidienne de récits emblématiques et symptomatiques. Tout ce qui peut pousser à la réflexion, ne serait-ce que de manière homéopathique, est désormais repoussé au profit de l'immense machine à vider les cerveaux.

Curieusement, en organisant une hagiographie excessive, sans doute, pour ce gentil chanteur, nos télévisions ont démontré par l'absurde à quel point elles avaient changé, ne laissant plus de place à de braves artisans des mots et des notes. Nul expert pourtant n'est venu expliquer cette dichotomie étrange, eux qui sont si nombreux à décortiquer l'actualité en toutes occasions.

La véritable chanson populaire ne doit pas mourir. Il y a sans doute, de par la francophonie, des troubadours et des baladins qui décrivent au plus juste les travers de nos mœurs. Il serait dommage qu'ils passent leur temps à quémander une antenne, à courir après un spectacle, à batailler pour se faire une place face aux rouleaux compresseurs du libéralisme triomphant : ceux-là même qui récoltent tous les subsides de l'odieuse Sacem : machine à décourager la petite création.

Soyez curieux, prenez la peine d'aller à leur rencontre. Osez la découverte d'un chanteur, auteur compositeur ou simple interprète. Laissez-vous porter par le plaisir de la chanson, fredonnez à votre tour de belles rengaines d'aujourd'hui. Il n'y a aucune raison pour qu'aucune mélodie n'émerge de l'immense production contemporaine.

Chantez aussi, chantez en français, chantez en famille, chantez en groupe. La chanson était partie intégrante de notre identité et notre nation ne chante plus, ne dispose, hélas, à l'exception détestable de la Marseillaise, d'aucune ritournelle commune. Seules quelques grandes chansons, inscrites désormais dans un passé de plus en plus lointain, émergent encore dans nos mémoires. Michel Delpech a eu cette immense chance d'être de ceux qui ont marqué l'air du temps. Bon vent à lui : Laurette demeurera longtemps encore dans nos mémoires. Sans rancune l'ami ; ma famille vit dans le Loir & Cher !

Enchantement sien.



18 réactions


  • colere48 colere48 7 janvier 2016 09:06

    Un vrai chanteur populaire, dans le sens le plus noble du terme !
    Paix à son âme.


  • juluch juluch 7 janvier 2016 13:41

    reposez en paix........vos chansons sont toujours présente.....


    Merci Nabum pour cet hommage

  • Intelle Intelle 7 janvier 2016 13:52

    Très bel article qui rend hommage à Michel Delpech...Les vrais chanteurs populaires deviennent de plus en plus rares, la jeune génération étant très influencée par les anglo-saxons. Heureusement certains jeunes artistes créent des albums de reprise de chanteurs disparus pour que continuent à vivre ces chansons inoubliables.


  • keiser keiser 7 janvier 2016 14:30

    Salut Nabum

    Rien que le fait de vivre là bas serait déjà une source de rancune pour moi smiley

    Nous avons une fois un stagiaire du Berry, il ne voulait plus rentrer chez lui.
    Le pauvre, il a pleuré toutes les larmes de son corps en quittant notre région Toulousaine et j’exagère à peine .

    Bon ceci dit, je ne suis pas trop chanson populaire mais j’aimais bien Delpech, toute une époque.
    Les 45 toujours que l’on jouait à fond sur le tourne disque des parents, c’est loin tout ça .
     


  • L'enfoiré L’enfoiré 7 janvier 2016 17:28

    Bonjour Nabum,


    « La chanson était partie intégrante de notre identité et notre nation ne chante plus, ne dispose, hélas, à l’exception détestable de la Marseillaise, d’aucune ritournelle commune. »
    C’est exactement ce que je voulais dire à la suite de l’article de Alinéa qui ressortait la vieille chanson « Besame mucho ».
    A part, Rocla+ confirmait mon impression. 

  • Antoine 8 janvier 2016 11:22

      Ce n’est que la constatation palpable de la médiocrité du niveau musical des français, mais, hélas, ce n’est pas nouveau...


  • Attilax Attilax 9 janvier 2016 20:27

    Le fait que la chanson populaire disparaisse des médias (ou devienne totalement insipide) n’est pas un hasard. Tout est comme ça dans le moderne : l’art, l’architecture, la bouffe, tout. Il faut briser les spécificités des peuples pour créer un consommateur global, acculturé, sans références authentiques et surtout, surtout, sans nation. Nos cultures expriment notre histoire, nos traditions, tout ce qui fait qu’un peuple est spécial et unique. Si nous désirons tous la même chose, que nous faisons tous les mêmes choses, que nous pensons tous pareil, c’est la fin de la culture citoyenne. Il ne reste plus que le marketing globalisé... C’est ce qu’ils veulent (les oligarques mondiaux) : un seul peuple de moutons sans mémoire qui consomme et obéit sans se poser de question. Comme vous l’avez dit, une simple chanson bien écrite peut tout changer, et ça ils n’en veulent plus. Comme ils ont le contrôle médiatique à peu près total, c’est facile pour eux de tout verrouiller. heureusement, ils restent les concerts, et il est d’ailleurs troublant de constater que les groupes qui marchent le mieux en « live » sont ceux qu’on n’entend jamais à la radio... Preuve que le public est pas si con.


    • C'est Nabum C’est Nabum 10 janvier 2016 09:18

      @Attilax

      C’est le sens de ce billet et je suis totalement en phase avec vous

      Il a été écrit pour être envoyé à une radio locale du groupe Radio France,, France Bleu Orléans, qui se vautre dans ce que nous dénonçons ici.

      Plus je proteste contre leurs choix rédactionnels et musicaux, plus je suis proscrit des ondes. Qu’importe, ces gens sont des collaborateurs d’une dictature molle mais épouvantable néfaste

      Résistons


    • keiser keiser 10 janvier 2016 13:12

      @C’est Nabum

      Ne t’inquiètes pas trop d’être banni du blaireau-land.

      J’ai une bibliothèque musicale assez conséquente .
      Celle ci s’est étoffée avec du bouche à oreille.
      Les amis de mon fils qui m’apporte un avis plus frais .
      Ainsi que des concerts surprise, un peu comme toi, si j’ai bien compris. smiley

      On s’en fout des radios formatées pour vendre la dernière chanson insipide de Machin Pagny.
      Et de son collègue obispo, générateurs de clips sentimentaux bio- dégradable.
      Et sans parler du reste ...

      On a pas besoin d’eux.

       


    • C'est Nabum C’est Nabum 10 janvier 2016 13:53

      @keiser

      Ils font pourtant très mal ces prescripteurs d’opinion pré-mâchée, ils sont orgueilleux et usent de leur puissance pour détruire et nuire

      Alors je tire à vue, je me sers de mes ondes courtes pour les dénigrer

      J’ai mal à la pluralité et entendre (imaginer quant à moi) l’ignoble Johnny représenter l’unité nationale au travers d’une chanson me donne envie de vomir ce monde factice


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