mardi 26 avril 2011 - par Michaux Jérémi

Des journalistes issus de la diversité à la télé… pas dans les autres médias

Rachid Arhab, Harry Roselmack, Audrey Pulvar, en dehors du fait d’être tous journalistes partagent au moins une autre spécificité, ils sont tous issus de la diversité. Par leur professionnalisme, ils nous obligent à plus de discernement et changent nos à-priori sur les composantes de la société en faisant simplement leur métier. Toutefois si la diversité française est de plus en plus représentée à la télévision, les journalistes qui en sont issus restent l’exception dans les autres médias de masse.

Décembre 1987, Rachid Arhab, reporter d’Antenne 2, est envoyé pour couvrir les émeutes indépendantistes en Nouvelle-Calédonie. A l’assemblée Nationale, un député du FN critique ouvertement sa déontologie de journaliste en rappelant ses origines algériennes et en laissant entendre qu’il n’est pas impartial. Applaudissements des élus du Front National. Le ministre de la culture François Léotard interviendra même personnellement pendant un journal télévisé face au tollé que souleva l’affaire. A l’époque Rachid Arhab est l’un des seuls journalistes d’origine étrangère à officier à la télévision. Par la suite, les choses ont un peu évolué et le journaliste a même été le premier à présenter un JT national pour lequel il recevra un sept d’or en 2000. Aujourd’hui membre du CSA, il a été celui qui à ouvert la voie aux autres journalistes issus de la diversité.

Parmi les journalistes issus d’une minorité visible, certains sont encore plus « visibles » que les autres. C’est le cas d’Audrey Pulvar. Elle fait, à double titre, partie des « minorités » car elle est visiblement noire et visiblement… une femme. Jusqu’à il y a peu de temps, elle était une journaliste de télévision pour I-Télé et de radio à France Inter parmi d’autres.

Elle est devenue une personne dont la voix compte sur la scène médiatique quand elle a implacablement chroniqué sur une petite phrase du fondateur de la maison Guerlain. Ce dernier avait déclaré sur France 2 « je me suis mis à travailler comme un nègre. Je ne sais pas si les nègres ont toujours tellement travaillé mais enfin... ». Si l’intervention de la journaliste en a surpris plus d’un et s’est avéré nécessaire parce qu’Elise Lucet qui interviewait M. Guerlain n’avait pas réagi à son écart de langage. On s’est alors aperçu d’un état de fait assez surprenant : Audrey Pulvar est probablement la seule journaliste noire à pouvoir diffuser ce droit de réponse dans un style journalistique qui se prête aux « coups de gueule », la chronique radio. 

 Le manque de représentativité apparaissait flagrant. La France ne parvient pas à intégrer ses minorités visibles. C’est dautant plus vrai dans la forteresse imprenable, car stratégique, de la diffusion de l’information. Paradoxalement certains reprochent à ceux qui ont réussi à force de travail d’être arrivé là grâce à leur couleur de peau. On mesure le chemin à parcourir par rapport aux médias anglais et surtout américains où des quotas minimum dans la société ont permis l’émergence de nombreux journalistes plus colorés.

Mais que pensent les premiers concernés de l’instauration de quotas ? Ils sont souvent contre ; à l’image de Christine Kelly ancienne journaliste de LCI et actuellement membre du CSA qui dans une interview à lInternaute se déclare « définitivement contre les quotas, même si je respecte et comprends ceux qui défendent cette position ». On ne peut que respecter son choix notamment concernant l’audiovisuel où, par définition la couleur des journalistes à l’antenne se voit. Le peu de minorités présent à l’antenne ne reflète pas encore la composition de la société mais s’en approche doucement. On peut par contre lui opposer leurs situations à la radio ou dans la presse dont les journalistes ne sont pas sous le feu des projecteurs.

Un seul journaliste noir dans la presse quotidienne nationale

Pour s’en convaincre il suffit d’aller faire un tour sur la « liste des émissions » » du site internet de France Inter. On peut y voir les photos de 63 journalistes qui officient sur les ondes pour la radio. Parmi eux, trois sont issus d’une minorité visible. Les journalistes d’information « issus d’une minorité visible » sont qualifiés ainsi parce que le public les remarque davantage que ceux à la peau plus claire.

On devrait pourtant dire minorité « invisible » tant ils sont esseulés au sein du paysage journalistique français quand il ne se résume pas qu’au petit-écran. On se souvient de cette enquête de 2006 pour le livre « Noir et français » qui avait conclu à la présence d’un seul et unique « journaliste noir » parmi tous les rédacteurs salariés de la presse quotidienne nationale (près de 2000). Ce dernier, Bertrand Dicale étant d’ailleurs métis travaillait pour Le Figaro à l’époque et officie actuellement pour France Info. Il écrit fréquemment des livres et, est notamment l’auteur de « La chanson française pour les nuls ». Plus proche de nous, l’année dernière Mustapha Kessous un journaliste du Monde a été encouragé par sa rédaction à rédiger un article sur les incivilités dont il était victime jusque dans son métier. L’inventaire est édifiant.

Un supporter qui refuse de lui parler car il est arabe. Des contrôles très fréquents de la police, qui le prend même quelques fois pour un suspect. Des personnes qui appellent la rédaction du journal pour signaler qu’un arabe se fait passer pour un journaliste du Monde mais aussi Brice Hortefeux qui l’accueille avant une interview par un « Bonjour, vous avez vos papiers ? ». Apparemment le chemin est encore long avant que le terme de minorité visible ne devienne obsolète.

Les consciences auront alors déjà bien évoluée. Les différences visibles seront alors mieux acceptées. Et si ce n’est pas pour demain, on s’en approche doucement concernant… la télévision. Il n’y a qu’à voir les visages de plus en plus colorés des jeunes journalistes qui présentent des JT ou des émissions d’informations.

Espérons que les médias écrits et radios ne resteront pas indéfiniment à la traine à cause de leur manque d’exposition vis-à-vis du public. On ne sait pas toujours qui a écrit un article ou qui parle dans le micro alors qu’à la télé, les couleurs sont « visibles ». Ce qui ne se voit pas n’évolue que très lentement.



13 réactions


  • wesson wesson 26 avril 2011 11:44

    Bonjour l’auteur,
    c’est de la diversité canada dry dont vous nous parlez. Le jour ou vous aurez daniel mermet au journal de 20H, on pourra parler de diversité. Pour le reste, toutes ces charmantes personnes sont d’accord sur l’essentiel et défendent une même vision du monde et de la société, ce qui me fait dire qu’il n’y a en définitive aucune diversité chez eux.


  • jef88 jef88 26 avril 2011 12:08

    Et à quand des journaliste d’origine franchouiarde bien populaire ?
    Nés à la campagne, d’une famille d’ouvriers ou ouvriers agricoles, avec un accent local ?

    Jamais .... C’est certainement trop vulgaire pour notre intelligensia..


  • non667 26 avril 2011 14:35

    et si on faisait des statistiques sur les origines religieuses !

    cela aurait des rn et nous rappellerait lhlpsdnh ! smiley


  • suumcuique suumcuique 26 avril 2011 14:49

    De Drucker à Elkabach en passant par Nagui et Kahn, c’est quasiment toute la télévision qui est « issue de la diversité ». Les propriétaires des médias sont tous « issus de la diversité ».


  • Damien Perrotin Damien Perrotin 26 avril 2011 15:10

    Avec PPDA ma minorité n’est pas si mal représentée... sauf que tous ces gens appartiennent au même monde, avec grosso modo les mêmes opinions et surtout le même mode de vie. Je ne vois pas en quoi le fait de réserver des rentes de situation à des représentants autoproclamés de telle ou telle minorité fictive (car il faudra qu’on m’explique ce qui rassemble un éthiopien, un zoulou et un matiniquais) profitera à la ménagère négro-nazairienne. Sauf qu’il faudra mettre « noir » sur sa carte d’identité car si on veut des quotas il faut une définition légale, et des signes distinctifs.

    Comment dit-on « color-blind society » en français ?

    Comme toujours, on préfère le sociétal au social.


  • agent orange agent orange 26 avril 2011 17:36

    La diversité présente et passée non exhaustive de la Tel Aviv-sion ?
    Michel Drucker, Marie Drucker, Léa Drucker, Jean Drucker, Arthur, Christine Ockrent, Anne Sinclair, Ruth Elkrieff, Geraldine Mulhmann, Nathalie et Elisabeth Lévy (BHL ?), Paul Nahon, Serge Moati, Daniel Schneidermann, David Abiker, Emmanuel Chain, Gérard Klein, Gérard Miller, Michel Field, Marc-Olivier Fogiel, Paul Amar, Yvan Levaï, Jean-Pierre Elkabach, Alexandre Adler, Eric Zemmour, Franz Olivier Giesbert, Etienne Leenhardt, Jean Pierre Pernault (not a goy !), etc...
    Je vous fais grâce de la presse écrite...


  •  C BARRATIER C BARRATIER 26 avril 2011 19:38

    Rachid ARHAB avait monté une émission qui donnait des boutons au gouvernement : « j’ai rendez vous avec vous » sur Anrtenne 2.. Du direct à travers toute la France avec des commentaires de l’actualité par des invités dont la diversité de pensée était recherchée. L’émission était très regardée, aucune vedette de la politique n’était jamais invitée, des gens simples.
    Pour préparer l’émission en direct, dans l’heure qui précédait, Rachid recevait en entretien le futur intervenant pour l’écouter, l’aider à dire ce qu’il avait d’essentiel à dire, ensuite au direct, il interviewwait l’intéressé avec le seul but de lui faire exprimer ce qu’il avait prévu. Une présence chaleureuse.
    Une émission citoyenne faite finalement par Monsieur ou Madame Tout le monde. Une équipe de grande compétence et de grande simplicité de relation autour de Rachid.
    Je pense que sa promotion au CSA et la suppression de son émission qui marchait très fort a été d’abord un moyen de supprimer ce grand moment hebdomadaire très attendu...moment qui n’a pas été remplacé.

    Rachid, c’était bien sûr la diversité, un talent nouveau que seule une grande ouverture au moment des recrutements permettrait encore : on voit toujours les mêmes ou leur copié collé.


  • Pépé le Moco 26 avril 2011 20:34

    Bonsoir,

    Le titre de votre article porte déjà la vacuité du contenu de celui-ci !
    « Des journalistes issus de la diversité à la télé ... pas dans les autres médias »
    L’accroche que vous utilisez avec le mot « la diversité » suggère la pluralité des idées. Il est immédiatement corrompu par « à la télé... pas dans les autres médias ». En effet, la télévision est le dernier des média qui fait preuve de pluralité des idées (vous êtes victime de violences symboliques et vous transmettez celles-ci au lecteur d’AV à travers votre article).
    Votre formation de « journaliste » (si vous en avez eu une) est une preuve criante de l’utilisation de la LQR, digne d’un nouveau chien de garde (un livre que je vous conseille d’acheter et de lire).

    Une chose est sûre, votre conception du journalisme vous permet dès à présent de travailler à TF1.

    Bon courage.


  • Martin sur AgoraVox Martin sur AgoraVox 26 avril 2011 21:24

    « La diversité », « les minorités visibles » etc. des expressions de « la novlangue  », de cette langue politiquement correcte, qui dénature la langue française en substituant aux termes véritablement signifiants des termes dont le sens est très, très dilué à tel point que les utilisateurs de cette novlangue ne sont plus capables d’exprimer des pensées structurantes, fondées sur le sens et la raison… 

    Mais en France cette novlangue est devenue la langue obligatoire permettant de diffuser des idées sans relief qui caractérisent des articles « politiquement corrects ».

    Pendant ce temps des articles qui utilisent les véritables expressions de la langue française, des expressions ayant vraiment un sens, sont mis à l’écart et les idées qu’ils risquent de rappeler sont interdites de diffusion.

    Concernant la liberté d’expression il est vrai qu’en France il est mal vu de dire certaines vérités, surtout celles qui concernent les groupes raciaux et ethniques ainsi que certaines religions qui connaissent une récente et forte progression en France. Mais il est bien vu de parler des « minorités visibles » alors qu’on devrait parler de groupes religieux, ethniques et raciaux. En France on utilise des contorsions, pour éviter de parler des faits objectifs avec des termes signifiants, on invente des termes comme « minorités visibles  » sans préciser quelle en est la signification, de sorte que l’on introduit avec ce néologisme maladroit la confusion, car il y a des quantités de minorités qui sont visibles : les handicapés moteurs, les chauves, les nains, les riches tape-à-l’œil, les gros, les barbus etc.

    D’ailleurs on peut également poser la question de savoir si en France les Blancs sont une « minorité visible  » : la question est légitime puisque les statistiques ethno-raciales n’existent pas en France, donc on ne peut pas savoir avec certitude a quel moment les Blancs deviendront ou sont devenus une « minorité visible  ».

    Cette attitude française, qui bride fort la liberté d’expression, explique, à mon avis, pourquoi certains articles ne sont pas publiés par AgoraVox pour la seule raison que leur sujet concerne les races humaines ou certaines religions ou encore l’idée de la nation protectrice.

    Par exemple, si vous avez publié quelques articles sur AgoraVox alors vous avez le statut de « rédacteur » d’AgoraVox et alors vous avez accès aux articles qui sont en attente de validation.

    Dans ce cas vous pouvez constater dans la rubrique « Actualités/Société » que l’article qui depuis le 8 janvier est bloqué à la validation par la rédaction d’AgoraVox a pour titre « L’avenir des races humaines ».

    De même vous pouvez constater dans la rubrique « Tribune Libre » que l’article qui depuis le 2 avril est bloqué à la validation par la rédaction d’AgoraVox a pour titre « L’identité des Européens, le nationalisme, l’européanisme et le régionalisme ».


  • antonio 27 avril 2011 09:11

    « Les minorités visibles » ! Quelle horrible expression en réalité profondément raciste.
    Je me moque de la couleur de peau des journalistes et de celle de tout homme d’ailleurs.
    Ce qu’on demande aux journalistes, c’est des qualités d’investigation, d’honnêteté, d’indépendance, de travail...et ce ne sont pas ces journalistes-là qu’on voit officier à la télé ; la plupart sont couchés, à la botte de la propagande sakozyste, paresseux, peignant le monde en « noir et blanc » ( les bons et les méchants ), mettant en valeur tout ce qui est anxyogène, et à la une les faits divers les plus graveleux.
    Que Tartempion soit noir, blanc ou rouge, qu’est-ce que vous voulez que ça me fasse du moment qu’il est aussi nul que tous les autres ?
    Et si pour vous, le problème des journalistes, c’est celui des « minorités visibles », eh bien vous ne méritez pas le titre de journaliste comme je l’ai défini plus haut. Vous ne faites que surfer sur la vague du politiquement correct et votre avenir de « chien couché » est bien assuré.




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