2022, premier état des lieux
Les élections présidentielles se profilent et à un peu plus d’un an du scrutin, il est possible de dresser un premier tableau, déplorable, de la situation. Et cela ne va sans doute pas s’arranger.
Les « forces » en présence
On pourrait parler d’emblée de faiblesses, tant ce qui se profile actuellement ne donne aucune envie d’aller voter.
D’un côté un sortant au bilan minuscule, miné par la pandémie qui lui a ôté ses beaux rêves de « réformes » néolibérales, et dont nous ne sommes pas encore certains qu’il sera en mesure de se représenter.
De l’autre, beaucoup de prétendants, dont la plus célèbre, Mme Le Pen, dont on dit que cela pourrait être son heure. Elle affole les sondages et les commentateurs indignés par l’effritement du fameux front républicain qu’on nous ressert inlassablement depuis 2001 et qui a créé des générations de frustrés qui ne savent même plus pour qui ils voteraient au second tour en l’absence de l’épouvantail Front National. Enfin, épouvantail, le mot est désormais bien fort, compte tenu des différents renoncements, économiques (sur l’euro), politiques (sur l’Europe) et sociétaux (les étrangers), qui font désormais de lui un parti presque comme les autres. Ne reste plus à Mme Le Pen qu’à prôner la légalisation du cannabis, ce qui lui apporterait des voix supplémentaires des habitants les banlieues excédés par les dealers…
A ma droite, le premier déclaré, Xavier Bertrand, l’assureur des Hauts de France, qui fera comme tous les autres en éditant un programme merveilleux pour « redresser la France » avec, en minuscule, au verso, les clauses d’exclusion comme celles des contrats d’assurances qu’on ne lit jamais.
Toujours à ma droite, Edouard Philippe, le Notaire du Havre qui donne à penser en ce moment qu’il aurait fait signer un viager au locataire actuel de l’Elysée et qu’il serait donc le futur propriétaire légitime des lieux, écrasant d’emblée la candidature Bertrand. Il aime bien « être aux manettes », ce qui caractérise plutôt le besogneux que celui qui a une vision pour le pays.
Au fait, a-t-on besoin d’une « vision » quand tout se décide ailleurs, en Chine, aux Etats unis, à Bruxelles ou au Medef et au CAC 40, lorsque Merkel ou Erdogan n’hésitent plus à s’essuyer les pieds sur nous. On l’a bien vu avec la crise sanitaire, de l’épisode des masques à celui de la vaccination en passant à celui des tests, preuves de notre dépendance généralisée.
A ma gauche, rien, de la poussière, de l’émiettement. Même le lider maximo autoproclamé a fait comme une partie du PS ou des verts en s’engouffrant dans les débats identitaires qui ne mènent à rien sauf à diviser entre elles des « communautés » qui s’invectivent désormais entre « traite à ta race » ou « nègre de service » et autres noms d’oiseaux. Le dispositif de noyautage mis en place par les idiots utiles de l’extrême gauche pour faire exploser la République, se retourne désormais contre eux. Ils ne font plus partie des « commerces essentiels » de la politique française et vont se retrouver dans les poubelles de l’histoire, laissant pour vingt ans au moins le champ libre à la droite et ses avatars.
Et le pays, dans tout ça ?
Passées les analyses sur les « forces » en présence, il faut bien se rendre à l’évidence : nous n’avons que peu de prises sur les évènements. Les candidats tentent de nous séduire avec la rigueur, la diminution des dépenses de l’Etat, la reprise économique qui effacera la dette et créera des emplois à foison (air connu), la sécurité, bien entendu, comme d’habitude, à tel point qu’on peut se demander, maintenant que nous sommes bien vacciné contre les promesses qui ne se réalisent jamais, si voter peut encore servir à quelque chose.
Tout se décide ailleurs, la mondialisation, dont nous faisons partie des meilleurs élèves, s’en occupe.
Cela nous permet donc de voir ce qui se passe dans les entrailles de la machine, c’est-à-dire cette fameuse administration que tout le monde nous envie, enfin, nous enviait, la crise sanitaire ayant dévoilé son mode de fonctionnement que l’on peut aisément comparer à l’armée française (pourtant meilleure sur le papier) de la déroute de 1940.
A l’occasion de la pandémie nous avons tous pu constater la faillite des organisations d’Etat de la Santé, pieuvre qui autour du Ministère s’alimente de nombreuses agences, hautes autorités, de Santé Publique France, etc, etc…, autant de décideurs soucieux de leurs prérogatives et qui mettent un temps fou à se mettre d’accord. Outre ce manque « d’agilité », comme on dit, on peut se poser des questions sur le coût de la gestion et se demander comment des Agences Régionales de Santé formatées pour supprimer des lits d’hôpitaux peuvent encore se retrouver en première ligne pour gérer la crise. On peut aussi se demander pourquoi on fait appel à des agences privées pour « aider à la décision »
Si on fait un tour du côté du Ministère de l’Intérieur, on trouvera également des débiles capables de nous concocter des attestations de déplacement Covid faisant deux pages.
Il y a de fortes chances pour que l’on puisse répéter les exemples avec tous les Ministères.
Le mal est ancien, c’est le « pas de vagues » qui prévaut et cette organisation merdique (et très dépensière) a pour arme majeure la technique de la patate chaude (c’est pas moi, c’est l’autre). C’est l’entropie qui signifie un « désordre produit par l’excès d’organisation ».
Il faut dire aussi que la fureur législative et réglementaire n’aide pas beaucoup : à chaque problème, une loi, souvent inutile parce qu’il en existe déjà une mais la production de nos parlementaires a un autre but : celui de rassurer le citoyen, lui dire qu’on s’occupe de lui. Qu’importe si les mesures seront sanctionnées ou non par le Conseil Constitutionnel, l’essentiel, c’est de communiquer pour dire qu’on est le meilleur : votez pour moi !
« La République des territoires »
Quel beau slogan de campagne pour M. X. Bertrand qui nous assène avec force que « la crise du Covid a enterré l’Etat centralisé ». Il prêche pour tous les potentats locaux qui cherchent à se glorifier avec de nouvelles initiatives, de nouvelles compétences prises sur le cadavre de l’Etat jacobin qui a failli. Or, si l’Etat est toujours partant pour refiler aux collectivités locales bonasses la gestion administrative coûteuse de secteurs dont il veut se débarrasser (action sociale, gestion des personnels des collèges et lycées…), il n’est pas question pour lui de faire des cadeaux aux Présidents de ces collectivités qu’il garde sous sa tutelle.
D’ailleurs, à y regarder de plus près, l’organisation de ces collectivités ressemble de plus en plus à celle de l’administration d’Etat décrite plus haut avec ses agences territoriales (on joue la carte de la fausse proximité avec le citoyen), ses établissements publics et autres agences d’urbanisme ou de conseil, sans compter les communicants qui sont là pour chanter les louanges des élus (majoritaires) ou encore les cabinets conseils privés payés fort chers.
On remarquera également que localement mais aussi nationalement, les idéologies et l’universalisme tendent à disparaître au profit de la segmentation des idées dans un gloubi-boulga ni de droite, ni de gauche ou carrément « apolitique », l’essentiel étant de pouvoir trouver sa place parmi les plus de 500 000 élus qui dirigent le pays et le cas échéant, pour les plus chanceux émarger aux indemnités de mandats prévues à cet effet. Un boulot comme un autre par ces temps de chômage…
Alors, voilà, avant de voter bêtement lors des prochaines élections présidentielles, régionales ou départementales, savoir si vous aller alimenter les rangs du « front républicain » ou rester chez vous, posez-vous la question de savoir si on ne se foutrait pas un peu de votre gueule.