samedi 16 mars 2019 - par Laurent Herblay

Ce que la dérisoire taxe GAFA dit de l’UE et de nos politiques

On pourrait croire que les 400 millions d’euros de recettes que devrait générer la taxe de Bruno Le Maire vont donner le change d’une plus grande justice fiscale et d’une juste mise à contribution fiscale des géants de l’internet à notre société. Mais pour qui s’intéresse suffisamment au dossier, difficile de ne pas voir qu’il s’agirait d’une petite obole par rapport à ce qu’ils devraient payer.

 

Petite taxe sur chiffre d’affaires minoré
 
La manœuvre est relativement habile dans la mesure où 400 millions représente une somme significative et que personne ne sait véritablement quel est le montant que devraient payer Google, Facebook, Microsoft et compagnie. Malgré, ou du fait, des protestations du secteur, cette taxe pourrait paraître être un vrai progrès alors qu’elle est totalement dérisoire et qu’elle révèle surtout bien des choses qui ne vont pas dans le système actuel. Le premier angle mort du projet du gouvernement est de vouloir taxer le chiffre d’affaires alors que ces entreprises sont spécialistes pour domicilier leur chiffre d’affaires là où cela est le plus intéressant pour elles dans cette UE qui leur est si favorable.
 
En effet, sur la base de quelques sources, j’avais estimé dans le passé que Microsoft, Google, Facebook et Apple semblent déclarer un chiffre d’affaires en France qui correspond à peine à 10% de la réalité, en profitant de la liberté extrême permise par l’UE pour, par exemple, vendre des publicités en France en les facturant depuis l’Irlande… Du coup, taxer sur la base du chiffre d’affaires déclaré en France, c’est dérisoire. Pour certains, la taxe ne sera pas de 3%, mais de 0,2 ou 0,3%... Pire, les entreprises purement françaises la paieront en intégralité, contrairement aux géants du web… Voilà donc une nouvelle règle qui montre bien que nos dirigeants ont une approche bien superficielle.
 
En outre, on peut estimer que les seuls quatre géants de l’internet parviennent à éviter pas moins de 2 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés par an  ! Du coup, cela relativise considérablement les prévisions de recettes de Bruno Le Maire, qui ne seront qu’extrêmement dérisoires par rapport à la désertion fiscale des géants d’internet. Ce faisant, cet épisode est extraordinairement révélateur. D’abord, l’échec des discussions montre à nouveau que l’UE protège structurellement les intérêts des multinationales et ne sera jamais un outil pour restaurer plus de justice fiscale ou sociale. Et parallèlement, c’est l’occasion de rappeler, a contrario, qu’elle est un outil de désertion fiscale des multinationales.
 
Mais ceci en dit également long sur Bruno Le Maire et la majorité actuelle, prêts à toutes les gesticulations législatives et fiscales. Il était évident que l’initiative européenne n’aboutirait à rien, étant donné que les parasites fiscaux de l’UE n’allaient pas agir contre ceux qu’ils accueillent si favorablement chez eux. Et cela est aussi le rappel que cette UE créé les conditions à une manipulation fiscale révoltante, source d’une injustice sociale au cœur de la mobilisation des Gilets Jaunes depuis quatre mois. Et les dirigeants actuels ne cherchent qu’à donner le change en prenant des mesures purement cosmétiques et dérisoires pour tenter de calmer une colère légitime sans rien véritablement changer.
 
 
La micro-taxe qui devrait être mise en place n’est donc qu’une gesticulation dérisoire, destinée à donner le change et qui épargnera largement la désertion fiscale des géants d’Internet. Elle n’a pas d’autre but que de servir la communication d’un gouvernement superficiel qui n’a aucune envie de véritablement agir pour une véritable justice fiscale, de toutes les façons impossible dans l’UE.


4 réactions


  • Arogavox Arogavox 16 mars 2019 10:42

    « l’UE protège structurellement les intérêts des multinationales et ne sera jamais un outil pour restaurer plus de justice fiscale ou sociale »

    On peut transposer :

     les fonctionnaires des « Forces de l’Ordre » protègent structurellement les intérêts des incarneurs(-transnationaux (*)) et ne seront jamais un outil pour restaurer plus de paix et de cohésion sociale.

    (*) cf ce passage de ce lien : http://in-girum-imus.blogg.org/emmanuel-macron-president-de-l-anti-france-insulte-les-francais-a131573396

    "On se souvient qu’en meeting à Lyon au mois de février 2017, il avait affirmé que la culture française n’existait pas

    "


    • Arogavox Arogavox 16 mars 2019 11:26

       « le régime macronien : c’est un régime fasciste, disons-le clairement, non seulement il bastonne les populations qui le contrarient, mais il a confisqué la justice, la police et les médias pour son usage personnel et celui de la caste qu’il représente.
      La concentration de tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme, sans doute fou, est un très grave danger pour la République. »
      ... «  Il est bon de qualifier précisément ce qu’est cette manière de l’oligarchie de gouverner par la matraque à défaut de réunir un consensus minimal sur ses projets vaseux et destructeurs. »

       cf http://in-girum-imus.blogg.org/la-fin-du-grand-debat-a160840376



  • Arogavox Arogavox 16 mars 2019 11:50

    lien avec la « dérisoire taxe GAFA de l’UE »  :

    « Pour le Conseil de l’Europe :  »La cohésion sociale est la capacité d’une société à assurer le bien-être de tous ses membres, en réduisant les disparités et en évitant la marginalisation."


    à noter que notre Grand Machin d’Europe, plus royaliste que le roi en matière de prétendu ’libéralise’ reste loin d’avoir compris aussi bien que les ’affreux-Kapitalistes-US’ la nécessité de casser les trusts : https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_antitrust

      N’oublions pas, que l’Internet que nous utilisons ici est indissociable de l’informatique grand public qui elle-même découle des lois US anti-trust qui avaient cassé le trust Bell ...



  • titi titi 16 mars 2019 21:14

    Ce que révèle cette taxation sur les Gafa… c’est qu’aucune de ces entreprises n’est née en Europe.

    Ce qui pose la question de l’innovation dans nos contrées et de la fiscalité autours des investissements.

    Un scénario à la Microsoft ou facebook c’est impossible de ce coté de l’atlantique.

    L’appareil administratif ne le permettrait pas car l’objectif de nos administrations, ce n’est pas l’emploi, ni l’innovation, c’est trouver des sources de taxation.

    Quand il y a une innovation, les USA en font un business, les chinois une copie, et les européen une taxe.


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