lundi 4 novembre 2019 - par Sylvain Rakotoarison

Félix Gaillard, le surdoué de la politique française (1)

« Son intelligence et sa faculté d’assimilation exceptionnelle l’engageaient dans des raccourcis brillants et rapides. Il devait bientôt prendre celui de la politique, seul débouché pour son ambition impatiente et élevée. » (Jean Monnet à propos de Félix Gaillard, cité par Benoît Yvert, "Premiers Ministres et Présidents du Conseil depuis 1815", éd. Perrin, 2002). Première partie.



L’ancien chef du gouvernement français Félix Gaillard est né il y a 100 ans, le 5 novembre 1919 à Paris. Comme beaucoup de personnalités de la Quatrième République, Félix Gaillard n’a plus eu beaucoup d’influence sur la vie politique française à partir du retour du Général De Gaulle. Pourtant, ce n’était pas à cause de son âge (il n’avait que 38 ans au début de la Cinquième République). Ce n’était pas non plus à cause d’un échec électoral (il fut réélu député sans interruption après 1958). Et tout portait à croire qu’il aurait pu reprendre un rôle essentiel dans le paysage politique, à la tête d’un parti "central"… s’il n’était pas mort prématurément, le 9 juillet 1970 à l’âge de 50 ans, au large de Jersey, avec trois coéquipiers, au cours d’un naufrage consécutif à l’incendie de leur voilier (probablement dû à un court-circuit électrique).

Il était plus jeune que François Mitterrand qui a imposé sa marque dans la vie politique jusqu’au milieu des années 1990. On pouvait donc imaginer que, comme Edgar Faure (encore plus âgé) ou d’autres (Jacques Chaban-Delmas), il aurait été pleinement présent dans la politique des années 1970 et 1980, face aux bouleversements du pays et du monde sans ce malheureux accident en pleine mer.

Félix Gaillard est connu surtout pour sa précocité dans la vie politique. En effet, le 6 novembre 1957, il est devenu Président du Conseil des ministres, c’est-à-dire Premier Ministre, et cela quasiment à son 38e anniversaire. Ce qui montrait que la Quatrième République était capable de mettre en avant un personnel politique jeune, renouvelé, et évidemment brillant, dont le point commun généralement était la participation dans la Résistance.

En ce sens, à cette époque, Félix Gaillard fut le plus jeune chef du gouvernement français de toutes les Républiques, et seul, Laurent Fabius, né le 20 août 1946, l’a "battu" de quelques jours, nommé Premier Ministre le 17 juillet 1984 (donc trente-quatre jours plus jeune que Félix Gaillard). Laurent Fabius a eu une carrière politique très longue puisque, ministre dès le 22 mai 1981 (député en mars 1978), et encore ministre le 11 février 2016, il est le Président du Conseil Constitutionnel depuis le 8 mars 2016 pour un mandat de neuf ans, donc, jusqu’en mars 2025 !

Une carrière longue, ce ne fut pas, hélas, le cas de Félix Gaillard. D’ailleurs la fonction n’équivalait pas entre les deux républiques. Le pouvoir exécutif, sous la Quatrième République, était aux mains du chef du gouvernement et pas du Président de la République, si bien qu’on peut quand même se risquer à dire que Félix Gaillard fut le plus jeune chef de l’exécutif de toutes les républiques françaises, plus jeune même que le Président actuel Emmanuel Macron qui, né le 21 décembre 1977, a été investi Président de la République le 14 mai 2017 (à l’âge de 39 ans et 4 mois).

Contrairement à ce que disait le député Guillaume Larrivé en pleine campagne présidentielle dans une tribune pour "L’Opinion" du 3 janvier 2017, Emmanuel Macron n’avait rien de comparable avec Félix Gaillard dans la mesure où Félix Gaillard avait, en 1957, déjà plus de treize ans d’expérience politique, ce qui n’était pas le cas d’Emmanuel Macron en 2017 (seulement cinq ans d’expérience politique). Félix Gaillard était un parlementaire avant d’être ministre, tandis qu’Emmanuel Macron n’a jamais été élu autrement qu’à l’Élysée. L’un était un membre plein et entier de la classe politique alors que l’autre se considérait comme un extraterrestre et c’était sur cette extériorité qu’il avait basé sa campagne.

Dans ce record de précocité, je ne parle évidemment que de l’histoire républicaine hors de la période révolutionnaire, car il y a eu aussi Napoléon Ier, né le 15 août 1769, qui fut hissé à la tête de la France le 10 novembre 1799 comme "Premier Consul de la République" (à l’âge de 30 ans), puis Empereur des Français le 18 mai 1804 (à l’âge de 33 ans).

_yartiGaillardFelix02

Né il y a un siècle, Félix Gaillard fut issu d’une famille bourgeoise des actuelles Côtes-d’Armor ayant fait fortune dans le cognac, et déjà implantée localement dans la vie politique : son arrière-grand-père Pierre Gaillard fut maire de Lachaise et conseiller général des Côtes-du-Nord et son grand-père Félix Gaillard Sr fut également conseiller général jusqu’en 1886.

Après son baccalauréat en 1937, Félix Gaillard fut étudiant à Science Po Paris (futur IEP Paris). Avoir 19 ans au début de la Seconde Guerre Mondiale n’était pas forcément un hasard heureux : il fut donc mobilisé jusqu’à la Débâcle en mai-juin 1940 qui a traumatisé ce jeune étudiant, comme beaucoup de sa génération. Au contraire de certains qui sont allés directement rejoindre De Gaulle à Londres, Félix Gaillard était plutôt perméable aux thèses de la Révolution nationale sans pour autant s’engager très fermement du côté de Vichy dont il s’éloigna progressivement au fil des lois antisémites. Il prépara surtout des concours et fut nommé inspecteur des finances en 1942, se retrouvant ainsi avec pour collègue Jacques Chaban-Delmas. Par ce dernier, Félix Gaillard s’engagea alors dans la Résistance et fut chargé de chercher des financements, grâce à son statut de haut fonctionnaire. Il fut nommé au Comité financier de la Résistance en février 1944 aux côtés de Jacques Chaban-Delmas et de Michel Debré.

Pour la petite histoire, il était très engagé dans la Résistance puisque ce fut lui, le jeune homme de 23 ans, qui a accueilli Joseph Laniel à Paris le 27 mai 1943 pour le conduire à la réunion fondatrice du Conseil National de la Résistance (Joseph Laniel avait été contacté par les gaullistes pour faire partie du CNR en tant que représentant de l’Alliance démocratique, un parti d’avant-guerre de centre droit).

En avril 1944, Félix Gaillard fut le bras droit d’Alexandre Parodi, le Délégué général du Gouvernement provisoire de la République française dirigé par De Gaulle. À ce titre, le "Dictionnaire des parlementaires français" de La Documentation française explique qu’il fut « associé à toutes les mesures qui visent à rétablir la République dans ses droits, et l’État dans ses murs ». Le serviteur de l’État pointait déjà. Félix Gaillard participa à la Libération de Paris en août 1944 et ce fut même lui qui a accueilli à la préfecture de police le premier officier de la 2e division blindée a être entré dans Paris (le capitaine Raymond Dronne, et il lui coula un bain dans la baignoire du préfet de police !).

Après la Libération de Paris, Félix Gaillard continua à collaborer avec Alexandre Parodi nommé le 9 décembre 1944 Ministre du Travail, comme directeur de cabinet, puis de décembre 1944 à novembre 1946, il fut le directeur de cabinet de Jean Monnet, au contact duquel Félix Gaillard fut renforcé dans son sentiment proeuropéen (à cette place, il participa à la mise en place du Commissariat au Plan et a mieux compris les grands enjeux internationaux). Jean Monnet était en effet d’abord Commissaire du gouvernement français aux États-Unis, puis Commissaire général au Plan. Comme de nombreux résistants, Félix Gaillard ne voulait plus être seulement un technicien mais un politique. L’onction du suffrage universel était donc une nécessité.

Or, dans une volonté de reprendre le pouvoir, le parti radical, quasi-hégémonique sous la Troisième République mais lourdement sanctionné lors des élections pour les deux Constituantes le 21 octobre 1945 et le 2 juin 1946 (au profit du MRP, de la SFIO et du PCF), voulut attirer de jeunes talents, comme Félix Gaillard qui fut élu député de la Charente le 10 novembre 1946 (il venait d’avoir 27 ans), tête de la liste radicale dans le département, avec 17,2% des voix. Félix Gaillard fut réélu député à tous les scrutins jusqu’à sa mort en 1970 : les 17 juin 1951, 2 janvier 1956, 30 novembre 1958, 25 novembre 1962, 12 mars 1967 et 30 juin 1968.

Spécialiste des finances publiques et également juré de la Haute Cour de justice, Félix Gaillard travailla beaucoup comme député, proposa de nombreux textes, rapports, etc. Dans ses options politiques, comme radical, il prônait une réduction du budget de l’État, moins d’intervention de l’État dans l’économie, une réduction du dirigisme étatique dans les entreprises publiques, etc. C’était notamment le sens de son intervention à la tribune le 1er juillet 1947.

Malgré son très jeune âge, Félix Gaillard s’est rapidement construit une réputation d’homme compétent, brillant, très travailleur, connaissant bien les dossiers. Dès le 26 novembre 1947 (à l’âge de 28 ans !), il fut nommé Sous-Secrétaire d’État aux Affaires économiques auprès du Ministre des Finances René Mayer, devenu son mentor, dans le gouvernement de Robert Schuman. A commencé alors une carrière ministérielle très rapide. Il a participé au Plan Mayer qui avait pour but le retour à l’équilibre budgétaire et le libéralisme économique.

Le gouvernement Schuman renversé le 26 juillet 1946, Félix Gaillard retourna à l’Assemblée Nationale jusqu’aux élections législatives suivantes. Il continua son travail parlementaire avec ardeur et efficacité, considéré parmi les députés les plus actifs. Ce qui ne l’empêcha pas d’être battu par une candidate du RPF aux élections cantonales du 27 mars 1949, dans le canton même dont son grand-père et son arrière-grand-père avaient été les élus au XIXe siècle (il ne fut élu conseiller général de Charente qu’en octobre 1967).



Félix Gaillard fut également membre de l’Assemblée Parlementaire (à l’époque "Assemblée Consultative") du Conseil de l’Europe du 13 août 1949 au 11 décembre 1951, et il ne resta pas inerte dans cette fonction puisqu’il a déposé plusieurs textes, comme cette proposition de résolution du 23 août 1949 (dix jours après sa prise de fonction !), cosignée par Édouard Bonnefous, qui demandait l’audition des ministres de l’économie des différents pays membres du Conseil de l’Europe pour connaître « les mesures que ceux-ci comptent prendre pour assurer une coopération économique efficace de leur nation avec les autres nations européennes tendant rapidement à une union économique complète de l’Europe et des territoires d’outre-mer qui lui sont rattachés ».

Il est intéressant de lire aussi les deux autres propositions de résolution déposées au bureau de l’Assemblée Consultative du Conseil de l’Europe qui montraient l’engagement très européen de Félix Gaillard. Ainsi, toujours en cosignature avec son collègue Édouard Bonnefous, il demanda le 26 août 1949, donc bien avant la fameuse déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950, « une véritable coopération économique européenne ». Il proposa ainsi : « Il convient d’entreprendre sans retard l’étude de la mise en commun des ressources de base de l’Europe avec administration commune par les différents pays d’Europe. » et souhaita « un plan de groupement européen du charbon qui pourrait revendiquer comme bien commun les ressources charbonnières de la Ruhr, auxquelles tous les États d’Europe, y compris l’Allemagne, mais pas l’Allemagne seule, auraient accès » ainsi que « des projets de groupement européen des transports, de l’acier et de l’électricité ». Félix Gaullard et Édouard Bonnefous avaient devancé la future CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier) de quelques mois.

De même, Félix Gaillard a cosigné une proposition de résolution signée le 9 août 1950 par cinquante-sept autres membres de cette instance européenne, dont Édouard Bonnefous, Léopold Sédar Senghor, Maurice Schumann, André Philip, qui rappela : « Un des buts essentiels du Conseil de l’Europe est l’institution d’un autorité politique européenne dotée de fonctions limitées mais de pouvoir réels. ». Et de préciser : « Pour atteindre un tel but, l’Assemblée Consultative demande à tous les États membres du Conseil de l’Europe de conclure sans délai un accord solennel instituant une autorité politique, au moyen de laquelle les États membres décideraient ensemble et à la majorité d’une politique commune en matière de protection des droits de l’homme, de relation extérieures, d’affaires économiques et de sécurité européenne. » Et enfin : « En outre, et dès maintenant, l’Assemblée Consultative encourage les États, qui désirent établir entre eux des liens organiques plus étroits, à signer un Pacte Fédéral, instituant un Parlement démocratiquement élu et un gouvernement responsable devant ce dernier. L’organisation fédérale ainsi créée, inscrite dans le cadre du Conseil de l’Europe, resterait ouverte à tous les États membres qui souhaiteraient plus tard y adhérer. ».

En quelques lignes, on peut ainsi appréhender la clairvoyance et la modernité d’une personnalité comme Félix Gaillard, certes il n’était pas seul (heureusement), mais déjà très engagée, jetant les bases de l’Union Européenne avec plusieurs décennies d’avance (le Parlement Européen fut élu au suffrage universel direct pour la première fois le 7 juin 1979, soit presque trente ans après ce texte de résolution).

Au-delà de ses convictions européennes, Félix Gaillard a toujours soutenu le scrutin majoritaire uninominal à deux tours pour les élections législatives, à l’instar de la plupart de ses amis radicaux, tandis que le scrutin proportionnel plombait la Quatrième République par l’instabilité gouvernementale qu’il provoquait. Ainsi, il a défendu le scrutin majoritaire lors de la réforme électorale en 1951, mais aussi le 2 février 1956, lorsqu’il a déposé une proposition de loi tendant au retour du scrutin majoritaire (deux mois après des élections législatives par scrutin de listes avec apparentements).

Lors des élections législatives du 17 juin 1951, Félix Gaillard fut réélu comme tête de liste des radicaux, sa liste arrivant, avec 18,3% des voix, en troisième position après celle du RPF et des communistes, avant celle de la SFIO. Rapidement, la tendance au centre droit de l’Assemblée Nationale l’a fait rappeler au gouvernement. Il fut nommé Secrétaire d’État auprès de la Présidence du Conseil du 11 août 1951 au 28 juin 1953, dans quatre gouvernements : ceux de René Pleven, Edgar Faure, Antoine Pinay et René Mayer. Au-delà d’être l’intermédiaire entre le chef du gouvernement et les députés, il fut également chargé de la Fonction publique, du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), et fut chargé aussi des Finances du 20 janvier 1952 au 8 janvier 1953 sous Edgar Faure et Antoine Pinay.

_yartiGaillardFelix03

Pendant ces deux années aux responsabilités, Félix Gaillard a beaucoup influencé sur la grandeur de la France. En effet, il a pesé de tout son poids pour faire acquérir la compétence nucléaire par la France, en développant le centre de recherches du CEA sur le Plateau de Saclay. Pour lui, le nucléaire tant civil que militaire était le moyen d’oublier le traumatisme, qu’il avait vécu personnellement, de la Débâcle en 1940, et de se maintenir comme une grande puissance mondiale. Il avait déjà défendu cette idée avant même de retourner au gouvernement.

En juillet 1952, il a donc fait adopter par les députés un plan de programmation de cinq années pour le développement de la filière nucléaire. Il faut bien insister sur l’importance de cette loi en pleine période d’instabilité gouvernementale : pour faire de la recherche sur le nucléaire, il fallait des programmes de financement sur du long terme et cette loi de programmation a permis une stabilité de ces recherches, étonnante stabilité sous la Quatrième République (un des sujets consensuels dans ce Parlement si divisé) et poursuivie par De Gaulle et ses successeurs sous la Cinquième République. Après ses responsabilités ministérielles, Félix Gaillard fut d’ailleurs nommé président de la Commission de coordination de l’énergie atomique. Il a soutenu également le 10 juillet 1956 le projet Euratom, mais mettait en garde pour préserver l’indépendance nationale dans la fabrication des armes nucléaires.

Selon le chimiste Bertrand Goldschmidt (1912-2002), cofondateur du CEA, ancien thésard de Marie Curie et collaborateur d’Enrico Fermi au Projet Manhattan, Félix Gaillard fut en 1951 l’un des deux sauveurs de la filière nucléaire française, le second étant Pierre Guillaumat (1909-1991), administrateur général du CEA de 1951 à 1958 et futur Ministre des Armées : « C’est alors que deux hommes providentiels apparurent dans notre ciel obscurci. ». Jean-Pierre Poirier, médecin et historien des sciences, a raconté dans sa biographie de Marie Curie, "Marie Curie et les conquérants de l’atome : 1898-2006" (éd. Pygmalion, 2011) : « Gaillard est l’ardent avocat de l’énergie nucléaire. Il a rencontré Bertrand Goldschmidt deux ans plus tôt [1949] et l’a accompagné dans une longue visite au fort de Châtillon puis chez Joliot, au Collège de France. Au Parlement, il a déclaré qu’elle était à la fois une nécessité en raison des faibles ressources énergétiques de la France, un facteur de dynamisme pour l’industrie, un élément de prestige et d’influence à l’échelle internationale. ».

Entre 1953 et 1956, Félix Gaillard termina la législature comme député. Il fut un soutien très mitigé au gouvernement de Pierre Mendès France (comme son mentor René Mayer), et le 29 décembre 1954 à la tribune du Palais-Bourbon, il a redit son regret de l’échec de la Communauté européenne de défense (CED), dont il a rendu responsable Pierre Mendès France lui-même. Félix Gaillard voyait dans la CED la garantie de l’arrimage à l’Ouest d’une Allemagne tentée par le neutralisme pour se réunifier. Il a voté pour cette raison contre les Accords de Paris qui autorisaient l’entrée de l’Allemagne fédérale dans l’OTAN. Il a par ailleurs voté contre la confiance à Pierre Mendès France le 4 février 1955 à cause de sa politique en Afrique du Nord, entraînant la chute de l’unique gouvernement du seul homme politique de la Quatrième République qui est resté encore aujourd’hui dans la mémoire collective.

Le 23 février 1955, il a soutenu l’investiture d’Edgar Faure à la tête d’un nouveau gouvernement et a soutenu aussi la loi électorale du 29 novembre 1955 qui proposait un mode de scrutin de liste par apparentements ainsi que la dissolution de l’Assemblée Nationale. Aux élections législatives du 2 janvier 1956, deux camps se faisaient face, et la césure se trouvait à l’intérieur même du camp radical, entre Pierre Mendès France et son Front républicain qui réunissait certains radicaux (dits de gauche) et les socialistes (SFIO), et Edgar Faure, lui aussi radical, qui proposait une coalition de centre droit avec des radicaux qu’on appela après l’Union de la gauche en 1972 "radicaux valoisiens" (expression anachronique en 1956) et les formations de centre droit (CNIP d’Antoine Pinay et Joseph Laniel, MRP, gaullistes dits républicains-sociaux, etc.).

Parmi les adversaires de Félix Gaillard dans la Charente, il y a eu donc la liste du Front républicain, mais aussi, à l’extrême droite, les listes populistes de Pierre Poujade, représentant les petits commerçants (sur lesquelles fut élu Jean-Marie Le Pen). Dans son département, Félix Gaillard a dû faire face à un éparpillement des voix, avec de nombreuses listes dont une de l’UDSR (petit parti d’anciens résistants de René Pleven et François Mitterrand) dans laquelle le propre frère de François Mitterrand était candidat en deuxième position. Il fut néanmoins réélu le 2 janvier 1956 avec 20,4% des voix, mieux qu’en 1951.

En 1956, Félix Gaillard était donc un responsable politique confirmé : ancien résistant, député depuis dix ans, avec de l’expérience ministérielle pendant un peu moins de trois ans, il avait tout pour que cette législature (1956-1961 en principe) fût celle de celui qui allait être un homme d’État, malgré ses seulement 36 ans. Mais pour l’heure, il était dans l’opposition, puisque le Front républicain a gagné les élections, et, dans une ingratitude de l’histoire, René Coty a préféré appeler pour diriger le gouvernement, pas Pierre Mendès France, mais Guy Mollet, secrétaire général de la SFIO, chef du parti le plus important de la majorité. Guy Mollet fut Président du Conseil du 2 février 1956 au 27 mai 1957. Son renversement entraîna le retour au pouvoir de Félix Gaillard que je propose d’évoquer dans un prochain article.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 novembre 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Dictionnaire des parlementaires français (La Documentation française).
Félix Gaillard.
Les radicaux.
Discours de Robert Schuman le 9 mai 1950 au Salon de l’Horloge à Paris (texte intégral).
François Mitterrand.
Joseph Laniel.
Georges Bidault.
Débarquement en Normandie.
Libération de Paris.
Général De Gaulle.
Général Leclerc.
Jean Moulin.
Daniel Cordier.
Le programme du Conseil National de la Résistance (CNR).
Jean Monnet.
Joseph Kessel.
Maurice Druon.
André Malraux.
Maurice Schumann.
Jacques Chaban-Delmas.
Daniel Mayer.
Edmond Michelet.
Alain Savary.
Léon Blum.
Pierre Mendès France.
Édouard Herriot.
Vincent Auriol.
René Coty.
Maurice Faure.
Gaston Defferre.
Edgar Faure.
René Cassin.
Édouard Bonnefous.

_yartiGaillardFelix04



3 réactions


  • Laconique Laconique 4 novembre 2019 11:54

    Merci pour ce premier article sur une personnalité que je ne connaissais pas.


  • phan 4 novembre 2019 20:34
    Pierre Ricordeau, directeur Général de l’ARS Occitanie (Agence régionale de santé) : « Toujours précurseur, le Pr Louis Lareng aura été l’inventeur, il y a plus de 50 ans à Toulouse, de ce qui deviendra le SAMU que nous connaissons partout en France aujourd’hui. Marqué à l’époque par la tragédie des accidents de la route, il aura porté avec persévérance l’idée d’amener l’hôpital hors les murs et le médecin au pied de l’arbre, révolutionnant ainsi l’organisation des soins urgents dans notre pays ».

Réagir