mercredi 23 décembre 2015 - par
François Hollande cherche à écarteler les Républicains
Décidément, François Hollande est loin d’être le balot que les humoristes caricaturent. Les régionales lui ont permis de démontrer une science tactique qui fait que sa défaite est tout sauf certaine en 2017. Il tend un piège absolument redoutable aux Républicains, qui s’y abandonnent.
Machiavel à la manœuvre
La séquence des élections régionales est assez extraordinaire. Passons sur la conclusion de la COP21 la veille du second tour, un argument pas malhabile pour assurer le report des voix écologistes. D’ailleurs, le bilan des élections n’est pas mauvais pour un parti arrivé 3ème au premier tour : 5 régions gagnées contre 7 pour les Républicains. Et encore, la déclaration outrancière de Claude Bartolone lui a peut-être fait perdre l’Ile de France. Mais surtout, en sacrifiant trois régions (deux complètement, une à moitié, du fait du refus du tête de liste de ne pas se présenter au second tour) sur l’autel du combat contre le FN, François Hollande brouille les cartes du jeu politique. Ne s’agit-il pas d’un donné pour un rendu pour les électeurs de droite en vue d’un second tour où il affronterait Marine Le Pen en 2017 ?
Mais surtout, il sème la discorde au sein des Républicains (qui n’en avaient guère besoin), où s’opposent les partisans de la ligne « ni-ni » choisie par Sarkozy, et ceux, comme Juppé ou NKM, qui sont prêts à appeler à voter pour la gauche si elle se retrouve face au FN. D’ailleurs, les deux présidents de région en PACA et au Nord-Pas-de-Calais-Picardie, n’ont pas oublié les voix de gauche qui leur ont permis de défaire largement la famille Le Pen et font assaut de concorde républicaine. Le président de la République en a profité pour aller dans le Nord et voir Xavier Bertrand. Plus fort encore, certains évoquent la possibilité de travailler ensemble pour la lutte contre le chômage. L’idée d’une grande majorité à la Française vient d’avoir son baptême du feu, pour le plus grand déplaisir de Nicolas Sarkozy.
Pile, ils perdent, face, il gagne
Il faut dire que la double stratégie de droitisation de la majorité et d’instrumentalisation outrancière du FN du PS place les Républicains dans une situation délicate. Hollande est malheureusement le digne fils politique de François Mitterrand et il semble tendre un piège auquel la droite pourrait bien ne pas pouvoir échapper. Car, que peut faire Nicolas Sarkozy ? La ligne Juppé (centre-droit modéré et front républicain contre le FN) est-elle viable tant elle semble proche de la ligne gouvernementale ? Comment espérer convaincre les électeurs de voter pour l’opposition de droite en tenant un discours si proche de Hollande ? En dépassant parfois la droite par sa droite sur les sujets économiques, la majorité actuelle réduit l’espace politique aux dits Républicains s’ils souhaitent se différencier du pouvoir.
D’où la droitisation de la ligne économique qui tentent les Républicains, mais, avec un PS qui fait ce que Sarkozy avait promis mais pas fait (sur le travail du dimanche), cela est-il crédible ? D’où l’idée de durcir le discours sur l’immigration, la sécurité et l’identité, pour se différencier du PS et tenter de ramener certains électeurs du FN dans l’escarcelle électorale des Républicains. Mais cette stratégie est délicate car elle pourrait alors faire fuir le centre vers un PS guère différent aujourd’hui et il est tout sauf évident que les électeurs de la famille Le Pen goberont les gesticulations d’un ancien président qui a déjà beaucoup bougé et beaucoup parlé, mais pas fait grand chose de sérieux pendant les dix années où il était en fonction. Du coup, les Républicains pourraient être face à deux choix perdants.
Bien sûr, son bilan est calamiteux, mais la toile tissée par Hollande depuis son élection, n’en demeure pas moins habile. En se droitisant et en hystérisant le débat sur le FN, il pourrait bien avoir placé ses opposants dans une impasse, comme commencent à le montrer certains sondages.