Le diable s’habille en TAFTA
Sorti par la porte sous le nom de « AMI », il revient par la fenêtre sous celui de TAFTA (ou TTIP ou PTCI) mais quels que soient les initiales du projet, c’est dans la plus parfaite opacité que Commission Européenne et USA sont en train de négocier.
Le diable s’habillerait-il en TAFTA ?
Telle est la question que l’on est en droit de se poser tant l’accord transatlantique en cours de négociation entre l’Europe et les Etats-Unis suscite interrogations et inquiétudes.
Négocié depuis le mois de juillet 2013, cet accord n’est pas un simple accord commercial mais il a bel et bien pour finalité la convergence réglementaire, n’en déplaise au Commissaire Karel de Gucht ou à Barack Obama qui ont déclaré la main sur le cœur qu’ils n’accepteraient pas d’affaiblir la réglementation qui protège les consommateurs européens, avec le risque est réel d’un nivellement par le bas de nombreux droits acquis par les consommateurs européens (santé, sécurité des produits, alimentation, protection des données…). lien
Ce « typhon qui nous menace », selon Lori M. Wallach, dans un article paru dans les colonnes du journal « Le Monde » en novembre 2013, permettrait à toute multinationale de porter plainte, par le biais d’une instance juridique privée, contre un état européen au motif qu’une mesure règlementaire porterait atteinte à ses profits, précisant : « négocié en secret, ce projet ardemment soutenu par les multinationales leur permettrait d’attaquer en justice tout état qui ne se plierait pas aux normes du libéralisme ». lien
TAFTA pour Trans-Atlantique Free Trade Agreement, ou TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) ou PTCI (partenariat transatlantique de commerce et d’investissement), c’est bonnet blanc, blanc bonnet, sous des noms différents.
C’est entre 1995 et 1997 que les USA et les 29 états membres de l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique) avaient déjà tenté d’imposer un traité, mais divulgué in extrémis, la vague de protestation européenne obligea les promoteurs du projet à le remettre dans un tiroir. lien
Il y a encore un an, il n’y avait pas grand monde à s’inquiéter des tractations qui s’étaient mises en place entre les USA et la commission européenne destinées à mettre au point ce nouveau projet de commerce multilatéral, destiné à « promouvoir les principe de l’économie de marché, rejetant le protectionnisme, afin de renforcer les économies nationales à un système d’accord multilatéral ».
C’est d’abord l’Allemagne qui a tiré le signal d’alarme, provoquant un vaste débat, lequel a donné naissance à un appel ANTI-TTIP de l’organisation Campact, lequel a déjà récolté plus d’un demi-million d’adhésions. lien
Dans cette coalition on trouve des organisations environnementales, des anti-gaz de schiste, anti OGM, ATTAC…
Quel est le vrai problème dénoncé par ces associations ?
Il est d’ordre juridique, car si ce traité était signé, il ne serait plus possible de s’opposer à ce que l’Europe conteste encore aujourd’hui, tels que « bœufs aux hormones, poulets au chlore, gaz de schiste, etc », car dès l’instant ou les Etats Unis acceptent ce genre de pratique, si un état européen s’opposait à ce genre de produits, il aurait à payer de lourdes sanctions financières.
En effet, par le truchement d’une structure d’arbitrage privée, dont les délibérations sont secrètes, les décisions de ces « juges privés » seraient appliquées sans que nos juridictions officielles puissent avoir leur mot à dire. lien
Cet organisme existe déjà à l’OMC sous le nom de « organe de règlements des différends », et celui qui exercerait son pouvoir si l’accord TAFTA était finalement approuvé, cette « juridiction privée » aurait la possibilité de condamner les états qui ne se soumettraient pas aux décisions prises.
Fort heureusement, suite à ce qui s’est appelé « la bataille de Seattle », le sommet de l’OMC avait tourné en eau de boudin, donnant la victoire aux ONG. lien
Il faut se souvenir que lors de l’interdiction du bœuf aux hormones de croissance en Europe, l’organe de règlement des différends a condamné l’Europe à payer des centaines de millions de dollars d’amende et rappeler que les critères de santé publique n’entrent pas en ligne de compte dans le cahier des charges de cet organisme.
On imagine sans peine ce qui se passerait si TAFTA était finalement signé : il ne serait plus possible pour un pays de s’opposer par exemple au gaz de schiste, aux OGM, ou d’autres pratiques largement contestées dans de nombreux pays européens, alors qu’aux USA leur constitution donne tous les droits aux multinationales qui voient déjà par cet accord, s’il était signé, l’occasion de se débarrasser une fois pour toutes ce qu’ils considèrent comme d’encombrantes régulations.
Pour découvrir le contenu du mandat de négociation menée entre l’Union Européenne et les Etats Unis d’Amérique, c’est sur ce lien.
Remercions ici Raoul Marc Jennar qui a commenté avec lucidité sur le document proposé les différents articles de l’accord.
Pour bien comprendre la complexité de la situation, il faut rappeler les nombreuses divergences qu’il existe entre l’UE et les USA : chez nos voisins outre-Atlantique, le secteur privé est privilégié au secteur public, la peine de mort et la vente des armes sont des pratiques légales, les USA ne sont pas liés par les conventions internationales sur les droits de l’Enfant, sur le respect de la biodiversité, sur le changement climatique, sur la cour pénale internationale…
Quid de ce "pays de la liberté » que sont les Etats Unis dans lequel les multiples atteintes aux droits de l’homme sont dénoncées depuis longtemps ?
La première étape de ce traité a déjà été franchie puisque le conseil européen des affaires étrangères a validé en juin 2013 le TABD (dialogue économique transatlantique). lien
On ne peut que s’étonner qu’à 2 semaines du scrutin européen, le débat sur ce thème soit largement occulté.
Danièle Favari, juriste de l’environnement, avait déjà résumé dans un ouvrage récent les enjeux et les dangers que représente cet accord de libre échange. lien
Sur l’antenne de France Culture, le 29 mars dernier, elle s’étonnait déjà de cette discrétion médiatique. lien
Comme elle l’écrit dans une interview : « il est nécessaire de s’interroger dès maintenant sur ses conséquences sur nos préférences collectives et nos principes démocratiques fondamentaux, et d’interpeller nos gouvernants (…) en parallèle, des barrières douanières et des normes nivelées vers le bas vont certainement concerner les secteurs agro-alimentaires et culturels si protégés dans l’Union Européenne. Sont à craindre, notamment, l’arrivée dans nos assiettes des OGM, du lait et bœuf aux hormones, poulet chloré, sans compter l’exploitation du gaz de schiste ». lien
En tout cas, son petit livre est indispensable pour bien comprendre les enjeux de cet accord dans lequel une armée de lobbyistes représentant les intérêts des différentes entreprises multinationale, voire impériales, est déjà largement à l’ouvrage dans les coulisses du futur traité.
Elle a aussi lancé une pétition. Lien
Pour l’instant, les négociations sont suspendues, non pas au scrutin du 25 mai, mais à l’étude d’un mécanisme d’arbitrage, via une consultation publique, lancée par Karel de Gucht, commissaire européen du commerce, et elles reprendront discrètement à Washington dès le 19 mai sans qu’on en sache réellement le contenu. lien
C’est l’occasion de rappeler la menace larvée qu’avait proféré l’ancien président de la république qui évoquait déjà en 2009 l’impossibilité d’échapper à une future gouvernance mondiale. lien
Il répondait en écho à David Rockefeller qui déclarait déjà « nous sommes à la veille d’une transformation globale. Tout ce dont nous avons besoin est la bonne crise majeure, et les nations vont accepter le Nouvel Ordre Mondial ». lien
L’occasion peut-être de rappeler que nous étions déjà prévenus ne serait-ce qu’en décryptant attentivement les billets de 1$, billet sur lequel apparait clairement le N.O.M. (Nouvel Ordre Mondial), lequel confirme le plan caché, devant aboutir en 2014 pour faire triompher le système financier américain. lien
Ce plan est destiné à provoquer l’effondrement du dollar (et de l’euro par la même occasion) afin de faire naitre dans la douleur un nouveau paradigme par le biais, entre autres, d’un changement du système monétaire. lien
Ce plan diabolique va-t-il réussir ?
L’avenir nous le dira.
En tout cas, François Hollande craint, lors des élections européennes, de recevoir une claque qui pourrait être plus violente que celle des municipales, les électeurs voulant, soit en s’abstenant, soit en votant ailleurs, lui signifier leur désaccord quand à la politique menée, aux antipodes des promesses qu’il avait fait.
Comme dit mon vieil ami africain : « qui crache en l’air doit s’attendre à recevoir des crachats sur la figure ».
L’image illustrant l’article vient de « piaf-95.webnode.fr »
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
Articles anciens
Sur ce lien, le rapport final du 11 février 2013,
A voir « le plus grand complot de tous ». (NOM)