lundi 16 avril 2018 - par Fergus

Notre-Dame-des-Landes : la faute politique de Macron

 

Photo Sipa Press {JPEG}

Le mercredi 17 janvier, Édouard Philippe annonçait, en porte-parole du président de la République, l’abandon définitif du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Une décision moins motivée par des considérations environnementales que par la crainte de désordres persistants sur le site, potentiellement vecteurs de victimes, et plus encore porteurs d’une dégradation de l’image d’autorité de l’exécutif. Une « faute » pour nombre d’observateurs...

Des observateurs en l’occurrence lucides qui n’ont pas manqué de souligner que ce peu glorieux renoncement ne changerait rien à la résolution des zadistes, bien déterminés à rester dans la place, qu’il y ait ou non construction de l’aéroport. Et de fait, la suite des évènements a donné raison à ces observateurs, comme l’ont montré les violents affrontements dans le bocage de Notre-Dame-des-Landes la semaine passée et sous les remparts du château de Nantes le samedi 14 avril. Des désordres qui ne sont pas prêts de cesser, eu égard à la combattivité des plus radicaux des zadistes, désormais encadrés par des éléments radicaux proches de ces « black blocks » qui interviennent partout où peuvent être mis en difficulté les pouvoirs publics.

On peut penser ce que l’on veut de la pertinence (ou non) du projet d’aéroport, et les débats contradictoires n’ont pas manqué durant ces dernières années, principalement alimentés par des arguments économiques et environnementaux. Mais il est un fait que ce projet, très largement porté par les élus du Grand ouest – tous bords confondus – et validé à une nette majorité (55,17 %) par les habitants de Loire-Atlantique lors de la consultation du dimanche 26 juin 2016, avait été soutenu à différentes reprises, et notamment lors de son passage dans « L’émission politique » du jeudi 6 avril 2017 par Emmanuel Macron, alors candidat à la présidence de la République.

Macron a donc « mangé son chapeau » en faisant acter le renoncement au projet d’aéroport par son Premier ministre. Ce faisant, il bafouait non seulement ses prises de position antérieures, mais jetait aux orties les avis et l’implication de tous ces élus du Grand ouest qui se battaient depuis des années pour doter la région d’un outil comparable à ceux de nombreuses métropoles régionales européennes en remplacement de Nantes-Atlantique, voué à une inéluctable saturation. De même, Macron bafouait-il la volonté majoritaire de ceux qui s’étaient exprimés en grand nombre dans les urnes, sans oublier les décisions de Justice constantes qui, en 189 occasions, avaient toujours donné raison aux tenants du futur aéroport. Élus, habitants, magistrats, tous ont de facto été trahis par le revirement de Macron et gardent sans doute aux lèvres un goût amer.

« Tout ça pour ça  ! », serait-on tenté de dire. Car il ne faut pas se leurrer : si Macron a renié sa propre parole, c’est – en « politicien avisé », diront les uns ; en « opportuniste cynique » diront les autres – après avoir évalué les avantages et les risques encourus. Et force est de reconnaître que le stratège élyséen s’est complètement « planté » dans ce dossier. Macron a fait le pari d’une évacuation relativement facile après l’annonce du renoncement, quitte à susciter pas mal de ressentiment ici et là. Au final, il a la colère des partisans de l’aéroport déboutés et doit – en même temps ! – faire face à Notre-Dame-des-Landes et Nantes à des zadistes jusqu’au-boutistes qui n’entendent pas céder un pouce de terrain alors même que la cause de leur « combat » a disparu.

Et ce n’est pas l’irréfléchie destruction par les forces de l’ordre de la « ferme des 100 noms » sur le site de NDDL qui va apaiser les esprits dans la mesure où ceux qui exploitaient cet espace étaient, semble-t-il, porteurs d’un projet agricole ni plus ni moins élaboré que d’autres jusque-là épargnés par les gendarmes mobiles. En bonne logique, et malgré la présence sur place d’éléments agitateurs, ce projet aurait dû, comme les autres, bénéficier des mesures de mise à l’étude d’une éventuelle régularisation dans le cadre des dispositions du Code rural. On peut donc parler de « bourde » de la part du commandement de l’opération d’évacuation, et en cela les satisfecit exprimés par Gérard Collomb tombent à plat, c’est le moins que l’on puisse dire.

Que va-t-il se passer maintenant ? Les néo-ruraux installés dans la ZAD vont-ils officialiser leurs demandes de régularisation dans le délai imparti par la préfète de Loire-Atlantique ? Et, si oui, accepteront-ils les décisions administratives qui seront prises après instruction des dossiers et qui, dans les cas positifs, déboucheront, conformément aux dispositions de la loi, sur des signatures de contrats de fermage passés avec les collectivités propriétaires des lieux ? Que feront en outre ceux qui seront déboutés et se verront signifier des arrêtés d’expulsion ? Que feront surtout les agitateurs infiltrés qui n’ont, à l’évidence, rien à faire des projets d’expérimentation agricole alternative et pour lesquels les trois lettres Z.A.D. signifient moins « Zone À Défendre » que « Zone d’Autorité à Détruire » ?

Autant de questions qui, dans le contexte actuel, et compte tenu du climat de rejet de toute initiative légale qui prévaut à Notre-Dame-des-Landes, laissent augurer des lendemains très difficiles et, malheureusement, de prochains épisodes de violence dont personne ne peut présager les conséquences. Nul doute qu’en cette mi-avril Macron doit amèrement regretter cette décision de janvier qui apparait de plus en plus comme une faute politique majeure. N’est pas Machiavel qui veut ! Pas plus que Jupiter ! 




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