mercredi 12 décembre 2018 - par Laconique

Anthropologie du Nouveau Testament

« Ceux qui considèrent la Bible comme un recueil de contes édifiants n’ont rien compris, me dit-il. C’est pourtant l’opinion la plus répandue. Or la Bible est tout autre chose. La Bible est un livre critique, c’est là son essence fondamentale. Ce n’est pas une succession d’histoires pieuses inventées ex nihilo. C’est une réaction, radicale et corrosive, à une réalité jugée insupportable. Cela vaut pour les deux Testaments :
 
- L’Ancien Testament est une dénonciation de l’illusion du pouvoir absolu, de la puissance, qui avait atteint des degrés inimaginables à cette époque. Dieu dit : « Vous pouvez bâtir des pyramides, assembler des empires dévastateurs en Assyrie, à Babylone, en Perse, moi, je renverserai tout ça, il n’en restera rien, et j’exalterai le peuple le plus insignifiant, le plus méprisé de la terre, sans raison, sans justification, tout simplement parce que je l’ai décidé. Toutes vos armées, toutes vos richesses, toutes vos pompes, tout cela n’est rien, ce n’est que du vent, et je vais vous le prouver. » Voilà le message de l’Ancien Testament. Il ne s’agit pas de morale, ou de chimères, ou de consolations. Il s’agit d’une dénonciation lucide et sans concession d’un mirage politico-social qui aveuglait alors tous les esprits.
 
- Le Nouveau Testament, lui, a deux cibles :
 
D’une part, il s’agit d’une réaction dialectique contre le légalisme juif. Pour parler en termes hégeliens, c’est la négation de la négation. D’où la phrase du Christ : « Le sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat » (Marc, 2, 27).
 
D’autre part, il s’agit de prendre en compte la nouvelle anthropologie issue de l’avènement de l’Empire romain. Jusqu’alors, l’individu ne comptait pas, il était totalement dépendant du sort de la cité, et pouvait être exterminé avec celle-ci en cas de défaite militaire. À partir du premier siècle de notre ère, les choses changent. La guerre disparaît, on meurt désormais de vieillesse, le bonheur ou le malheur deviennent des perspectives individuelles. Dès lors, livré à lui-même et à ses penchants, délivré de la peur, c’est un autre fléau qui s’abat sur l’individu : la possession. Ici, nul besoin d’effort d’imagination, il suffit de se promener dans les rues pour comprendre de quoi il s’agit, la situation du monde romain est encore la nôtre : chacun est possédé par son démon particulier, qu’il se nomme Avidité, Narcissisme, Orgueil, Nihilisme, etc. C’est de la nature même de l’homme qu’il s’agit : l’homme est désormais un champ d’action ouvert à toutes les menées des démons. Et le Christ, si l’on y regarde attentivement, ne fait pas autre chose que de guérir des possédés, encore et encore. Il n’a rien à offrir à ceux qui s’adressent à lui, il ne les renvoie pas euphoriques et comblés (ce qui est justement l’œuvre des démons). Il les renvoie libres : « Va, tu es guéri, ne pèche plus. » Telle est donc la promesse du Nouveau Testament en ce qui concerne cette vie : la liberté, et rien de plus : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jean, 8, 31). « C’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés » (Galates, 5, 1). D’où la déception de ceux qui recherchent dans la religion la même chose que ce que leur propose le monde : des sensations fortes, des étourdissements. D’où aussi le caractère toujours précaire de l’œuvre de Dieu, et la parabole terrible de l’Évangile sur l’esprit impur qui revient sept fois plus puissant après avoir été chassé une première fois (Matthieu, 12, 43).
 
C’est là l’anthropologie du Nouveau Testament ; seul le christianisme porte ce message sur l’homme, et ce message est plus actuel que jamais.
 
Si tu suis le Christ, tu ne seras pas transporté instantanément au septième ciel, tu ne kifferas pas. Tu ne ressentiras rien. Mais tu seras immunisé à l’égard de tous les démons du monde moderne. Tu verras clair, tandis que tous autour de toi tâtonnerons dans les ténèbres. »
 
J’aimerais retranscrire ici la fin de son discours, mais le reste s’est perdu dans les brumes de ma mémoire, car c’est alors que je reçus un message de Jessica sur mon portable. 


12 réactions


  • Étirév 12 décembre 2018 14:47

    L’AncienTestament, dans sa forme altérée, c’est le livre de la justification des prêtres dans les luttes de sexes.

    Le Nouveau Testament, qui a imité l’Ancien, n’en a été qu’un pâle reflet, il est sans force. Et, à la lueur de cette mauvaise copie, la morale dite chrétienne semble encore belle à des gens naïfs qui ne savent pas discerner les sentiments vrais des sentiments faux, qui ne comprennent pas dans quel repli de l’âme est la source de ce trésor de vérité dont les épaves leur semblent si admirables !

    Rappelons ceci ou, simplement informons à propos des auteurs des Grands Livres sacrés de l’antiquité :

    La tradition antique personnifia toujours la science et les lettres par neuf femmes qui furent les neuf grandes Révélatrices. Les sociétés secrètes, qui continuent les Mystères antiques, ont gardé fidèlement le souvenir de ces grandes Déesses qu’elles symbolisent par neuf sœurs.

    Quelles étaient en réalité ces neuf Déesses ?

    Les voici  : 

    1- TOTH en Egypte, auteure des 42 livres sacrés.

    2- SARASVATI aux Indes, auteure du Véda.

    3- YAO en Chine, auteure des King.

    4- La VOLUSPA chez les Celtes, auteure de l’Edda.

    5- DERCÉTO, surnommée ISTAR ou ASTARTHÉ, en Phénicie, auteure de la Cosmogonie Phénicienne.

    6- ARDUI-ANAÏTA, surnommée ARIANE ou ARIADNE, auteure de l’Avesta en Perse.

    7- KRISHNA aux Indes, auteure de la Bhagavad Gitâ.

    8- HEMŒRA en Grèce, auteure des livres attribués à Homère.

    9- MYRIAM HATHOR en Egypte, auteure du Sépher qui servit à faire le premier livre du Pentateuque, la Genèse biblique.


  • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 12 décembre 2018 15:16

    Seule l’éducation permettrait de guérir l’humain des sept péchés capitaux qui constitue la peste de toutes les civilisation. Mais ne rêvons pas trop. Entre la Vénus Astarté (ou le désir sexuel matériel-sensoriel-dévorant) et la Vénus-Aphrodite, intégrant, la tendresse, la sublimation, la créativité, il y a un fameux chemin à parcourir. 


  • Sozenz 12 décembre 2018 15:32

    bravo !

    simple , clair , ce qu’ il faut retenir est là .

    un grand merci pour votre article .

    il tombe à point.pile au bon moment . ;

     ;


  •  C BARRATIER C BARRATIER 12 décembre 2018 20:18

    Agoravox est un bien meilleur lieu d’échanges critiques que la bible, l’encyclopédie de Diderot était déjà meilleure en lucidité et démonstrations. La bible reste un vestige archéologique


  • soi même 12 décembre 2018 20:39

    @ Laconique : ( La Bible est un livre critique, c’est là son essence fondamentale. Ce n’est pas une succession d’histoires pieuses inventées ex nihilo. C’est une réaction, radicale et corrosive, à une réalité jugée insupportable. Cela vaut pour les deux Testaments ) très personnel votre avis , êtes vous sur de vos sources ?

    Je croie plus tôt que vous n’avez toujours pas compris le véritable sens de la Bible de l’Ancien et du nouveau Testament, je vous en veux , c’est notre époque qui en est responsable.


  • eric 12 décembre 2018 22:32

    Des hommes ont ressentis que leur existence n’était pas vaine, qu’un sens leur était offert, et ont tenté de rendre compte, avec leurs moyens humains et contextualisé, de cette expérience, de cette révélation.

    Révélation est un mot relativement moderne qui remonte au 12 ème siècle, mais ce n’est pas grave car il veut dire dévoiler, ce qui est le sens du mot Apocalypse.

    Il y a des textes apocalyptiques dans l’ancien et le nouveau testament. La meilleure approche possible de la bible et de ce qu’elle dévoile est sans doute pour un non croyant celle de René Girard. C’est une hypothèse scientifique d’interprétation qui pour le moment, n’a pas rencontré, à ma connaissance, de réelle contradiction scientifique.Elle montre qu’à date, la bible explique nos autre productions culturelles ( marxisme, freudisme, libéralisme, islamisme, que sais je encore etc.. ; mais que le contraire n’est pas vrai. En cela et elle est pour tout honnête homme une source indispensable pour essayer de comprendre ce qui l’entoure.

    C’est encore plus vrai pour des occidentaux puisque jusqu’à il y a peu, l’essentiel de nos productions culturelles en étaient issu ( architecture, cuisine, littérature, musique, peinture langage. Encore aujourd’hui la méconnaissance de la Bible interdit de comprendre des tas de stéréotypes culturels qui sont les nôtres.

    Ainsi, le parti pris d’une égalité entre les hommes est un préjugé parfaitement biblique et néo testamentaire, révoqué en doute par à peu prêt toutes les autres cultures. Encore aujourd’hui, un écolo, qui devrait considérer qu’il doit y avoir des différences entre les hommes, qu’il faut préserver la bio diversité en évitant trop de mélanges désordonnés, ou en les organisant, que le principal mécanisme écologique est et doit être, d’éliminer les plus faibles, les plus pauvres, les moins talentueux, les moins aptes, n’osent pas le dire à haute voix.

    Aller plus loin serait parler de foi, ce qui passe par une rencontre personnelle avec un être humain, notre seigneur jésus christ. Si on peut s’en approcher à l’aide de témoignages de prochains, cela ne se vend pas encore en super marché.


  • Bernard Dugué Bernard Dugué 13 décembre 2018 11:30

    La Bible, autant que Gilgamesh, Platon, Homère, les Upanishad, l’Avesta, reste un texte crypté contenant des enseignements pour l’homme. Ces livres sont bien plus éclairants que nos piètres penseurs français, de Diderot à Derrida et Deleuze


  • Attila Attila 13 décembre 2018 15:31

    Merci pour cette perspective éclairante qui remet à leur place les médiocres qui considèrent la Bible comme un recueil de contes édifiants et n’ont rien compris.

    Mme Danièle Hervieux-Léger, sociologue des religions avait écrit : « Les religions sont un fait de civilisation »

    .


  • JPCiron JPCiron 14 décembre 2018 21:10

    Il y a tant de manières de lire des textes rédigés sur un arc temporel couvrant tant de siècles, par une foule de gens différents, depuis tant de contrées distantes !


    On peut leur faire dire ce que l’on veut, et aussi leurs contraires.


    A mon sens, c’est d’ailleurs là leur richesse et leur valeur fondamentale. Car cela nous invite à l’humilité, tandis que nous cherchons à empoigner l’impalpable, à définir le mystérieux, à réduire l’infini à notre nombril.


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