vendredi 15 mars - par Mervis Nocteau

Humilité et fierté dans les communautés polythéistes et plus largement païennes, mais aussi dans le monde occidental

Dans cet article, nous traiterons de choses démentielles, en ce sens qu'elles dépassent de beaucoup le quotidien, et qu'il faut peut-être en prendre la mesure, si possible, pour apprécier sa teneur. « Tout » part d'un constat au sein de la, ou plutôt des, communautés polythéistes, plus largement païennes, qui s'expriment online, mais qui existent aussi IRL (in real life, dans la vie réelle) – les unes recoupant parfois les autres, sans nécessité, et réciproquement. Ce constat, c'est l'observation des valeurs à l'oeuvre, prises dans une dialectique de l'humilité et de la fierté.

Mais d'emblée, il faut dire que cette dialectique ne concerne pas que les communautés évoquées : les communautés évoquées en sont, en quelque sorte, un genre de baromètre. En effet, ces communautés, en tant qu'elles se placent doublement « à faux » par rapport à l'héritage monothéiste et par rapport au devenir-laïc de cet héritage, présentent l'avantage d'en être des réceptacles originaux.

Ainsi, tout comme en médecine les phénomènes originaux permettent de comprendre rétroactivement les phénomènes normaux, ces communautés permettent de comprendre rétroactivement la société normale – si seulement elle existe.

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Les pièges de l'humilité

Les pièges de l'humilité ? Quiconque un peu sincère en sa démarche, mais d'ailleurs aussi hypocrite à jouer les bonnes mœurs, demandera ou feindra de demander, comment est-il possible d'entamer ainsi par l'expression de pièges de l'humilité. Le monothéiste, naturellement, est déjà en train d'y sentir « une ruse du Malin », toutefois même le polythéiste – et plus largement le païen, ou encore le New Ager – peut se retrouver gêné devant cette expression de pièges de l'humilité, à se préfigurer un mauvais esprit. Et, « pire » encore : l'humilité peut sembler tout sauf piégeuse : même à un « expérimental pur » (c'est-à-dire quelqu'un qui ne jurerait que par l'expérimentation sonnante et trébuchante).

Je parle de cet « expérimental pur », avant tout pour lui demander, au passage (avec tous les religieux et autres spirituels d'ailleurs) si « l'expérience religieuse » (pour personnelle et culturelle qu'elle soit) n'en est pas moins de l'ordre, justement, de l'expérience ? Et vraie comme telle : expérimentée, vécue ?... à supposer que le religieux voire le spirituel soient faux, leur fausseté n'est-elle pas néanmoins - - - une expérience, vraie comme telle ? Et cette vérité, pour biochimique qu'on la fera, n'en reste-t-elle pas moins - - - une vérité ? La vérité de « l'expérimental pur » n'est-elle pas, elle aussi, biochimique ?

Mais revenons-en à l'humilité et ses pièges.

L'humilité, c'est étymologiquement la qualité de l'humus, c'est-à-dire du sol, de la terre. Est dit humble, la personne qui, dans sa démarche, resterait (excusez les expressions) terre-à-terre, sur le plancher des vaches, au raz-des-pâquerettes. Vraiment, et c'est bizarre, mais il faut bien observer que l'humilité consiste à s'atterrer, voire se terrasser, et c'est d'ailleurs bien pour cela, que les monothéistes n'arrêtent pas de parler de « trembler devant Dieu » à ce sujet. Toutefois, on songe moins à quelqu'un de « bien bâti » voire « à l'esprit étroit » à propos de l'humilité.

Car l'humble, c'est toujours la personne qui se fait plus basse que moi, ou bien tu me diras humble, si je me fais plus bas que toi. Il y a là des petits jeux qui peuvent être très, très bas, jusqu'aux coups bas, en vérité. Et, quand l'un et l'autre « se sont couchés » jusqu'à s'écraser autant que possible, que reste-t-il ?... Il reste à se faire plus bas que terre, en-dessous de tout, ce qui est tout de même curieux et (pour être tout à fait franc) laisse à désirer...

On rétorquerait que cette argumentation des pièges de l'humilité serait basée uniquement sur des jeux de mots, de l'étymologie aux associations d'idées ? Je voudrais, s'il ne m'avait pas été donné d'expérimenter tout purement l'humilité à l'oeuvre, à travers divers mouvements dans lesquels j'ai été impliqué par le passé, bon gré mal gré : monothéistes, gauchistes et new age notamment.

Les mêmes phénomènes, évidemment, sont à l'oeuvre parmi les polythéistes contemporains, et plus largement les païens. Et bien sûr parmi les droitistes : les gauchistes se voulant tous plus égalitaires les uns que les autres, jusqu'à s'en faire gloire et devenir absolutistes, et les droitistes se voulant tous plus « individualitaires » les uns que les autres, c'est-à-dire économiquement et juridiquement laxistes.

Tout le monde prétend libérer tout le monde à travers l'humilité. Vivre et laisser vivre : une maxime humble, à bon compte, pour notre temps. Enfin c'est du même ordre que la charité.

Or surtout, ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'au fond égalité et individualité sont des notions nécessaires l'une à l'autre, sur une base monothéiste : chaque individu égal de chaque individu, que ce soit devant le Dieu exclusif ou – hérité par réflexe – à l'égard de la société. Le sociologue Pierre Bourdieu disait là : « Dieu c'est la société ».

 

Les pièges de la fierté

Ah là c'est rassurant, tout le monde est d'accord pour dire que la fierté peut être piégeuse, entre orgueil et arrogance, il y en a pour toutes les nuances de vaniteux, de suffisant, de prétentieux, de hautain, de présomptueux, d'altier, etc.

« Naturellement », celui qui est tombé dans un voire plusieurs pièges de la fierté, c'est toujours toi, là, en face de moi, toi qui n'est pas assez humble à mon goût – c'est-à-dire pas assez bas, ou du moins pas assez nivelé.
« Naturellement », si tu sembles (ne serait-ce que sembler, même pas être)... si tu sembles plus haut, plus élevé, plus distingué, meilleur en quelque façon, gare à toi ! Tu mérites que l'on ne te reconnaisse aucun mérite, et tu mérites que l'on te rappelle au « devoir d'humilité » ! C'est l'humilité-même qui inspire le monde à t'humilier, tu l'as mérité !

Hem. Bon. Kof-kof. Pardon. Hum... Nous voyons bien qu'un tel laïus est lui-même victime d'un ou de plusieurs pièges de la fierté, et qu'en conséquence il existe une fierté méritée, puisque basée sur le mérite. Or, qu'est-ce que le mérite ? Eh bien, il n'y a pas de mérite en soi, par contre il y a des mérites relatifs à des opportunités saisies, des compétences entraînées, des connaissances approfondies, des beautés réalisées et des objectifs atteints.


Hélas certes, souvent les gens confondent chance, hasard, bonne et mauvaise fortune avec mérite. Et néanmoins, quand on a une chance immédiate dans la vie, la honte serait de ne pas l'exploiter pour aller au-delà, c'est-à-dire vers des mérites.

M'enfin voilà : il faut bien observer que la lutte contre la fierté est bien plus développée que le soupçon devant l'humilité dans nos contrées, et c'est tout à fait normal puisque nous héritons, bon an mal an, d'un passif monothéiste (d'ailleurs toujours actif dans le monde et parmi nous).
Ce n'est pas parce que vous vous réclamez du « paganisme » que ça change automatiquement les choses. Où le plus satyrique (oui, satyrique) correspond à cette espèce de fierté humiliée ou humiliation fière, qui se présente comme une force des opprimés : on nous rejoue littéralement le Christ, là.
(C'est pitié, d'une pitié supérieure – nietzschéenne. Entende qui peut...)

Enfin, ces derniers temps s'est développée « une fierté du troisième type », qui fait de certaines caractéristiques identitaires personnelles un mérite en soi, jusqu'à faire de la diversité un mérite en soi : c'est ubuesque. Et, au contraire, qui fait de certaines caractéristiques identitaires collectives une autre espèce de mérite en soi : là c'est dramatique, puisque l'identité collective se diversifie toujours.

Et tenez-vous bien : les revendications collectives sont autant de gauche (manifestations idéologiquement identifiées, déployant leur culture de masse) que de droite (manifestations identitairement idéologiques, affirmant leur masse de culture) ; de même, les revendications personnelles sont autant de gauche (sexuelles, notamment) que de droite (« successuelles », notamment).

 

L'humilité et la fierté dans l'impasse

Le tout n'est pas d'être humble ou fier, mais modeste. Du latin modestia, depuis modus, mesuré. Les Hellènes le savaient bien, qui cherchaient à éviter l'excès, dans une belle harmonie de leur créativité et de leur intellectualité.

Mais prenez le Hávamál germano-scandinave : pas de doute, c'est la même démarche : « Les rois doivent se taire et observer / ce que l'on dit, car c'est ainsi qu'il doit être ; / s'ils entendent une chose qui ne leur plaît pas, / qu'ils se retiennent, car ils auront une grande récompense. » Or, il n'est pas du tout ici question d'humilité ni de fierté : il est question de mesure. Car manifestement, un roi est un roi : il est au-dessus du commun, et le dire humble est une erreur de traitement. S'il est fier, c'est aussi trop facile pour lui.

Ni humble, ni fier : il faut être modeste.

Où la fausse modestie possible n'est pas un contre-argument, car l'humilité et la fierté peuvent, elles aussi, être feintes. Toutefois, à la différence de la fausse modestie, l'humilité et la fierté feintes n'ont aucun effet propre à l'humilité ni à la fierté : l'humilité et la fierté feintes rendent malheureux, au fond. La fausse modestie ne rend pas plus heureux, mais elle ne rend pas malheureux et, surtout, elle a l'effet social de la modestie. Il faut voir les choses sans jugement de moralité monothéiste.

Néanmoins, si la question de la fausse modestie vous taraude, rappelez-vous du dicton : « chasse le naturel, il revient au galop ». On n'est jamais longtemps faux dans la modestie, et d'ailleurs si l'expression de fausse modestie est si connue contrairement à d'autres simulacres, c'est justement parce qu'elle se voit. La fausse modestie n'est donc jamais un problème durable.

 

Quid des communautés polythéistes, et plus largement païennes ?

Nous distinguons les communautés polythéistes et païennes, en ce sens que les communautés polythéistes peuvent certes être jugées païennes par les monothéistes ou les laïcs (qui reprennent ce vocable de païen hérité) que ces communautés polythéistes gardent un caractère plus traditionnel que les communautés païennes au sens large. Communautés païennes qui dérivent souvent vers des formes de New Age et autres fallaces voire politicardises – même quand elles contiennent, facultativement, du polythéisme.

Mais enfin ces communautés, quelles qu'elles soient, ont permis de quintessencier la dialectique de l'humilité et de la fierté, car elles sont traversées par ces attitudes. D'une part, par héritage monothéiste subconscient ; d'autre part, par revendication antimonothéiste-propolythéiste-propaïenne consciente... cette revendication serait-elle caricaturalement sommaire (or, elle l'est, caricaturalement sommaire) car elle agit dans le sens monothéiste de sa diabolisation.

 

Un moratoire sur la fierté...

D'un côté, vous allez trouver toute une frange dans ces milieux, qui donc clame combattre l'ego, ce dernier étant régulièrement mis en parallèle paronomastique avec l'égout. Ça commence (très) mal, car l'ego n'est peut-être « que » l'ego, qu'il n'en reste pas moins un aiguillon et un point d'appui pour aller au-delà : je n'ai jamais vu de petit homme qui, en grandissant, ne passait pas par ce que les psychologues du développement nomment des phases égocentriques, afin de s'approprier leur existence. L'ego est la fonction adaptative du psychisme et, comme tel, il ne saurait être ni dégoûtant, ni fourgué au tout-à-l'égout.

L'attitude qui consiste à acquérir une conscience supérieure à la seule adaptation, ne peut provenir que d'une éducation où, justement, il s'agit d'élever la conscience à d'autres « objets » que le seule adaptation. Et, pour être vraiment juste, où il s'agit d'adapter la conscience à d'autres « objets » que la seule présentation des « choses ». Lutter contre l'ego, revient donc à créer des handicaps. L'erreur originaire ayant été, de confondre l'ego avec la fierté – comme font les monothéistes, qui luttent lamentablement contre l'amour-propre.

C'est fondamentalement sectaire, même à propos des « sectes qui ont réussi ».

 

... et un moratoire sur l'humilité...

De l'autre côté vous avez, au contraire, toutes ces affirmations de « fierté païenne » franchement ridicules. Pourquoi ? Eh bien, mérite-t-on d'être païen ?... Le choix du polythéisme, et plus largement de quelque paganisme dans la démarche, de nos jours laïcs – en France – et du moins séculiers – dans le reste de l'Occident, – s'avère comme tel : choisi.

Bien sûr, comme toute religiosité ou spiritualité, celui qui l'expérimente n'est pas si sûr qu'il s'agisse d'un choix : il a plutôt le sentiment d'une direction que prend sa vie, par la force des choses. Quoiqu'il en soit, à la fin, il faut bien en assumer la responsabilité – de la direction qu'a prise notre vie. Auquel titre, toutes les « fiertés » semblent des façons de se voiler la face, parce qu'on n'assume pas ou qu'on ne prend pas vraiment la mesure (la mesure, la modestie) de ce qu'implique notre trajectoire ; alors, pour se donner du courage, on « s'affirme » « fier d'être ci et ça »...

Ça fait penser, ces dernières années, à ce slogan américain au milieu du wokisme, disant « it's OK to be White »« il n'y a aucun mal à être Blanc » : à force d'entendre des âneries wokistes (du type complètement contradictoire : « la blanchité nous racise » où les prétendus « racisés » « racisent » en fait « les Blancs »)... il se trouve que certains entrèrent dans des angoisses folles, au point de devoir dire, sur le mode thérapeutique : « it's OK to be White ». Paye ta fierté ! Mais les uns comme les autres n'ont aucun mérite dans la démarche.

Comme disait Michel de Montaigne : « on naît comme on est avec le nez qu'on a » et, faut-il ajouter : « on devient ce qu'on est » c'est-à-dire qu'il y a toujours des prédispositions – faiblesses, tendances ou intérêts – par lesquelles nous évoluons dans l'existence.

 

... aboutissent à une modestie

Seule la modestie devant la fierté et l'humilité, c'est-à-dire la mesure, permettent de déjouer les pièges qu'elles nous tendent. Et nous pouvons progresser dans notre milieu, précisément de façon naturelle, et pour tout dire écologique. Ici, l'écologie est d'insertion harmonieuse dans le milieu : chacun fait ce qu'il veut avec ce qu'il peut, eut égard à ce qu'on lui accorde, mais aussi ce qu'il s'accorde à lui-même !

Ni humilité, ni fierté, il s'agit d'avoir la modestie de se situer - - - à sa juste mesure : sans égalité ni individualité, par-delà égalité et individualité.

Car l'égalité et l'individualité s'impliquent l'une l'autre, et cette implication mobilise aussitôt les problématiques de l'humilité et de la fierté.

Affranchies de ces problématiques, les personnes s'organisent « écologiquement ».

Ce qui est un idéal polythéiste, quoi que pas forcément païen au sens moderne du terme païen (parce que le paganisme contemporain, regroupe aussi des égalitaires-individualitaires, comme on a compris) : c'est l'antique fonctionnement en clans, en gentes, en « races » au sens non-raciste – c'est-à-dire en bonnes engeances.

(Et donc en engeances, tout de même, pour le meilleur et pour le pire.)

 

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37 réactions


  • Yann Esteveny 15 mars 09:10

    Message à tous,

    L’humilité et la fierté ne sont pas des valeurs des païens de la laïcité. L’orgueil et la mort sont leurs valeurs.

    Cette société occidentale renie le Dieu unique révélé, nous mène à un paradis artificiel technologique et vide les âmes de leur richesse intérieure.

    Cette société occidentale nous conduit tout droit en Enfer.


    • amiaplacidus amiaplacidus 15 mars 09:18

      @Yann Esteveny : « Cette société occidentale nous conduit tout droit en Enfer. ».

      Cela tombe bien, moi qui suis frileux, je me réjouis d’aller me réchauffer dans quelques années.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 13:51

      @amiaplacidus. smiley

      @Yann Esteveny. Les païens de la laïcité. C’est une expression qui a du sens : la laïcité, involontairement, est un « polythéisme mécréant », dans la mesure où sa neutralité suppose au moins une posture agnostique publiquement, vis-à-vis de tout type de croyances. Toutefois, l’expression reste fautive, car le laïc, d’abord, dans le monde chrétien, c’est le peuple du Dieu exclusif, quand il n’est pas impliqué dans le clergé. La laïcité, à la base, c’est la non-cléricalité. Et c’est tout. Séparation de l’Eglise et de l’Etat... De plus, païen étant une notion romaine vaticanaise — c’est-à-dire urbaine et religieuse, dès les origines du christianisme — correspond mal à la laïcité moderne. D’ailleurs, ça ne correspond pas au polythéisme tout court. Mais alors, quand vous liez le reniement de leur Dieu au déploiement de la technologie, en vous servant comme vous faîtes de la notion de païen de la laïcité, on atteint des sommets de non-sens, d’autant plus que « les païens » (les vrais, derrière ce mot galvaudé) sans renier la technique, tiennent à la nature et ses divinités.


    • Seth 15 mars 14:26

      @Jérémy Cigognier

      L’agnosticisme me paraît plus juste à considérer que l’athéisme.

      Je ne crois pas une seconde que ceux qui se prétendent athées « fondamentalistes » le soient. La culture seule a suffi à inculquer l’idée de Dieu. Qu’il s’agisse d’un dieu différent de « l’officiel » difficile à définir c’est possible mais le vide absolu de l’absence totale de dieu me paraît difficile à concevoir et à vivre et le doute n’est que la recherche de ce qu’on pense exister.

      Peut être ai-je tort...


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 16:39

      @Seth. Je ne pense pas. L’athéisme moderne a quelque chose de nécessairement antithéiste, dans la mesure où effectivement l’humanité a toujours cru massivement en des entités. Or l’antithéisme dit : « la majorité de l’humanité a tort ». Mais ce qu’il devrait se dire, et ce que certains évolutionnistes se disent pour s’en tenir à la science, c’est que « l’idée » théiste (poly- comme mono-) fut nécessaire pour développer les fonctions empathiques du psychisme. Alors le curieux, c’est qu’on s’imagine, sur cette base, pouvoir se passer de « l’idée » théiste (qui est bien plus qu’un seule idée, puisqu’elle éprend parfois intensément, qu’on s’en tienne à sa biochimie comme à la qualité de son expérience personnelle). Manifestement, dans le monde hypermoderne (l’expression est de Gilles Lipovetsky) règne l’hypernarcissisme (même auteur) : il serait peut-être temps d’y voir un lien de cause à effet avec l’irréligion, même sous l’angle évolutionniste scientifique seul. C’est-à-dire que « l’idée » théiste, aussi épurée soit-elle telle que dans le déisme d’un Voltaire (franc-maçon),  a un impact positif sur le développement psychologique complet. D’aucuns n’y voient qu’un anxiolytique : c’est vrai, mais cet anxiolytique, en tant que tel, réduit l’anxiété et prolonge l’existence en conséquence par réduction du stress psycho-physiologique... mais surtout c’est réducteur même au point de vue scientifique, puisque « l’idée » théiste est belle et bien vectrice d’empathie.

      Hélas, si le fanatisme semble si peu vecteur d’empathie, c’est que les monothéistes se disputent « l’idée » théiste au miroir d’une seule entité. Ils veulent arrêter la figure de l’Autre, pour n’empathiquement que s’y retrouver eux-mêmes. C’est tout. Ensuite, des études ont été menées, qui démontrent que, dans les faits, les « athées » (qui n’ont été comparés qu’aux monothéistes dans cette étude) sont plus généreux que les monothéistes invocateurs du Bien. Ce serait une bonne nouvelle, si cela signalait réellement l’existence d’une empathie développée. Aussi bien, il peut s’agir d’une sympathie, au sens de sentiment symbiotique, par indifférentiation. Là est le point. Le divin, différencie. Il fait mûrir. Et c’est ainsi qu’on peut avoir moins de générosité apparente aussi, au profit d’un respect envers l’autonomie et la force d’autrui à se construire (en vertu de « la foi »). Bien entendu, un tel respect tourne parfois à l’inconscience, à laisser autrui dans sa merde aussi. Mais, ce qui est sûr, c’est que nul n’est parfait, et que l’idée même d’une « perfection en tant que telle », est monothéiste, puisque toute perfection réelle est forcément relative à un domaine, ou un genre, comme disait Aristote. Il n’y a pas de perfection en soi, la perfection est l’attribut de ce qui dépasse son domaine, ou son genre.


  • amiaplacidus amiaplacidus 15 mars 09:15

    Déjà que les monothéismes nous racontent quantité de contes de fées.

    Alors, les polythéismes, ce sont les contes de fées au carré.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 13:55

      @amiaplacidus. Je ne crois pas que les affres de spasmophiles conquérants au désert proche-oriental, soient des contes de fées. Les contes de fées sont une richesse immense, au moins au titre patrimonial. De plus, littérairement, il est faux d’amalgamer les genres du conte (de fées ou autre) et du mythe. Les Anciens Grecs, déjà, savaient symboliser au-delà, et philosopher, sans avoir besoin de cette ridicule posture de reniement moderne, postillonnant sur la richesse symbolique comme s’il ne s’agissait que d’enfantillages. Souvent d’ailleurs, les enfants font preuve de plus de vitalité que les empirico-rationalistes, car ils savent très bien distinguer entre le réel et l’imaginaire, en faisant vivre l’imaginaire dans le réel, c’est-à-dire en apportant la richesse de l’imaginaire dans le réel, dont l’imaginaire est en fait une constituante indéniable (cf. Cornelius Castoriadis, et pas que Cornelius Castoriadis).


  • Laconique Laconique 15 mars 11:37

    Whosoever exalteth himself shall be abased ; and he that humbleth himself shall be exalted.


    • Seth 15 mars 13:54

      @Laconique

      Faudrait signer : c’est St Luc.

      Et puis ça peut se dire en français parce que du vieil anglais, pas facile pour ceux qui parlent le globish à la mode.

      Vous remarquerez qu’on utilise shall et non will. Sachant qu’il n’y a pas de futur en anglais, on utilise des verbes pour le rendre et ils ont un sens particulier et s’interprètent donc.

      Et en plus c’est avec ce genre de principe que l’on justifie la pauvreté des inférieurs grâce à des promesses hypothétiques dans l’au-delà. Perso je rejette formellement les grands principes du petijésu, ce sont eux qui nous ont amené où nous sommes et ce sont encore eux qui sous-tendent les idées politiques réactionnaire mais aussi la « non-violence » actuelle permettant à l’ordre social actuel de perdurer.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 13:59

      @Seth. Oui. Alors que l’humanité fut infiniment plus polythéiste que monothéiste dans son Histoire universelle, le fanatisme est manifestement un ressort plus fréquent dans le monothéisme, ainsi que la manie exégétique tordue. Les polythéistes ont certes parfois utilisé la religion à des fins sociopolitiques (le punique Hannibal exaltant la figure de Milqart-Hercule, pour fédérer le monde grec dans les guerres puniques et exalté ses troupes avec des héros demi-divins) que cela servait avant tout de storytelling, sûrement pas pire que nos propagandes modernes  politiques et publicitaires  par ailleurs. 

      @Laconique. Vous vous cachez derrière le vieille anglais, par lequel vous croyez faire bon genre, mais la mauvaise conscience est pour vous. Vous vous imaginez parler à une autre région de la conscience ainsi, ou de l’inconscient, et c’est de la manipulation sociopolitique.


    • Seth 15 mars 14:09

      @Jérémy Cigognier

      Je vous recommande, si vous ne les avez pas lu, la lecture des Gathas (pas la totalité de l’Avesta), texte plus philosophique que religieux que du reste les Philosophes grecs en leur temps considéraient comme important.

      On est dans le monothéisme contrairement à ce que prétendent certains qui confondent Dieu et les forces. smiley


    • Laconique Laconique 15 mars 16:24

      @Seth, Jérémy Cigognier 
      It’s the King James version of the Bible, the only authorised version in my congregational Church.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 17:10

      @Seth. Le mazdéisme est certes une forme de monothéisme, comme le sikhisme bien plus récent. Mais il y a monothéisme exclusiviste et, disons, unithéisme, sachant en outre que d’autres entités (ahuras) sont à l’oeuvre, si je ne m’abuse, un peu comme les anges. D’ailleurs, selon l’éthique juive, catholique et orthodoxe, la mobilisation des anges et des saints, produit une forme de polythéisme. Parce que nombre de polythéisme eux-mêmes, ont un Dieu princeps.

      @Laconique. Et pourtant, je vous ai connu francophone ; et surtout, vous êtes sur un site francophone. Vous cherchez des excuses à votre irrespect.


    • Seth 15 mars 18:29

      @Jérémy Cigognier

      Comme cela c’est plus simple : Car quiconque s’élève sera abaissé, et quiconque s’abaisse sera élevé.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 00:10

      @Seth. Moui. C’est un Dieu qui aime le yoyo. Ce serait drôle si ce n’était pas invivable.


    • Jean Keim Jean Keim 16 mars 08:41

      @Jérémy Cigognier

      Il semblerait que les religions polythéistes, tout au moins au cours de leur développement, on mit un dieu sur chaque ‘’phénomène’’ inexpliqué, et ensuite est venue la nécessité de mettre un peu d’ordre dans la pétaudière, tout un panthéon de dieux a été instauré avec une mythologie had hoc, bien entendu il a fallut instaurer un chef suprême qui au fil du temps serait devenu le Dieu unique doté de tous les attributs divins ; tout cela est arrangé bien évidemment pour servir le pouvoir en place.

      En aparté, mon commentaire me fait songer à ce que Jean l’évangéliste a retranscrit : « dans la maison de mon père il y a de nombreuses demeures »


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 11:19

      @Jean Keim. Votre propos est celui du positivisme, et il est mauvais, car bien que le monothéisme ait spirituellement conquis l’humanité à 50%, je vous rappelle qu’il reste 50% de non-monothéistes divers, et surtout que même parmi les « conquis » perdurent légion de pratiques  pour reprendre un vocable monothéiste sans crainte.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 11:22

      PS : et que ceux qui s’imaginent que le monothéisme est propice à fédérer et s’emparer ainsi, se souviennent de l’Egypte, de l’Inde, de la Chine, de l’empire mongol, et tant d’autres. Le monothéisme, ce n’est que 1% de l’Histoire d’homo sapiens en comptant large et, au mieux, en comptant court, 5%.


    • Jean Keim Jean Keim 16 mars 16:55

      @Jérémy Cigognier

      Qu’il y ait (encore) des polythéistes ne change rien, se référer au positivisme non plus.

      Toutes les religions sont des archaïsmes, leurs dieux ont tous des comportements très humains, c’est attendu leurs créateurs le sont également, les remplacer par une idéologie athée et/ou matérialiste ne comblera pas le manque.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 17:40

      @Jean Keim. Et ça ne peut pas le combler, puisque c’est un besoin spirituel. Je vous renvoie à mon propos sur l’évolutionnisme. Ne serait-ce que du point de vue de la psychologie archétypale, la prégnance des archétypes  lire emblématiquement Présent et Avenir de C.G. Jung, toujours d’actualité,  ne saurait être gérée par les individus égalisés, où tout serait égal, indifférent, comme dans l’athéisme/matérialisme (en fait antispiritualité, antitradition, « expérimentation pure » sonnante et trébuchante)... Comme chante Alain Souchon : « la vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie », pour m’en tenir au regard profane. Le nihilisme (cf. Anacharsis Cloots) n’est pas viable, et si le spirituel n’était seulement que le produit de nos cerveaux, il en serait une dimension vitale.


  • Gollum Gollum 15 mars 13:00

    L’humilité, passion triste selon Spinoza :

    https://youtu.be/AgnoMHGPC0o


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 15 mars 14:00

      @Gollum. Merci. Spinoza inspira le premier néodruidisme, et souvent encore-toujours les druidistes modernes, quand ils ne raccordent pas avec les savoirs archéo/historiques.


    • Seth 15 mars 15:09

      @Gollum

      Comment ça va ? On ne te lis plus ici, et pourtant... un Mélu lacking peut être . smiley

      Je suis tombé l’autre jour ta discussion sur ago télé avec un type qui adore le transverbéré (pas confondre avec trans-réverbéré qui fait référence aux Ukrainiennes sur les boulevards) santopadrépio. Bien rigolé en lisant ces mecs illuminés qui croient aux miracles !

      Zont trop sauté sur les genoux du bon curé qui après la confession leur administrait pénis-tence. smiley


    • Gollum Gollum 15 mars 17:04

      @Seth

      Hello ! smiley Non je viens peu, pas de sujets qui m’intéressent en ce moment..

      La Mélu j’y pense plus quasiment, pas mécontent qu’elle ait été virée en fait... Je consacrais trop de temps à cette pétasse imbue d’elle-même (Mélu si tu me lis bien l’bonjour).. smiley

      Sinon pour Avox.tv tu veux parler du Christophe Nicolas j’imagine ? Il sévit ici sur rouge aussi.. Un gros malade qui se prend pour une lumière.. Je me suis foutu de sa gueule en effet récemment.. en publiant les âneries du Padre Pio du genre le diable qui va au confessionnal.. Pétard la barre de rire.. smiley

      Y a de moins en moins de monde ici il me semble non ?


    • Seth 15 mars 18:25

      @Gollum

      Ouais, ça s’appauvrit ici en intervenants alors forcément on rigole moins. smiley

      Et les artic, sorti de Rosemar il n’y a plus grand chose qui fasse rire franchement.

      Sinon c ’est bien de Xtof Nicolas qu’il s’agit. Le coup du Padre Pio était grandiose. Il y a des gens, j’te jure... smiley

      A+


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 11:24

      @Seth. Alors il va falloir que vous produisiez régulièrement des articles et les diffusiez pour mobiliser autour de ce qui vous importe.


  • Seth 15 mars 13:42

    Allez, un petit cantique, tous en choeur :


    Les saints et les anges

    Avec tous les élus

    Quand ça les démange

    Se gratte le cul

    Ave ave ave le petit doigt.  smiley


  • Jean Keim Jean Keim 16 mars 07:46

    C’est tout un ensemble de conditionnements qui régit nos choix, ainsi sont les religions, et plus généralement les idéologies ; si nous sommes un tant soit peut conscient, alors nous percevons la cupidité inavouée qui se cache derrière nos choix idéologiques, mais pas qu’eux.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 11:28

      @Jean Keim. Enfin quand même ! Parler de « conditionnements » c’est facile. Il n’existe pas de vie « déconditionnée ». Nous vivons au monde, et le monde nous précède toujours. Ces discours sur les « conditionnements » sont sectaires. L’être humain est un animal culturel. Sans culture, c’est démontré à travers les enfants sauvages, il est amoindri dans son développement. Et la culture est un Tout, y compris religieux-spirituel.


    • Jean Keim Jean Keim 16 mars 17:21

      @Jérémy Cigognier

      Ce que vous dites est en qq. sorte une redite de mon commentaire, néanmoins vos propos ne sont pas complètement exacts ; si effectivement le monde (et ses croyances) nous façonne, en retour nous le regardons à l’aune de nos conditionnements, il devient tel que nous le pensons.

      Les enfants sauvages ont été avant tout privés de liens sociaux, leur cerveau, entre autre, n’a pas connu un développement normalement ‘’humain’’.

      Nous avons toujours la possibilité de prendre conscience de nos conditionnements, ce qu’apparemment l’animal ne peut pas faire, pas plus qu’un enfant sauvage probablement.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 17:45

      @Jean Keim. Les conditions sont la base : conditions de vie, etc. sans lesquelles il n’y a pas de Vie. Parler de conditionnement est un abus de langage. Quant aux enfants sauvages, je vous parle de carences psycho-affectives irrécupérables, que l’on n’aquiert que dans l’acquisition de la culture, à commencer par le langage, au contact d’autres êtres humains, notamment plus développés. Il y a des enfants sauvages irrécupérables, des humains dénaturés, puisque la nature de l’humain est cultivée, culturelle : l’alimentation devient l’art de la chasse ou la gastronomie, le sommeil devient la literie, la copulation devient l’érotisme, selon mille et une variantes, et il y a autant de types d’humanité qu’il y a de types culturels. Evidemment, c’est moins évident avec la standardisation industrielle, qui singulièrement nous dénature car semble nous autoriser à renoncer aux cultures, du fait de ses automatismes confortables, et l’on devient médiocre...


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 16 mars 17:47

      * ... je vous parle de carences psycho-affectives irrécupérables, auxquelles on échappe que dans l’acquisition de la culture, à commencer par le langage, au contact d’autres êtres humains, ...


    • Jean Keim Jean Keim 17 mars 08:55

      @Jérémy Cigognier

      Il y a la CULTURE dans son acceptation la plus large y compris la science, la technique, le religieux et même plus largement les idéologies..., là il est question d’une somme de savoirs, donc inévitablement de CONDITIONNEMENTS et de leurs prégnances dans les CONSCIENCES.

      Pour survivre au milieu de la forêt vierge ou dans une mégapole comme New York, les savoirs requis seront très différents... mais il y a toujours un mode de penser spécifique, on en est plus ou moins conscient, voire pas du tout.


    • Mervis Nocteau Jérémy Cigognier 17 mars 10:36

      @Jean Keim. Bien sûr, que la culture comprend les dimensions pratiques et scientifiques. Mais la pratique et la science seules, bien que l’on parle de « culture scientifique » et que l’on puisse parler de « culture technique/pratique » ou « d’us/d’usage », ne suffisent pas. Dans la République profane, du moins en France, les Lettres prirent le relais. Les Humanités, depuis la Renaissance européenne. Or ces domaines sont vitaux. L’imaginaire (j’en ai déjà parlé plus haut et j’y renvoie) est constituant et s’en priver est dommageable. Mais on ne s’en prive pas de nos jours : il est toutefois atomisé dans les « productions ». Ainsi continue-t-on d’en vivoter, sans qu’il soit bien constituant  comme tout en Occident est atomisé, du reste, sous le coup du taylorisme (c’est-à-dire desdites « cultures scientifique/technique » qui industrialisèrent toute méthode).


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