La religion s’invite à l’école
A tous les niveaux de la scolarité, les témoignages recueillis par le Haut Conseil à l'Intégration font état d’obstacles croissants. Dans leur rapport on peut lire : « Dès l’école primaire, des parties du programme soient refusées : alors que le programme d’histoire en CM1 prévoit expressément la romanisation de la Gaule et la christianisation du monde gallo-romain , au même titre que l’étude des conflits et échanges en méditerranée au Moyen Âge : les Croisades, la découverte d’une autre civilisation, l’islam, des enseignants se voient systématiquement opposer un refus de parents musulmans à l’étude, par leurs enfants, de la christianisation. Les mouvements migratoires, conséquences des Croisades, sont remis en cause au prétexte que les Chevaliers n’ont pas existé ou que dans le meilleur des cas, ils n’ont jamais atteint le Proche-Orient !
Ainsi, la pression religieuse s'invite au sein des cours et dans la contestation ou l'évitement de certains contenus d'enseignement. Ainsi, les cours de gymnastique et de piscine sont-ils évités par des jeunes filles qui ne peuvent être en mixité avec les garçons. Ces dispenses d'enseignement, parfois justifiées par des dérogations médicales "de complaisance", pose le problème du vivre ensemble entre filles et garçons. Il arrive que des enseignants, désemparés devant le peu d'élèves à la piscine lors du ramadan, cherchent auprès de l'imam le plus proche la justification religieuse à pouvoir suivre les cours dispensés. Par une volonté de bien faire, ces enseignants contreviennent alors au principe de laïcité et inscrivent de fait la religion comme ayant force de loi.
Depuis peu, les professeurs du domaine scientifique ne sont pas davantage à l’abri de contestations qu’ils doivent sans cesse contrer. L’évolutionnisme est remis en cause au profit d’une action divine ou créationniste imposée par l’élève, sans argumentation.
Qui imaginerait que l'éducation musicale soit contestée ? Pourtant, des enfants refusent de chanter dans une chorale ou de jouer de la flûte à bec au prétexte d'une interdiction religieuse.
Ces questionnements, ces prises de positions souvent bruyantes exigent de la part de l’enseignant une forte conviction dans la portée de son métier et une formation solide pour affirmer rigueur et autorité pendant une séquence afin de garder le cap. Contrairement à ce que l’on entend, il n’est pas certain que les enseignants confirmés soient les mieux préparés à cet exercice car, confortés par des années d’écoute relative de leur auditoire, beaucoup confirment l’émergence soudaine de situations de classes qui leur étaient jusque là inconnues. Décontenancés, certains lâchent prise. Aussi faut-il craindre que, pour acheter la paix dans la classe, des parties de programmes ne soient plus abordées ou deviennent l’objet de négociations permanentes mettant à mal les outils indispensables à l’intégration sociale. Ces contestations perturbent le bon déroulement des cours et empiètent sur le temps dévolu aux enseignements.
La formule bien connue de "nos ancêtres les Gaulois", aujourd'hui considérée comme assimilatrice, était conçue comme un moyen d'intégrer dans une même histoire des écoliers venus de pays différents. La France étant une terre de droit du sol, le lien qui unit les nationaux est un lien de communauté choisie qui s'incarne dans une histoire nationale. Or, depuis plusieurs années, dans un nombre croissant d'établissements, les cours d'histoire sont le lieu de contestations ou d'affrontements, de mise en concurrence de mémoires particulières qui témoignent du refus de partager une histoire commune.
Des revendications religieuses se font jour : demande de pause pour la rupture du jeûne lors du Ramadan, rupture du jeûne de professeurs musulmans avec leurs élèves dans un collège du Nord de Paris, refus de représentation de figures humaines en cours de dessin…
Laïque, l'école de la République est aujourd'hui devenue parfois le lieu de l'expression et de l'affirmation religieuse, dans une visée parfois volontaire de confrontation.
La demande de menus halals est forte, et cette demande concerne aussi, dès le plus jeune âge, les crèches collectives. Dans certaines villes, des pétitions de demandes de repas halals, circulent, parfois soutenues par des fédérations de parents d'élèves, comme au Tremblay-en-France ou à Lyon. Le principe de laïcité républicaine, qui doit prévaloir aussi dans les cantines scolaires, service public non obligatoire et néanmoins lieux d’éducation, vise à ne pas discriminer les élèves en raison de leurs origines ou de leur appartenance religieuse. "La République ne reconnaît, ni ne subventionne aucun culte". Les personnels de cantine scolaire et les enseignants ont trop souvent le réflexe d'associer la religion à l'origine géographique, et des parents sont parfois étonnés de voir leur enfant écarté d'office des repas avec porc, alors même qu'ils n'avaient rien demandé de particulier. Lors de périodes religieuses comme le ramadan, les élèves sont soumis à la pression communautaire et doivent suivre le groupe sous peine d’en être exclus. Les railleries, les moqueries, les insultes sont le lot de ceux qui n'affichent pas leur pratique.
Plus gravement, les filles sont soumises à la pression des garçons, notamment des frères, au prétexte de la religion et du fait qu'elles doivent "être respectées". Les filles sont chez elles, dans l'intimité des appartements, elles ne peuvent pas rester jouer dehors après la classe. Difficile dans ces conditions d'exister, et beaucoup constatent que les filles payent aussi le fait de jouer le jeu de l'intégration scolaire. Plus sérieuses en classe, elles obtiennent de meilleurs résultats, au grand damne des garçons qui leur font payer par une étroite surveillance, voire en leur reprochant d'être des "collabos". L'école est en effet perçue comme l'école de la France par des jeunes en perte de repères, qui se vivent comme Algériens, Marocains, Camerounais… avant d'être Français. Ni d'ici, ni de là-bas, ils s'enferment dans une vision idéalisée de leur origine et revendiquent leur altérité au travers de leur religion. Des enseignants ont pu être traités de "sales Français" et la culture française et ses valeurs rejetées. Face aux contestations politico-religieuses des élèves, les enseignants sont trop souvent livrés à eux-mêmes et réagissent au coup par coup. Les réponses adoptées ne sont donc pas toujours satisfaisantes. L'importance donnée à l'éducation civique et au principe tout théorique de laïcité ne pourront combler la fissure qui gagne le monde de l'éducation."
Source : www.ladocumentationfrancaise.fr
Comme le texte ci-dessus ne raconte que les faits, je me permets d'ajouter une opinion personnelle :
Si, dès la maternelle, les enfants s'habituent à contester et s'opposer aux valeurs de la République, la persistance, jusqu'à dans la troisième génération, de communautés résistant à l'intégration ne devrait pas surprendre. Le principe de "tolérance", prêché aussi bien à droite qu'à gauche, n'est peut-être pas la bonne réponse.
Le principe de la laïcité est censé agir comme un bouclier contre l'incursion de la religion dans l'école. Or, on constate que ce bouclier est systématiquement retourné contre le principe lui-même par ses opposants . Ils se réclament des droits de l'homme, qui assurent la liberté de pratiquer et manifester sa religion (Art. 18). Force est de constater que la tolérance exprimée dans cet article des droits de l'homme affaiblit la laïcité. Soucieuse d'un esprit de tolérance et d'équité, l'Europe se veut une terre d'accueil de toutes les religions, sans distinction. Mais c'est justement ce "sans distinction" qui crée la brèche dans laquelle une religion militante et expansionniste s'enfonce. Malgré l'affaiblissement de la Foi, Europe reste historiquement judéo-chrétienne, et "historiquement" n'implique pas que les racines judéo-chrétiennes n'ont plus aucune valeur aujourd'hui. Au contraire, si les valeurs islamiques posent problème en Europe, c'est qu'elles sont en opposition à certaines valeurs judéo-chrétiennes reprises dans les droits de l'homme. Tant qu’on refuse de reconnaître, au nom de la laïcité, ou au nom d'une conviction athée, les racines chrétiennes de l'Europe, une religion plus jeune et plus vigoureuse s'établira à sa place. Maintenir que l'Europe est religieusement "neutre", n'est pas seulement faux, mais surtout périlleux.
Si les textes des droits de l'homme ne font aucune distinction entre les religions, les mettant toutes sur le plan de l'égalité, c'est d'abord parce qu'ils se voulaient universels, mais aussi parce que ni en 1789 ni en 1948 aucune religion minoritaire en Europe se faisait remarquer d'une façon revendicatrice. On n'y voyait donc pas d'inconvénient pour les pays d'Europe, où seule l'Eglise avait un pouvoir politique. Mais quelques années plus tard la situation en Europe commençait à évoluer. La politique d'immigration accueillait une religion, jusque là très minoritaire, qui s'établissait et s'épanouissait jusqu'a devenir "la deuxième religion de France", un fait qui est bientôt devenu un slogan pour ses adhérents, malgré le fait que cette "deuxième religion" reste très minoritaire. L'Eglise, aujourd'hui, oserait à peine faire les revendications que cette "deuxième religion" cherche en permanence à négocier, arguant, en toute logique, que puisque toutes les religions sont égales devant le droit, certains privilèges de l'Eglise, comme les cloches, les fêtes du calendrier, le dimanche férié, sont injustes.
Ainsi on constate qu'en déclarant toutes les religions égales devant le droit, nous nous sommes mis dans une difficulté imprévue. Or, pour la majorité des Européens, cette égalité devant le droit est injuste et hypocrite, parce que l'Europe a toujours été chrétienne et aussi parce que la singularité de l'islam est évidente. Nous avons à faire avec une religion qui refuse de considérer la femme comme un être égal à l'homme, qui refuse la mixité et réclame des heures différentes dans les piscines, refuse certaines matières à l'école, réclame des repas différents dans les cantines, ainsi que des abattoirs différents, qui cherche à se distinguer visiblement par l'habillement, et qui résiste à la laïcité. Une religion qui, contrairement au christianisme, ne respecte pas la liberté de l'individu, mais exige sa soumission à la volonté de Dieu, et qui codifie l'intégralité de sa vie dans la société. Pour ses adhérents, cette religion n'est nullement "égale" aux autres religions mais, au contraire, la seule vraie religion. Néanmoins, nos dirigeants insistent sur l'égalité des droits de toutes les religions, postulant qu'aucune n'a une prérogative quelconque. C’est un laïcisme pur et dur qui exclut tout signe religieux, y compris chrétien, de l’espace public. Et pourtant, la laïcité est fille du christianisme : le premier à proclamer la séparation des pouvoirs fut le Christ — « rendre à César ce qui est à César ». Sans le christianisme, le principe de la laïcité ne se serait pas établi si tôt, comme on le voit dans les états sans tradition chrétienne.
Il serait temps de rétablir le bon sens et de reconnaître qu'en Europe le christianisme est bien plus ancien que les autres religions et pour cette raison a bien le droit de maintenir ses traditions historiques comme le calendrier des fêtes, la crèche et l'arbre de Noël publics, et les cloches de l'église. La persistance de ces traditions, qui, dans l’état laïque où la croyance se perd, deviennent plus folkloriques que religieuses, ne justifie pas la revendication d’autres religions de voir leurs propres fêtes religieuses célébrées de la même façon.
Note : L'auteur est agnostique, mais il distingue entre le christianisme, l'Eglise, et la Foi. Le non-croyant peut très bien approuver le message humaniste du christianisme tout en rejetant les dogmes de l'Eglise, comme toute autre doctrine religieux.