L’Afrique victime de l’exode de ses personnels médicaux
Le 7 avril dernier, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) rééditait, simultanément dans les différentes régions du globe, une journée mondiale de la santé. Très symboliquement présent dans la capitale zambienne, le Dr Lee Jong-Wook, directeur général de l’OMS, a stigmatisé le fait que l’Afrique est en train de se vider de ses agents de santé au profit des pays riches. L’insuffisance en personnels de santé expliquerait en grande partie le fort taux de mortalité du continent africain.
Pour le Dr Jong-Wook, la Journée mondiale de la Santé est
certes l’occasion de saluer la remarquable contribution du personnel soignant à
la santé mais aussi de pointer les choses qui fâchent. Le constat est amer.
Partout dans le monde, les systèmes
de santé ont du mal à former, rémunérer et fidéliser leur personnel. Dans les
pays développés, la demande d’agents de santé augmente à mesure que la
population vieillit et que les affections chroniques gagnent du terrain. Pour
répondre à cette demande, les pays riches font de plus en plus souvent appel à
des agents qualifiés, originaires de pays en développement aggravant de ce fait
pour ces derniers la pénurie de personnel.
Or, sans personnel sur qui
compter, il est impossible de mettre les avancées en matière de soins à la
portée de ceux qui en ont besoin. On ne peut prévenir et soigner efficacement
les maladies sans agents de santé à qui confier les tâches d’évaluation, de
prestation et de suivi. Le manque d’effectifs compromet les moyens de riposte en
cas de pandémie de grippe humaine, mais aussi plus spécifiquement en Afrique
pour combattre la progression du sida souvent en délivrant de l’information aux
populations et en luttant contre "la médecine" traditionnelle.
Cette carence en personnels ne
concerne pas seulement les praticiens, mais aussi les enseignants,
instructeurs, administrateurs et personnels d’appui.
Cumulant les handicaps, l’Afrique
est également confrontée à des difficultés économiques, à la détérioration de
ses infrastructures sanitaires et à des troubles sociaux quand ce ne sont pas des
guerres.
Le Nigéria, le Ghana et la Zambie
figurent parmi les pays les plus affectés par l’exode de main d’œuvre médicale
au profit principalement du Royaume-Uni des USA, du Canada et de l’Australie.
Un rapport spécifique a été
réalisé par l’organisme onusien, sous la plume du Dr Tim Evans. L’auteur
affirme que 25% des agents de santé africains travaillent dans les pays
occidentaux. Plus qu’une saignée, le phénomène est qualifié de fuite des
cerveaux voire de pillage des ressources humaines africaines. Ainsi, la Zambie
ne disposerait que de 600 médecins pour 11 millions d’habitants, soit un
praticien pour 14 000 habitants, quand dans le même temps le Royaume-Uni
enregistre un rapport de 1 pour 600.
A court terme, le Dr Evans
préconise que las pays riches aillent recruter en Europe de l’Est, région
encore épargnée par le problème d’insuffisance en personnel de santé. On sait
pourtant que, plus à l’est, l’ex-URSS est confrontée à une paupérisation
importante d’une partie de la population et des infrastructures sanitaires.
L’accès aux soins de l’ensemble
des populations, parce qu’il découle d’un partage des richesses, demeure
incontestablement un grand défi de notre millénaire.