mardi 18 janvier 2011 - par Yannick Comenge

L’IGAS charge l’Agence du Médicament

Le rapport de l’IGAS est vu comme une terrible charge contre l’Agence du Médicament (Afssaps). A sa lecture, on constate une focalisation sur une période passée de l’Agence (1987-2000) qui permet de déresponsabiliser les tenants actuels de la santé en France hormis un DG qui est dépeint habillement comme un incompétent ce qui permet tranquillement de mettre hors d’atteinte la classe politique. J’ai donc mis en exergue quelques morceaux choisis de ce rapport pour montrer un enchainement, des errements, des moments affligeants et surtout une forme de manipulation politique peaufinée par Xavier Bertrand.

La première lecture du rapport de l’Igas montre combien l’Agence du Médicament devenue ensuite Afssaps a pu devenir une véritable machine à gaz, plus dangereuse qu’utile. Laissant passer des scandales tout autant que l’EMEA, elle n’a jamais rien vu. Que ce soit pour Vioxx et Celebrex ou pire encore avec Acomplia et enfin Médiator qui s’avère être un petit joueur à coté d’Avandia.

Le rapport de l’Igas souffre certes d’un risque de crédibilité car il mentionne une date clef de 1999, alors que l’un des auteurs de ce rapport de 260 pages a été proche de Kouchner et de Jospin. Ceci est à noter d’emblée car on comprend pourquoi tout le jeu du rapport est de rester collé au sujet de l’Afssaps et des relations avec Servier ou l’HAS.

Le rapport dit des vérités utiles, souvent très connues mais importante à écrire noir sur blanc, mais encore une fois, il est palpable que certaines lenteurs, « erreurs », roueries administratives aient été pilotées depuis les ministères qui sont depuis l’affaire du sang contaminé pas coupable mais responsable et désormais grâce à Médiator, plusieurs gouvernements, premiers ministres, ministres et secrétaires d’états surtout depuis 2002 sont ni responsable ni coupable. Il y a donc à se demander pourquoi un rapport vient dédouaner les politiques en démontrant une agence perdue dans l’organigramme de l’administration française.

Le premier argument qui me vient à l’esprit est la description du DG le plus récent de l’Afssaps, Monsieur Marimbert. Lui est décrit comme un incompétent notoire qui aurait fait illusion pendant des années et surtout plusieurs scandales… On se demande d’ailleurs comment cet homme a pu être aussi cloisonné dans son agence et ne pas être au courant des dossiers… n’avait il pas un conseiller spécial diabétologue et brillant (Eric Abadie) qui participât à beaucoup de réunion sur les sujets focalisant sur le syndrome métabolique. Cette description d’un Marimbert nullissime est utile pour les auteurs qui semblent avoir pour feuille de route d’avoir à décrire une nébuleuse administrative hors des influences politiques…

L’autre charge est assez amusante car plein de cohérence et ne viendra pas heurter les réformettes de Xavier Bertrand. Il s’agit de la description de l’accoutumance au risque vécu par la pharmacovigilance… et la vieillesse de ces gens installés depuis fort longtemps à la direction de ces centres de vigilance… il semble que l’œil du cyclone cible Kreft et Casto qui sont depuis des lustres à ces responsabilités et finissent par ne plus rien voir, y compris Mediator… c’est pour dire. Bien que la description des auteurs soient assez cohérente… il n’y a pas suffisamment d’explications concernant les influences notamment de la mairie de Marseille vis-à-vis d’un médecin qui signala un des premiers cas de valvulopathie… là encore, peu d’information ou de témoignage… mais l’Igas devait faire vite…

L’élément suivant est la partie outrancière du rapport. Elle cible Jean Michel Alexandre qui fut un des grands pontes de l’Agence du Médicament. On dit qu’il a pantouflé à la fin de sa vie vers Servier (Marianne, le journal en avait parlé) mais le rapport montre des arrangements, des moments critiques de 1987 à 1999 ou à plusieurs reprises JMA semble avoir joué un rôle très important dans un maintien du Médiator. La réponse de JMA à la fin du rapport est contredite par les auteurs du rapport qui montre combien les arguments de JMA sont absurdes ou erronés. Un passage de la prose : « Au regard de ses responsabilités scientifiques et administratives très importantes, comme de ses compétences pharmacologiques reconnues et de son aura personnelle, il est un acteur central des événements et des décisions prises entre 1993 et 2000, date à laquelle il quittera ses fonctions à l’AFSSAPS. Il entamera alors une activité de consultant pour l’industrie pharmaceutique, notamment pour les laboratoires Servier. ». On découvre l’ambiguité d’un agent de l’état « Le directeur de la pharmacie et du médicament répond le 1er septembre 1987 (annexe deuxième partie n°73) que l’indication concernant le diabète « a été examinée mais n’a pas été retenue… » (cf. ci-dessus). Il admet néanmoins la position du Pr Alexandre : « Si vous souhaitez conserver cette indication, vous pourrez déposer un dossier complet lors de l’appel de la 8ème tranche (endocrinologie) ». » Enfin l’IGAS montre insupportable au travers d’une pratique incohérente de JMA qui créé un groupe ad hoc au lieu de laisser le dossier Médiator partir vers les commissions voulues : « Le groupe de travail ad hoc « Stratégie thérapeutique de l’obésité », prévu par la CNPV du10 mai 1994, mis en place par le Pr. Jean-Michel Alexandre, se réunit le 31 mai 1994 sous sa présidence ».

Enfin, JMA semble avoir pour l’IGAS une responsabilité dans la vie antique de l’Agence du Médicament en lien avec le médiator, ses successeurs visiblement laisseront moins de traces…

Un second couteau de cette époque et qui signe tout ce que JMA exige qu’on signe (si j’ai bien compris) est Mme North qui ne se « rappelle pas des faits »… là, aussi beaucoup d’incohérence. Un élément assez ahurissant en dit long sur l’incompétence qui revient souvent « Une note de l’Agence établie le 24 mars 2000 (annexe deuxième partie n°92), par la responsable du processus de validation durant la décennie 1990 donne l’explication suivante à ce retournement de position : « la firme rapporte à l’agence l’original de la notification du 28 avril.Après accord avec AN (ie Arielle North) et JMA (ie Jean Michel Alexandre, directeur de l’évaluation) Cf Note manuscrite d’AN ». Cette note manuscrite n’est pas disponible, bien qu’elle ait été recherchée. Sur la note du 24 mars 2000 est de fait indiqué : « C. ReyQuinio (évaluateur en charge du MEDIATOR® depuis 1998, (puis chef d’unité d’évaluation organigramme 2010)) ne retrouve pas ce document ».

L’expertise a aussi son « Virenque » au milieu d’un peloton très chargé. Il s’agirait d’un Pr Moulin qui fit de belles études montrant des belles activités du Médiator (dont l’un des dérivés catabolique est l’Isoméride…). Sur ce point, un détail appelle à la réflexion, les études de ce professeur sont tellement « innovante » qu’une « inspection » est diligenté par une personne de l’Agence alors que sa hiérarchie s’y oppose. L’inspection est une vacherie supreme en terme de rapport que peut avoir l’Agence vers un expert ou une étude… et déclencher cela est comme un acte de guerre… mais cette inspection en 2007 ne trouve rien… néanmoins la personne qui aura reçu l’inspection a reçu des pressions cette année là (coup de fil anonymes, menaces sur sa famille). Cette même personne a reçu ce même cocktail de menace juste avant que l’IGAS ne débarque avec des questions ciblées et consensuelles… il fallait surement éviter que cette chef d’unité puisse dire des éléments éclairants qui soit gênants… Car combien de fois les Agences (de santé ou de l’alimentation) doivent subir d’en haut le « c’est politique » et fermer les dossiers voire oublier de notifier à l’ensemble des médecins que le médiator a perdu par exemple une indication… Il n’y a pas que des erreurs humaines.

Outre ces points, on retrouve l’étrange Eric Abadie, ancien membre du Leem, diabétologue qui semble avoir été à l’évaluation pendant une période importante de commercialisation du Médiator sans avoir rien vu…on retrouve des écrits étranges… « La firme présente ensuite son programme d’études à venir qui va aboutir à la première grande étude dite Del Prato. Le 26 janvier 1996, une lettre de l’Agence signée par le Dr Abadie (non disponible dans les dossiers transmis à la mission) semble valider le protocole de cette étude ». Cela ne choque personne qu’on perde des documents… mais in fine il est plus important de se focaliser sur JMA qui est un retraité passif alors que Monsieur Abadie est haut responsable au CSP.

Autre point sur ce curieux personnage, « de son côté, l’Agence procède à une longue élaboration du compte rendu et s’interroge sur les conséquences du refus de considérer le MEDIATOR® comme antidiabétique surl’indication adjuvant au régime du diabète. Une note manuscrite d’un membre de la direction de l’évaluation à son directeur en date du 6 avril (annexe deuxième partie n°) dit ceci : « Vu avec EA (Eric Abadie) : notification avis défavorable à l’indication diabète. Etes vous OK pour notification ce qui laisse la possibilité de recours gracieux qui pourrait permettre un accord sur indication « minimale » dans diabète ». Une ambigüité dans cette information qui sera lourde de conséquence…La fin de ce propos est il un deal avec la firme ? C’est une question à poser. Mais bien peu d’élément recherché pour un diabétologue central entre 2000 et 2007 et qui aujourd’hui est stratégique à l’Europe…

Ce qui est intéressant c’est de mettre aussi en exergue l’inspection exigée en 2007 qui vient d’un chef d’unité obligatoire de la DEMEB (un évaluateur ne peut lancer cette charge) alors que la DEMEB et la direction de l’Agence reste inactives ou peu conciliantes avec cette procédure vis-à-vis de Moulin…

En conclusion, il s’agit évidemment de morceaux choisis qui commencent à éclairer les choses concernant le Médiator. Il faut savoir que les acteurs autour du Médiator sont peut être différents de ceux qui ont été « passifs » pour Vioxx, Celebrex, Avandia ou Acomplia… mais il en découle un problème lourd que Bertrand « ne veut pas voir ». Oui, les politiques ont eu leur influence sur l’Agence car des ENArques ne ferment pas les yeux sans ordres… c’est leur marque de fabrique… certes, on voit que Marimbert ira finir sa vie professionnel dans une autre agence, pour avoir été incompétent (curieuse sanction quand on voit que des chômeurs restent étranglés dans la misère pour avoir juste été en retard à plusieurs reprises à leur boulot).

L’autre point que l’Igas oublie c’est le maillage européen… Alors que Bertrand veut faire vite (et mal comme d’habitude), lui qui a de part son activité de ministre de la santé une responsabilité humaine et politique sur Médiator, lui donc, va faire une réforme de plus… mais il est déjà trop tard car tout se décide à l’Europe… tout se manigance à l’EMEA et au CSP et l’Agence comme la Pharmacovigilance sont désormais inféodés à ces instances européennes… aussi, il est déplorable de voir qu’on va chercher deux coupables foireux au sein de l’Agence et qu’on reforme stupidement sans tenir compte de la problématique européenne… 

ps : dans un prochain billet, je focaliserai sur les morceaux choisis concernant les méthodes de Servier (mais la presse entière en a déjà parlé).



25 réactions


  • Alpo47 Alpo47 18 janvier 2011 11:51

    De toutes façons, tout le système est « pourri ».
     Depuis environ 30 ans, l’industrie pharmaceutique, et Servier semble en être un superbe exemple, a progressivement corrompu tout le système, jusqu’à et encore actuellement, faire nommer d’anciens salariés au ministère. Ainsi , sauf erreur de ma part, Roselynbe est une ex pharmacienne salariée des laboratoires. Idem actuellement.
    Les « autorités de controle » sont aux mains de gens rémunérés par l’industrie, la formation professionnelle des médecins est à la charge de l’industrie. La boucle est bouclée.

    Si les labos gagnent des milliards, les pharmaciens font partie des plus haut revenus, les médecins également. Tout le monde dépend d’une chose : prescrire. Juste le miroir de notre société.

    La maladie et les épidémies (H1N1) sont autant de source de profit pour l’industrie ... et les autres.

    Dans l’état actuel, il ne reste guère d’organismes qui ne soient aux prises avec le « conflit d’intérêt ».

    Je doit tout de même préciser qu’il reste encore des médecins intègres et d’abord soucieux de leur patients. Il faut juste chercher.


  • TSS 18 janvier 2011 13:23

    l’IGAS a determiné que seuls les labos et afssaps etaient responsables mais surtout pas les

     politiques ! ce serait risible si ce n’etait aussi triste !!

    quant on voit le niveau technique de la nouvelle promue (F.Amara) ca promet... !!


  • janequin 18 janvier 2011 14:31

    Si tout le système est pourri, c’est d’abord à la racine, dans les fondements de la médecine classique, qui a voulu passer outre à la sanction de l’étude chimique des réactions biologiques. Sait-on exactement ce qui se passe avec les anticorps ? Sait-on comment fonctionnent (au niveau de la molécule s’entend) les médicaments antisida ?
    Quel mot savamment galvaudé que le mot « moléculaire », utilisé à toutes les sauces (biologie moléculaire), sans qu’on n’y décrive aucune réaction chimique faisant appel à une description de molécules !


  • kéké02360 18 janvier 2011 16:12

    même musique pour les biotechnologies végétales !!!

    mais cette fois smiley

    http://www.infogm.org/spip.php?article4684 


  • bo bo 18 janvier 2011 16:33

    Très bon article, juste un comùplément

    Le problème des labos c’est qu’il n’y a pas eu de découverte majeure depuis longtemps, alors il faut aussi du docteur Knock (exemple H1N1 fortement démoncé par les internautes d’Agoravox).
    De plus, chose ibouïe ils peuvent fixer librement le prix du « nouveau médicament » (qui est généralement le même que celui va tomber dans le public, sans apport thérapeutique
    ....). Et cela au nom des frais d’amortissement de la recherche....
    Le kafka de l’histoire et l’absurdité cs sont que les autorités françaises (car c’est nous qui payons de fait ces recherches) n’a pas demandé et exercé un droit normal de contrôle des dites recherche.
    De plus, les labo ont le droit (merci à l’UMPS) de faire homologuer leur médicament en France ou au près de la communauté européenne...... (sans commentaire pour ne pas s’énerver).
    La seule marge de manœuvre « institutionnelle est le taux de remboursement de la sécurité sociale et le droit (jamais exercé) d’obliger à faire figurer des textes sur les emballages qualifiant le degré d’efficacité thérapeutique ou non par rapport à la précédente formule.
    Les ministres qui se sont succédés au ministère de la santé depuis 30 ans ont un bilan déplorable et ont adopté la devise de FABIUS....... »responsable mais pas coupable" et continuent leur coupable carrière politique


  • bo bo 18 janvier 2011 16:34

    Désolé pour les fautes, c’est parti par erreur sans correction


  • Alpo47 Alpo47 18 janvier 2011 18:09

    Ce qui revient donc à dire que les laboratoires sont une « mafia pharmaceutique », cupide et sans éthique, dont le seul objectif est le profit immédiat,sans souci des conséquences.
    C’est plus court comme ça, non ?


  • Tuscany 18 janvier 2011 21:35

    Quand il ya la moitié de l’argent ne regarde même pas à votre santé !
    By Tuscany


  • Cap2006 19 janvier 2011 07:57

    Il y a longtemps que plus personne ne croit aux rapports diligentés par les gouvernements... et bien avant la triste période actuelle.
    heureusement... nos amis tunisiens qui partaient de si loin montrent que la dignité est toujours à porté de main... enfin pas dans un pays sénile, dirigé par des seniles, pour des séniles...


  • kéké02360 19 janvier 2011 09:01

    c’est pas parti pour changer dans l’agriculture !!

    conflit d’intérêts même Musique !!!

     

    http://citoyens.citoyaisne.free.fr/PartideGauche02/index.php/?q=FNSEA


  • kéké02360 19 janvier 2011 09:06

    la chine ne se laisse pas embourber si facilement par les USA

    http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65587.htm 


  • kéké02360 19 janvier 2011 09:22

    la guerre industrielle sur le vivant , la vie fait rage !

    http://www.infogm.org/spip.php?article4645 


  • voxagora voxagora 19 janvier 2011 12:22

    Merci pour cet article.

    En effet, ce genre de dénonciation venant d’une personne plus spécialisée dans le champ incriminé a plus de chance d’être lu que d’autres, même s’il suffit de bien enquêter pour être compétent.
    Le Médiator est pointé comme on pointe un bouc émissaire,
    alors qu’il n’est que l’arbre qui cache une forêt très très très touffue.
    Mais c’est une bonne base de recherches, en tant que modèle de certaines pratiques.
    L’alliance de la politique et des médias menteurs est régulièrement dénoncée sur ce site,
    mais l’alliance de la politique et du méd..ical gangrène tout aussi sûrement ce qu’on appelle « la médecine » en général, vitale, elle.

  • elmapelki elmapelki 19 janvier 2011 13:56

    Toma, Toma la pastilla !!!


  • pierrot pierrot 20 janvier 2011 11:33

    Bonjour,
    .

    Le rapport de l’IGAS est un bon document qui montre bien les dysfonctionnement dans l’affaire du scandale du Médiator.
    Il est disponile en ligne sur internet.

    Il montre les pratiques faussaires du laboratoire Ser vier qui a largement contribué à masquer la vraie nature du Médiator (benfluorex) qui appartient à la famille chimique des amphétamines (anéroxigène) comme l’isoméride (dexfenfluramine) du même Servier interdit en 1999.
    .

    Les chimistes savaient que le Médiator et l’Isoméride ont le même métabolite très toxique : le norfenfluramine.
    .

    Ni Servier ni l’AFSAAPS n’ont donné une suite rapide aux très nombreuses alertes sanitaires graves d’où 10 années perdues (1999-2009) avec comme conséquence des milliers de morts induits et d’intervention graves.
    .
    Le statut de l’AFSSAPS devrait être rapidement réformée afin de rendre l’expertise indépendante de l’industrie pharmaceutique et améliorer la transparence des décisions et instructions en cours.
    Cela aura un coût pour le budget de l’Etat mais c’est dans l’intérêt des patients.

    Si cette nécessaire réforme était menée à terme la prévention de nouveaux scandales sanitaires serait atteint.
    C’est l’intérêt des patients mais aussi de l’industrie pharmaceutique dont l’image de marque est salie par ce « mouton noir » , c’est aussi l’intérêt des politiques et parlementaires de conduire cette réforme.

    Bonne journée.


  • ravachol 23 janvier 2011 08:55

    Si un jour l’euthanasie est legale(sujet a l’etude au senat) et que les labos ont le monopole de la fabrication des produits,ca risque d’etre tres rok and roll


  • Lutin Lutin 23 janvier 2011 21:40

    Voici l’allocution de not’Président pour la remise de la Légion d’Honneur à Servier, je ne mets pas Monsieur et c’est volontaire.

    ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

    à l’occasion de la remise des insignes de Grand’Croix de la Légion d’Honneur au Docteur Jacques SERVIER Président fondateur des Laboratoires Servier

    Palais de l’Élysée – Mardi 7 juillet 2009

    Monsieur le Docteur, Monsieur le président, Cher Jacques SERVIER,

    Votre histoire, c’est une grande histoire française riche de leçons. Vous avez traversé le siècle - on ne le dirait pas - et vous êtes pleinement engagé dans les nouveaux défis de notre temps.

    Je me souviens de notre première rencontre en 1983. C’était déraisonnable, c’est là que je vois que vous êtes enthousiaste, vous pensiez déjà à l’époque que je serai Président de la République. Incorrigible Jacques SERVIER !

    Vous êtes un personnage hors du commun. Votre ascèse et votre sobriété forcent le respect de tous.

    Mais je ne veux pas faire votre portrait, comme on croque quelqu’un à distance. Je vous connais trop bien pour cela. Je préfère tenter d’exprimer votre identité profonde.

    Vous êtes avant tout un médecin, un homme de santé et de recherche. Vous êtes à la fois docteur en médecine et docteur en pharmacie. C’était un fait rare en 1950, cela le reste aujourd’hui.

    Vous avez été formé à l’école de la médecine française, celle de Pasteur, celle des nombreux prix Nobel dont notre pays peut s’enorgueillir. Je le dis devant Roselyne BACHELOT, l’école de médecine française – ce à quoi elle croit - est une école d’excellence. J’entends parfois certains opposer les soins et la recherche. C’est oublier d’où vient la médecine de notre pays. C’est négliger les fondements de l’enseignement des Jean BERNARD et autres Jean HAMBURGER. C’est ignorer que l’amélioration de la santé humaine résulte des innovations de la recherche et des progrès qu’elles ont permis.

    Le groupe auquel vous avez donné votre nom, est un laboratoire de recherches et vous êtes passionnément attaché à cette spécificité.

    Vous avez fait de votre groupe une fondation. Raymond et moi, on y a joué un rôle. Grâce à ce statut, tous les résultats du groupe sont réinvestis dans la recherche. Aucun dividende n’est distribué. Tous les médicaments SERVIER sont issus de la recherche du groupe et vous parvenez, avec les 20 000 collaborateurs du groupe, à inscrire ce site dans la durée, à le faire fonctionner année après année.

    Vous êtes médecin Jacques et, à ce titre, vous avez une conception profondément humaine de votre métier. Vous vous êtes battu toute votre vie pour soulager et pour guérir, pour proposer aux médecins et à leurs patients des médicaments efficaces.

    Au sein du groupe, vous avez prêté une attention particulière aux collaborateurs et à leur talent. Vous vous êtes très tôt préoccupé de la place des femmes à tous les échelons du management. Vous avez fait du groupe SERVIER une fondation et vous avez voulu protéger les femmes et les hommes de votre entreprise plutôt qu’attirer les capitaux. Vous nous rappelez que les capitaux n’ont d’autre destination que de servir les projets que chacun d’entre nous porte en lui. L’homme n’a pas à être soumis aux caprices du capitalisme et encore moins aux caprices de la spéculation.

    Jacques, vous êtes un entrepreneur comme la France en compte peu. Les Laboratoires SERVIER, entre 48 et aujourd’hui, ont connu un développement remarquable. De la pharmacie familiale à Orléans, neuf employés. En 54, l’entreprise s’installe à Neuilly. Aujourd’hui les Laboratoires SERVIER sont présents dans 150 pays, avec des positions très fortes en Russie, en Chine, en Europe de l’Est. 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires et l’effort de recherche et de développement représente 25% du chiffre d’affaires.

    Vous n’avez eu de cesse de prendre des risques. Je sais bien que passer d’Orléans à Neuilly, c’était déjà, pour reprendre vos mots, se développer à l’international.

    En tant qu’entrepreneur, vous avez été souvent sévère à l’endroit de l’administration française. Vous critiquez l’empilement des mesures, des normes, des structures et vous avez raison.

    Enfin Jacques, vous être un patriote. Grâce à vous, notre pays peut saluer une industrie de classe mondiale. C’est un privilège réservé à moins d’une dizaine de pays dans le monde.

    Et puis, vous êtes un homme fidèle. Vous êtes quelqu’un qui ne retire pas son amitié. Vous êtes un homme courageux et vous être un visionnaire.

    La nation vous est reconnaissante de ce que vous faites. Vous êtes une publicité vivante pour les médicaments SERVIER parce que, franchement, l’âge n’a absolument aucune prise sur vous. Je dirais même que par une certaine coquetterie, vous rajeunissez Jacques. C’est extrêmement énervant !

    J’espère que chacun aura compris que c’est un grand Français que je vais décorer au nom de la République française.

    ***Ben mon cochon.........

    Tiré de cet article

    http://www.atoute.org/n/article182.html


Réagir