mardi 31 mars 2009 - par LOmiG

Autocensure et fissures

S’il y a une chose qui préfigure bien ce qu’est la censure, c’est bien l’autocensure. Criticus m’a alerté sur un excellent article de Gil Mihaely, sur Causeur.fr, et qui revient sur l’affaire Gouguenheim. Sylvain Gouguenheim est un historien médiéviste, qui a écrit un livre - Aristote au Mont Saint-Michel - sur les racines grecques de la culture européenne, en remettant en cause un mythe de l’histoire officielle, à savoir celui selon lequel une part des savoirs de la culture européenne serait à mettre au crédit de l’islam. Le livre a fait polémique (il aurait mieux valu que l’on reste dans la controverse), et les attaques ad hominem n’ont pas manqué de pleuvoir. Franck Boizard, Criticus en ont déjà parlé. Vous pouvez lire une passionnante interview de Sylvain Gouguenheim sur ExtrêmeCentre.

L’article de Gil Mihaely retrace bien l’histoire de la polémique, et sa dérive dans le procès en sorcellerie. Je cite sa conclusion :

Peut-être les détracteurs de Gouguenheim ont-ils, en partie ou totalement raison quant à la pertinence de sa thèse – je me garderai bien d’en juger. Leurs méthodes, qui consistent à abattre un auteur au lieu de critiquer ses idées, n’en sont pas moins injustes et indignes de la communauté universitaire. Il est ignoble d’accuser Gouguenheim d’islamophobie et de faire de lui un promoteur du “choc des civilisations”. C’est plutôt en prétendant soustraire non seulement l’islam mais aussi l’histoire du monde islamique à la liberté de la critique et de la recherche qu’on creusera un fossé entre les civilisations.

Les auteurs de ces attaques portent une lourde responsabilité. L’affaire Gouguenheim a en tout cas changé de registre, glissant de la controverse académique au procès stalinien. La question n’est pas, n’est plus, le rôle de tel ou tel moine obscur, les compétences linguistiques de Sylvain Gouguenheim ou ses supposées erreurs et approximations. Ce n’est plus le contenu du débat qui importe mais le débat lui-même, ses limites et ses règles et, en vérité, sa possibilité même. Ce qui est en jeu, c’est la liberté de s’exprimer et même de se tromper, sans craindre pour son honneur ou son avenir professionnel, sans avoir à redouter d’être victime de harcèlement moral. En ce moment, c’est la seule question qui vaille.

Gil Mihaely

Tout ce que cette affaire m’a évoqué, c’est le mot “d’autocensure” : une culture qui s’autocensure est prête pour accueillir la censure, non ? Et cela est entré en résonnance avec un extrait d’un sketch de Guillon :

Et puis, j’ai vu ce week-end le film “La journée de la jupe”, film difficile et courageux, humaniste mais sans concession, porté par des acteurs formidables.

Et j’y ai vu quelque chose de positif, comme une fissure - justement - dans l’autocensure ambiante, dans le relativisme culturel béat, tolérant tout et n’importe quoi, y compris l’intolérable. Je rejoins complètement l’avis de Finkielkraut (entendu sur Bivouac-ID) : La journée de la jupe est un évènement historique en France. La conclusion à Finkielkraut :

				 				 					



9 réactions


  • John Lloyds John Lloyds 31 mars 2009 12:03

    Excellent article, merci

    La racine identitaire est probablement le sujet le plus sensible qui soit, aussi n’est-il pas étonnant qu’il fasse l’objet de censures répétées, notamment dans un système où la culture s’apparente de plus en plus à de la propagande.

    Il y a en effet de gros doutes sur les tenants de la philosophie scolastiques, si l’influence arabe est indéniable - les chrétiens faisaient de véritables pélérinage à Tolède où était enseigné "tout ce qu’un chrétien ne devait pas savoir" - l’influence grecque native est elle aussi incontestable : toute la "vieille logique" aristotélicienne était déjà connue bien avant les premières traductions du XII° siècle, puisque déjà Abélard l’avait utilisée.

    S’il y a un panachage incontestable des deux cultures, le problème est de savoir si l’une a été prépondérante. Comme d’habitude, la propagande préconçue ne fera que jeter un doute supplémentaire, si Sylvain Gouguenheim a été l’objet d’un tel lynchage, nul doute que l’interdiction du débat cache encore un lièvre.


    • LOmiG LOmiG 31 mars 2009 13:16

      salut,
      merci pour ton compliment. En fait un des problèmes ici aussi est le fait qu’on confond (ce que dit d’ailleurs Gougenheim dans l’interview en lien dans l’article) islam (l’idéologie) et culture islamique ou monde / civilisation islamique.

      A une époque (l’âge d’or andalou), la civilisation musulmane a produit de belles choses dans beaucoup de domaines, mais le fait est que ce n’est pas grâce à ses racines islamiques (l’idéologie), mais malgré elles. C’est un point sur lequel revient Ibn Warraq dans son livre "pourquoi je ne suis pas musulman". Il y explique que les avancées de cette civilisation étaient obtenues "en cachette" des pouvoirs religieux.

      Et comme les islamistes savent très bien jouer de cette ambiguité, il nomment indifféremment l’idéologie ou la culture du même mot "Islam". Pratique.


  • Le péripate Le péripate 31 mars 2009 13:49

     Je ne m’attendais pas à vous retrouver ici Lomig. J’apprécie votre blog, et si vous revenez ici, ce sera un grand bonheur pour tous ceux qui commencent à se lasser du 911, du complot sioniste et du capitalisme-qui-mange-les-enfants.

    Dans cette lignée de la censure sur certains thèmes, et sur les racines grecques de l’Europe, on peut aussi citer le discours de Ratisbonne de Benoît 16, qui a soulevé une tempête médiatique, texte qui a été déformé au possible.


    • LOmiG LOmiG 31 mars 2009 15:58

      En fait j’ai arrêté de republier mes articles ici, mais celui-ci a été sélectionné par la rédaction d’Agoravox. L’accueil que tu y fais m’incite à revenir publier mes articles plus souvent ici, alors ?

      Sinon, le mieux est de venir sur expressionlibre.net, et participer à des discussions sans toute la bande de trolls gauchistes-anti-sionistes-anti-capitalistes.

      c’est à la fois reposant, et stimulant parce qu’on va plus loin - parfois - dans les discussions...

      à bientôt


    • Jojo 31 mars 2009 19:25

      A l’auteur,
      Et en gras s’il vous plait, ceci est-il de vous ? :
      « à niveau de vie égal, l’état de santé est-il plus mauvais dans les populations musulmanes parce que l’islam y réduit le rôle des femmes ou les sociétés qui dévalorisent les femmes sont-elles les plus enclines à s’islamiser ? »
      http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=38683



    • Le péripate Le péripate 31 mars 2009 21:15

       C’est noté, merci.


    • ASINUS 31 mars 2009 22:46

      yep l avais apprécié moi , puis vint le péripate pfff faut que je relise ,un con de gauche comme moi j ai du rater quelque chose...


    • Le péripate Le péripate 1er avril 2009 00:44

       smiley Il ne faut pas se laisser gouverner par ses préjugés. 


  • barbouse, KECK Mickaël barbouse 31 mars 2009 15:14

    bonjour,

    article sympathique que le votre, mais si on étend sociologiquement le sujet, on s’aperçoit surtout que les réflexes pavloviens d’autocensure et de censure sont surtout lié à la peur. Des attentats, des bandes de jeunes se fantasment en viril terroristes, qui sont aussi des élèves, et autres lignes de force violentes qui font que la communauté enseignante majoritairement féminine contribue aussi a hystériser négativement la critique principalement parce que pour elles, tout ce qui augmente le ressentie religieux se fait autant contre elles que contre ce qu’elles ont a enseigner.

    L’islam religieux prend une posture victimaire pour ne pas entendre ni même étendre la pertinence de la critique occidentale, d’ailleurs nombreux sont les musulmans dont le complexe de persécution engendre l’absence d’audition a la critique, mais simplement 2 réactions, le rejet ( du ils ne peuvent pas nous comprendre à la comparaison de la critique faite au juifs) ou le combat ( du prosélytisme organique au bandes qui imposent un code ou la dignité est faite voile)

    A cela on ajoute les parallèles avec la palestine, le constat fréquent d’etre une communauté mise à part de la communauté de destin nationale, et le rejet manifeste de quantité de lecture différentes du coran, que le français confond en une seule entité "islam", lectures souvent moyen ageuse dans les pays peu dévellopées. Pourtant Il y a un islam idéologique, méditerranéen, et proche de l’occident,

    Ce qu’il manque fondamentalement pour l’instant c’est un malebranche musulman, un théologien raisonnable du coran, qui s’impose et impose une lecteur en adéquation avec l’usage de la raison qui plait a dieu, du libre arbitre, et où la révélation de la vérité se fait dans l’opposition amicale entre les opinions. 

    Ce dernier point est là grande différence entre nos 2 cultures, depuis la forme de l’écriture de la bible et celle du coran jusqu’au traductions de livres grecs. 

    du point de vue historique, sur les étapes de la construction de la pensée moderne occidental, on aperçoit deux virages distinctement prie de façon opposés entre les zones catholiques occidental et les zones musulmanes. LA bible est un ensemble de témoignages qui corroborent la vérité du christ, son message, et l’esprit critique d’un St thomas n’en fait pas moins un saint que les autres. Il y a dans la bible la reconnaissance validée de l’opinion de plusieurs personnes, d’origine, de niveaux sociales, qui ensemblent forme la bible.

    Aussi une population majoritairement lettrée par la bible conçoit au moyen âge que les divergences d’opinions et confrontations d’opinions sont saines au sein d’une même entité sociale, que l’affirmation de la vérité passe par plusieurs témoins, et de là découle entre autres, aprés des siècles d’erreur et de rapport de force, le prima de la démocratie comme seule capable de réguler sans verser le sang la confrontation des doutes légitime de chacun. La reproductibilité chère aux avancées scientifique participe de ce même courant de confrontation des opinions.

    Avec le coran, il y a une seule opinion, celle du saint qui dicte a mahomet le texte, elle viens d’en haut, elle est censée etre parfaite, immuable, intangible, n’entend pas la critique des hommes, et est issue d’un premier miracle, sont écriture elle même.

    Une population majoritairment lettrée par un texte construit sur cette forme, une seule opinion dont l’unicité de la vérité viens d’en haut et ne peu etre critiqué, avec pour corrolaire pour être croyant il faut s’y soumettre un point c’est tout, n’engendre pas une culture où la vérité se révèle par l’esprit critique, par la confrontation des opinions, par l’insmoussion de l’esprit d’un chercheur aux vérités établies qui l’incite a ne pas aller voir plus loin, mais par la références soumise a un seul corpus de texte considérer comme au delà de ce qu’un homme peu penser et critiquer. 

    il n’y a pas de ST thomas dans le coran. Et pour les livres grecs, notamment les dialogues de platon, un exemple de ce que donne la confrontation des opinions, coté musulmans, ils ont été préservés mais uniqument mis dans les mains des intellectuels autorisés, une minorité. Coté occidentaux, aprés les avoirs récupèrer, les moines copistes de toute l’europe ont user leur doigts sur des plumes en un temps record pour l’époque afin de diffuser ces textes au plus grand nombre. Pas une université, pas une bibliothèque d’honnète homme de l’époque n’était complète sans sont philosophe grec. 

    Aussi l’influence du miracle héllène, une des bases de l’amour de la raison, a imprégnée des générations de lettrées et de penseurs européens, et finalement trés peu dans la culture musulman où on a maintenue ces textes loin de l’accès aux intelectuels. Aux passage on notera que quantité d’esprit de la révolution Française ont dans leur CV " traduit l’oeuvre grec d’untel ou d’untel"

    Ces deux virages là, sont le pourquoi sur le cours qu’a pris la recherche de la vérité scientique, elle a briller de notre coté la méditerranée depuis des siècles, là ou ailleurs, notamment dans les pays musulmans, elle avance au rythme des innovations découverte ailleurs qu’elle assimile plus ou moins vite, mais sans réelle culture de la recherche. 

    Ce qui finit par engendrée ce décalage sur les champs de bataille qui fait que des armées qui se combattaient a l’arme blanche au moyen age, maintenant c’est plutôt un hélicoptère et des missilles contre une kalach, cette derniere n’étant pas non plus une invention issue de la recherche musulmane.

    Aussi, même si bien évidemment avoir un gamin en face de soi qui en marre d’être insulté pour sa religion musulmane c’est pénible autant pour lui que pour qui est devant, ne pas critiquer l’idéologie musulmane, en temps que dogme a prétention intellectuel et universel au delà de l’esprit critique, c’est ne pas l’inciter a le faire lui même, ni a lui faire voir que la modernité dans laquelle il aime vivre, de sa console a son ordi en passant par son scooter, n’est pas dûe a la quête de la vérité orientale mais occidentale.

    Ne pas lui rappelé qu’on ne peu pas prendre au pied de la lettre un livre qui est écrit a une époque où l’on était persuadé que la terre était plate, c’est le laisser du mauvais coté de la science et de la modernité, celui ou on apprend des choses inventée par l’occident, obligé pour se donner une valeur de rendre moralement ou esthétiquement supérieur, voir virilement aggressif, une appartenance a une culture qui a abandonné la notion d’évolution interne en figeant la vérité a une époque où la terre était communément connue comme plate.

    Aussi, bien sur, laisser "l’ennemi musulman" dans l’ignorance, loin de l’apprentissage de l’usage des armes en arrétant la conscription, en cassant l’école, en lui apprenant via les ghettos américains qu’etre virile c’est être haschiché sans cervelle, et que son honneur c’est d’être soumis a une culture intellectuellement figée, fait de bien des musulmans une mains d’oeuvre pour métier peu qualifiés, militairement soumise, parce que si les banlieues dérapent de trop, aprés la police laxiste et lache, reste l’armée et son droit de tirer en cas de guerre civile mettant en danger l’intégrité de la nation. 

    Mais pour le gamin innocent qui viens de naitre en France aujourhd’ui, de culture franco musulmane, l’important, si on lui souhaite un avenir de Français et d’européen debout, c’est de l’inciter a lacher lui même la partie moyen ageuse du coran, ne garder comme le font les catholiques, l’incitation a faire sienne un ensemble de vertue,

    et de prendre ce qu’il y a de bien dans sa culture occidentale, afin d’avancer en franchissant le double obstacle qui est le sien, être soumis a l’obligation morale de respecter ses racines oriental d’un coté, ( ce qui oblige a constamment regarder en arrière, se sentir coupable, solidaire de la misère et impuissant a pouvoir y changer quoi que ce soi, etc...) et d’être confronté à la crainte des autres de le voir épanouir un talent qui rentre en concurance avec eux dans la compétition de la vie notamment professionnel.

    C’est un choix a faire, participer de l’avenir ou rester engluée sur les passées que nul ne peu plus changer.

    amicalement, barbouse. 



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