Silence politique sur la « socialisation » du capitalisme
Le fait que le président ait parlé de vouloir « socialiser » le capitalisme aurait du avoir un retentissement dans le microcosme intellectuel, politique et philosophique de notre pays. Il faut bien admettre que le silence autour de ce sujet est inquiétant ? Faut-il en croire que personne n’est dupe de ce nouveau slogan, ou bien que la pauvreté et la régression de l’information n’a plus la force de sortir de sa pensée unique cristallisé autour du faits divers et peoples, et que subitement un sujet aussi philosophique laisse pantois, car dans aucun livre à ma connaissance vous ne trouverez ce sujet, si ce n’est dans mon essai écrit en 1999, mais ce n’est pas mon propos.
Quelques Agoraviens se sont lancés dans des explications du capitalisme et ont reçu en échos des commentaires. Certains reprenant les définitions livresques d’autres donnant leurs perceptions du vécu. Je ne veux pas discuter l’exactitude des propos tenus par les uns ou les autres qui sont fondés par leur degré d’ignorance ou de savoir tout comme moi.
Mais force est de constater que la nécessité de vivre fait accepter les concepts et les contraintes qui nous soumettent à leur exercice. Il en est ainsi pour le capitalisme, son concept ne fut pas inventé par un quelconque penseur mais est le produit d’une association de comportements, dans lequel il faut inclure tout aussi bien la transformation des relations salariales en 1804 « le louage de sa force de travail » que l’abandon de la production manufacturière vers une production industrielle pour poursuivre la recherche de l’enrichissement qui s’opérait au travers des anciens privilèges.
Le salariat est apparu dès que les liens féodaux ont été suffisamment lâches pour permettre à des hommes de disposer librement de leur force de travail. Bien que cette liberté soit plus formelle que réelle, car ne disposer que de la force de ses bras pour subsister et assurer ses lendemains, borne nécessairement cette liberté. C’est ainsi qu’au XIV ième siècle, apparaît le terme « prolétaire » qui qualifiait ceux qui ne possédaient que leur descendance (proles, en latin), et les pauvres dont l’existence ne dépendaient que de leur capacité à louer leur bras.
Mais la plupart du temps leur activité professionnelle les faisait qualifier « Brassiers », « manouvriers », « journaliers ». Ils étaient plus comme des domestiques, car la plupart du temps ils s’intégraient à la famille de leurs employeurs, dont ils partageaient le gîte et le couvert, à l’instar de la « famille » romaine qui désignait en fait l’ensemble des esclaves. Cette intégration limitait la précarité de leur existence, parce que le salaire correspondant (modeste fraction de la récolte, quelques pièces de monnaie équivalentes à un argent de poche) ne permettait pas de trouver une autonomie, à moins de trouver d’autres occupations complémentaires, ce qui n’était pas chose facile. Malgré des conditions qu’il ne faut pas regretter, cette société rurale, dure pour les pauvres et les sans grades, était immergée dans un monde de relations personnelles, voire familiales qui lui donnaient un sens (communauté de famille).
Avec l’avènement de l’industrialisation, les liens personnels ne comptent plus, du fait d’une part de l’urbanisation (migration vers les cités industrielle), d’autre part par la structure industrielle qui mobilise des masses de travailleurs que l’on voit mal s’installer dans la famille de l’employeur. La seule forme qui subsistera en la matière, héritée de la ruralité, sera le « paternalisme ». Un paternalisme qui donnait un sens à l’intégration dans l’entreprise, de la même manière que nous parlons aujourd’hui, « d’esprit d’entreprise ».
Le salaire devint le mode dominant de mobilisation et de rémunération de la force de travail, sans que pour autant la condition des travailleurs s’améliorent, car ils passent d’un dur labeur rural, à un prolétariat qui les plonge dans la misère, et il faut attendre la première loi « sociale » votée en mars 1841 pour voir le travail des enfants limité dans les filatures. Au XIX ième siècle le salaire devient un prix comme un autre, soumis aux fluctuations de l’offre et de la demande en fonction de l’intensité de la concurrence, ce n’est donc plus le juge ou la coutume qui le fixe. Cette relation est analysée par le code civil en 1804 et reconnue comme résultante d’un échange de libres volontés, et considéré comme une forme de « louage de service ». (Imposture du contrat de travail, plutôt contrat d’adhésion).
Ainsi le salarié privé de liens familiaux ruraux, privé d’une fixation d’un salaire coutumier, voit la recherche d’un travail et du salaire correspondant devenir essentielle, et s’imposer comme la valeur référentielle quelles que soient les lentes transformations qui ont jalonné jusqu’à nos jours, sa durée, son organisation, sa rémunération en fonction des périodes qui marquent notre société industrielle.
Nous pouvons parfaitement comprendre qu’avant comme après la recherche du moindre coût et le propre d’un comportement biologique, mais c’est un autre sujet complexe, on va donc dire historique, car nous pouvons le faire remonter à la Grèce antique, et qu’il est né de la sédentarisation qui a contraint des groupes d’hommes à se structurer pour produire. La démocratisation bourgeoise d’abord par le libéralisme et son extension a une population de plus en plus éduqué grâce a la vision de Condorcet ou de philosophe comme Pelloutier à ce que nous connaissons aujourd’hui.
Ainsi des règles de commerces instaurent les modalités par lesquelles se comptabilise et se réparti la création du capital issus du besoin de produire et d’échanger des biens, produits et services et ses différentes dénominations suivant sa distribution, salaires, honoraires, vacation, intéressement, bénéfice, rentes, impôts etc.
Ce n’est donc qu’au dix-neuvième siècle, sans entrer dans la discorde sur ses origines qui opposait Max Weber et Werner Sombart, que l’industrialisation créer les conditions du travail en son sein proche de l’esclavagisme, pour ne pas dire issus de l’esclavagisme (société qui utilisent les esclaves ou les personnes en servitudes à des productions essentielles, ne pas confondre avec la traite des noirs).
La base en est toujours la recherche du capital par la transformation de matières premières (matériaux ou la capacité intellectuelle) pour produire un produit fini (biens, services, épargnes) au plus bas coût et l’échanger au plus haut prix, en utilisant le travail des autres, devant l’impossibilité de faire tout soi-même. Quand c’est le cas nous parlons d’artisans.
Ce processus de production collective dans un bassin d’extraction, de transformation etc. que nous appelons aujourd’hui bassin d’emploi, à induit la notion de lutte contre l’exploitation de l’homme par l’homme par des philosophes qui se sont penchés sur l’analyses des rapports humains qui unissaient les « possédant et les serviteurs du système de production.
Comme je le décris cette exploitation n’est pas nouvelle sauf que depuis la révolution elle bénéficiait du statut de liberté de choix, ce qui laisser supposer que l’autonomie des individus n’était pas attachée à la servitude d’un maitre, c’est pour cette raison qu’est née la notion de louage de service.
En effet nous pouvons observe parce que nous appelons le marché de l’emploi que les « possédant » demandent de l’aide pour parvenir à la réalisation de leur objectif de production, et que les sans possession, les démunis, ceux qui n’ont que leurs bras et leurs têtes cherchent à qui se louer, voire plus précisément comme ont l’entend parfois aujourd’hui à qui se vendre. Certes ils peuvent entreprendre comme hier, sous réserve de disposer de la filaire héritière ou financière.
Aujourd’hui ses relations de production issus de la sédentarisation sont identiques à celles d’hier, seule la perception du maitre et la nature de ses possessions se sont transformées, le maitre c’est dilué dans la société anonyme et vous pouvez tout à la fois être une fraction de ce maitre (actionnariat) et celui qui le sert (le salarié), sans que cela est changé la nature de la recherche maximum d’un capital comme moyen d’échange, dont le cumul conduit à la puissance.
Alors où ce situe la différence qui fait le capitalisme ? Dans la possession d’un moyen de production qui vend au travers du produit sont coût de production, y comprit le capital reversé en salaire et autres, qu’il récupèrera chez tous ses clients potentiels pour reformer son capital et regrouper par ce moyen des capitaux qui lui permette d’en ressortir un bénéfice avec lequel il prospèrera ou acquerra des titres de propriétés (actions) sans jamais participer à la gestion des entreprises ou groupes dont il est possesseur en partage qu’il confie a un tiers qui se substitue a lui et agit en son nom, même quand il peut en être nominativement l’actionnaire majoritaire.
Ce maitre qu’il n’est plus possible de toucher est le produit de la société anonyme et du marché boursier, et derrière eux tous les acteurs qui agissent en leurs noms se déculpabilisent de leurs comportements, ce qui conduit non a une concurrence entre individus, mais une concurrence de comptabilité, une concurrence de l’impersonnalisation du système auquel à conduit sa réglementation.
Vous pouvez bien jeter tel ou tel manager son remplaçant au nom des comptes s’attachera à faire la même chose. Ce système que je qualifie de "dominant systhèmique", suscite les réponses de notre affect qui ordonne nos comportements en bien ou mal, alimente et conduit notre vie sociale et politique.
Aujourd’hui la puissance des banques est le produit du système de production industrielle, donc du capitalisme, en mettant sur le marché, par création, la monnaie qui transitera entre tous les agents économiques de l’entrepreneur au client pour se concentrer dans « la pompe à création de capital » « qui enfle sans jamais redistribuer, je vais dire convenablement.
Convenablement parce que l’asservissement de ceux qui louent leur force de travail aux possédants sont de même nature que les ilotes face aux spartiates, des esclaves face aux romains, des serfs face aux seigneurs, du journalier ou manouvrier face à la noblesse ou la bourgeoisie.
Seule la contestation de masse a su imposer une redistribution, de cette contestation par des hommes instruits en est sorti dans le sang le socialisme avec toute s ses figures emblématiques et ses erreurs historiques.
Alors quelle est donc cette "socialisation" du capitalisme que veut mettre en œuvre notre Président ?
Pour ma part j’en défends une conception :
Nous pouvons convenir que lorsqu’un particulier prend l’initiative d’un investissement créatif, il est normal qu’il dispose des revenus et profits de ce dont il est le propriétaire.
Mais lorsque son projet doit utiliser l’aide de tiers, alors c’est lui qui est demandeur ; et c’est une évidence que de comprendre que sans ces aides, il ne parviendrait pas à ses fins.
De fait une collaboration s’impose, et si le propriétaire veut être le maître absolu de ses décisions, s’il veut disposer du fait du prince, alors il doit rester seul.
Dans tous les autres cas il y a une collaboration à imaginer pour que le propriétaire conserve les profits de son investissement et atteigne ses buts, sans s’approprier ceux générés par les tiers.
L’histoire de l’impuissance collective a conçu des maîtres plutôt que des guides, mais le reconnaître ne le rend pas irréductible ; et si le code civil a analysé en 1804 la « marchandisation » de la force de travail comme du « louage de service », donc du marchandisage. Je pense que depuis 1804, il est intervenu bien des événements culturels (développement des sciences) qui nous permettent de concevoir notre activité de travail complexes entre adultes culturalisés, comme une relation humaine, et non un conflit d’intérêt comptable.
Cela naturellement nécessite une approche plus éducative de ce que j’ai appelé le « collectivisme fractal », ou entreprendre avec les autres.