jeudi 7 mai 2009 - par worf

Touche pas ma musique !

Ou comment la musique et ce qui tourne autour a changé depuis une vingtaine d’années pour en arriver à soupçonner des consommateurs de piraterie, à opposer artistes et internautes !

J’ai acheté mon premier disque, un vinyle en 1980. A ce moment là, entre copains, on se réunissait autour d’un tourne disque et on écoutait des albums que chacun avait apportés. On se les prêtait, on les enregistrait sur des k7 mais je ne me rappelle pas que les maisons de disque ont fait pression sur les politiques pour interdire ces copies.

C’est vers les années 80 qu’on a commencé à entendre le terme d’industrie du disque, industrie musicale. Auparavant, la musique était confinée dans un certain artisanat on va dire où les quelques chanteurs ou groupes pouvant en vivre étaient vite considérés comme des stars. Mais à la fin des années 70 et au début des années 80, on va assister à une explosion musicale : toute une série d’artistes et de groupes vont créer des nouveaux courants musicaux. Dès qu’un groupe explosait dans un nouveau genre musical, les autres maisons d’éditeurs s’engouffraient dedans en signant à tour de bras d’autres groupes dans le même genre en espérant que l’un d’entre eux perce aussi. De plus en plus de magazines musicaux vont apparaître, des chaînes musicales vont voir le jour et diffuser 24h sur 24 des vidéo clips.

Des investisseurs, sentant que l’on pouvait faire beaucoup d’argent vont se lancer dans ce créneau. La musique passait dans le giron du business ! Elle va passer complètement dans le domaine de l’industrie quand des maisons d’éditeurs vont répliquer les chanteurs et chanteuses qui marchaient sur les radios et les chaînes musicales. Quand les éditeurs vont commencer à se racheter l’un l’autre, pratique qui s’est généralisée dans le monde de l’entreprise à cette époque là aussi. Pourtant les maisons d’édition ne sont pas concurrentielles. Pourquoi essayer de se racheter ainsi ? Pour peser plus lourd, avoir un panel plus conséquent d’artiste ? Pour réduire les coûts et donc gagner plus d’argent en fusionnant des branches communes ? Pour s’approprier le catalogue artistique d’une autre maison d’édition ?

En 1985, au sommet de sa gloire, Michael Jackson rachète le catalogue des Beatles au grand désarroi de Paul McCartney. Quelques années plus tard, les albums de la star ne rencontrent plus autant de succès et les dettes commençant à apparaitre, il doit céder une partie du dit catalogue à son éditeur Sony Bmg. Tout récemment, on apprend que EMI, Michael Jackson, Sony et McCartney ont signé un accord pour remasteriser les albums du groupe et diffuser les chansons des Beatles sur itunes. Entre temps la valeur financière du catalogue a énormément augmenté, certains ont dû faire ou font encore de bons profits !

Ou est-ce simplement un phénomène existant déjà avant de rachat d’une maison d’édition éprouvant des difficultés financières par une autre qui s’est amplifiée ?
Pourtant le nombre de maison d’édition importantes a diminué depuis ces 20-30 dernières années !

Et puis une nouvelle technologie arrive : le CD. Non seulement les nouveaux albums vont être imprimés sur ce nouveau support mais on va rééditer tous les anciens vinyles. Combien de possesseur de vinyles n’ont pas racheté leurs albums également en CD ? Et les profits sont énormes car il n’a en gros que les coûts de fabrication et les royalties qui interviennent dedans ! Mais tout cela n’a qu’un temps ; alors on trouve des astuces comme les best of, very best of, coffret intégral pour essayer de maintenir des ventes élevées. On rachète une autre maison d’édition, on hérite ainsi de son catalogue et on publie les artistes qui marchent, les autres étant bien souvent mis aux oubliettes.

Mais la technologie va permettre aussi à de plus en plus de gens pour des coûts de moins en moins élevés de pouvoir s’offrir son propre studio d’enregistrement. Il n’est donc plus nécessaire d’être dans une maison d’édition indépendante ou une major pour enregistrer un album, on peut le faire chez soi, créer son propre label et trouver un réseau de distribution.
 
Alors que la musique n’a jamais autant foisonné, les majors ne passent plus du temps à rechercher des nouveaux talents, à arpenter les salles de concert et la musique produite devient de plus en plus standardisée.

Coup de tonnerre : voilà que débarque internet puis les sites p2p !

Internet permet de faire diffuser sa musique sans passer par le réseau traditionnel. Au début, les majors ne s’intéressent pas à ce nouveau moyen de communication, ils vont même céder facilement et pour pas cher à Apple la possibilité de vendre de la musique sur le net et d’en écouter sur les ipod. Hélas pour eux, cela rencontre un vif succès et chez les majors, on grince des dents, on passe à côté de juteux profits et fini leur hégémonie musicale !

Il faut réagir, voilà, on a trouvé, c’est à cause des p2p et des internautes partageant des fichiers, ils menacent gravement l’industrie du disque, oups ! correction, ils menacent les artistes.

Les internautes se retrouvent soupçonnés de piraterie (il y a une différente entre échanger des fichiers et aborder un navire, kidnapper l’équipage et réclamer une rançon !), il faut interdire les sites p2p, les politiques doivent promulguer des lois pour protéger les artistes contre les internautes.

Tout ce qu’il y a dans cette opposition pour ou contre Hadopi, pour ou contre les p2p voire la toile est que des gens s’accrochent encore à un mode de fonctionnement et de pensée d’avant internet où il y avait d’un côté les artistes avec la structure des producteurs, éditeurs et de l’autre côté les consommateurs !

Avec l’avènement d’internet et des nouvelles technologies de l’informatique, cette séparation est devenue nettement plus floue. les moyens de créer au sens artistique sont devenus beaucoup plus facile d’accès, moins onéreux. Beaucoup plus d’artistes peuvent enregistrer leurs chansons chez eux dans leur studio, cette capacité est désormais à la portée de nombreuses personnes de par le monde. Mieux, étant tous interconnectés, chacun peux faire connaître ses chansons via un blog, site ou des sites spécifiques de musique. On peut réagir directement et immédiatement, apporter ses idées, devenir promoteur d’un artiste via un site de partenariat, faire évoluer une création et ainsi casser cette barrière entre créateurs et consommateurs pour devenir consommateur-créateurs ou producteurs-consommateurs (là il faudrait bien inventer un nouveau terme !).

Les défenseurs d’Hadopi, ceux qui considèrent qu’internet est un bric à brac, voire une poubelle qu’il faut contrôler, surveiller et fliquer ne sont-ils pas les mêmes qui ne veulent pas que la société en crise actuellement change, qu’il faut maintenir le système économique tel quel ?


8 réactions


  • saint_sebastien saint_sebastien 7 mai 2009 12:02

    Hadopi est surtout une mauvaise réponse à un vrai problème. Celui du partage , l’acces à la culture numérique et la rémunération des créateurs et éditeurs de contenu.

    Hadopi ne va pas faire repartir la vente de musique franco française , tout simplement car aujourd’hui l’industrie du disque ne maitrise plus la distribution. le client a le choix d’écouter du français mais aussi n’importe quel disque qui sort dans le monde , du coup , toute tentative pour proteger artifciellement la « culture » française est vouée à l’echec.

    la seule solution valable à ce problème est une license globale, dont la redevance serait obligatoire avec l’acces internet , pour les particuliers , qui permettrait aux artistes français de percevoir un revenu à la hauteur de leur activité musicale réelle , et plus seulement un revenu de rente provenant de l’édition via la SACEM


    • bright13 bright13 7 mai 2009 15:06

      « percevoir un revenu à la hauteur de leur activité musicale réelle »....voilà qui va être simple à définir....le seul revenu qui trouve valeur à mes yeux est celui de l’artiste qui mouille sa chemise sur scène.


  • Bulgroz 7 mai 2009 15:08

    Grâce à Dieu et à la toute puissance de l’idéologie de gauche, le PS a, dans cette affaire Hadopi, une contreproposition hyper innovante : la jolie taxe universelle de licence globale forfaitaire imposée à tous sans discrimination.

    Voilà une idée neuve : La Sainte taxe socialiste dont j’adresse la présente prière :

    O très tendre taxe fille du think tank socialiste, Vierge et Mère du Sauveur de tous les siècles, à partir d’aujourd’hui et pour toujours, prenez-moi à votre service et délivrez nous du vil satan hadopiste et sa criminelle haute autorité sarkoziste. Désormais, en toutes circonstances, soyez ma très miséricordieuse avocate ; venez sans cesse à mon aide. Après Dieu, en effet, je ne veux plus préférer personne à vous et, de mon plein gré, pour l’éternité, comme votre propre serf, je me livre à votre domination.


  • norbert gabriel norbert gabriel 7 mai 2009 15:47

    «  »« .le seul revenu qui trouve valeur à mes yeux est celui de l’artiste qui mouille sa chemise sur scène.«  »

    c’est vrai ; mais pour avoir un public, qui paye sa place, il faut bien des moyesn pour que les artistes se fassent connaître, des chansons enregistrées, ce qui n’est pas gratuit, même si c’est plus facile avec les home-studios.


  • franc 7 mai 2009 16:11

    le problème avec la license globale c’est que je suis obligé de payer pour des artistes ou des oeuvres que je n’aime pas ,que je déteste et que je trouve nul-------------comment faire la distinction entre les qualités des oeuvres ,ne risque t-on pas de mettre sur le même plan la nullité et l’excellence et même de privilégier la première au détriment de la seconde car il est plus facile de produire des choses médiocres que celles qui sont de réelle valeur ----------------l’argent dépensé pour la nullité qui abrutit les personnes manquera pour produire l’excellence qui élève les esprits et donne le vrai bonheur --------------c’est le mal du siècle ,avoir la quantité plutôt que rechercher la qualité ,la mal-bouffe à gogo dans tous les domaines ,en musique comme en alimentation,au cinéma comme aux informations

    pour ce qui est de l’accès gratuit à la culture en général surtout pour les pauvres et les jeunes ,ne vaudrait -il pas mieux distribuer des chèques-culture comme des chèques restaurants età chacun de choisir ce qui lui plait d’acheter ------------------mais avant il faut une véritable éducation artistique et en particulier pour donner un sens aigü de la musicalité faire écouter dès la maternelle de belles chansons avec de belles mélodies pour habituer les enfants qui plus tard deviendront des personnes aptes à faire des choix qualitaifs et écouter de la bonne musique source de beaucoup de bonheur -------------------la musique (la bonne) adoucit les moeurs

    j’aime beaucoup la musique


  • worf worf 7 mai 2009 16:34

    @ franc, tu paye bien une redevance tv pour des chaînes que tu n’aime pas, des programmes que tu déteste !

    Quand à développer le sens aigu de la musicalité en faisant écouter des chansons, bonjour la dérive car on passera en France des chansons françaises et pas étrangères (on va pas déjà les formater à la musique anglo-saxonne !) et sur quelle base définir ce qu’est une une belle chanson !


  • franc 7 mai 2009 17:07

    Personnellement j’ai écouté de la musique à l’âge de 3 ans et déjà je ne sais pas si c’est inné j’avais déjà la passion de la belle mélodie -----------------------------à cet âge là j’écoutais les disques de Dalida de l’époque de Barclay ,les titres de chansons comme « les gitans »,« les enfants du Pirée » ou « Romantica ayant des mélodies superbes que j’écoute encore aujourd’huis avec beaucoup de plaisir et de bonheur, à tel point que je me rappelle j’ai dit à ma maman »J’aime Dalida« et ma mère de dire »tu veux te marier avec elle« et j’ai répondu »oui" -----------------------------------cette exigence de la belle mélodie et de la bonne qualité musicale que j’ai aujourd’huis ne viendrait-il pas de ce que j’ai écouté de la belle musique tout au lond de mon enfance ?,je me le demande et je pense qu’il en est ainsi

    pour ce qui est de la télévision,il faut comparer avec ce qui est comparable -----------------un CD n’a pas le même cout qu’une émission de télé


  • franc 7 mai 2009 17:51


    Aujourd’huis j’écoute tous les genres de musique pourvu qu’il y ait une belle mélodie (j’apprécie particulièrement la soul music des années 60---Otis Redding ,Aretha Franklin,Wilson Picquet,etc---) ce qui exclut le rap qui ne possède pas de mélodie ,on parle ,on crie mais on ne chante ,pour moi ce n’est pas un genre musical mais plutôt un genre théatral ou de la poésie comme le slam

    le seul endroit aujourd’uis où il y a de la créativité en même temps que l’excellence c’est dans les clubs ,le dance-floor,la house-disco et en particulier la trance (Tiestö,Armin van buren)où on allie à merveille le rythme et la très belle mélodie ---------------le dernier chef d’oeuvre de la trance-club a pour titre « Silence » de Delerium mixé par Thomas Gold,avant il y avait un autre chef d’oeuvre de la house disco en 2006 « Love sensation » de Eddy Thonneik

    à mon avis le système de chèque-culture gratuit satisfera tout le monde ,et les consommateurs et les producteurs et les artistes et a l’immense avantage de laisser à chacun le choix libre ainsi que de respecter le principe de compétence et d’excellence


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