Commentaire de zerdi
sur Azouz Begag : « une fatwa médiatique »


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

zerdi (---.---.154.191) 14 avril 2007 11:54

Par Mohamed ABASSA, directeur de l’institut du meme nom, conseiller en communication

Etes-vous sûr d’aimer la France, Monsieur Sarkozy, plus que les autres Français d’origine étrangère ?

ALGER, - Monsieur le Président de l’UMP, Monsieur le Ministre, vos déclarations aussi impulsives qu’intempestives sur les jeunes révoltés des banlieues (racaille, nettoyer les banlieues au Karcher, aimer la France ou la quitter et autres noms d’oiseaux variés) ainsi que votre dernière trouvaille de loi sur l’immigration, conduisent naturellement à penser que vous agissez contre les intérêts supérieurs de votre propre pays, la France.

Elles trahissent en définitive un profond sentiment de désarroi et de rejet de cette même France que vous appelez d’autres à aimer sinon à la quitter. Cette singulière attitude n’est pas la meilleure des manières d’aimer la France et encore moins de la faire aimer. Voici pourquoi.

Vous qualifiez les jeunes beurs révoltés de racaille, exactement comme les nazis de Hitler et leurs héritiers actuels (Le Pen, de Villiers et consorts) qualifiaient les juifs de vermine. Cette insulte inqualifiable (racaille, vermine) dite par un ministre français en poste et président de parti, l’UMP, gaulliste de surcroît, prétendant déclaré à la présidence de la République Française, est humainement insupportable, vraiment insupportable, Monsieur Sarkozy.

Elle conduit et appelle surtout à de plus violentes révoltes génératrices à leur tour de haines et de divisions entre les communautés, entre les religions, entre les citoyens d’un même pays. De fait, l’insulte que votre seule impulsivité n’explique pas, par sa défiance irresponsable et son caractère provocateur, atteint les jeunes et leurs familles, dans leur dignité d’êtres humains, dans leur amour-propre de jeunes et dans leurs droits républicains de citoyens français. Tout porte donc à croire que vous poussez volontairement la France minoritaire des banlieues, la France du ghetto, à plus de violences aux seules fins d’effrayer l’autre France, la majoritaire, la France tranquille, celle qui vote et dont vous serez, naturellement, le seul et le plus grand défenseur ; on l’aura deviné.

Ainsi, vous vous posez plus et mieux que Le Pen en défenseur autoproclamé des Français de souche, pur beurre, contre cette « barbarie française » des banlieues que vos discours suggèrent arabe, islamique et africaine et que, entre nous soit dit, vous avez vous-même contribué à créer, à provoquer ; vos diverses polices aidant. Agir ainsi, Monsieur Sarkozy, est-ce le meilleur moyen d’aimer la France ? Est-ce le meilleur moyen de paraître plus français que français ? Est-ce le meilleur moyen de rassurer ces centaines de millions de musulmans, d’Africains et d’Arabes qui entretiennent avec la France des rapports historiques et qui demandent, maintenant plus que jamais, à être assainis, clarifiés ?

Car, pour mémoire, sachez Monsieur Sarkozy que pour devenir chancelier, Hitler avait agi comme vous, exactement comme vous le faites aujourd’hui ; faire peur au brave petit peuple et se poser en muraille infranchissable contre la « racaille » des banlieues arabes, islamiques et africaines qui menacent la quiétude du brave et grand peuple de France. Dans le même contexte argumentaire que développait Hitler contre les communistes allemands et la « vermine » juive. Vous connaissez la suite, Monsieur Sarkozy : 60 millions de morts.

Cette même « racaille » que vous comptez nettoyer au Karcher dans les banlieues est issue, à son corps défendant, d’une autre « racaille » ces millions de Maghrébins, de musulmans, d’Africains qui ont fait tous vos champs de bataille, ont partagé vos souffrances, vos tranchées, vos défaites et aussi vos gloires. Le seul cas algérien est édifiant. Les Algériens se sont battus avec et pour la France pendant plus d’un siècle : en Crimée, au Mexique, à Sedan, à Verdun, à la Marne, au Tonkin, à Madagascar, en Indochine et même en Algérie contre leur propre peuple. Ils sont des centaines de milliers d’Algériens à avoir donné leur vie pour la France. Combien de Hongrois l’ont fait, Monsieur Sarkozy, combien ? Aucun je crois ; ils se battaient en face pour Hitler. Ces mêmes Algériens, morts pour cette même France que vous croyez incarner aujourd’hui, ont été également traités de racaille et de sous-hommes par vos pairs d’alors.

Sinon pourquoi étaient-ils utilisés comme chair à canon, boucliers humains dans toutes les grandes batailles que la France a menées pour sa survie ? Le plus caustique et, aussi, le plus affligeant est que cette « racaille », les tirailleurs algériens et les tabors marocains s’étaient battus à Marseille et Monté Cassino (Mont Cassin en français) contre les Panzergrenadiers allemands soutenus par des volontaires hongrois et français de la division Charlemagne ; la vraie racaille de droite et d’extrême droite dont les héritiers actuels s’appellent Le Pen, de Villiers et bien d’autres qui ont admiré et servi l’Allemagne nazie.

Au vu de vos inconduites, de votre ingratitude envers ces vaillants combattants, et de vos insultes fracassantes et récurrentes à l’endroit de l’immigration, je serais naturellement tenté de vous classer dans la seule rubrique de ceux qui semblent vous inspirer ; la racaille brune ; celle qui hait les Arabes, les Juifs et les Noirs Une seule raison m’interdit de le faire ; votre rang. De même, votre descendance juive par la mère aurait dû vous porter à mieux comprendre les souffrances humaines, celles des migrants, des exilés et des expatriés au lieu de prendre fait et cause systématiquement pour les bandits sionistes. Pourquoi ne pas entendre et rejoindre ces juifs français de cœur et d’esprit qui soutiennent et défendent leurs frères émigrés ? Parce que vous aussi, Monsieur Sarkozy, vous êtes un expatrié, un migrant et un exilé, de père légionnaire et de maman juive tout autant expatriée.

Ce ne sont ni des tares ni des motifs de haine et de rejet de l’autre surtout quand cet autre, l’immigré, avec moins de réussite, partage en mieux votre histoire et vous ressemble. Monsieur Sarkozy, on n’échappe pas à son passé, à son histoire, en crachant sur tout ce qui vous ressemble, sur tout ce qui n’est pas suffisamment et correctement français. Sinon, que veut dire cette terrible boutade que même Le Pen n’a pas (encore) prononcée « aimez la France ou quittez- la ! » A qui s’adresse cette sentence aux relents odieusement racistes ? Aux Français de souche comme ne l’est pas M. Sarkozy ? Non. Aux Européens de l’UE vivant en France ? Non.

Dans l’entendement du ministre français de l’Intérieur, la menace s’adresse seulement et exclusivement aux Français d’origine maghrébine, arabe, islamique et africaine. A vos yeux, Monsieur le Ministre, pour aimer la France, les Français de cette mauvaise origine, de cette mauvaise naissance diriez-vous, la racaille donc, selon vos propres dires, se doit d’être sage et soumise : n’envahissez pas le Stade de France pour dire votre mal-vie, ne brûlez pas les banlieues pour crier vos douleurs, vos misères, votre profonde solitude par l’exclusion organisée, ne manifestez pas vos colères contre le gouvernement de la France. Si vous le faites, c’est que vous n’aimez pas la France donc quittez la France. A-t-on dit cela aux révoltés de mai 68 ? Aux anti CPE ? Aux altermondialistes ? A José Bové ? Aux manifestants gay ? Dit-on à ces manifestants, à ces révoltés de quitter la France parce qu’ils ne l’aiment pas ?

Les jeunes de banlieues aiment la France, c’est leur pays, mais ils n’aiment pas les gouvernements de cette même France qui les confinent dans des ghettos, dans la malvie, dans la non-vie ; si vous dites aïe, j’ai mal, j’ai très mal, c’est que vous n’aimez pas la France, alors quittez-la, dites-vous Monsieur Sarkozy. Est-ce vraiment le meilleur moyen d’intégrer, de rassurer, de gagner ces jeunes que votre système a exclus ? Est-ce le meilleur moyen de rendre service à cette France que vous croyez servir et aimer, Monsieur le Ministre ? Ces pratiques, par leur lecture profondément raciste, sont attentatoires à l’honneur et à l’image de la France, à cette France supposée laïque et républicaine.

Monsieur Sarkozy, votre dernière loi sur l’immigration est à la fois choquante et amusante : Amusante : il y a quelques petits siècles, vos pairs choisissaient leurs émigrés, esclaves compris, selon des normes très proches de votre définition mise à jour de la racaille : analphabètes, costauds, forts et musclés, courageux, baroudeurs et combatifs. A l’époque, cette « racaille humaine », Monsieur Sarkozy, transformée par vos négriers et divers employeurs en bêtes de somme, en chair à canon, en harkis, en manœuvres et en divers OS, en main-d’œuvre bon marché qui a reconstruit à bas prix vos pays ravagés par vos seules et sales guerres, cette « racaille-là », dis-je, avait fait la prospérité et le bonheur de votre pays, la France.

Pendant des siècles, cette immigration, esclaves compris, était la plus prisée, la plus recherchée, la plus aimée, parce qu’elle faisait vos guerres en mourant pour vous, sans gloire et sans pleurs, qu’elle transpirait dans vos chantiers sans protester, qu’elle souffrait la misère et la faim sans crier, sans haine, qu’elle acceptait son exclusion sans manifester et sans brûler les symboles de son aliénation, de son humiliation. Cette « racaille-là », Monsieur le Ministre, a fait des petits ; ils sont dans vos banlieues. Ils ne veulent pas, ne veulent plus subir le sort dégradant de leurs parents, de leurs aïeux. Ils veulent exister, travailler, chanter, aimer ; seulement cela, parce qu’ils aiment la France.

Votre loi est choquante parce qu’elle introduit, encore une fois, des normes racistes et élitistes. Cette même logique raciste qui portait naguère vos pairs et vos systèmes à choisir, sélectionner vos migrants sur les seules valeurs marchandes de leur viande et de leurs muscles, les porte tout naturellement maintenant à les choisir sur son parfait contraire ; sur leurs performances intellectuelles, culturelles, techniques et scientifiques. Ce qui veut dire, en termes simples, que la France actuelle, celle de M. Sarkozy, le fils du migrant légionnaire hongrois, n’acceptera plus en France la racaille de la viande et des muscles, cette même racaille qui a sauvé la France à Verdun et à Monté Cassino ; ce glissement moral qui renseigne parfaitement sur l’amoralité de ses auteurs nous paraît, ici en terre d’Algérie, assez indécent et très choquant, Monsieur le Ministre ; vous en conviendrez, je l’espère.

Et, plus grave encore, cette loi va tout naturellement pousser les cadres et élites du tiers-monde, africaines en particulier, à s’expatrier massivement pour venir enrichir la France des têtes, de l’immigration choisie pas subie ; le haut du panier ; on choisit les hommes comme on choisit ses patates ; du vrai racisme exprimé en loi et bien votée par une droite négrière et poujadiste à l’excès. Quand vous déclarez les cadres et élites africains éligibles à l’émigration par opposition à l’autre émigration dont vous ne voulez plus, la racaille subie dites-vous souvent avec insistance, quel but visez-vous ? Appauvrir encore et toujours l’Afrique ou enrichir la France ? J’affirme ici que, par cette loi, vous allez encore appauvrir l’Afrique sans enrichir la France. Parce que ces nouveaux migrants cultivés et en phase avec les nouveaux besoins de la France, rejoindront vite, très vite, les banlieues dans lesquelles elles seront obligatoirement casées.

Est-il normal, moral, vous le prétendant au poste le plus élevé de France, président de la République, que vous appeliez, selon une procédure insidieuse et dangereuse, les derniers cadres africains à quitter leur pays pour venir s’installer en France. Hier vous aviez vidé l’Afrique de ses bras pour en faire des esclaves, aujourd’hui vous voulez la vider des rares élites pensantes qui lui restent ; c’est un autre crime qu’aucune loi ne saurait punir ici ou ailleurs. Que faites-vous Monsieur le Ministre de l’Intérieur contre ce racisme verbal ordinaire et banalisé par votre presse ? Pourquoi rappelle-t-on toujours l’origine étrangère d’un citoyen français d’origine maghrébine ou africaine. Pourtant, plus de 50 % de la population française est d’origine latine autre que française (espagnole, italienne, portugaise). On n’entend et ne lit jamais dans votre presse « le Franco-Espagnol, le Franco-Italien, le Franco- Portugais, ou le Franco- Hongrois », jamais. Par contre, quand il s’agit d’actes répréhensibles commis par des citoyens français d’origine ...maghrébine on n’oublie rarement, dans la presse surtout, de rappeler l’origine étrangère du délinquant français. Dernier exemple en date, le Français Moussaoui est systématiquement qualifié de franco- marocain.

Par contre, quand d’autres Français de mêmes origines réalisent des prouesses et forcent l’admiration, alors, là, on insiste pour rappeler qu’ils sont français et seulement français, le Français Zidane, la Française Leila Picard, le Français Djamal Bourras, le Français Noah, etc., etc. Le jour où Zizou jouera moins bien, soyez certain Monsieur le Ministre, votre presse parlera du Franco- Algérien Zidane. Cette discrimination terminologique au quotidien crée dans ces communautés des sentiments de frustration et de rejet. Vous conviendrez que cette France-là, raciste dans son ordinaire, ne soit pas aimée. Pour autant, faudra-t-il la quitter comme vous les y invitez ? Assurément non, Monsieur le Ministre, puisque ces gens-là aiment à en mourir une autre France qui n’est pas, ne peut pas être la vôtre.

Ils aiment la France de l’Abbé Pierre, d’Henri Alleg, de Jeanson, de Garaudy, de Ferrat, de José Bové, de Bernard Thibault, de Marie-George Buffet, de Renaud, de Lang, de Martine Aubry, de Danielle Mitterrand, de Roger Hanin et de milliers d’autres Français de cœur, de talent et d’esprit qui sont la vraie France, la France des tolérances, la France des solidarités et des amours vraies, cette France-là est bien aimée par la « racaille ». S’il vous plaît, Monsieur le Ministre, ne parlez plus des bienfaits de la colonisation. Au mieux fermez-la (la parenthèse coloniale). Je vous livre quelques petits extraits d’auteurs français (Lounis Aggoun et Jean Baptiste Rivoire sur les « bienfaits » de la colonisation en Algérie et, en particulier, les comportements de la légion étrangère que vous semblez si bien connaître.

A suivre


Voir ce commentaire dans son contexte