Commentaire de argoul
sur La trouille des Français et le rire des élites


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Argoul argoul 13 octobre 2006 14:45

Gem - Iconographie : pour moi les images sont destinées à apporter quelque chose de plus au texte. Elles ne sont pas choisies par hasard. Dans ce texte trop sérieux, elles visent à relativiser, à dépasser le blocage du sérieux, en bref à manifester ce que certains appellent l’humour. Je suis mauvais juge du résultat, étant partie à son élaboration. Mais je constate sur le fond que le trollisme et les habituelles « injures » des Croyants de l’antilibéralisme-antiaméricanisme-anticroissance-antitout ne sont pas au rendez-vous des commentaires. Et c’est d’autant mieux pour la qualité des débats. Alors, « femme à poil », pas vraimant, elle est surtout « repliée sur elle-même », donc seuls ses membres se voient ; en Occident on a l’habitude de les laisser nus - peut-être est-ce aussi pour cela qu’hors de l’Occident on nous accuse de pornographie ? Intéressante perspective ouverte par cette image... Juppé en SDF canadien : il s’agit de la dérision d’une dérision, chacun sait que « pour les élites, tout va bien merci » (c’est dans le texte) ; certains ont déplorés ce « pauvre » Juppé (homme que je respecte par ailleurs) exilé au fin fond du Canada (comme si c’était le désert de Gobi, pour les condescendants du bd St-Germain) ; chacun sait désormais (d’autant que c’est fini) que cet « exil » fut plus que doré et ma foi fort agréable (c’est Juppé qui le dit). D’où la dérision de l’image : l’élite chassée ne vit pas comme le lambda chassé de son boulot (avec 425 euros par mois d’ISS) ! Pour le reste, vous ne parlez ni de la citation de Ducasse (en image) ni de l’ineffable Sollers trônant Brasserie des Lilas...

Dealbata ou Petit - chute : vous attendiez un programme politique ou un nouveau Messie, désolé de vous décevoir. Si j’étais cet homme politique, je m’efforcerais de ne parler que de ce que vous aimez entendre et ne passerais pas mon temps à lire des revues qui fâchent. Si j’étais Messie, je ne ferais aucun effort d’écrire sur Agoravox mais me contenterait d’exploiter les charmantes « images » qui graviteraient autour de mon auguste personne. Non, rien de tout cela. je crois en revanche que la « politique » vaut mieux que la « croyance » pour gouverner une société. Par « politique », j’entends le débat ouvert et l’échange d’arguments sur la vie de la cité. Comme en Grèce ou aux Etats généraux de 1789, quoi, ou même au Sénat français si l’on s’y intéresse. Pas comme les médias et leurs petites phrases. « Apprivoiser le loup offre le temps de trouver des solutions adaptées qui nous conviennent, d’en débattre les compromis acceptables et leurs contreparties, et d’en faire assez tôt la pédagogie. » Voilà ce qu’est la politique : considérer le monde qui change et débattre de comment nous allons nous y adapter pour survivre en gardant ce qui fait ce que nous sommes. Contrairement au jugement péremptoire et non argumenté de Petit : « décliniste » je ne suis pas. Steve a raison : « on » (les politicards) n’expliquent RIEN parce qu’ils préfèrent vivre leurs privilèges et se goinfrer dans le fromage. Question d’institutions monarchiques, je crois, une fois assis, indéboulonnables ! Comme après avoir passé un concours ou pris brevet de « noblesse » à l’ENA. Vous êtes « arrivés » et nul ne peut plus rien contre vous. Ronny : « quel grand projet nous propose-t-on ? » - Justement aucun, c’est là le problème « politique » en France (et Kereven a raison), un immobilisme de vieillards (ce pourquoi je ne peux être d’accord avec le soutien de Steffy à JM Le Pen). Cet article est le premier d’une série de 4, dont les autres ne sont pas (encore ?) parus sur Agoravox. Comme je ne suis pas tout seul à écrire (et c’est heureux) je suis sur liste d’attente pour l’offre politique qui suit cet article général : la droite, la gauche, modifier la constitution. Les impatients iront directement sur mon blog : http://argoul.blog.lemonde.fr

Joe, IPxxx avec photo (aucun nom !), Johan, etc. - Libéralisme. Toujours le gros mot qui fâche alors que personne ne semble savoir ce que c’est. Le libéralisme a été inventé par les Français avec Montesquieu et Voltaire, peut-être après le Hollandais Spinoza si on en croit certains ; il est passé du politique à l’économique puis au social mais, comme l’a montré Alain Touraine, économique et social ont divorcé depuis une dizaine d’années. Le « libéralisme » économique dit « pur » n’existe que dans les fantasmes des paranos. Nul pays ne pousse aux extrêmes le laisser-faire, laissez-passer, tout le monde il est beau et autres fariboles. Même - et surtout ! - aux USA. Si ce pays était « libéral » ultra, on n’entendrait JAMAIS parler du Président ni de l’Etat, chacun se débrouillerait comme il voudrait dans son petit coin. Lire par exemple ma note sur Agoravox « le capitalisme n’est pas un modèle de société ». http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=4014 ou « qu’est- devenue la jeunesse du monde ? » http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=4231

Alors, quoi entendre par ce « libéralisme » ? Nous sommes tous d’accord sur 2 points :

1/ l’initiative individuelle vaut bien mieux pour les libertés comme pour la prospérité que le diktat d’irresponsables d’Etat, la chute de l’URSS et la conversion de la Chine sont là pour le prouver « Chine un capitalisme communiste » http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=4222), alors que le marasme de Cuba (il suffit d’y aller) et la paranoïa aigue de la Corée du Nord montrent à l’envi qu’on a surtout pas envire d’y vivre ;

2/ le libéralisme « sauvage » n’existe pas. Le fantasme très « guerre froide » du n"importe quoi soutenu par la loi de la jungle des pétroliers texans est pour les gogos. Même aux Etats-Unis, le droit et la loi l’emportent sur les intérêts individuels : pourquoi croyez-vous que la bourse de New-York veuille racheter Euronext ? Parce qu’après les détournements d’Enron, la loi est devenue si tatillonne et les contrôles si fréquents que les entreprises préfèrent la liberté relative européenne aux contraintes de legacy américaine. N’oubliez pas que les USA sont le paradis des lawyers ! L’Etat existe aux Etats-Unis, il suffit de regarder ce que fait George W Bush pour s’en rendre compte. Chez nous, la régulation à nos préférences. Point trop d’Etat mais là où il faut : la justice, l’école, l’armée, la sécurité des habitants. On ne peut que constater qu’avec des prélèvements obligatoires parmi les + élevés d’Europe (et une TVA proche du top), nous avons des prestations d’Etat à peine dans la moyenne européenne. Il y a donc problème ! Les pays scandinaves ont eu les mêmes problèmes, tout comme les Anglais, les Allemands et les Italiens. Tous ont réussi à changer (avec chacun leur style) quelque peu la dérive : sauf nous. Par immobilisme politique, par tabou idéologique, par lassitude de vieillards. Car nous avons AUSSI la classe politique parmi la plus géronte d’Europe ! Ce n’est pas chez nous qu’un chef d’Etat quitte le pouvoir, après 10 ans de règne, et à 54 ans seulement (mais en Angleterre).

Il y a donc beaucoup à faire et cela démontre que notre classe politique se moque éperdûment des citoyens qu’elle se contente de manipuler par des slogans grossiers.

Lartiste, Céline - la France pays moyen, les étincelles de l’intelligence française, l’outil de production : eh oui, nous ne sommes plus le nombril du monde comme aux temps de la Révolution (1ère puissance démographique d’Europe !), même si nous gardons un brio intellectuel qui vient de notre passion pour la chose politique et pour l’écrit. Bien que conservant le 2ème réseau diplomatique au monde, juste derrière les USA, nous n’avons même pas le quart de leur puissance, il y a donc divorce entre ce que nous croyons être et ce que nous sommes vraiment. Et là les politicards ont fauté, tout comme l’école qui n’apprend pas grand chose de ce qui importe (les manuels raisonnent toujours en comparaison de tonnes d’acier, comme au temps de l’URSS !). La production crée des outils nouveaux là où des besoins nouveaux apparaissent : pas en France ni dans une Europe repue, au chômage ou vieillsante (on a plus besoin de services maternants que de nouveautés quand on est vieux, on a besoin du minimum quand on chôme, et surtout pas de bagnole, de livres chers ou de disques). Tangoypiano a bien complété la note par son commentaire sur la démographie.

En revanche, JP, tu te trompes : si la productivité française est en effet l’une des meilleures du monde, la lecture des statistiques est trompeuse. Il s’agit de la productivité PAR TRAVAILLEUR, pas par membre de la population active. Ce qui fait « l’excellence » française dans ces classements ? Mais le CHOMAGGE MASSIF bien entendu ! Plus la faiblesse chronique de l’investissement. Faire le même travail, avec moins de gens et de capitaux investis, c’est ça la productivité. Mais tout économiste ne considère pas cette mesure comme le nec plus ultra d’une économie... C’est plutôt le niveau de vie par tête qui importe. Et la France a choisi de garder à peu près le niveau de vie au prix de la dette. Décourager la création d’emplois par des règlementations plus rigides qu’ailleurs, mettant ainsi les moins de 30 ans, les + de 45 ans et les non-qualifiés au chômage massif, tout en redistribuant des subsides. Comme ça : pas de fâcherie avec la CGT (qui ne défend que les gens à statut public ou les inclus à contrats des grosses boites), pas de grogne des fonctionnaires (voyez, le chômage vous guette si vous quittez le statut, on vous paye peu mais vous êtes protégés, donc fermez-là), pas de muleta agitée devant les extrémistes de gauche qui ont les « manifs de Damoclès » éternellement suspendues au-dessus des têtes socialistes (les chômeurs ne sont pas gauchistes, ils veulent seulement du boulot). Seulement la dette, hein, elle ne peut avoir qu’un temps ! Et il semble que nous y sommes...

Réponse très longue mais commentaires de qualité. Merci à tous ! C’est assez rare pour le noter.


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