Commentaire de Ferdinand_Pecora
sur “Too Big To Fail”


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Ferdinand_Pecora 7 avril 2011 14:22
Après Angelides, Barofsky condamne le renflouement

Dans une tribune intitulée « Là où le renflouement a foiré » publiée dans le New York Times du 29 mars, l’inspecteur général du plan de renflouement américain TARP Neil Barofsky [*], constate l’échec patent de la politique publique de sauvetage de Wall Street et des banques européennes. Barofsky rejoint ainsi les rangs de ces gens du système, à l’image de Phil Angelides aux Etats-Unis ou Jean Paul Delevoye en france, fustigeant un système condamné.

Le texte de Barofsky met en accusation le secrétaire au Trésor Tim Geithner et l’administration Obama. Si, à l’image de George W. Bush Jr. sur la Guerre en Irak, « le gouvernement [Obama] a déclaré sa mission accomplie (…) j’ai le regret de dire que je ne suis pas d’accord » . Le renflouement n’a fait que profiter aux banques géantes « qui jouissent désormais de bénéfices records et d’un avantage compétitif qui semble permanent pour celles que l’on considère ’trop grosses pour faire faillite’ ». De surcroît, le plan TARP a failli dans tous ses objectifs envers la population – « Main Street » – alors que ces mesures avaient permis son adoption par le Congrès.

« L’emphase du projet de loi sur le sauvetage des propriétaires de logement fut particulièrement vital pour son adoption. On a dit au Congrès que le TARP servirait à acheter 700 milliards de dollars d’hypothèques, et pour obtenir les votes nécessaires, le Trésor a promis qu’il modifierait ces hypothèques pour aider les propriétaires en difficulté. En effet, la loi mandate expressément le département du Trésor pour faire cela. Mais il n’a fait que bien peu pour se conformer à ce compromis législatif. Quasi-immédiatement, tel que permis par le langage vague de la loi, le plan du Trésor est passé du rachat d’hypothèques à l’infusion de centaines de milliards de dollars dans les grands établissements financiers du pays ; ce changement a été opéré en promettant expressément que cela permettrait de rétablir le crédit.

« Cependant, le Trésor a versé l’argent aux banques sans politique effective ou de volonté pour les obliger à prêter de nouveau. Il n’y avait aucune contrainte : pas de condition ou d’incitation à accroître les prêts aux acquéreurs de logement, et même, contre nos propres recommandations, pas d’exigence que les banques rendent compte de leur utilisation des fonds du TARP. Ce n’est qu’en avril 2010, en réponse à nos recommandations, que le Trésor a demandé aux banques de fournir ces informations, bien après que les principales banques aient remboursé leurs emprunts. Il n’est donc pas surprenant que le crédit n’ait pas repris et même poursuivi son déclin pendant la reprise.

« Dans le même temps, l’objectif d’aider les propriétaires de logement en difficulté a été suspendu jusqu’en février 2009, au lancement du Home Affordable Modification Program qui devait aider 4 millions de familles a rééchelonner leurs hypothèques. Ce programme s’est avéré un échec colossal puisque le déjà faible nombre de modifications permanentes (540 000) a été moindre que celles ayant raté ou été annulées (plus de 800 000). C’est le bilan souvent évoqué d’un programme lancé en toute hâte, dont les défaillances tiennent à sa conception, (…) et du refus de tenir pour responsables les fournisseurs d’hypothèques aux performances abyssales pour leur indifférence vis-à-vis des directives du plan. Alors que le programme piétine, les saisies immobilières poursuivent leur ascension avec une prévision de 8 à 13 millions de dossiers sur la durée de vie du TARP.

« Le secrétaire au Trésor, Tim Geithner, a reconnu que le programme ne remplirait pas, et de loin, ses objectifs initiaux (…) mais ses représentants refusent toujours d’agir sur ces insuffisances. Au lieu de cela, ils continuent de soutenir avec entêtement que le plan est un succès et qu’aucun changement n’est nécessaire, assurant ainsi que les engagements envers Main Street ne seront pas honorés.

« Au final, on avait assuré au pays que la réforme de la régulation se concentrerait sur la menace que pose à notre système financier ces grandes banques qui jouissent d’une garantie effective du gouvernement, quelle que soit la dangerosité de leur comportement. Cette promesse aussi semble s’être envolée. Les plus grosses banques sont 20% plus grandes qu’avant la crise et exercent un contrôle sur une part sans précédent de notre économie. Elles supposent raisonnablement que le gouvernement leur viendra à nouveau en aide si besoin. En effet, les agences de notation incorporent les futures renflouements publics dans leurs évaluations des grosses banques, éxagérant ainsi les distorsions du marché qui leur donne un avantage injuste sur les établissements plus modestes qui continuent à se battre pour leur survie.

« Pire, le Trésor a apparemment décidé d’ignorer plutôt que de soutenir les efforts réels de réforme, tel que ceux fournis par Sheila Bair, la présidente de l’Agence fédérale de garantie des dépôts (FDIC), en vue de rétrécir les établissements financiers les plus complexes. »

Cette politique, c’est le Glass-Steagall de Franklin Roosevelt dont la réinstauration équivaudrait à une mise en liquidation judiciaire des spéculateurs. Les responsables politiques qui ne le comprennent pas, ou pire, qui ne le veulent pas, contribuent à nous précipiter dans le mur. Machine arrière toute !


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