Commentaire de 雛罌粟
sur Pourquoi le mariage homosexuel est-il une imposture ?


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雛罌粟 雛罌粟 17 juillet 2013 03:56
Je lis à l’instant cet article, dont la principale qualité est la brièveté. Mais j’ai le sentiment d’avoir été dupé car, quoique lisant avec attention, je n’ai pas appris ce qui ferait du mariage homosexuel une imposture…
Peut-être parce que, un peu méfiant, je ne souscris pas aux assertions péremptoires que son auteur pose en axiomes, telles…
« la République n’a à connaitre en la matière
et pour sa pérennité, qu’une seule pratique :
la génitalité. »

L’auteur nous informe de sa conception – personnelle, donc – de ce que devraient être les préoccupations de la République.
C’est son droit.
On est libre d’avoir l’avis opposé aussi ; d’autant plus que les textes légaux (Constitution, code civil, etc.) ne prescrivent aucune finalité particulière au mariage. Le code civil se contente de définir les relations entre les parents et les enfants au sein du mariage dans le cas où les mariés ont procréé, mais il n’est nulle part spécifié que le droit au mariage soit subordonné à la procréation.
On peut arguer par ailleurs que le mariage a aussi d’autres finalités déclarées que relatives aux enfants : notamment celle d’instituer une cellule au sein de laquelle existe une cohésion protectrice. C’est ce que prévoit l’art. 212 du code civil :
« Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance. »
Cette disposition va donc dans le sens du bien commun, et peut s’appliquer à tous les couples, quelle que soit leur composition.
D’ailleurs, les premières études (car l’extension du mariage aux couples de même sexe semble être un fait historiquement très récent) conduites sur la question semblent indiquer que le mariage a des conséquences bénéfiques sur la santé des couples de même sexe.
(Voir par exemple “Effect of Same-Sex Marriage Laws on Health Care Use and Expenditures in Sexual Minority Men : A Quasi-Natural Experiment”, Hatzenbuehler & al., American Journal of Public Health, 2012.
Où les auteurs ont comparé les dossiers médicaux de 1200 homosexuels durant les 12 mois précédant et suivant l’instauration du mariage dans l’état du Massachusetts.)
L’un des effets bénéfiques du mariage – et dont devrait donc se soucier la République (pour user de termes ronflants…) – c’est probablement l’amélioration de la santé des citoyens. Ce fait est étudié et bien connu depuis le XIXe siècle (William Farr, 1858) pour les couples H/F ; il semble donc que les couples F/F et H/H n’échappent pas à la règle.

Par ailleurs il y a dans ce court exposé quelques flottements de pensée malencontreux :
« les homosexuels n’ont jamais été exclus
du mariage [bla bla] »
C’est méconnaître (ou feindre de…) que les tribunaux condamnent avec constance l’époux qui n’accomplit pas son devoir conjugal, en interprétant l’art. 215 du code civil comme constitutif d’une obligation des époux à entretenir des relations sexuelles.
On voit donc mal comment le mariage, tel qu’il existait, permettait à des homosexuels de se marier, ce qui les aurait contraints à entretenir des relations sexuelles avec une personne du sexe opposé. Tel qu’il existait, le mariage était conçu à l’usage des hétérosexuels (et des bisexuels), mais les homosexuels en étaient exclus.

« l’égalité républicaine concerne l’égalité
des droits individuels et non pas l’égalité
des groupes dont notamment les couples »
Possible…
En tous cas, ce qui était dénié aux homosexuels, c’était le droit de voir reconnue socialement la famille¹ qu’ils entendaient fonder avec la personne de leur choix.
C’est donc bien de l’égalité des individus devant la loi qu’il s’agit.

« la République n‘a pas à connaitre les
orientations sexuelles des individus : le
mariage n’a pas été fait pour des couples
homosexuels. »
Voilà enfin une assertion irréprochable !
En effet, la loi Taubira n’a jamais instauré l’obligation d’une vérification (par le maire, le préfet ?) de l’orientation sexuelle des époux.
C’est simple : vous aurez beau chercher les expressions « homosexuel », « orientation sexuelle », vous ne les y trouverez pas
(à l’exception de l’art. 19, qui a été rajouté par amendement, et qui est sans rapport avec le mariage).
On peut même considérer que les droits des hétérosexuels aussi ont été accrus puisque, désormais, deux hommes hétérosexuels peuvent se marier (ensemble) alors qu’avant ils ne le pouvaient pas.

Quant aux considérations embrouillées sur la Règle & la Loi, l’instinct, Darwin, la Génitalité, je ne suis sûr ni de les avoir bien comprises ni de saisir leur rapport avec la question du mariage, cela expliquant sans doute ceci.

¹ : j’écris bien famille car (à l’intention de ceux que ça défrise), la CEDH a considéré (Affaire Schalk & Kopf c. Autriche) dans le § n° 94 de son arrêt que :
« il est artificiel de continuer à
considérer que, au contraire d’un couple
hétérosexuel, un couple homosexuel ne
saurait connaître une “vie familiale” aux
fins de l’article 8.
En conséquence, la relation qu’entretiennent
les requérants, un couple homosexuel
cohabitant de fait de manière stable,
relève de la notion de “vie familiale” au
même titre que celle d’un couple
hétérosexuel se trouvant dans la même
situation. »

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