Commentaire de Alban Dousset
sur Chronique d'un éveil citoyen – Épisode 7 : Penser la monnaie et la dette


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Alban Dousset Alban Dousset 19 novembre 2014 18:12

« Que définissez-vous par « propos radicaux » ?
Quels éléments de l’interview vous ont fait me mettre une étiquette de « propos radicaux » ? »

 

Ce n’était en aucun cas un argument, je ne faisais que partager une impression qui s’est dissipée à la lumière de votre second message. En ce qui me concerne renoncer à la monnaie est un propos radical. Évidemment, la radicalité est toujours affaire de subjectivité.

 

1.

« La pénibilité n’est qu’une limite psychologique. Certaines personnes aiment les défis, d’autres rebutent face au moindre effort. »

Je trouve terriblement insultant de réduire la pénibilité du Travail à « une limite psychologique » (Pierre Gattaz lui-même n’aurait pas osé la sortir celle-là !)

Comme je le dis dans l’article « pour une majorité de personne, pour la majorité du temps, le travail est un labeur qui demande des efforts et une motivation et qui est une source d’ennui et/ou de souffrance. L’un des rôles majeurs de la dette/monnaie est notamment de rendre la société redevable du labeur des travailleurs. » et, contrairement à ce que vous avanciez, « Quels sont les travaux « mal appréciés » ? En général, les travaux dont on ne voit pas le but, l’utilité », selon moi, les travaux « mal appréciés » sont des travaux pénibles.

Et, comme je le dis également, l’idée « d’aimer/apprécier » son travail est un phantasme capitaliste/individualiste.

Mon opinion est que, globalement, le travail n’est pas agréable et que, à ce titre, il mérite une contrepartie sociale.

 

2.

« Que devient ce travail pénible si une part d’automatisation vient aider l’humain » C’est vrai qu’ils sont vachement idiots dans les communautés autosuffisantes et « sans monnaie » du Larzac, on devrait leur dire qu’ils devraient se construire des robots pour les servir et éviter les travaux pénibles.

Pardonnez mon ironie, mais je trouve terriblement irréaliste de résoudre le problème de la pénibilité par une « automatisation théorique ». Par ailleurs, aucune « automatisation » n’existe pour les travaux que j’ai cités plus haut. Travaux dont je vous certifie la relative pénibilité et qui mériteraient une reconnaissance sociale formelle.

 

3.

« Les « coûts » n’existent plus dans un système post-monétaire. » Effectivement, mais cela n’efface pas le travail, la pénibilité qu’il induit, la gestion des compétences et des ressources, les obligations morales dues à ceux qui travaillent « plus »…

 

4. « Mais la monnaie est un outil qui exacerbe la violence et le pouvoir ! Et cette exacerbation est liée à la rareté relative de cet outil. (sinon, personne ne se bat pour obtenir des feuilles d’arbre) »

La « rareté relative » de cet outil est liée à la « valeur » de la « réserve de valeur » (http://fr.wikipedia.org/wiki/Valeur_%28%C3%A9conomie%29). Or, pour prétendre être une réserve de valeur (qui permettra à la monnaie d’incarner une reconnaissance sociale qui serait le fruit du surcroit de son labeur), la monnaie doit être rare aux yeux de la très grande majorité des acteurs économiques. La monnaie incarne une violence et un pouvoir socio-économique, je ne le nie pas, mais elle n’exacerbe pas cette violence et ce pouvoir : elle se contente de les incarner. Si nous souhaitons réduire cette violence, nous devons veiller à une répartition plus équitable de la monnaie et ne pas la déifier (comme le fait notre société mercantile).

 

5. « 1 personne donne un ordre à une autre personne dans un système post-monétaire. Si cet « ordre » n’a pas de fonction d’organisation (diriger des travaux pour qu’ils soient efficaces et bien réalisés, sorte de coordination), la personne recevant cet ordre pourra répondre « Sans blague ? Et il fait beau chez toi ? ».
Quid de la notion de pouvoir ? »

C’est ce que j’appelle « réduire » la notion de pouvoir à la monnaie. Pour forcer quelqu’un à travailler on peut le menacer d’une arme, faire divers chantages, jouer de séduction ou de charisme, agir sur son sentiment culpabilité, user de ses compétences ou son expertise pour le confiner à des taches ingrates…

Bref, il est absurde d’envisager réduire le pouvoir et l’influence sociale à l’argent.

 

6. « Sans le coût de la formation, sans le coût du copyright et des brevets, les spécialisations et la division du travail posent moins de problème, c’est tout. »

Ce n’est pas parce que le système économique actuel a inventé des coûts relativement absurdes que la spécialisation et la division du travail posent « moins » problème à « l’après monnaie ».

7. « Pour que quelqu’un réussisse économiquement, il faut que plein d’autres perdent.
C’est mathématique. »

Je crois que c’est faux, la diminution de notre mortalité infantile, l’augmentation de notre espérance et notre niveau de vie depuis plus de 100ans prouvent le contraire. Notre système économique est injuste, défaillant et instable, certes, mais ce n’est pas un problème de monnaie.

 

8. « La monnaie fait partie intégrante de « l’organisation de la vie de la cité ». Non ?
Qui plus est, c’est un point de vue ultra libéral : la monnaie doit être totalement libre. Non ? »

 

Oui, la monnaie « fait partie intégrante de « l’organisation de la vie de la cité » ».

Comme je le dis, la monnaie doit être assujettit à l’intérêt général, au bien commun, à la souveraineté populaire.

Or quand je dis que « je suis un peu rigoriste sur la question : la monnaie ne doit JAMAIS être l’objet d’une quelconque politique (quelle que soit ses fins) et se cantonner au dogme Aristotélicien. » je ne fais retranscrire mon opinion individuelle (nécessairement subjective) de ce qui est, de mon point de vue, d’un « intérêt général ».

 

9. « Car pour donner à l’un, il faut prendre à l’autre. Que faire lorsque les deux méritent d’avoir ? »

La rareté (des ressources, biens, services, compétences…) fait parti de ce monde : il faudra gérer cette rareté avec ou sans monnaie. Le problème que vous posez n’est donc pas un problème lié à la monnaie mais à la rareté des biens.


Voir ce commentaire dans son contexte