Commentaire de Philippe VERGNES
sur L'instrument majeur du pervers narcissique : la parole


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Philippe VERGNES 30 mai 2015 01:21

@ alinea,


« Intéressantes ces relations, parce que le pervers narcissique « utilise » toujours les autres, joue une relation « normale » mais celui ou celle qui se trouve là, si il ou elle n’est pas victime potentielle, la relation sera plutôt agréable, manière superficielle, et, bien sûr, éphémère. »

Si le pervers narcissique « utilise » toujours les autres (je ne dis pas autre chose en parlant de relations « ustensilitaires »), comment pouvez-vous alors qualifier cette relation de « plutôt agréable » ??? smiley

« Le pervers narcissique n’a pas volonté de détruire, il a nécessité de se nourrir de l’autre ; ce qui est tout à fait différent ! »

Le pervers narcissique a effectivement un besoin vital de se nourrir du narcissisme d’autrui pour combler son vide existentiel (lutte contre l’angoisse d’anéantissement), mais la perversion narcissique est également une défense contre une angoisse d’attraction objectale. La défense contre cette seconde angoisse s’exprime par la pulsion de destruction (pulsion de mort ou pulsion d’emprise). Pas de pulsion de destruction (pulsion de mort ou pulsion d’emprise), pas de perversion narcissique. C’est aussi simple que cela.

Seuls les borderlines ou états limites ne luttent que contre l’angoisse d’anéantissement ainsi que d’autres phobies. La pulsion de mort du borderline n’est pas tourner vers l’objet, mais se retourne sur le moi du sujet. C’est la toute la différence avec le pervers narcissique qui est également classé dans la catégorie des états-limites.

« Vous oubliez de mentionner l’étrange occurrence de relations perverses, en fonction de la hiérarchie sociale, au travail, ou bien sexuelle, dans un couple par exemple. »

Je parle de tout cela dans d’autres articles. Ce billet ne traite que d’un seul aspect de la perversion narcissique : la parole.

« Comment expliquez vous le silence des « témoins » qui ne voient rien ? si cela se voyait comme le nez au milieu de la figure ? »

Où ai-je exprimer l’idée que la perversion narcissique se voyait comme le nez au milieu de la figure ? Lorsque j’ai employé cette expression, c’est justement pour affirmer le contraire en réponse au fait que vous puissiez dire qu’un pervers narcissique ne puisse trouver personne à vampiriser.

« Je n’ai aucune envie de plonger à nouveau là dedans, mais je ne pensais pas être dans le vague face à un spécialiste ! Je ne sais même pas ce qui vous intéresse dans ce « phénomène » ! Ni comment on peut, si c’est le cas, rester dans la « douce protection de l’étude » ! Je voulais juste ajouter que les deux cas que je connais qui ont subi un harcèlement moral au travail, ont été toutes les deux prises en charge ; congé de plusieurs années, psychothérapie remboursées, etc... et oh bizarre, neuf ans plus tard, un cancer ! »

Passons sur les considérations personnelles qui n’ont guère d’importance et attaquons-nous au cas du harcèlement moral au travail. Que les personnes harcelées puissent développer un cancer et souffrent terriblement de leur situation, c’est une évidence. J’en ai également parlé dans plusieurs de mes articles et je compte encore en reparler. Autrement dit, que le harcèlement moral soit destructeur, c’est un fait indéniable. J’ai même déjà mentionné ailleurs que pour chaque cas de suicide, nous devrions suspecter une prédation morale.

Par contre, le harcèlement moral n’est pas systématiquement l’apanage du pervers narcissique. Si le pervers narcissique harcèle moralement ses proies, tous les harceleurs ne sont pas des pervers narcissiques.

« Pour ma part je n’ai été prise en charge par personne, mais j’ai beaucoup étudié le truc de l’intérieur ; peut-être dans un an me découvrira-t-on un cancer ! Je ne partais pas de rien, c’est vrai, psychanalyse, début de didactique et aussi une forte attraction pour le psy (! !!) donc pas mal de lectures, bien avant mon « expérience » ! Mais je sais bien que les savants n’ont rien à apprendre du vécu des victimes ; puisque bien sûr le pervers narcissique ne pourra jamais parler de lui. Sauf que le mien, je l’ai « étudié » à la loupe, et je vois très bien le tableau, c’est pourquoi, j’insiste sur le « couple » et aussi sur le fait qu’il convient de ne pas faire du pervers narcissique un démon ; je suis convaincue que celui-ci souffre ( c’est à expliquer et approfondir car cela n’est pas forcément conscient) terriblement de son vide émotionnel et que s’il rencontre la personne « idoine », ce sera pour lui une question de survie de la détruire. Les pervers narcissiques sont, me semble-t-il jamais violents physiquement, en parole, c’est autre chose... »

Il n’y a qu’un cas où le pervers narcissique est amené à souffrir et à se déprimer : c’est lorsque sa proie lui échappe. C’est alors l’occasion, peut-être la seule, où il est accessible à une prise en charge. En dehors de ce cas, c’est sa proie qui se déprime à sa place : c’est la condition princeps de la perversion narcissique qui consiste pour un sujet à exporter ses deuils et conflits internes pour les faire couver ailleurs. Si cette condition n’est pas remplie, et ben... c’est tout simplement que ce n’est pas une perversion narcissique.

Encore une fois, celui qui souffre, c’est le borderline qui a une labilité émotionnelle qui peut paraître proche de celle du p.n.

Comprenez-vous la contradiction qui existe dans le fait d’affirmer que quelqu’un puisse souffrir de son vide émotionnel ?

Par ailleurs, si le pervers narcissique rencontre la personne « idoine » et que c’est pour lui une question de survie de la détruire, comment peut-il ne pas avoir la volonté détruire sa « victime » comme vous l’affirmiez en début de post ?

Pour finir : que vous n’ayez aucune envie de vous replonger la dedans se comprend aisément, mais manifestement, vous n’en avez pas encore fini avec cette problématique. Généralement, les personnes qui prêtent des affects aux pervers narcissiques, c’est soit qu’elles n’ont pas eu affaire à un véritable pervers, mais plutôt à un borderline ; soit qu’elle culpabilise encore et que leur deuil de cette relation n’est pas terminé. Un grand classique !


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