Commentaire de Taïké Eilée
sur Trump veut « jeter Nicolas Sarkozy en prison » : décryptage d'une manipulation


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Taïké Eilée Taïké Eilée 17 mars 2016 21:31

@Romain M
Je viens de lire votre article Ni complotisme, ni conformisme. Il est excellent. Je n’ai pas trop de mérite à le trouver excellent... puisque c’est le message que je fais passer dans la plupart de mes articles depuis 2007. Et, pas plus tard que le 14 mars, je disais sensiblement la même chose dans cet article, faisant aussi référence aux exercices de simulation militaires le matin du 11 septembre 2001. Je dis également qu’il ne faut pas tirer de la coïncidence troublante la certitude d’un complot interne, mais qu’il faut cependant oser enquêter là-dessus. Vous semblez dire la même chose. Vous parlez d’un sujet « presque tabou dans la presse ». Le mot « presque » me semble ici presque de trop...

Remarque très juste : « Le problème, c’est que cette chasse généralisée au complotisme, déclarée par une multitude de médias, risque de donner un crédit renouvelé à une autre déformation informationnelle et cognitive : le suivisme du pouvoir en place ». C’est précisément à quoi sert un média citoyen, à pallier ce biais assez fort dans les grands médias : le suivisme. Travers que je dénonçais notamment dans cet article.

C’est d’ailleurs LE manque flagrant dans la campagne actuelle de Najat Vallaud-Belkacem : elle veut développer l’esprit critique des jeunes contre la désinformation sur Internet, les rumeurs et théories du complot... mais elle oublie la propagande étatique, ou venant des grandes entreprises.
Votre article est très bien, mais n’avez-vous pas l’impression de prêcher dans le désert parmi la plupart de vos confrères ? Votre attitude équilibrée, qui est aussi celle que j’essaie d’avoir, me semble bien rare.

Petit bémol : les grands médias traditionnels ont peut-être moins de casseroles que des sites clairement orientés (et propagandistes quasi revendiqués), mais ces grands médias ne commettent pas seulement des « erreurs », comme vous le dites, ils ont aussi des biais idéologiques, peut-être plus discrets que ceux de Sputnik ou Fox News, mais bien réels. Et cela nuit à leur honnêteté parfois.

Et puis, quand vous dites : « Il peut s’agir de se laisser tenter par des théories confuses qui, au prétexte d’une accumulation d’incompréhensions et de doutes, laissent entendre qu’il y a un mystère à résoudre (11 septembre : plus il y a de doutes, plus on peut imaginer qu’on nous ment) ».
Je suis d’accord que nous devons nous tenir à l’écart des « théories ». Mais le fait est qu’on nous ment, en partie évidemment, ici ou là. Je ne vais pas tout récapituler ici (voir par exemple cet article), mais il est avéré, par la presse américaine elle-même, que l’administration Bush a menti en prétendant n’avoir reçu aucun avertissement avant les attentats, et n’avoir pas pu imaginer ce genre de scénario. Le directeur de la CIA lui-même a maintes fois dénoncé l’inaction de l’exécutif après ses alertes de juillet 2001. Très récemment, une journaliste du Point s’est moquée de Trump car, selon lui, nous ne connaîtrions pas encore les financiers du 11-Septembre. C’est pourtant très exactement ce que dit le rapport de la Commission d’enquête lui-même, page 172. Par sa moquerie non-informée, la journaliste nous trompe. Les 28 pages classifiées, dont parle Bob Graham depuis 2002, qui mettraient en cause l’Arabie saoudite (maintenons le conditionnel), c’est au minimum une cachotterie de la part de l’administration américaine. Elle ne veut pas tout dire, quitte à protéger (c’est l’idée implicite de Graham) un des responsables des attentats.

Quant à Gérald Bronner, que vous dites apprécier, il dit certes des choses pertinentes, de manière générale, mais souffre parfois des biais qu’il dénonce. Il précise, avec raison, que mettre en garde contre les théories du complot n’empêche pas qu’il y ait évidemment des complots réels ; mais, à peine l’a-t-il dit, qu’il traite de « conspi » tout individu qui émet l’hypothèse d’un complot (y compris dans l’affaire JFK, ce qui est un comble...). Je crois précisément que ces amalgames grossiers auxquels ce genre d’expert se livre parfois tient au fait qu’il n’a pas étudié le moins du monde certains des dossiers sur lesquels il nous livre pourtant son expertise. Il ose même dire que cette étude est « inutile », que c’est une perte de temps, et qu’il vaut mieux se cantonner à déconstruire la rhétorique « complotiste ».

Bref, je préfère l’équilibre et l’ouverture de votre propre pensée à celle de ce sociologue et de certains de ses acolytes.


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