Commentaire de Mélusine ou la Robe de Saphir.
sur Emmanuel Macron : la boussole après les horloges


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Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 17 octobre 2018 16:11

Le meilleur, c’est Joffrin ;

17 octobre 2018
La lettre politique
de Laurent Joffrin
Macronimus le prophète

Dans l’Etoile mystérieuse, Tintin est poursuivi par un personnage inquiétant qui déambule dans une robe blanche et fait résonner un gong en psalmodiant des lugubres prédictions : « Repentez-vous ! », « La fin est proche », « C’est la fin du monde ! », etc. C’est Philippulus le prophète, l’oiseau de malheur qui hante les premières planches de l’album.

Voici maintenant « Macronimus le prophète ». Dans un clair-obscur inquiétant, le président s’est adressé au pays avec une homélie crépusculaire. Etrange mise en scène digne de l’Exorciste  : lumière sombre, ton grave et punchlines lugubres. Ce monde est dangereux, la France est blessée, l’Europe bascule dans le nationalisme. Toutes choses qui ne sont pas fausses mais que la forme de l’intervention a outrancièrement soulignées, rejetant au second plan l’appel à la confiance et à l’action qui faisaient le fond de sauce du propos. Il y a là de quoi savonner la tête de quelques communicants…

Cultivé – c’est un atout appréciable –, le Président, par ses allusions, a mis en miroir deux livres, la Fin de l’histoire de Francis Fukuyama et les Somnambules de Christopher Clark. Le premier proclamait sa foi dans la victoire de la démocratie ; il est obsolète. Le deuxième décrivait l’inconscience criminelle des dirigeants européens à la veille de la Grande Guerre ; il est d’une actualité criante. Voilà qui va nous rassurer.

Pourtant le Président avait des arguments : il a mené à bien une série impressionnante de réformes, son remaniement est équilibré et le vaisseau gouvernemental reste dans ses lignes, le cap du changement est maintenu, et qu’on aime ou non la politique en cours, c’est un signe de cohérence. Mais tout cela a été encastré dans un message sinistre et une réalisation funèbre. Le format avait le grand mérite d’éviter tout questionnement journalistique sur la séquence baroque qui vient de se dérouler. Il s’agissait de prendre de la hauteur, loin des tracassins du rituel médiatique. Mais on est passé de Jupiter à Cassandre. Ou à Hergé. Il n’y manquait que le gong et la robe blanche.

LAURENT JOFFRIN

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