jeudi 24 janvier 2019 - par rosemar

La vie qui s’en va par dessus nous...

 

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La fuite du temps a inspiré tant de poètes, depuis Ronsard, Hugo, Musset...

On retrouve ce thème dans une chanson intitulée La vie qui s'en va, un texte de Maurice Vidalin, sur une musique de Mikis Theodorakis. Cette chanson interprétée par Mouloudji revêt un charme, empreint de mélancolie.

Le poète emploie, dès le début, le pronom indéfini "on" qui a une valeur générale : "On ne sait plus ce que l'on est, on ne sait plus qui l'on était..." Ce pronom "on" réitéré restitue, ainsi, une forme d'anonymat : l'homme perdu dans une foule oublie sa propre identité.

Cette chanson écrite pour un film "Biribi" qui évoque la vie dans des bataillons disciplinaires d'Afrique du Nord dénonce la dure réalité de la condition des soldats, à la fin du XIXème siècle.

Les négations traduisent un désarroi, une perte totale de repères.

La vie associée à un verbe de mouvement est personnifiée, elle semble, ainsi, tout emporter sur son passage : "La vie qui va par dessus nous, efface tout."

La vie devient une sorte d'entité qui impose sa souveraineté sur l'homme, qui le domine et le subjugue.

Le verbe familier "elle s'en fout" traduit, aussi, une violence infinie qui terrasse les individus.

Une simple phrase restitue toute la fugacité du temps qui passe, grâce à la répétition du verbe "aller" : "la vie qui va, c'est la vie qui s'en va "...

Le passé, lui, apparaît comme un réconfort, car il est magnifié par les souvenirs : il permet d'oublier un présent douloureux, "le cafard" que ressent le poète : l'emploi de la première personne du singulier donne au texte un ton confidentiel : "Et mon passé, quand j'ai la cafard c'est tout doré, à travers un brouillard". Le style familier et poétique rend cette confidence encore plus poignante.

Ce passé se concrétise, avec l'évocation de la ville natale du poète, "Paris", puis "ma rue", un point d'ancrage qui paraît essentiel, avec l'image d'une femme aimée, symbole de sensualité, de tendresse : "Marie et ses seins nus", des images simples qui touchent tout le monde.

On retrouve, dans ce texte, un motif souvent associé à la fuite du temps : la fleur, raccourci saisissant de la vie humaine, la fleur vouée à un dépérissement très rapide : "Cueille une fleur, demain, la fleur sera fanée, il faudra l'enterrer".

L'alternance du passé et du présent souligne le désarroi du narrateur : "Moi, j'étais un fils à maman, je suis moins que rien au régiment.." Objet de toutes les sollicitudes dans l'enfance, celui qui est devenu soldat a tout perdu, il est réduit à néant, comme le montre l'expression négative et familière : "moins que rien..."

Et cet être réduit à néant affirme même : "Je suis mort"... une mort d'autant plus atroce que personne ne le sait, ce que suggère l'expression interrogative : "Mais qui le sait ?"

Il est vrai que ce soldat "marche encore", mais il n'est plus qu'une apparence, une ombre "j'ai l'air d'exister", affirme-t-il... Le texte restitue, ainsi, la déshumanisation que subit l'individu dans l'univers militaire.

La mélodie très douce traduit une forme de résignation et d'acceptation qui suscitent en nous émotion et mélancolie...

 

Le blog :

http://rosemar.over-blog.com/la-vie-qui-s-en-va-par-dessus-nous

 

Vidéo :

 



3 réactions


  • Clark Kent François Pignon 24 janvier 2019 18:16

    « Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
    Suspendez votre cours :
    Laissez-nous savourer les rapides délices
    Des plus beaux de nos jours !  »

    Le Lac  La Martine


  • norbert gabriel norbert gabriel 25 janvier 2019 14:59

    Merci, moi qui croyais bien connaître Mouloudji.. Cette chanson ne figure pas dans le coffret de 300 chansons que je croyais recenser l’intégrale de Mouloudji...

    Une enquête s’impose...  smiley


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