mercredi 5 juillet 2017 - par Fergus

Beethoven et la 5e symphonie

C’est à un programme fabuleux qu’ont eu droit, le 22 décembre 1808, les spectateurs viennois du Theater an der Wien. Parmi les 4 œuvres crées ce jour-là figurait la 5e symphonie de Beethoven, dirigée par le compositeur en personne. Nul ne peut imaginer aujourd’hui à quel point cette œuvre atypique a marqué l’histoire de la symphonie et constitué, après la 3e symphonie dite « Héroïque », une nouvelle étape de la révolution musicale en marche...

On a coutume de dire des quatre notes qui ouvrent la 5e symphonie dans la tonalité dramatique d’ut mineur – le fameux « pom-pom-pom-pooom » – qu’elles symbolisent « le destin qui frappe à la porte ». Et de fait, ces quatre notes – trois sol brefs suivis d’un mi bémol long – semblent avoir été écrites pour placer d’emblée l’auditeur dans la gravité que requiert l’inéluctabilité du Destin. À tel point que cette source de l’inspiration de Beethoven, couramment réaffirmée par les éditeurs et les musicologues, s’est imposée au fil du temps comme une vérité intangible que l’on retrouve dans le sous-titre de l’œuvre, qualifiée de « symphonie du Destin ».

Or, Beethoven n’a jamais laissé le moindre écrit qui permette d’étayer cette relation entre le Destin et la 5e symphonie. Et cela contrairement à ce qu’a laissé entendre son secrétaire et biographe Anton Schindler pour le plus grand plaisir des éditeurs, toujours friands d’éléments de nature à doper les ventes en attisant la curiosité des mélomanes. Mais en réalité, cela n’a que peu d’importance : l’œuvre colle si bien à une représentation musicale du Destin – ce même destin si cruel pour Beethoven, déjà très handicapé par sa surdité – qu’à l’exception de rares musicologues, il s’est trouvé peu de monde pour contester la véracité de la « confidence » qu’aurait faite Beethoven à Schindler. Et cela malgré une crédibilité très écornée du biographe depuis quelques décennies*.

Bien que Beethoven en ait eu l’idée dès 1802, ce n’est qu’à partir de 1804 qu’il commença à dessiner la trame de la 5e symphonie. Et ce n’est qu’en 1808, après quatre années de maturation, qu’il mit un point final à cette œuvre et en donna la « première » lors de cette fameuse « Akademie » du 22 décembre au Theater an der Wien. Un concert exceptionnel au cours duquel les spectateurs purent entendre, outre cette 5e Symphonie, trois autres créations majeures : la 6e symphonie dite « Pastorale », le 4e concerto pour piano, et la Fantaisie pour piano, chœur et orchestre, vaste et superbe esquisse du futur mouvement final avec chœurs de la 9e symphonie, écrite quelques jours seulement avant le concert pour mettre en valeur l’Ode à la Joie de Schiller.

Si l’on en croit les chroniqueurs de l’époque, malgré des oreilles éduquées et en dépit d’un esprit plutôt ouvert aux innovations, le public viennois ne fut pas séduit par cette 5e symphonie. Il est vrai qu’elle était atypique car presqu’entièrement construite, non sur des mélodies, mais sur une architecture cyclique obsédante de quatre notes déclinées jusqu’à la saturation pour certains mélomanes encore ancrés dans le modèle classique hérité de Haydn et Mozart. Il est vrai que le concert ne se déroula pas dans d’excellentes conditions : la salle était glacée, et les musiciens – de compétences inégales – n’avaient pas eu le temps de répéter suffisamment cette symphonie si déconcertante. Ceci explique sans doute cela.

Et de fait, un mois plus tard (le 23 janvier), la 5e symphonie était rejouée à Leipzig où elle reçut un accueil enthousiaste confirmé en 1812 par les Viennois lors d’une reprise de cette œuvre dans la capitale autrichienne. Il est vrai qu’entre temps, le populaire compositeur E.T.A. Hoffmann s’était montré dithyrambique : « Cette magnifique œuvre transporte l’auditeur à travers des climats grandissants jusqu’au royaume spirituel de l’infini. » Quant au public français, ce n’est qu’en 1828 qu’il entendit pour la première fois la 5e symphonie : elle fut saluée par les acclamations du public et fit dire dans la Revue Musicale au célèbre critique Fétis, impressionné par la puissance dégagée, « C’est l’univers qui s’ébranle ».

Beethoven a-t-il voulu, après l’« Héroïque », écrire une nouvelle symphonie révolutionnaire en composant la 5e ? On peut en douter. Et cela d’autant plus que c’est au prince Lobkowitz qu’il a dédié cette œuvre. Il est vrai que Beethoven pouvait difficilement faire moins, ce prince et mécène bohémien s’étant attaché ses services pour 4000 florins par an à condition qu’il reste à Vienne et ne cède pas à l’offre du roi de Westphalie qui entendait faire du compositeur son Kapellmeister (Maître de Chapelle). Pas de nouvel opus héroïque donc, mais incontestablement une œuvre innovante dans laquelle la créativité personnelle de Beethoven prend, tout au long de la symphonie, le pas sur le style de l’époque.

Une créativité qui, au-delà du caractère cyclique s’exprime dans un final étonnant. Voilà en effet une œuvre qui débute sur un mode sombre et qui se poursuit dans une gravité obsédante dont on comprend qu’elle ait pu inspirer cette référence au Destin. Or voilà qu’enchaîné au 3e mouvement surgit un final en majeur empli d’une joie et d‘une force communicatives : les trois premiers mouvements s’imposent dans le cadre d’une salle de concert favorisant l’introspection, le quatrième ouvre tout grand les fenêtres et déborde dans le parc pour s’exprimer avec moult notations fortissimo comme une puissante pièce d’extérieur aux accents jubilatoires. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Beethoven ajoute pour la première fois à l’effectif symphonique habituel une flûte piccolo, un contrebasson et trois trombones, tous instruments de plein air dédiés aux musiques de réjouissance et de fête.

Par ce final en apothéose, Beethoven a montré que, Destin ou pas, c’est une vision d’espoir et de joie qu’il voulait donner de la vie, et cela en dépit de la propre douleur que lui occasionnait la progression inéluctable de sa surdité, une calamité pour un compositeur ! D’une certaine manière, le final de la 5e symphonie préfigure, dans un style très différent, ce que sera celui de la 9e symphonie, et ce n’est peut-être pas un hasard si Beethoven a donné à entendre ensemble cette 5e symphonie et la Fantaisie chorale lors du concert du 22 décembre 1808. À chacun d’en juger !

Lien musical : 5e symphonie par l’Orchestre philharmonique de Berlin dirigé par Herbert von Karajan.

Anton Schindler est, depuis les années 70, accusé d’avoir falsifié de nombreux échanges avec le compositeur consignés dans des carnets dont certains ont été détruits de sa main pour servir ses manipulations et embellir son rôle auprès du compositeur. Malgré tout, le travail de Schindler reste précieux à bien des égards.

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22 décembre 1808 : un concert de légende !

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35 réactions


  • troletbuse troletbuse 5 juillet 2017 09:33

    Aujourd’hui nous avons la cinquième ripoublique. de Biteauvent


  • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 5 juillet 2017 10:27

    « une nouvelle étape de la révolution musicale en marche... »


    déjà ?

    C’est pourtant Mozart qui a composé la symphonie Jupiter !




    • Fergus Fergus 5 juillet 2017 18:23

      Bonjour, Jeussey de Sourcesûre

      Exact ! Et Beethoven « Les créatures de Prométhée » dans lesquelles il ne faut pas voir les députés LREM. On ne souhaite d’ailleurs pas à Macron d’avoir le foie dévoré tous les jours. Il n’a d’ailleurs rien volé à Jupiter, autrement dit à lui-même.


    • baldis30 5 juillet 2017 22:34

      @Fergus
      bonsoir,

      Jupiter ... Jupiter mais c’est une création de Meilhac Halévy et Offenbach qui le font intervenir subrepticement dans « La belle Hélène » avant de lui donner un beau rôle de dragueur sous forme de mouche dans « Orphée aux Enfers ».

      ceci dit les quatre premières notes de la cinquième ne valent pas le ré ré ré ré ré ré de l’allegretto de la septième .....


    • Fergus Fergus 5 juillet 2017 22:44

      Bonsoir, baldis30

      Superbe 7e symphonie ! Et le 2e mouvement en est une pure merveille.

      Cela dit, la cellule mélodique qui induit toute la 5e symphonie n’a pas d’équivalent.


  • eric 5 juillet 2017 12:00

    http://www.espritsnomades.com/siteclassique/lamusiquedegeneree.htmlonjour Fergus. Comme toujours, article interessant. A titre humoristique, j’ai envie de reagir comme si j’etais « de gauche »... Pas etonnant que les socialistes internationalisant, aient tant d’affinites musicales aves les socialistes nationalisant... http://www.espritsnomades.com/siteclassique/lamusiquedegeneree.html


    • Fergus Fergus 5 juillet 2017 19:08

      Bonsoir, eric

      Désolé, mais votre amalgame n’a rien d’humoristique. Et en matière de musique - notamment classique -, l’on trouve tous les goûts dans la société, sans que l’on puisse distinguer qui est de gauche et qui est de droite.

      Quant aux perversions décrites dans votre lien, elles sont le fait d’esprits dérangés.


    • Fergus Fergus 5 juillet 2017 20:10

      Bonsoir, Robert Lavigue

      On peut faire toutes les typologies que l’on veut - et certaines sont globalement pertinentes - sans tomber dans la généralisation.

      Et ce qui vaut pour la musique vaut pour la politique : il y a des gens très bien à droite et de parfaits abrutis à gauche, et vice versa naturellement ! smiley


    • baldis30 5 juillet 2017 22:42

      @eric

      je peux dire PREUVE A L’APPUI qu’en matière de sabotage musical la gauche et la droite c’est bonnet blanc et blanc bonnet ...

      Et c’est énorme .... HENAURME ce qui aurait pu se passer sur un emplacement où quelqu’un d’entre nous a récemment fustigé une exposition dite « d’art » moderne .... En matière de sabotage, d’incompétence, de fainéantise .....

      « Un théatre à ... mais c’est la fin de la moralité de nos enfants » ... et la droite emboita le pas ...


    • baldis30 6 juillet 2017 16:12

      @Fergus
      bonjour,

      « sans que l’on puisse distinguer qui est de gauche et qui est de droite.  »

      Oui et non ....

      Mais souvent lucides .... comme Toscanini, sociaux selon les usages de l’époque ( Liszt, Verdi) , concernés ( Haydn, Mozart, Beethoven).

      Evidemment on a des contre-exemples .....


  • laertes laertes 5 juillet 2017 15:54

    @Fergus : j’aime vos articles et bien sûr ceux consacrés à la musique.
    Néanmoins je ne partagerai pas ce « concert » de louanges.
    Contrairement à ce que pense ETA Hoffmann je ne trouve pas que « Cette magnifique œuvre transporte l’auditeur à travers des climats grandissants jusqu’au royaume spirituel de l’infini. »
    Je pense que Beethoven est un maître absolu dans le traitement d’un thème avec tension permanente vers le paroxistique. C’est uniquement à mon avis cette tension qui crée cette impression de transport car la mélodie , elle, reste assez pauvre. Et même dans le domaine du traitement d’un thème , Beethoven est battu à plates coutures par le compositeur qui lui réellement transporte , selon moi l’auditeur vers « le royaume spirituel de l’infini » à savoir J.S. Bach. Il n’est qu’à comparer les variations Diabelli de Beethoven avec les variations Goldberg de Bach.
    Beethoven n’est pas un mélodiste. Il lui a fallu plus d’une dizaine d’années pour trouver le motif de la 9ème qui lui convienne.
    Personnellement je serais plutôt d’accord avec Goethe qui n’accordait pas une grande importance à Beethoven et lui préférait, avec raison W.A. Mozart. Ce qui ne fait pas de Beethoven un très grand musicien, bien au contraire car transformer un thème, même pauvre en brûlures est unique.
    Pour moi Mozart est un bien plus grand musicien que Beethoven mais lui , au lieu de faire varier d’une manière magique et démoniaque les thèmes (à part le finale de DonJuan) faisait varier, les mélodies.
     A cet égard , voir l’impuissance de Beethoven dans le domaine de l’Opéra où le compositeur est vraiment confronté à la création mélodique des situations dramatiques.


    • Fergus Fergus 5 juillet 2017 20:33

      Bonsoir, laertes

      En usant de telles formules, Hoffmann était dans l’air du temps en matière de critique musicale : on donnait alors assez peu dans la nuance, l’enthousiasme débordant pour une œuvre étant souvent compensé par les tirades féroces à l’encontre d’un autre opus.

      Je ne crois pas que l’on puisse dire que Beethoven n’était pas un mélodiste. A cet égard, ses symphonies 6 et 7 démontrent qu’il avait de réelles et belles capacités dans ce domaine, même si sur ce plan Schubert - et bien entendu Haydn et Mozart - ont sans douté été plus inspirés que lui. Cela dit, il est vrai qu’il a échoué dans la création lyrique, ce qui n’a rien de surprenant : l’opéra fait appel aux sentiments, or Beethoven n’est jamais aussi créatif que dans l’épique.

      Parler de Bach comme du grand mélodiste de la musique classique me surprend en revanche. Non qu’il ait été dépourvu de talents - voire de génie - en la matière, mais guère plus que ses contemporains Telemann et Vivaldi, le génial compositeur allemand ayant surtout marqué l’histoire de la musique par sa remarquable maîtrise de la construction musicale, à la rigueur toute scientifique.

      Cela dit rassurez-vous, Bach fait évidemment de mon panthéon des grands hommes de la musique, au côté de ceux déjà cités dans ce commentaire.

       


    • laertes laertes 6 juillet 2017 13:43

      @Fergus : je ne suis pas d’accord avec vous. Quand on regarde attentivement les motifs de la 6 ème et 7ème symphonie de Beethoven, on remarque tout de suite la pauvreté mélodique. Je suis désolé, cela ne veut pas dire que Beethoven n’était pas un grand musicien mais seulement qu’il avait peu d’inspiration en matière mélodique par rapport à son incroyable génie de traitement des motifs. Et , là encore je suis désolé mais quand on est un grand mélodiste on n’a pas peur d’exprimer en musique des sentiments... mais, à mon avis cette dimension « épique » de la musique de Beethoven est plus une ficelle pour masquer son manque de créativité dans ce domaine spécifique. En cela, il ressemble à Haydn qui a les défauts de Beethoven sans en avoir les grandioses qualités. Quant à Schubert, que dire ? C’est selon moi le musicien qui peut trouver de très belles mélodies mais elles sont trop rares et surtout, surtout elles sont traitées avec un manque total de capacité. C’est l’un des musiciens les plus surévalués de notre époque. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi. Sa musique est si ennuyeuse, si , comment dire si incapable....
      Quant à Bach, là encore désolé...... C’est le maître absolu. Réécoutez les variations Goldberg et vous verrez qu’à partir de ce que vous appelez , avec raison « la maîtrise de la construction musicale » il arrive à créer un univers mélodique nouveau en parfaite adéquation avec ladite construction. C’est pour cette raison que Mozart l’admirait tant et a même utilisé ses trouvailles dans l’immense « Flüte Enchantée ».


    • O Coquinos O Coquinos 6 juillet 2017 22:34

      @laertes

      Bonsoir.

      Vous avez écrit être « d’accord avec Goethe qui n’accordait pas une grande importance à Beethoven et lui préférait, avec raison W.A. Mozart ». Avec raison ? Quelle raison ? A quoi bon classer par ordre d’excellence des compositeurs qui ne sont pas comparables, ont chacun forgé leur style propre dans le cadre de canons artistiques évolutifs appartenant à des époques diverses, ont disposé de moyens d’expression instrumentaux et vocaux qui n’étaient pas identiques, et dont les oeuvres aujourd’hui touchent différemment des publics différents.

      Selon votre sensibilité, J.S. Bach fut au summum de l’art musical. Pour d’autres qui se sont procuré l’excellente intégrale Bach parue naguère chez Brilliant et qui l’ont écoutée dans son entier, quel ennui, mais quel ennui neuf fois sur dix ! A côté de nombreux chefs-d’oeuvres immortels, une masse de musique à peine au-dessus de la moyenne de l’époque, voire en-dessous. D’aucuns préféreront les fils au père. Certains, tel votre serviteur comme on disait jadis, considéreront Vivaldi, le Vivaldi des oeuvres religieuses, des sinfonias pour cordes, des concerti pour hautbois, basson, viole d’amour, mandoline, luth, flûte à bec ou pour ensemble d’instruments variés, des cantates, des opéras (parmi la vingtaine qui nous sont parvenus), etc., sans parler des concertos pour violon, comme infiniment plus imaginatif, important et moderne que le « grand » J.S. Bach. C’est une simple question de goût, d’appréciation. Et Goethe avait beau être un « grand » écrivain, l’un des plus « grands » de tous les temps sans doute, le fait, à vous lire, qu’il ait préféré Mozart à Beethoven ne prouve pas que la musique de l’impertinent Salzbourgeois fût supérieure à celle de son austère cadet (ça veut dire quoi, d’ailleurs, « grand » et « supérieur » dans le domaine des arts ?), cela montre seulement que Goethe n’était guère sensible à l’expressivité et à la facture des compositions du second ; probablement aussi ne prisait-il guère sa personnalité bourrue, un peu brute de décoffrage. En un mot, il ne comprit ni la musique de Beethoven, ni l’exceptionnel créateur que ce dernier était. On peut avoir du génie dans son domaine de compétence (la littérature) et être aveugle comme une taupe (ou sourd comme un pot) dans un domaine à soi étranger (la musique).

      Vous avez écrit d’autre part que Beethoven n’était pas mélodiste - vous êtes ou sacrément difficile ou terriblement culotté ! - et qu’il fut « battu à plates coutures » par Bach (encore cette satanée hiérarchisation qui n’a pas lieu d’être : Albert Roussel était-il inférieur à Heinrich Schütz, Prokofiev à Gesualdo, Magnard à Brahms, quant à leur inventivité mélodique ? Cela n’a à mon avis aucun sens) : comptez-vous le mouvement lent de la Septième pour rien ? le mouvement introductif du concerto de violon comme négligeable sur le plan mélodique ? Et toutes ces idées sublimes et non « paroxystiques » qui se gravent dans la mémoire de l’auditeur dès la première écoute en ne la quittant jamais plus par la suite qu’on trouve dans la foisonnante musique de chambre de Beethoven, dans l’immense corpus de ses pièces pour piano, dans ses lieder, dans ses concertos de piano, dans ce petit joyau trop méconnu des mélomanes qu’est la Huitième ou dans la ravissante Première ?

      Vous avez ajouté : « Il lui a fallu plus d’une dizaine d’années pour trouver le motif de la 9ème qui lui convienne ». Il faudrait s’entendre d’abord sur le motif auquel vous faites allusion, car la Neuvième ne manque pas d’invention mélodique ! Mais quel est le rapport entre le temps mis par un compositeur pour trouver la version définitive d’un thème et la qualité finale du résultat ? Mendelssohn était-il meilleur compositeur vers la fin de son adolescence que Beethoven dans sa pleine maturité parce qu’il conçut ses premiers chefs-d’oeuvre avec une remarquable rapidité ? Dans ce cas, Offenbach, Johann Strauss fils et Suppé, autres génies dans leur genre, furent bien « supérieurs » à Beethoven, Brahms et Draeseke... Je crois qu’ils eussent été très surpris de l’apprendre !

      Quant à l’impuissance du maître de Bonn, selon l’expression consacrée, en matière d’opéra, s’agissait-il réellement d’impuissance ou de recherche peut-être excessive de la perfection dans un genre prestigieux (et lucratif lorsque le succès était au rendez-vous) qui n’était tout simplement pas le sien - étant profondément symphoniste de nature, y compris dans ses oeuvres pianistiques et de musique de chambre - et dans lequel, mal à l’aise, il avait à coeur de se distinguer, conscient de la place éminente qui serait la sienne dans l’histoire de la musique ? Auparavant, les compositeurs des époques baroque et classique produisaient en abondance pour la plupart et dans tous les genres, opéras inclus (mis à part J.S. Bach qui n’accoucha d’aucun ouvrage scénique... par impuissance ?) et, sauf exception, ne retravaillaient pas de fond en comble leur oeuvres durant de longues années jusqu’à ce qu’ils touchassent à l’idéal. Parmi les précurseurs du romantisme, c’est Beethoven qui s’imposa le premier, à ma connaissance, la tâche herculéenne de remettre un grand nombre de fois sur le métier un même opéra jusqu’à lui trouver sa forme parfaite (Leonore devenu Fidelio). D’autres suivront plus tard son exemple avec plus ou moins de réussite (César Franck et sa Hulda, Moussorgsky et sa Khovanchtchina, Borodine et son Prince Igor, Chausson et son Roi Arthus, Dukas et son Ariane et Barbe-Bleue, Debussy et son Pelléas et Mélisande, Albéniz et son Merlin, etc.).

      En postant ce commentaire, mon but n’est évidemment pas de vous contredire sur tous les points pour le plaisir de vous contredire, et vous avez parfaitement le droit d’écrire ce que vous avez écrit et de penser ce que vous pensez. J’admets également pouvoir me tromper dans certaines de mes affirmations. L’important est que vous êtes manifestement un amoureux de la belle musique et qu’en cela nous partageons une même passion.


    • O Coquinos O Coquinos 6 juillet 2017 22:38

      @O Coquinos

      Ma réponse concernait bien sûr votre commentaire du 5 juillet 15:54.


    • Fergus Fergus 6 juillet 2017 23:00

      Bonsoir, O Coquinos

      « A quoi bon classer par ordre d’excellence des compositeurs qui ne sont pas comparables"

      100 % d’accord.

      Pour aller dans votre sens concernant Bach, n’oublions pas qu’il s’est beaucoup plagié, aussi bien dans ses cantates que dans ses concertos, sans oublier l’apport de Vivaldi dans son œuvre.

      A ce propos, je vous rejoins totalement sur Vivaldi dont la créativité a été en tous points extraordinaire, allant jusqu’à tenter des expériences inédites en composant des œuvres pour les instruments les plus variés - comme vous le rappelez - et cela pour être jouées par les jeunes orphelines de la Pietà (lien). 

      J’ajoute que je vous rejoins très largement sur le reste de votre commentaire.



    • Antoine 6 juillet 2017 23:35

      @O Coquinos
      Bel et épuisant exercice ! J’ai la plus grande considération pour quasiment tous les cités, même si je vous trouve un rien trop enthousiaste pour Vivaldi, auteur certes d’œuvres magnifiques mais trop souvent à vide à force de faire du remplissage avec des trucs de compositeurs (tous en ont -quasiment la seule œuvre qui n’en comporte pas, « l’Après-midi d’un faune »-, mais lui, c’est quelque chose !). Quant à moi, j’écoute en boucle les symphonies de Rott, Casella, Tyberg et bien d’autres superbement ignorés par trop d’oreilles...


    • O Coquinos O Coquinos 6 juillet 2017 23:40

      @laertes (concernant cette fois votre commentaire du 6 juillet 13:43)

      Là, je ne vous suis plus du tout. Vous semblez atteint de ce syndrome qui atteint certains adorateurs de Bach qui le considèrent comme le nec plus ultra de la musique baroque et l’horizon indépassable de la musique tout court, admettant à la rigueur dans son ombre par-ci, par-là un Mozart. Vous semblez ne pas vous rendre compte qu’en vous en prenant maintenant et de cette façon à Joseph Haydn, ainsi qu’à Franz Schubert, vous vous discréditez auprès des lecteurs avertis. Si Mozart vous entendait, d’oser dénigrer l’un des rares compositeurs qui étaient son égal et qu’il reconnaissait comme tel, je crois qu’il vous rirait au nez ! Quant à Schubert, reprocher à ce génie absolu de l’invention mélodique (comme l’étaient également Haydn et son frère) son « manque total de capacité » dans ce domaine... c’est du grand n’importe quoi. Que connaissez-vous donc de Schubert ? L’Inachevée, la Neuvième, la Cinquième, les quatuors à cordes, les sonates pour piano, les lieder, les messes, Rosamunde, sont ennuyeux et peu mélodiques ? Vous dites que Schubert est l’un des compositeurs les plus surévalués de notre époque et ne pas comprendre pourquoi : c’est bien là que réside le problème, vous ne comprenez pas la beauté, la profonde humanité et le tragique sous-jacent de sa musique et de ce fait vous la reléguez au second plan. On a envie de vous plaindre. Sincèrement.


    • O Coquinos O Coquinos 6 juillet 2017 23:57

      @Fergus

      Merci à vous. Emporté par ma fougue, j’ai oublié dans mes précédents commentaires de préciser que votre article m’avait bien plu et intéressé. C’était sous-entendu, mais il vaut mieux l’exprimer clairement.


    • O Coquinos O Coquinos 7 juillet 2017 01:20

      @Antoine

      J’apprécie beaucoup les rares oeuvres gravées sur CD de Hans Rott, disparu si jeune. Sa symphonie pour grand orchestre et son quatuor à cordes notamment sont des oeuvres absolument géniales. Mahler a reconnu sa dette envers son condisciple et pour moi, mais ce n’est qu’un avis strictement personnel, la musique de Rott est en plus totalement dépourvue de ce clinquant cuivré qui affecte certaines grandes symphonies de Mahler. J’aime la musique de Casella et ne connais point encore celle de Tyberg (il y en a tant à découvrir !).

      Sur Vivaldi, ce que vous écrivez (« faire du remplissage ») rejoint quelque peu la phrase assassine imputée à Stravinsky selon laquelle il aurait recommencé six cents fois le même concerto. J’ignore si vous connaissez les oeuvres de Vivaldi que j’ai brièvement évoquées dans ma première réponse adressée à Laertes ; si c’est le cas, libre à vous de faire ce reproche au compositeur vénitien, qui est d’ailleurs justifié dans une certaine mesure au vu de l’immensité de son oeuvre (et de la rapidité de son écriture), dans laquelle il y a forcément des redondances et des oeuvres plus faibles que d’autres. Mais si vous ne connaissez la musique de Vivaldi que de façon relativement superficielle, alors je vous assure qu’il vaut la peine de se pencher dessus plus attentivement. Vous y découvrirez une quantité proprement confondante de purs joyaux qui semblent avoir été composés avant-hier. Par ses trouvailles rythmiques, ses ruptures de rythme, sa fantaisie imprévisible, ses alliages inhabituels de timbres, son saisissant traitement des voix, ses contrastes d’atmosphère déconcertants qui vous font soudainement passer d’une jubilation extrême à une infinie mélancolie, et par-dessus tout la richesse et la grisante beauté de ses mélodies, la question que l’on se pose est : où l’esprit humain peut-il puiser les ressources d’une pareille inventivité ? Vivaldi semble sorti de nulle part : il n’avait pas véritablement de précurseurs et la musique de ses contemporains et concurrents tels Albinoni, autre compositeur de génie, ou les Marcello, n’avaient pas cette rutilance, cette spontanéité, cette intelligence fusant de tous côtés, cet élan irrésistible qui sont les marques de fabrique du « prêtre roux ». Ce fut un météore. Ni prédécesseurs, ni successeurs réels, un peu comme Berlioz à une autre époque et dans un autre registre, ou Alkan. Ses sonates pour violoncelle sont splendides, le moindre morceau de chant est épatant.

      Je ne suis pas dithyrambique, c’est le legs musical vivaldien qui est époustouflant pour celles et ceux qui prennent le temps de sortir des sentiers battus en allant au-delà des cycles bien connus de concertos de violon qui ont fait sa célébrité.

      A bientôt peut-être en commentant un autre article de Fergus ?


    • Fergus Fergus 7 juillet 2017 08:29

      Bonjour, O Coquinos

      Merci également à vous pour la richesse de votre argumentation et la qualité de vos échanges avec Antoine.


    • Antoine 8 juillet 2017 00:03

      @O Coquinos
      Mon cher ami (je m’autorise cette familiarité à l’égard d’un si rare connaisseur de ce qui mérite le nom de « Musique »), je sais bien que Vivaldi a écrit des pages admirables mais c’est quand même le Donizetti de son époque, avec un très fort taux de remplissage mais un savoir-faire qui fait parfois merveille. Il maitrise d’ailleurs beaucoup moins bien qu’Haendel les couleurs dramatiques et affectives, défaut en partie masqué par le caractère très instrumental de ses œuvres.


    • laertes laertes 14 août 2017 17:29

      @O Coquinos : j’ai beaucoup aimé votre commentaire et je vais essayer d’y répondre. La musique est une expérience personnelle et personnellement je suis convaincu qu’on peut aussi expliciter , comme n’importe quel art, sa force émotionnelle c’est à dire en donner les raisons et par là même y découvrir de nouvelles émotions.
      Quand je dis que Goethe préférait avec raison Mozart , je voulais parler des miennes de raisons.
      Saviez-vous que Mozart n’a pas été impressionné par Beethoven ? Je crois savoir pourquoi. Selon moi ils n’habitent pas un même monde musical comme Bach père n’habitait pas le même monde musical que celui de ses fils.
      J’aime beaucoup Beethoven , surtout ses sonates que j’estime supérieures à ses symphonies et aux sonates de Mozart. Il est vrai que le mot « supérieur » est toujours délicat à utiliser. J’utiliserai donc ce mot dans le sens de potentialité émotionnelle (que ce soit par la mélodie, son traitement, son architecture harmonique ou autre, sa rythmique, ses contrastes, sa dynamique et les timbres employés).
      Bach peut aussi m’ennuyer (il était qqfois trop dépendant de sa foi et des formes du moment) mais désolé, moi qui aime beaucoup Vivaldi il n’y a rien de comparable dans son oeuvre concertante avec certains concertos brandebourgeois ou suites pour orchestre, rien aussi chez Vivaldi qui puisse se comparer aux oeuvres pour clavier (suites, partitas sonates pour orgue etc).
      Si je parle tant des variations Golberg c’est parce qu’elles montrent d’une manière éblouissante combien ce compositeur quand il en avait l’occasion était au-dessus (dans le sens que j’ai défini ci-dessus) de tous les autres et surtout de Beethoven. Son oeuvre peut être parfois si fascinante qu’elle semble venir d’un autre monde. Oui, dans ses capacités JS Bach était de loin supérieur à Vivaldi, Schütz, Telemann, Haendel et....Beethoven.
      Je ne partage pas votre admiration pour les symphonies de Beethoven dont le contenu mélodique reste très moyen. D’ailleurs si la 9ème est certainement l’une des plus grandes symphonies jamais réalisées ce n’est certainement pas par sa richesse mélodique mais par le traitement que Beethoven en fait. Beethoven est un architecte génial qui n’a pas les ressources mélodiques correspondantes à son génie spécifique.
      Vous dites : "Quant à l’impuissance du maître de Bonn, selon l’expression consacrée, en matière d’opéra, s’agissait-il réellement d’impuissance ou de recherche peut-être excessive de la perfection dans un genre prestigieux (et lucratif lorsque le succès était au rendez-vous) qui n’était tout simplement pas le sien« ... oui il recherchait la perfection bien sûr , comme l’anecdote de la »trouvaille« du motif de la 9ème l’indique mais le fait qu’il ne l’ait pas trouvé dans ce domaine précis et encore très prisé me ferait plutôt pencher vers une incapacité.
      Beethoven est très fort pour mettre en musique des idéaux (ça ne mange pas de pain et c’est assez abstrait) comme l’a montré »Fidélio« mais il montre toutes ses limites dans l’expression des sentiments portés par un texte.............. Et ce sont VERITABLEMENT selon moi des limites. Et ces limites sont dus à sa faiblesse créatrice en matière mélodique. Et ne venez pas me dire que le mouvement lent de la 7ème ou autre sont d’une grande richesse mélodique car ce n’est pas vrai. Il répète ( ce qu’il sait faire génialement) le motif d’une manière incroyablement originale... mais il crée peu dans ce domaine.
      Quant à l’attitude de Bach vis à vis de l’opéra je n’ai pas de réponse car c’est énigmatique. Il ne refusait pas pourtant de faire des oeuvres profanes mais l’opéra à cette époque en dehors de l’Italie était plutôt cantoné dans l’oratorio.

      Sur votre deuxième commentaire
      Je vous recite : » Vous semblez ne pas vous rendre compte qu’en vous en prenant maintenant et de cette façon à Joseph Haydn, ainsi qu’à Franz Schubert, vous vous discréditez auprès des lecteurs avertis.«   : alors là vous me décevez. Je croyais que vous étiez un esprit indépendant et cultivé. Je me fous du discrédit auprès de lecteurs avertis ou pas. Je connais mes goûts et je suis capable de les soutenir.
      Mozart n’a jamais considéré Haydn comme son égal (Vous savez, le même Haydn que Beethoven appelait Papa Haydn ») . Il disait qu’il n’y avait aucun compositeur qui le faisait autant rire que lui (rire non moqueur bien sûr). D’ailleurs c’est Haydn qui écoutant les fabuleux quatuors que Mozart lui avait dédiés dira au père « je tiens votre fils pour le PLUS GRAND COMPOSITEUR de notre époque » Il a dit : « le plus grand ». Et il avait raison !
      Réécoutez les quatuors de Haydn : aucun absolument aucun ne peut se comparer aux derniers quatuors de Mozart. Haydn reste un grand compositeur mais comparé à Mozart un nain, un élève.
      OUi, j’ai écouté une grande partie de l’oeuvre de Schubert : quatuors, quintettes, lieder (le pire est peut-être wintereise), symphonies, musique religieuse.
      Je n’ai jamais dit que ses oeuvres n’étaient pas mélodiques. Au contraire , j’ai écrit qu’il pouvait trouver des mélodies d’une étonnante beauté. J’ai dit qu’au contraire de Beethoven il les traitait avec un manque total de capacité. Oui, je trouve que sa musique est profondément ennuyeuse, répétitive jusqu’à la nausée, engoncée dans un pathos que vous voyez vous comme d’une beauté tragique.
      Ne me plaignez pas : Il me reste Mozart, Bach...................et plein d’autres GRANDES oeuvres. Je n’ai que faire d’un Schubert et sa « pseudo tragédie larmoyante ».


    • Fergus Fergus 14 août 2017 17:44

      Bonjour, laertes

      Vous écrivez à O Coquinos « Je ne partage pas votre admiration pour les symphonies de Beethoven dont le contenu mélodique reste très moyen. »

      Pourquoi pas ? Mais on s’en fiche un peu du contenu mélodique lorsque l’œuvre dégage une telle puissance. Or, c’est bien de puissance - et donc de contenu émotionnel, fût-il dicté par cette puissance et non par un contenu plus intime - qu’il est question avec les symphonies de Beethoven non directement inspirées par le style de Haydn.

      « Récoutez les quatuors de Haydn : aucun absolument aucun ne peut se comparer aux derniers quatuors de Mozart. »

      Absolument d’accord ! Mais Haydn a été avant tout un grand compositeur de symphonies et de concertos.

      Pas d’accord du tout sur Schubert. Il a été un génie en certaines occasions et un artisan laborieux en d’autres. Sans doute son décès prématuré nous a-t-il privé d’œuvres de maturité de grandes qualités.

      « je trouve que sa musique est profondément ennuyeuse »

      La vie est décidément bien faite car elle donne à chacun des goûts variés. Personnellement, ce sont les quatuors de Beethoven que je trouve ennuyeux !!!


    • laertes laertes 15 août 2017 15:50

      @Fergus : j’apprécie votre commentaire Fergus.
      Quand vous parlez de la puissance de la musique de Beethoven je suis à 100% d’accord avec vous mais... je ne vous suivrai pas quand vous parlez du contenu émotionnel associé à cette puissance. C’est Woody Allen je crois qui disait « quand j’écoute la musique de Wagner j’ai envie d’envahir la Pologne ». Oui, je suis d’accord, cette puissance est certes hyperforte émotionellement donc, selon moi intime, mais je ne la trouve en aucun cas variée et riche... et c’est là que le côté « goût personnel » comme vous dites avec raison, entre en jeu.
      Saviez-vous que les deux compositeurs préférés de ce grand mélomane qu’était Adolf Hitler étaient Wagner et Beethoven, qu’il détestait Mozart et Bach. Bien sûr ces gôuts n’ont rien à voir avec l’histoire mais je les trouve intéressant car ils sont assez logiques.
      Concernant Haydn qui me semble -t-il a créé le quatuor à cordes, il me semble que ses symphonies (à part peut-être les Sturm und Drang) et concertos révèlent les mêmes limites que les quatuors.
      Je ne partage pas votre avis sur Schubert. Quand vous écoutez sa musique vous constatez peu d’évolution et le fait qu’il soit mort à 30 ans ne change rien à l’affaire selon moi. Sa musique est incroyablement répétitive et traitée maladroitement. Quand vous écoutez la symphonie fantastique de Berlioz écrite qd il était jeune , vous constatez que ce musicien avait beaucoup plus de capacité que Schubert. Il avait retenu les leçons musicales de Beethoven mais surtout, il les avait appliquées avec une grande originalité car.............il en avait les capacités.
      D’accord avec vous sur les quatuors de Beethoven......................
      Le plus grand compositeur de musique de chambre reste, selon moi Wolfgang Amadeus Mozart.


  • Antoine 6 juillet 2017 00:01

    Bravo Fergus pour cet article qui aborde dans un AV un sujet « sain ». Beethoven a, comme personne, révolutionné la musique par la construction musicale, en particulier par l’usage de motifs courts et leur exploration intense. Son truc, la singularité du langage. Cela dit, on trouve le meilleur Beethoven ailleurs, notamment dans les quatuors...


    • Fergus Fergus 6 juillet 2017 08:41

      Bonjour, Antoine

      « Singularité du langage », en effet. Mais aussi une puissance et une force d’entraînement rarement atteintes auparavant et qui éclatent à un niveau inégalé dans plusieurs opus, et notamment dans le concerto « L’empereur ».

      Pour ce qui est du « meilleur de Beethoven », c’est à chacun de se prononcer : les uns votent pour les symphonies, d’autres pour les concertos, ou bien encore, comme vous, la musique de chambre. Personnellement, ma préférence va vers les concertos, mais vous savez que j’ai toujours eu une attirance toute particulière pour ce genre.

      Merci pour votre contribution.


  • Antoine 6 juillet 2017 23:18

    Pour les concertos pour piano, mon préféré est le troisième s’il est interprété avec une tension maximale. Cela dit, les symphonies et concertos sont « grand public » et donc, si j’ose dire, plus « vulgaires », et en conséquence comportent infiniment moins de subtilités que les quatuors davantage destinés aux initiés et donc d’une ampleur et d’une variété beaucoup plus grandes.


  • Fergus Fergus 7 juillet 2017 17:25

    Bonjour, Antoine,

    "les »symphonies et concertos sont « grand public » et donc, si j’ose dire, plus « vulgaires »"

    Houla ! Voilà une affirmation qui ne manquerait pas d’hérisser le poil de nombreux amateurs, y compris parmi les plus éclairés. Je connais même des musiciens classiques professionnels qui, à l’image du patron de l’Orchestre Symphonique de Bretagne, sont des fans de ces œuvres  du grand Beethoven.

    Et n’allez surtout pas dire cela aux abonnés du Philharmonique de Berlin ! smiley

     Cela dit, je reconnais bien volontiers que le public des quatuors de Beethoven est plus élitiste et sans doute mieux formé – le plus souvent dans le cadre d’une éducation bourgeoise – aux subtilités de la musique de chambre que le public des concerts symphoniques. Cela ne signifie pas pour autant à mes yeux qu’un genre est supérieur à l’autre.  


    • O Coquinos O Coquinos 7 juillet 2017 19:38

      @Fergus

      Très bonne réponse. Je suis entièrement d’accord avec vous.

      Je crois que c’est le genre même du quatuor à cordes qui se prête davantage à un style d’oeuvre plus épuré, austère, aride, d’une appréhension plus ardue, parce que le quatuor c’est la quintessence de l’orchestre : il n’est guère possible de séduire ou de surprendre l’auditeur en mariant les couleurs instrumentales, en recourant au chatoiement orchestral, en ménageant des effets de masse, etc.

      Il y a certainement aussi des raisons plus terre-à-terre à cela : un compositeur pouvait prendre le risque de mettre davantage de lui-même dans une oeuvre pouvant être jouée dans une petite salle avec un effectif réduit que dans une symphonie dont l’exécution onéreuse requérait plusieurs dizaines d’interprètes et présentait toujours le risque d’un fiasco commercial lors de sa création. Les symphonistes avaient donc peut-être tendance à être un peu moins novateurs pour ne pas effrayer leur public.

      Néanmoins, on ne peut pas vraiment appliquer cette théorie au Beethoven de l’Héroïque, de la Cinquième et de la Neuvième ou du concerto de violon qui ne semble pas s’être beaucoup soucié du confort tranquille de son public...

      D’autre part, il n’y a pas non plus beaucoup de compositeurs autres que Beethoven qui ont poussé aussi loin que lui l’expérimentation dans leurs propres quatuors, surtout à son époque.

      Bonne soirée.


    • Fergus Fergus 7 juillet 2017 20:30

      @ O Coquinos

      Je vous rejoins très largement sur ces différents points.

      J’y ajoute un autre élément : de nombreux monarques, princes et autres membres éminents de familles royales ont eux-mêmes été des instrumentistes de qualité* (et parfois des compositeurs comme Frédéric II de Prusse). Mais il n’était évidemment pas question pour eux de se produire dans un théâtre au sein d’un orchestre. Jouer en trio ou en quatuor avec des partenaires de qualité dans un salon aux yeux d’un parterre de courtisans était en revanche parfaitement admis par les différents protocoles. C’est pourquoi de très nombreuses œuvres de musique de chambre sont nées de commandes de la noblesse, mais également de riches négociants pour eux-mêmes ou leur progéniture.

      * Cela a d’ailleurs été le cas du prince Lobkowitz dont on sait qu’il a été un bon violoniste.

      Bonne soirée également.


    • Antoine 8 juillet 2017 00:11

      @Fergus
      Certes, pour les « amateurs » ! Ses œuvres grand public comportent des moments admirables, voire grandioses, mais que de redites et d’effets pour imprégner l’auditeur moyen. Pour ce qui du Philhar de Berlin, il faut bien des programmes très accessibles pour remplir les salles, sans compter la flemme de nombreux chefs à la tendance radoteuse. Par contre, pour ce qui est destiné aux connaisseurs plus pointus des quatuors...il n’y a pas photo !


  • UnLorrain 9 juillet 2017 22:05

    Je survole les derniers comms,feuille lue,et...meme pas de Locatelli ? Corelli ? Valentini ? Albinoni ? Sonates concertos prodigieuses de ceux ci,connaissez pas ? A écouter,immodérément !!


    • Fergus Fergus 10 juillet 2017 09:09

      Bonjour, UnLorrain

      Votre commentaire est évidemment inspiré par les échanges à propos de Vivaldi, et vous avez raison de rappeler ces noms de compositeurs italiens baroques de toute première importance. J’y ajouterai Gallupi qui a sans doute été le principal créateur italien de la transition baroque-classique.


    • Antoine 19 juillet 2017 11:34

      @UnLorrain
      Un lorrain aurait quand même pu commencer par citer Gouvy !


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