lundi 28 février 2022 - par Paul ORIOL

Ceci n’est pas un meurtre…

 

Ceci n’est pas un meurtre…

 

Mais c’est un Maigret adapté au cinéma par Patrice Leconte.

Un roman, un film policier est le plus souvent une histoire qui débute par la découverte d’un meurtre suivi d’une enquête policière cherchant à découvrir les coupables de cet acte criminel. Encore faut-il d’abord établir les faits avant d’engager lecteur ou spectateur dans de multiples impasses plus ou moins angoissantes.

Dans le prologue de Maigret, c’est le Commissaire qui est inquiet de son état de santé, marqué par une fatigue excessive, un manque d’appétit… heureusement sans cause ni conséquence si ce n’est une inutile interdiction médicale de fumer par son médecin. Et le Commissaire est appelé à une nouvelle enquête à propos de la découverte du corps d’une jeune femme lardé de coups de couteau signalé à la police par une alerte téléphonique anonyme.

Le film de lumière et d’ombre. La lumière de Paris ou plutôt le mirage de Paris qui attire les jeunes femmes de province, prêtes à beaucoup, pour se faire une place dans le cinéma ou le beau monde. Mais Paris n’est qu’un aquarium illuminé dans un bureau obscur, un endroit où le nouveau poisson exotique aura une place s’il n’est pas mangé par les premiers occupants.
Le Paris du Commissaire est tout autre : un Paris fait de maisons sombres, de bureaux occupés par des hommes vêtus de noir, de rues tout aussi banales et grisâtres, de longs couloirs sans lumière, même le bord de Seine n’est qu’un couloir pavé : le Commissaire évoque pour une jeune femme qui va l’aider dans sa recherche, une de ses premières enquêtes commencée par la découverte d’un corps en très mauvais état retrouvé au pilier du pont…

Le contraste est fort entre la clarté des images fugitives des jeunes et joyeuses candidates figurantes, des riches fiançailles ou du mariage bourgeois, de l’aquarium et le monde du Commissaire triste et sombre, de son domicile, de son bureau… et des nombreux couloirs qu’il arpente. Contraste encore entre la jeune femme luxueusement vêtue, pour un jeu de rôle, cornaquée par le Commissaire qui lui donne des conseils pour marcher dans le couloir sombre de sa chambre, tous deux aperçus par une logeuse, elle aussi habillée de noir au regard soupçonneux pour ce couple équivoque.


De tous, le personnages dominant est bien sûr le Commissaire, par son rôle, par sa forte corpulence, par l’énormité de Gérard Depardieu encore accentuée par l’importance de ses épais vêtements, de son manteau. Il écrase tout et tout le monde, surtout de dos, dans la rue.

Dans l’épilogue, le film policier est terminé. Deux séquences hors enquête : dans la première, un bal, une jeune femme qui ressemble étrangement à la victime, seule, triste perdue ; dans la seconde, le Commissaire remonte difficilement une rue pentue, déserte et grise, croise une belle jeune femme, souriante, conquérante qui, probablement, débarque de sa province, avec sa valise... la nouvelle vient tenter sa chance dans l’aquarium parisien.
Le monde continue. Le commissaire se retourne, la regarde, reprend lourdement son chemin et son énormité disparaît, s’évanouit, laissant la rue pavée, grise et vide.

 



3 réactions


  • Clark Kent Kaa 28 février 2022 14:31

    Raconter un polar (bouquin ou toile) me rappelle ce qu’on racontait à l’époque où il y avait des petits métiers dans les salles de cinéma. Un client ne lui ayant pas donné de pourboire, l’ouvreuse lui dit à l’oreille : « le coupable, c’est l’épicier ».


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