mardi 10 novembre 2009 - par Fergus

Ces villages de Lorraine « morts pour la France »

À la veille des commémorations de l’Armistice du 11 novembre 1918, zoom sur une émouvante singularité du tissu administratif français. Le 1er janvier 2009, on recensait 36686 communes en France. Six d’entre elles, toutes situées dans le département de la Meuse, comptaient… zéro habitant. Retour au cœur de la « Zone rouge ».

Peu nombreux sont les Français qui savent ce que désigne cette appellation de « Zone rouge ». Pour en savoir plus, il convient de revenir 90 ans en arrière. Sitôt l’Armistice de 1918 signé, un Ministère des régions libérées est créé en vue de jeter les bases de la reconstruction des zones de guerre dévastées ou dégradées par les combats de la Grande Guerre. Sont concernés 12 départements, près de 4000 communes et… 3,3 millions d’hectares ! Dès 1919, une cartographie précise permet de distinguer trois zones :

· La Zone bleue, caractérisée par des dégâts limités et la présence d’installations, de matériels ou de munitions militaires.

· La Zone jaune, plus largement dégradée, où demeurent de nombreux obus non éclatés ; la majorité de ses voies de communication sont toutefois restées praticables.

· La Zone rouge, constituée par les lignes de front et très largement dévastée, quand elle n’est pas complètement rasée de toute construction et de toute végétation ; la plupart des infrastructures de cette zone sont détruites, soit en partie, soit en totalité.

Les destructions subies dans la Zone rouge sont souvent comparées à celles qu’auraient pu faire plusieurs bombes atomiques. Et de fait, dans les secteurs les plus touchés, il ne subsiste plus, au lendemain de la guerre, que des sols lunaires parsemés de milliers de trous d’obus et dépourvus de toute végétation. 9 villages de la région de Verdun ont eu la malchance de se trouver au cœur de cette apocalypse. Tous ont été détruits par un déluge de fer et de feu. Ces villages martyrs se nommaient BEAUMONT-EN-VERDUNOIS, BEZONVAUX, CUMIÈRES-LE-MORT-HOMME, DOUAUMONT, FLEURY-DEVANT-DOUAUMONT, HAUMONT-PRÈS-SAMOGNEUX, LOUVEMONT-CÔTE-DU-POIVRE, ORNES et VAUX-DEVANT-DAMLOUP. 9 villages « Morts pour la France » et titulaires de la Croix de Guerre 14-18 avec palme (citation à l’Ordre de l’Armée).

26 millions d’obus !

Aucune de ces communes rurales n’atteignait le millier d’habitants à l’aube de la guerre. ORNES, la plus peuplée, en comptait 718, et HAUMONT, la moins peuplée, 131, FLEURY se situant dans la moyenne avec 422 habitants. La population de ces communes était principalement composée d’agriculteurs, de bûcherons et d’artisans. Personne, parmi ces gens paisibles, ne pouvait imaginer, en fanant son pré, en débitant un frêne ou en ferrant un cheval, que le tocsin dont le chant lugubre se répandit de clocher en clocher le samedi 1er août 1914 dans la campagne lorraine allait plonger, quelques mois plus tard, ces villages dans le plus effroyable enfer qu’une guerre ait jamais engendré : la bataille de Verdun.

Lundi 21 février 1916. À 7 heures du matin, l’artillerie allemande entreprend un hallucinant pilonnage des positions françaises. En deux jours, 2 millions d’obus s’abattent sur ce qui va devenir un champ de bataille universellement connu, symbole de la folie des hommes. Lorsque la bataille de Verdun s’achève, le 19 décembre, 26 millions d’obus – 6 par m² ! – ont détruit, brûlé, ravagé un terroir naguère verdoyant et désormais réduit sur des milliers d’hectares à un bourbier apocalyptique nourri du sang de 306 000 morts ou disparus français et allemands, sans compter les centaines de milliers de blessés et de mutilés évacués vers l’arrière. Les villages situés au cœur de la zone des combats sont réduits à des amas de gravats, les bois ont disparu, le sol n’est plus qu’une épouvantable étendue de terre retournée, parsemée de milliers de trous d’obus où toute trace de vie semble s’être évanouie.

Interdit d’accès en raison des risques liés aux munitions non explosées et à la pollution des sols, le territoire des 9 communes est intégralement classé en Zone rouge. À l’exception de VAUX, rebâti ultérieurement à quelques centaines de mètres du village détruit, aucun des autres villages ne sera reconstruit. Seuls seront réhabilités ou érigés quelques rares bâtiments à ORNES et DOUAUMONT, le principal étant constitué sur cette commune par l’Ossuaire abritant les restes de 130 000 soldats inconnus français et allemands. Durant l’entre-deux guerres, une chapelle-abri et un monument aux morts seront construits dans chacun des 9 villages martyrs.

En novembre 1919 sont organisées les premières élections municipales de l’après-guerre. En hommage aux villages détruits, l’État français décide de leur maintenir un statut de commune au lieu de rattacher leur territoire, transformé en sanctuaire, à des communes environnantes moins touchées comme cela s’est fait en d’autres lieux. Faute d’habitants, les communes martyres seront désormais administrées chacune par une Commission municipale de trois membres désignée par le préfet de la Meuse.

Monsieur le Président

90 ans plus tard, ces dispositions sont toujours en vigueur dans sept des neuf communes. Seuls VAUX (67 habitants lors du dernier recensement) et DOUAUMONT (7 habitants !) échappent à cette règle administrative. Compte tenu de l’érosion de la population de cette dernière commune (évoquée en juillet dernier au Sénat), son statut pourrait toutefois être aligné sur le statut particulier des sept autres communes mortes pour la France et dépourvues de tout habitant, à l’exception d’ORNES (8 habitants).

Bien qu’ayant gardé leur statut de commune, il n’y a pas de maire à la tête de ces entités administratives, mais un président de Commission municipale dont la désignation, actée par le préfet lors de chaque élection municipale, repose sur un fort lien avec les villages martyrs et une grande motivation dans la préservation des sites. Chacun des présidents* reçoit, lors de sa nomination, une écharpe tricolore comme tous les maires de France et l’obligation de tenir à jour, année après année, des registres d’état-civil bloqués à… zéro dans 6 des 9 communes.

L’essentiel de l’activité des présidents n’est évidemment pas là, mais réside dans l’obligation qui leur est faite d’entretenir, avec l’aide des associations, les chapelles-abri, les sanctuaires, les monuments aux morts, les cimetières, les plaques commémoratives et les allées desservant ces lieux de mémoire. Ils disposent pour cela d’un budget alloué par la préfecture. Pour optimiser leur action, les communes qu’ils administrent se sont constituées en SIVOM en 1988. Les 9 communes appartiennent toutes à la communauté de communes de Charny-sur-Meuse.

D’autres villages ont été anéantis durant la Grande Guerre, mais contrairement à leurs homologues du champ de bataille de Verdun, leurs territoires ont été rattachés à des communes environnantes**. C’est notamment le cas de HURLUS, LE MESNIL-LÈS-HURLUS, PERTHES-LÈS-HURLUS, RIPONT et TAHURE, ces cinq ex-communes ayant définitivement perdu leur statut en 1950 lors de la création du camp militaire de Suippes sur les terres ravagées du département de la Marne. MORONVILLIERS et NAUROY ont subi le même sort dans la région rémoise, de même que REMENAUVILLE et REGNIÉVILLE en Meurthe-et-Moselle, FEY-EN-HAYE, reconstruite, ayant échappé à la fusion.

Le mot de la fin reviendra à Louis Lavigne, ancien instituteur meusien. Tiré de son Histoire de Cumières, il tient dans ces trois phrases, qui résument si bien l’état d’esprit des survivants de cette effroyable parenthèse dans l’histoire de la Lorraine : « Notre village a perdu son corps, mais sa mort ne peut être définitive. Son âme, comme la nôtre, est immortelle. Cette âme, c’est l’histoire du village, et ce sont tous nos souvenirs… » 

* L’aîné de ces présidents est M. Jean Laparra (87 ans), en charge de la commune de Bezonvaux. Bien qu’exerçant de facto une fonction de maire et portant l’écharpe, les présidents n’ont pas le statut de grands électeurs et ne sont par conséquent pas admis à voter lors des élections sénatoriales.

** Le nom de chaque commune dissoute a été accolé à celui de la commune de rattachement (ex : WARGEMOULIN-HURLUS ou ROUVROY-RIPONT).


52 réactions


  • jako 10 novembre 2009 19:32

    Merci à votre article Fergus, je suis de ces régions mais n’ai pas vécu ces guerres bien heureusement, par contre mes parents et grands parents oui et je me rends souvent sur ces endroits et plus particuliérement la foret d’Argonne ou je bivouaque parfois.
    Honte à ces guerres fraticides ou des gamins se sont « joyeusement » éventrés sur ordre
    de royla nantis, voir le bunker du kronprintz dans la foret....


    • Fergus Fergus 10 novembre 2009 19:58

      Bonjour, Jako, et merci pour votre commentaire.

      Contrairement à vous, je connais peu ces régions. Je m’y suis toutefois rendu avec beaucoup d’émotion et de respect pour tous ces pauvres gars tombés là ou devenus des « gueules cassées ».

      Mon grand-père a lui aussi combattu à Verdun, dans ce qui est devenu la Zone rouge, et plus précisément dans l’enfer du fort de Vaux sous les ordres du Cdt Raynal. Lui a eu la chance de revoir son Auvergne natale, contrairement aux 700 000 autres des deux bords qui ont été mis hors de combat.

      Ma propre existence a tenu à peu de choses, et ça donne sacrément à réfléchir ! 


  • Mania35 Mania35 10 novembre 2009 19:37

    Merci pour cette page d’histoire. J’ignorais l’existence de ces communes « fantômes ».
    Bonne soirée.


    • Fergus Fergus 10 novembre 2009 20:00

      Salut, Mania.

      J’ai pensé qu’effectivement peu de monde connaissait leur existence. D’où l’intérêt d’en parler et de leur rendre un hommage mérité, aussi modeste soit-il.

      Bonne soirée à toi.


  • LeGus LeGus 10 novembre 2009 20:28

    Merci pour cet article.

    Il existe un documentaire sur le sujet :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_Rouge_(film_documentaire_sur_la_1%C3%A8re_guerre_mondiale)
    Une photo qui montre la folie absolue de cet guerre
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Bundesarchiv_Bild_102-03373A,_Nordfrankreich,_Angriff_auf_Grabenstellung.jpg

    N’oublions pas.


    • Fergus Fergus 10 novembre 2009 20:35

      Bonsoir et merci à vous, LeGus, pour ces liens.

      La photo est en effet parlante et malheureusement représentative de l’état des sols à l’issue de la Bataille de Verdun.

      Et encore n’a-t-on pas conscience du fait que sous les terres ravagées, des milliers d’hommes resteront disparus à jamais.

      Quant aux obus non éclatés, il en existe aujourd’hui encore des milliers qui, à eux seuls, expliquent pourquoi, au delà de la volonté de sanctuarisation, certains villages n’ont jamais été reconstruits.


  • morice morice 10 novembre 2009 20:39

    excellent boulot de mémoire, Fergus, on le salue !


  • ZEN ZEN 10 novembre 2009 20:49

    Intéressant, Fergus
    Il y eut d’autres disparitions : en Champagne et la célèbre Craonne, près de Laon


  • ZEN ZEN 10 novembre 2009 20:51

    Craonne et son célèbre chant des mutins...


    • Gasty Gasty 11 novembre 2009 10:27

      Une petite contribution en images sur ces lieux. La végétation a repoussé depuis, ce qui permet de se rendre mieux compte avec les images de l’époque de la destruction totale du terrain pendant ce conflit. Les sous bois sont complètement labouré de trous d’obus, inutile de s’y engager autrement qu’en suivant les chemins tracés.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 12:44

      Bonjour, Gasty.

      Merci pour ces photos. La végétation a heureusement repris ses droits dans la plupart des secteurs consacrés au souvenir sur le territoire des communes détruites. Quelques parcelles ont néanmoins été conservées en l’état, seulement engazonnées comme à la Pointe du Hoc pour le débarquement de 1944.


  • Fergus Fergus 10 novembre 2009 22:57

    Bonsoir, Zen, et merci pour ces liens.

    Vous avez raison, j’aurais dû évoquer Craonne, détruite et reconstruite à quelque distance du village d’origine, comme Vaux. Et cela d’autant plus que je connaissais la fameuse et très émouvante « Chanson de Craonne ».

    De même que sa variante de Verdun, en rapport direct avec mon grand-père évoqué plus haut : « C’est à Verdun, au fort de Vaux / Qu’on a risqué sa peau… » en lieu et place de « C’est à Craonne, sur le plateau / Qu’on doit laisser sa peau… »

    A toutes fins utiles, pour faire un lien avec votre allusion aux Dardanelles, je vous renvoie à mon précédent article, écrit il y a une semaine : « Waltzing Matilda » ou l’enfer des Dardanelles.


  • Yohan Yohan 10 novembre 2009 23:20

    Salut Fergus.
    Plus que la guerre de 39-45, celle de 14-18 me touche beaucoup. Elle m’est évocatrice des objets que j’ai retrouvé tout au fond du grenier de mon grand père qui les avait rangé hors de sa vue, probablement pour ne plus jamais les voir, mais en pensant que ses petits enfants finiraient par les excaver un jour.
    Il y avait aussi ces cartes postales que ma grand mère avait récupéré de sa soeur, des cartes postales que des jeunes gens (morts pour la plupart) envoyaient du front à ma grand tante, très jolie postière (parait-il) et disparue plus tard de la grippe espagnole. 
    Du genre de celle-ci . Ce qui est étonnant, c’est que ces gars écrivaient des choses légères, alors qu’ils vivaient des combats déments. L’insouciance de la jeunesse qu’ils avaient encore avant de la perdre, puis de mourir sans avoir vécu...


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 09:01

      Salut, Yohan, et merci pour ton commentaire.

      Comme toi, la Grande Guerre me touche énormément. Peut-être à cause de mon grand-père « poilu » de Verdun et rescapé d’une boucherie aggravée par l’égarement de Nivelle et Mangin.

      La carte postale que tu as mise en lien est effectivement de celles qui étaient envoyées par les poilus, accompagnées de propos plutôt légers et, pour les paysans, de conseils de culture.

      A priori étonnante, cette « légèreté » s’explique, selon moi, d’une part par le souci qu’avaient ces combattants de rassurer leur famille, d’autre part par la censure qui s’est exercée ici et là et aurait condamné à la destruction les cartes porteuses de propos « démoralisants ».

      Bonne journée.


    • achab 15 novembre 2009 23:12

      Ces gars n’ écrivaient pas que des choses légères !
      En témoigne entre autre le receuil « Lettres et carnets du front 1914 1948 » intitulé « Paroles de poilus » publié aux éditions Librio . Ce sont pour la plupart des lettres de tristesse et de souffrance écrites à leurs familles ou proches par les combattants des deux bords. J’en conseille la lecture à tous ceux qui s’interessent à la « Grande Guerre ».


    • Fergus Fergus 16 novembre 2009 09:17

      Vous avez raison, Achab, beaucoup de poilus ont envoyé des courriers poignants imprégnés de leurs souffrances.

      Mais il est vrai que dans certaines unités, une certaine forme de censure existait et s’ajoutait à la volonté de certains soldats de ne pas alarmer leur famille. Cela a été le cas de mon grand-père, parmi bien d’autres combattants de Verdun.

      Quant aux cartes postales « légères », il est indiscutable qu’elles ont eu un franc succès à cette époque, sans doute comme un moyen d’évacuer le stress et la peur des combats.


  • intactsaphir 10 novembre 2009 23:54

    Merci Fergus pour cet article.

    Pendant toute sa vie mon grand-père paternel a souffert d’une plaie à l’épaule provoquée par un éclat d’obus. Il fut touché à l’age de dix huit ans.
    Plus je vieillis plus je pense à lui ... tous les jours...

    Encore merci pour la mémoire de nos aïeuls.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 09:09

      Bonjour et merci à vous, Intactsaphir, pour ce témoignage personnel.

      Je crois effectivement que la mémoire des combattants de cette guerre atroce ne doit pas disparaître.

      Bien au contraire, le sacrifice de centaines de milliers d’hommes issus, pour l’écrasante majorité, des classes populaires (et quel que soit le camp auquel ils ont appartenu) doit être enseigné aux enfants, documents d’archives à l’appui, pour montrer l’absurdité de la guerre. Une absurdité qui a atteint des sommets à Verdun au point de laisser une terre morte.


  • gruni gruni 11 novembre 2009 08:40

    Bonjour Fergus.

    Je suis Lorrain et bien sûr je connaîs l’existence de la zone rouge encore fouillée aujourd’hui par des collectionneurs.
    J’ai visité l’ossuaire quand j’étais adolescent et bien sûr j’ai été très impressionné.
    Je vous remercie pour cet article et une pensée pour les poilus .


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 09:15

      Salut, Gruni.

      Très impressionnant en effet, et sans doute encore plus parlant pour un Lorrain.

      Mais plus encore que l’Ossuaire, ce qui me frappe à Douaumont, c’est le très émouvant mausolée musulman et le carré de tombes réservé aux combattants d’Afrique du Nord tombés là pour défendre un sol qui n’était pas le leur, le sol d’une nation encore enfermée dans ses certitudes colonisatrices. Cela donne à réfléchir...

      Bonne journée.


    • brieli67 11 novembre 2009 14:16

      @ Fergus


      Lorrain plus trop , dans le département de la Meuse , géologiquement, historiquement c’est la Champagne. Tant que celà rapportait touristiquement.... c’était Reims... 
      Evoquons l’exploitation politique des gaullistes de tous poils : Il était d’une règle d’une coutume, que chaque français pouvait bénificier chaque année d’un AR sur Paris en train. Ces officines à autobus empochaient ces bons, faisaient payer leurs prestationsn nourrissaient le matin halte des madeleines, midi plutôt dans l’après_midi la choucroute royale.... la Jeanne avec Gaulombey ... où le personnel politique de leur canton, arrondissement ... voir ministre attendaient l’electeur potentiel. Nos foires brocantes vide_greniersdébordent de ces gadgets...
      Entre 3o_39, c’était du tourisme industriel, en préparation de la suivante, le train déversait jour après jour ses pélerins ... 3 messes étaient dites par un êvêque attitré, l’allocution du ministre du jour, une grande fête du Trône avec exhibition des Gueules cassées ? Sollicité pour dons et achats toute la journée... 
      Vin rouge et cigarettes à gogo, dès le départ de sa gare ... Les fanfares, harmonies et chorales assurant l’ambiance. Reste une expression pour le passablement éméché mais tenant encore sur pied ; oh de retour de Verdun. Quand il tangue, la question : la poignée d’osselets a droite ou à gauche ou dans les deux poches du pantalon. 
      Après « Verdun » c’est être saoul comme un Pollack ou comme un cochon... 

      Dans ce « pays pauvre » de la Champagne pouilleuse et de Bar mouvant, l’aubaine. 
      Plein de boulot en ces années de crise, tourisme, gastronomie, .... et la « récupération » du matériel, des métaux de la guerre, des villages dévastés, des villages démolies à reconstruire avec subsides de l’Etat et la ligne Maginot aussi... 
      Les petits de la brocante, les ferrailleurs, les démineurs.... et des gros, qui avaient rangé ou rangeaient encore la « Prussienne » de 1870 ( des deux côtés de la frontière) ont eu des concessions de l’Etat, collecter, trier revendre....

      Parmi ces« gros » de 7o, 14/18, 4o/45,ne travaillant pas pour le Roi de la Prusse( pour rien) une famille des « Marches de l’Est » de Sarrebourg, le fief de Messmer : 
      Loeb/Loew//Lion..... Fabius. Tiens donc, connu comme descendant de diamantaires( les Strassburger) du côté de la mère et du côté du père ’d’antiquaires, pardon ferailleur brocanteur de la République... 
      Non pas que des juifs, les Messmer se sont convertis en pionnier de la station à essence /atelier de réparation de véhicules motorisés avant 1914 ..... au Boul’ Mich’

       !!! ASSEZ DE NOUS TONDRE LA LAINE SUR LE DOS !!!



    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 15:51

      Salut, Brieli.

      Aussi douloureuses soient les épreuves, aussi meurtries soient les familles, aussi dévastés soient les terres, il y aura toujours, hélas ! des gens âpres au gain, des profiteurs, des opportunistes, prêts à faire leur pelote, aussi dérisoire puisse-t-elle être pour les moins habiles d’entre eux, sur le malheur des peuples et la désolation des pays.
       
      Cela fait partie de l’humanité, et ce n’est pas son côté le plus reluisant. Par chance, il y a également des gens biens, et c’est pour ceux-là qu’il faut se battre lorsque les circonstances ou les charognards s’abattent sur eux et sur leurs biens.


  • Le péripate Le péripate 11 novembre 2009 09:26

    Très intéressant.

    Et c’est aussi l’occasion de rappeler comment l’armée française a été désorganisé lors de l’affaire dite des fiches.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 09:54

      Bonjour, Le Péripate.

      Merci pour ce lien très intéressant sur l’« Affaire des fiches » dont j’avoue qu’elle m’était sortie de l’esprit.
      Il est sûr que le fanatisme de Combes a joué un rôle néfaste dans la structuration de l’armée. Le plus étonnant est qu’Emile Combes avait failli devenir prêtre ! 


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 10:12

      Salut, Chatecler, et merci pour ce commentaire.

      La Lorraine et la Champagne n’ont bien évidemment pas été les seules touchées durant la guerre de 14-18. De nombreux villages du Nord et du Pas de Calais ont également subi de terribles dommages, notamment autour de Bailleul et La Bassée, ces deux villes ayant été pratiquement rasées avant d’être reconstruites ultérieurement.

      Pour ce qui est du « Traité de Versailles », la République de Weimar a très largement tiré profit du mythe qui s’est bâti outre-Rhin sur la supposée « injustice » de ses dispositions. Un mythe qui, malheureusement, a largement alimenté le désir de revanche et permis l’arrivée au pouvoir du NSDAP et de son leader Hitler.

      Bonne journée.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 12:59

      Je pense effectivement que c’est plutôt comme cela qu’il faut lire les évènements. Sans doute cette évolution a-t-elle été facilitée par le renoncement des communistes à participer aux élections de 1919. Il est vrai qu’ils projetzaient encore d’établir une république soviétique sur le modèle de celle de Munich, éphémère et rapidement réprimée.


    • brieli67 11 novembre 2009 18:42

      @ Chantecler 

      Pour la responsabilité ! 
      Une ces « méchantes discussions

      A la sortie de l’hiver 1916, les allemands sortent vainqueurs des tranchées. Paris à fleur de fusil..... le Chancelier
      en version allemande plus complète

      entre en négociation pour un traité de Paix sous la poussée de ses soutiens »socialistes« au Reichstag. ( le courant libéral.... »rocardien« ... Jaurès en france à l’Huma des pacifistes)

      Un an de crises _BH, homosexuel notoire de la Garde rapprochée du Kaiser n’arrangeait pas la situation avant sa destitution, un coup d’Etat de militaires facilité par les évènements intérieurs de la Russie des Tsars.

      En fait, les marchands de canons de toutes nations et de tous poils se sont entendus par dessus les frontières pour »prolonger le débat" ..... 
      L’ Angleterre s’est attribuée le MO en douce, en perfidie. Les maux du MO de nos jours datent de ces mois_là

      Longtemps dans ces négociations de Paix anticipée, on parlait de la Maison d’Autriche qui voulait ainsi sauver sa couronne. Les Habsbourg depuis qqs siècles complètement dégénérés par la consanguinité, que du blabla des nobles, royalistes. 

      „Immer neue Völker stürzen sich in das Blutbad. Zu welchem Ende ?
      A quoi bon ce carnage ? printemps 1916 TBH devant le Reichstag

      15o ans d’histoire allemande
      somme de documents de l’histoire officielle non contestée. 



       

  • kitamissa kitamissa 11 novembre 2009 12:16

    cet article m’émeut d’autant plus que mon Grand’Père était un soldat Allemand de la Grande Guerre prisonnier et blessé ,soigné dans un hôpital militaire Français ,et ayant rencontré une infirmière Lorraine,celle qui allait devenir ma Grand’Mère par cette union !


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 13:09

      Bonjour, Kitamissa, et merci pour cette anecdote (si importante pour vous) qui apporte un éclairage sur les rapports qui ont pu s’établir entre Allemands et Français lors de cette guerre. Des rapports pas forcément synonymes de haine.

      Revenu en Auvergne avec ses compagnons rescapés du conflit, mon propre grand-père n’a, malgré l’atrocité du conflit dans le bourbier de Verdun, jamais tenu le moindre propos haineux sur les « Boches ». Et pour cause : de part et d’autre du no man’s land qui séparait les tranchées, c’était des gars de même origine ouvrière ou paysanne qui s’affrontaient et qui, lors de quelques accalmies, ont même pu communiquer entre eux.


  • Cosmic Dancer Cosmic Dancer 11 novembre 2009 12:44

    Très bel article, Fergus, qui m’a appris l’histoire de ces villages et rappelé mon arrière-grand-père, qui a survécu à Verdun malgré de grandes blessures avec cinq de ses camarades tandis que près de deux cents autres y perdaient la vie.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 13:14

      Un grand merci à vous, Cosmic Dancer.

      Peut-être nos aïeux se sont-ils connus dans l’enfer de Verdun. Le mien défendait le fort de Vaux et la plupart de ses compagnons ont disparu ou sont devenus des « gueules cassées ».

      Bonne journée.


  • finael finael 11 novembre 2009 14:16

    Excellent et très bien écrit.

    J’avais entendu parler de ces villages, avais vu un documentaire sur eux, mais cette évocation sait à la fois être très instructive et très émouvante.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 15:43

      Bonjour, Finael, et merci pour ce commentaire élogieux.

      Pour ce qui est de la rédaction de l’article, je vous laisse juge. Cela dit, et de manière générale, je dirais qu’on écrit bien que ce que l’on ressent profondément.


  • brieli67 11 novembre 2009 14:46

    ENFIN les bouches se délient et on cause vrai dans nos Dernières Nouvelles d’Alsace du jour !


    Vous n’avez accès que temporairelment deux jours à ces textes .... FAITES EN UNE COPIE PDF

    expulsion des indésirables

    des soldats sous uniforme allemand


    Si vous suivez les suites « lorraines » de BLE ? 
    Cette région défigurée, spoliée, fracassée, cassée.... plus que des cendres.... avec des politicards qui se réchauffent à la fumée.
    La fracture « boche » de Metz versus « Polonais » toujours d’actualités, à comparer avec le drame wallon/flamand de la Belgique ;

    « Polonais » francophones en référence au Baba au Rhum : Beau Papa Stan l’édenté faisait mouillette, trempait sa tranche de Kouglof dans du vin liquoreux...



    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 16:13

      Merci pour ces liens, Brieli.

      Les deux articles des DNA sont particulièrement intéressants et gagneraient à être lus du plus grand nombre.

      Notamment le premier qui relate un fait peu connu des Français : l’expulsion, dégradante pour ceux qui en ont ordonné les conditions, des 130 000 Allemands venus s’installer en Elsass-Lothringen après la guerre de 1870-71.


  • Georges Yang 11 novembre 2009 14:47

    Merci, Fergus, votre prose me repose de la mediocrite d’Allain Julles
    Lorrain, je sais ce que cette region a subi lors du premier conflit mondial, heureusement originaire plus a l’est, les villages que je connais ont moins souffert>

    En parrallele, il faut ausi lire l’article de Henxi sur les Chinois qui creuserent les tranchees dans le meme coin>


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 16:01

      Bonjour, Georges.

      Je présume qu’en effet, en tant que Lorrain, vous êtes particulièrement sensibilisé aux épreuves qu’a subies cette région martyre.

      J’ai lu l’article de Hengxi et j’en recommande moi aussi la lecture car il répare une injustice en mettant en lumière ces Chinois employés, dans des conditions très dures et souvent au péril de leur vie, au déminage et au nettoyage des champs de bataille.


  • casp casp 11 novembre 2009 15:22

    n’oublions jamais...
    Et ne laissons plus jamais nos élites nous entrainer dans de tel folie.

    Seulement pour combattre un fou il faut parfois oser prendre des risques.
    Soyons vigilant et prêt au sacrifice de notre petit vie tranquil ; pour eviter de sacrifier plus grand.

    Nous sommes déjà en afghanistan, j’éspère que la prochiane fois qu’il s’agira de se mobiliser contre la guerre cela sera plus serieux que quelques manifestations vite oublié.

    Une marche mondiale pour la paix à lieue en ce moment.. hélas bien peu demonde y a participer. Il est triste de voir combien l’europe se désintérèsse de l’engagement politique, de l’activisme... Esperosn que après la phase d’information qu’a crée internet, internet engendre une deuxième pahse d’action loin de son ordinateur.


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 16:20

      Bonjour, Casp.

      La lutte contre l’oubli est en effet la condition première d’une mobilisation contre d’éventuelles dérives bellicistes, car cette mobilisation ne peut reposer que sur l’engagement de citoyens ayant pris profondément conscience de l’inutilité et de l’horreur des guerres.

      Peut-être Internet sera-t-il, dans l’avenir, le vecteur d’une plus grande mobilisation des consciences. Souhaitons-le...


  • brieli67 11 novembre 2009 15:35

    en colmplément bonne base de docs et de liens

    Au lieu d’un référendum d’autodétermination « nationale »
    la France impose les Commissions de Triage au sortir de 1918

    Une des premières mesures fut de diviser la population en quatre selon son origine : ceux qui sans l’annexion de 1871 auraient été français reçurent une carte A marquée de tricolore, ceux dont un parent était allemand, ou encore les Allemands conjoints d’Alsaciens-Lorrains, furent munis d’une carte B, les étrangers eurent droit à une carte C et les Allemands enfin reçurent la carte D. Ce tri, uniquement fondé sur les origines, ne tenait ainsi aucun compte du sentiment de l’individu, son patriotisme pouvant être totalement indépendant de ses origines. Quelqu’un eut l’idée de placer une carte B dans la main de la statue de Jean Baptiste Kléber, le grand héros alsacien : il n’aurait pas en effet mérité plus.

    Il y a un nom pour cette attitude d’un Etat ? 


    • Fergus Fergus 11 novembre 2009 16:27

      C’est effectivement indigne, Brieli.
      Et qui plus est, imbécile. La carte B dans la main de Kléber le démontre parfaitement.


  • brieli67 11 novembre 2009 17:15

    Woerth..... un nom qui vous dit quelque chose, un maroquin d’chez Sarko 


    alors fais quelque chose !! 


    dans un de ces états de délabrement incroyable ! 
    La France pour son manquement a préféré se faire trainer devant les tribunaux et payer ’partiellement« des condamnations pendant 80 ans. 

    DANS LA MEME LIGNEE

    La loi Besson sur les emplacements réservés et aménagés aux » gens du voyage" ? Non ?
    Les logements sociaux à Neuilly et 92, 94, etc Oui ?

    Le tir aux palombes, aux canards de la Somme, les gallodromes, la corrida ..... Oui ? non ?
    De Fion aux Verts et inversement....

    eXCEPTION franchese ou French -attitude ?
    De quels français au juste ?????????

  • WILLY WONKA 15 novembre 2009 13:58

    Du coté Alsacien, il y a le site du Viel Armand et dans les Vosges on peut encore visiter la première ligne des troupes allemande et française au site du Linge. Au Nord de Verdun, la butte de Vauquois est impressionnante. Dans la forêt près de Verdun, il y a le monument mortuaire de Fournier à Saint Remy de la Calonne, très émouvant.


    • Fergus Fergus 15 novembre 2009 14:18

      Bonjour et merci à vous, Willy, pour ces indications.
      Il est important que la mémoire des soldats ayant combattu sur ces sites soit entretenue.


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 15 novembre 2009 15:44

    c ’est y donc quoi , ce besoin forcené de se mettre sur la gueule tout le temps ?


    • Fergus Fergus 15 novembre 2009 17:09

      Excellente question, Capitaine, que l’on aimerait bien voir définitivement disparaitre de nos conversations, faute de conflits. On peut toujours rêver...

      Bonne soirée.


  • koko 16 novembre 2009 08:43

    Très très bel article.

    J’ai eu l’occasion de faire un voyage scolaire il y a une dizaine d’années en faisant le tour des lieux de la bataille de Verdun.

    Je pense me souvenir longtemps des paysages où malgré la végétation, on distinguait parfaitement les trous d’obus. Mais ce qui m’a vraiment marqué, c’est l’ossuaire de Douaumont.
    A l’intérieur vous voyez toutes ces plaques représentant des personnes mortes pour rien et que l’on ne pourra jamais identifier. Quand vous ressortez ces tombes quasiment à perte de vue rendent encore plus inimaginable ce qu’a put être l’enfer de Verdun.
    Je pense que tout le monde devrait faire une visite sur place, mesurer ce que peut être la folie humaine.


    • Fergus Fergus 16 novembre 2009 09:10

      Bonjour, Koko, et merci pour ce commentaire.

      Comme vous le soulignez, la visite des sites de la bataille de Verdun, et notamment celle de l’Ossuaire de Douaumont et des immenses cimetières alentour, est particulièrement impressionnante, y compris pour les plus désinvoltes.

      A cet égard, je crois qu’il faudrait multiplier les déplacements scolaires à Verdun pour faire prendre conscience aux jeunes de ce qu’a été l’horreur de ce conflit, et par extension de l’absurdité des guerres.


  • alain_àààé 10 novembre 2013 15:39

    je suis heurue tu as fait cet article moi qui suis lorrain et été muilitaire a verdun il y a 44 ans j y revens de temps en temps et j espere quand mes petits enfants seront grand les emmené la bas. j ai eu l honneur avec mon régiment de présenter les armes au general DE GAULLE lors d une commemoration avec un autre chef d etat


    • Fergus Fergus 10 novembre 2013 16:48

      Bonjour, Alain.

      Merci pour ce commentaire. Ces lieux sont très émouvants, et même les personnes qui ne sont pas très au courant des détails de cette guerre sont saisis par l’émotion lorsqu’elles sont sur le terrain et prennent conscience des conditions atroces dans lesquelles ont vécu les poilus de la Grande guerre. J’imagine qu’une prise d’armes officielle donne encore plus de relief à cette émotion.


Réagir