lundi 19 janvier 2009 - par Theothea.com

« Gertrude » de Howard Barker avec Anne Alvaro au Théâtre de l’Odéon

A l’origine, le syndrome d’un Hamlet désemparé par la supputation du crime familial trouvait son écho Sheakspearien en un pathétique « être ou ne pas être ».

C’est le cri tellurique de la Gertrude de Barker qui va faire imploser le doute métaphysique, en affirmant la genèse du fratricide en pleine jubilation orgasmique.

Ainsi posée l’équation exemplaire du « Théâtre de la catastrophe » revendiqué par Barker, précisons qu’à la clef de cette transgression du tabou, aucun jugement moral ne saurait régenter ce jeu de miroir, fût-il déformant.

Que Claudius (Luc-Antoine Diquéro), l’amant, soit le bras armé de Gertrude, enivrée de jouissance sexuelle au sein du pouvoir de donner vie et mort au souverain de son choix, peut aisément laisser Hamlet (Christophe Maltot) au rang de dommage collatéral et élever la Reine à celui du principe absolu de l’extase.

C’est en effet le cri animal initial de Gertrude (la mythique Anne Alvaro) aux confins de tous les paroxysmes que Claudius voudrait réentendre et revivre sans cesse en tentant de réunir les voluptés nécessaires à son accomplissement.

Ainsi l’escalade progressive dans le dérèglement des sens exacerbés obligera peu à peu les protagonistes aux contorsions les plus extrêmes de l’émotion jusqu’à dénier tout principe de réalité.

C’est pourquoi, prenant Howard Barker au mot, la mise en scène de Girgio Barberio Corsetti organise en premier lieu un ballet obsessionnel, à travers un circuit en forme de huit, dont elle met sur rails des wagons de garde-robes et d’armoires à linge qui vont cloisonner l’espace en le modulant dans une réitération sans fin.

Viendra ensuite le temps des acrobates et des funambules qui, jetant un défi aux lois gravitationnelles de l’équilibre, provoquent l’amalgame des références verticales et horizontales sous un effet de réflexion totalement renversant.

Du jamais vu sur les planches au jamais conçu dans la langue se tient donc ce no man’s land secret où Howard Barker et Giorgio Barberio Corsetti, réunis pour le meilleur et pour le pire, nous proposent de rejoindre les vertiges du désir en assumant son effroi. 
 
Photo © Alain Fonteray

GERTRUDE - *** Theothea.com - de Howard Barker - mise en scène : Giorgio Barberio Corsetti - avec Anne Alvaro, John Arnold, Francine Bergé, Cécile Bournay, Jean-Charles Clichet, Luc-Antoine Diquéro, Christophe Maltot, Julien Lambert & Baptiste Vay - Théâtre de l’Odéon -




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