mardi 30 juillet 2019 - par Theothea.com

« Homme encadré sur fond blanc » Pierric prodigieux au Tristan Bernard

A l’instar du mythe de Sisyphe, Pierric remonte son rocher inlassablement vers le sommet de la montagne, se retrouvant, néanmoins, inexorablement, de nouveau au point de départ à fréquence régulière sans qu’il puisse se départir de sa quête obsessionnelle : Sortir d'un endroit fermé et maculé d’une blancheur infinie apparemment sans échappatoire patente.

 

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PIERRIC
© Fabienne Rappeneau

  

En cet été 2019, l’artiste franco-suisse se produit au sein de son installation sise sur la scène du Tristan Bernard face à un public dûment armé d’éventails distribués gracieusement à la billetterie.

Son couvre-chef atterrissant d’emblée depuis les cintres en signal de départ, l’homme se retrouve, au propre comme au figuré, encadré sur fond blanc disposé en triptyque face au quatrième mur.

Son sang et surtout son esprit ne faisant qu’un tour de piste, le voilà immédiatement disposé à chercher la sortie de cet espace jugé hostile… à sa quiétude !

 

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PIERRIC
© Fabienne Rappeneau

  

Mais comment s’extraire d’un lieu clos où les deux portes latérales ont perdu leurs poignées respectives alors que les parois lisses ne renvoient leur otage qu’à sa réflexion en abîme ?

Sans doute les tours de passe-passe et autres pratiques de magie dont le personnage est coutumier pourraient-ils, en faisant diversion poétique, susciter le détraquement nécessaire dans ce dispositif d’où pourrait émerger une perspective d’ouverture virtuelle.

Cependant pour parvenir à cet objectif, Pierric Tenthorey doit sans relâche remettre sur le métier le fruit des expériences dont, par accumulation progressive à chaque cycle, il corrige le tir de façon à éviter l’impasse précédente.

 

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PIERRIC
© Fabienne Rappeneau

  

Ainsi muet mais expressif, vif mais doué pour l’esprit d’escalier, perspicace mais opportuniste faisant feu de tout bois, l’antihéros pris au piège s’ingénie à rebondir sur chaque nouveau concept surgissant de l’intelligence collective partagée avec l’assentiment de la salle indubitablement partie prenante.

Philosophe dialectique en diable, magicien en fantôme de Buster Keaton, véritable pourfendeur de la victimisation, tel un gentleman cambrioleur pris à rebours, le voici toujours classieux prêt à instrumentaliser les moindres accessoires que les sortilèges du manque vont mettre fort opportunément à sa disposition au prorata de sa jugeote et de sa capacité d’anticipation le plaçant si possible avec un ou plusieurs coups d’avance sur les forces antagonistes.

 

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PIERRIC
© Theothea.com

  

Sa souplesse, son élasticité, sa fluidité et même ses soubresauts surprennent, ravissent, captivent l’imaginaire des spectateurs pris à témoins face à tant d’ingénuité, de trouvailles et même de méthode Coué.

Du grand Art, de la subtilité, de la complicité sous un regard impénétrable et néanmoins amusé des bons tours qu’il joue à la destinée, Le « Pierric » subjugue son auditoire, plongé la plupart du temps au cœur d’un profond silence entrecoupé de quelques bruitages, sifflements ou de musique surlignant la cadence du processus chorégraphique en cours, au point que sa démonstration « sans voix » sur la méthode permettant de s’extraire à son avantage de l’adversité pourrait faire figure d’exhortation rhétorique emblématique, la plus pragmatique et la plus fascinante qu’il ait jamais été accordée à un mime.

  
photos 1 à 3 © Fabienne Rappeneau
photos 4 & 5 © Theothea.com
  
HOMME ENCADRE SUR FOND BLANC - **** Theothea.com - Conception artistique Pierric Tenthorey, Gaëtan Bloom, Jérôme Giller & Roelof Overmeer - avec PIERRIC - Théâtre Tristan Bernard

   

 

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PIERRIC
© Theothea.com

   




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