lundi 24 février 2014 - par Pelletier Jean

Intermittents : le combat Parisot/Filippetti

Le MEDEF vient de se signaler de manière particulièrement intempestive à l’égard des intermittents du spectacle, en proposant purement et simplement la suppression de leur régime spécial, comme prélude à l’ouverture des négociations entre partenaire sociaux sur le régime de l’UNEDIC (chômage). Laurence Parisot (ex Président du MEDEF) est sortie de sa réserve pour prendre la défense des intermittents.

La sortie est inhabituelle, de la part de celle qui fut la dame de Fer du patronat français, et pourtant, c’est bien elle qui a titré dans une tribune publiée, ce jour, dans les Echos : « Pourquoi il faut cesser de tirer sur les intermittents

C’est au nom d’une prétendue équité que le MEDEF a souhaité la suppression du régime spécial des intermittents du spectacle. Laurence Parisot, actuelle Présidente de l’Institut Français d’Opinion Publique (IFOP) a donc décidé de s’opposer frontalement à son successeur Pierre Gattaz. Tout en reconnaissant les abus, dont il faudrait se débarrasser, elle plaide pour la spécificité du système en trouvant les mots justes  : « la question des intermittents du spectacle est loin d'être un simple problème comptable, elle renvoie au statut de la culture dans notre pays ».

Elle poursuit, en écrivant : « Parce qu'elle est mystérieuse, imprévisible, fragile et puissante à la fois, l'offre culturelle n'est pas une offre économique comme les autres. Elle a cela de spécifique qu'elle est notre bien commun. Elle parle de nous. Elle nous rend accessible aux étrangers. Dans bien des cas, elle est le premier ambassadeur de la France. ». La culture vient de se trouver une ambassadrice de choc et en chef !

Bref, il faut mettre un terme à cette stratégie du MEDEF qui consiste à chercher l’opposition systématique entre les artistes et les salariés et en affirmant, haut et fort, que la culture n’est pas un bien, ni un service comme un autre.

JPEGParisot/Filippetti le combat est le même. La ministre de la culture a déclaré de son côté que les intermittents, « contribuent à un secteur représentant 3,2 % du produit intérieur brut… Economiquement, on a besoin des intermittents. Quand vous investissez 1 euro dans un festival ou un établissement culturel, vous avez 4 à 10 euros de retombées économiques pour les territoires ».

La bataille sur la nécessité de défendre les spécificités du secteur culturel et l’affirmation de son importance économique sont plus que jamais d’actualité. D’abord parce que les collectivités locales, confrontées à la crise, commencent à le faire payer à la culture sur le thème : la culture cela coûte trop cher. Ensuite c’est la cour des comptes qui tire à boulets rouges sur le cinéma français, comme quoi il coûterait trop cher. Bref la vieille ritournelle « Trop cher… trop cher… la culture », refait surface.

Heureusement un rapport conjoint des inspections générales des finances et des affaires culturelles vient à point nommée. Si la culture coûte cher, elle rapporte aussi beaucoup.

Dans ce contexte, si particulier, où Aurèlie Filippetti a réussi tant bien que mal à faire passer deux budgets successifs de la culture en baisse, ce que la droite n’avait pas osé, deux administrations, celle des finances et celle de la culture établissent que les dépenses globales de l’Etat pour la culture sont de 13,9 milliards d’euros et celles des collectivités territoriales de 7, 6 milliards, mais surtout que le PIB culturel serait de 57,8 milliards d’euros..

Petit portrait économique du secteur culturel (spectacle vivant, patrimoine, arts visuels, presse, livre, audiovisuel, publicité, architecture, cinéma, industrie de l’image et du son, accès aux savoirs et à la culture (bibliothèque, archives…).

  • 670 000 personnes y travaillent (2,5% de l’emploi total en France),
  • PIB culturel de 57,8 milliards d’euros (3,2% de la richesse nationale),
  • soit l’équivalent de l’agriculture et des industries alimentaires (60,4 milliards), le double des télécommunications (25,5 milliards), sept fois celui de l’industrie automobile (8,6 milliards),
  • le spectacle vivant représente 8,8 milliards d’euros,
  • le patrimoine 8,1 milliards,
  • Les arts visuels et la presse génèrent chacun 5,7 milliards,
  • le livre 5,5 milliards,
  • l’audiovisuel et la publicité, 5,1 milliards chacun,
  • les industries de l’image et du son 3,4 milliards,
  • l’accès au savoir et à la culture 2,3 milliards,
  • l’architecture 4,4 milliards,
  • le cinéma (3,6 milliards.

Le cabinet privé Ernst Young (en novembre 2013), avait évalué, de son côté, le chiffre d’affaires direct des industries culturelles et créatives (ICC) à 61,4 milliards d’euros.

De quoi pouvoir négocier pied à pied avec tous ceux qui pensent pouvoir contingenter la culture, au titre qu’elle coûterait trop chère et rapporterait peu.

Toutefois si PIB culturel a augmenté entre 1995 et 2005, depuis, la part de la culture dans la valeur ajoutée a diminuée de 0.3%. Ce léger fléchissement correspond à la période où le numérique est venu perturber les réseaux économiques de la culture (effondrement du marché du disque, par exemple). Mais l’étude souligne à juste titre que la responsabilité en incombe aussi aux Google, Apple et Amazon… qui ont capté une part de la valeur ajoutée à leur profit.

Il y a donc urgence à ce que les pouvoirs publics agissent en tant que régulateur sur les outils de la politique culturelle. A quand l’An II de l’exception culturelle promis par le président Hollande ?

 



17 réactions


  • foufouille foufouille 24 février 2014 16:58

    vu le salaire des acreurs et le nombre de daube produites, ou de spectacles pour 10 bobos ..... y a de la marge


  • alinea Alinea 24 février 2014 20:09

    Ce qui est bien dans notre monde actuel, c’est que l’alibi pour que quelque chose subsiste, c’est le fric que cette chose génère ; pour qu’elle crève c’est ce que cette chose coûte !
    Société de merde où la gratuité, la création, le plaisir, le bonheur sont peanuts !
    Nous laisserons-nous ensevelir jusqu’au dessus de la tête par cette abjecte vision du monde ?


    • Shawford43 24 février 2014 20:12

      MDR, y’en a qu’ont vraiment besoin d’électriciens smiley Et ceux ci sont vraiment de sacrés empaffés smiley smiley 


  • eric 24 février 2014 20:19

    Une honte nationale. La culture appartient a tous. mais les intermittent sont finances par les seuls salaries du prive qui ne sont pas au chômage. Et encore, puisque au final, le financement est pompe sur le budget des chômeurs.
    Priver les agents publics, les retraites, de la possibilité de participer egalitairement au financement de la culture, n’est ce pas les traiter en citoyens de seconde zone ? Pourtant, compte tenu de leur temps libre, ils ne sont pas les derniers concernés.
    Payer l’impôt citoyen est un devoir, une grande politique culturelle aussi sans parler de la solidarité.
    Que ces catégories ne fassent preuve d’aucune solidarité avec les chômeurs peut encore se comprendre. Ils ne se sentent évidemment pas concernés et peu intéressés.
    Que le régime des intermittents soit une injure aux smicards qui touchent moins au chômage en ayant travaille plus et qu’on leur pique leurs cotisation pour financer la culture, prouve bien qu’on pas affaire a une politique sociale mais bien a une politique culturelle.
    Bon, il y a en plus les emploisnon salaries qui sont concerne par cette déresponsabilisation citoyenne, mais d’un autre cote, vu ce qu’ils bossent ( artisans, petits commerçant libéraux etc...) il n’est pas évident qu’ils constituent non plus les gros bataillons des consommateurs en termes relatif.

    Maintenir ou pas le régime ? A voir, que le parlement en décide. Changer son financement, c ;est une évidence. On ne peut pas continuer a restreindre aux seuls salaries du prive le privilège de financer notre politique culturelle.


    • alinea Alinea 24 février 2014 23:27

      Le pays est assez riche pour payer les intermittents ; si ce sont les pauvres qui les payent, il ne faut pas supprimer les intermittents, mais changer les politiques et faire cracher le capital !!


    • Salade75 25 février 2014 13:31

      Bonjour Musima,

      Votre post ou vous justifiez vos avantages réels ou supposés en les mettant en regard de ceux réels ou supposés des autres me convainc que l’injustice en France est vraiment une politique qui permet d’opposer en permanence des petits groupes pour que surtout rien ne change.
      Pas une profession, pas une corporation, pas une ville, ... ou les gens soient égaux.
      C’est ça la France.
      Omerta, inégalité et individualisme.
      Ca change de liberté, égalité, fraternité.


    • alinea Alinea 25 février 2014 13:56

      En tout cas il faut faire gaffe, parce que oui, bien sûr, le régime des intermittents est unique au monde, et oui, naturellement, l’exception culturelle gravée dans le marbre du GMTA ne concerne que l’audio visuel !
      Alors plutôt que jouer les tarés qui pleurent de jalousie devant ces artistes cossus et repus( !!), il serait plus malin de faire l’inventaire de ce que nous perdrions en perdant ce statut !
      ...j’ai écrit un articulet sur ce thème, ayant été moi-même pro de la musique de concert ( mais avant le statut !!!)


  • mario mario 24 février 2014 21:57

    les intermittents du spectacle ? ils y en a beaucoup trop....a l’assemblée nationale et au senat !


  • claude-michel claude-michel 25 février 2014 09:27

    bof...faut choisir dans la vie....Acteur ou Chômeur...mais les premiers veulent le beurre et l’argent du beurre...Zont K travailler en intérim quand ils ne tournent pas...Les caisses sont vides...et ils n’ont pas beaucoup d’honneur c’est le problème avec cette corporation.. !


  • spartacus spartacus 25 février 2014 12:33

    Le système des intermittents est abjecte !

    Les privilèges des uns se reportent sur les autres, dans un système ou les cotisations doivent être en balance avec les indemnisés

    Les plus faibles du système en font les frais au prix fort. 100% un système égalitariste socialiste.

    Dans un système ou les recettes doivent égaler les dépenses, les gens les plus fragiles, les jeunes, les plus de 50 ans, les précaires qui font le gros des bataillons des chômeurs indemnisés sont taxés d’une sorte de « taxe spectacle » chargée de donner plus à la corporation du spectacle.

    Le principal financier du spectacle en France, c’est donc une partie de l’indemnité qui aurait du revenir du chômeur de longue durée.

    N’est-il pas aberrant de savoir que le premier financier du spectacle en France est le chômeur de longue durée ?

    Que les élus, les fonctionnaires ne participent pas ?

    Plus le chômeur reste au chômage, plus il est spolié (sorte de taxe spectacle) par le régime des intermittents.

     Est-ce au chômeur de longue durée du privé de payer le plus pour la période de chômage des gens de la corporation du spectacle ? 


  • Salade75 25 février 2014 13:18

    Bonjour,

    3,7% du montant cotisé, 25% du déficit de l’assurance chômage.

    Mais visiblement, il est totalement politiquement incorrect de même se poser la question sur les intermittents du spectacle.

    Il est vrai que ceux qui profitent des « spectacles » sont majoritairement ceux qui ne sont pas au chômage et dont on parle de diminuer les indemnités (ou la durée).


    • alinea Alinea 25 février 2014 13:58

      vous dîtes n’importe quoi salade !! faites donc le compte de ce que vous gagneriez à ce que ce statut disparaisse !!


    • Salade75 25 février 2014 19:08

      Bonjour Alinéa,

      Aidez-moi à faire ce compte je vous prie.
      En tant que potentiel chômeur, je voie que ceux qui cotisent pour 3% génèrent 25% du déficit de l’assurance chômage.
      Et je me demande juste si il ne serait pas possible d’envisager de se poser la question de la possibilité d’essayer d’un peu rééquilibrer cela. ... et je constate que cette coupable audace est interdite par la police de la pensée au nom d’une exception culturelle dont mon niveau de salaire ne me permet pas de profiter.


  • zygzornifle zygzornifle 25 février 2014 15:42

    Avec ce gouvernement c’est du spectacle sans intermittence ....


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