jeudi 31 mai 2007 - par L’enfoiré

Jean-Claude Brialy : un zéphyr s’en est allé, souriant

L’éternel jeune premier, comme les journalistes le décrivaient, Jean-Claude Brialy ou plutôt Jean-Claude, tout court, est mort en cette fin mai. Mai, le mois où l’on fait ce qu’il nous plait.

En 2004, il écrivait l’histoire de sa vie et de ses rencontres « J’ai oublié de vous dire ». Que de choses à dire, que de souvenirs à écrire. Sur 74 ans dont 53 ans de présence au cinéma, au théâtre, sur la scène du grand show de la vie mondaine.

Avec des débuts en 1954, par la petite porte du petit boulot, seul, sans l’aide des parents, il se lance à l’assaut de Paris. Des courts métrages et Jacques Pinoteau qui lui offre un rôle dans l’ « Ami de la famille » enchaîné tout de suite avec « Ascenseur pour l’échafaud » de Louis Malle.

Dans le mouvement « Nouvelle Vague » avec Truffaut, et dans « Les Quatre Cents Coups » il va exceller. Beau gosse, il partage son beau parler et sa présence de bellâtre, jeune et fier de l’être. On veut vivre avec le pied au plancher à cette époque. Belle époque de mâles en proie avec la vie sur le fil du rasoir. Alain Delon, Belmondo ne sont que les comparses de cette vie qui explose après les souvenirs encore frais de la guerre. Enfants de la balle, d’abord, monopolisateurs de la vie sous toutes ses formes et expériences. Aux Etats-Unis, James Dean représentait cette « Fureur de vivre » sous le même titre au cinéma.

Dès 1971, il se lance dans la réalisation de son premier film, « Eglantine », et pour la télé en 1973. Mais, c’est surtout le théâtre qui l’attire. La présence avec le public, c’est ce qui l’électrise et le motive. Quinze pièces, c’est peu et beaucoup à la fois en regard de sa présence au cinéma qui a littéralement absorbé sa carrière, peut-être plus qu’il n’aurait voulu. Il ne savait pas dire « non ». Oui, c’est sûr. Tout tourner avant de raccrocher, une passion, un piège parfois. Une centaine de films au cinéma, 11 à la télé, 12 films réalisés lui-même.

Difficile d’être excellent en tout, mais il a donné ce qui lui semblait le meilleur de lui-même.

Le problème pour ces éternels jeunes, ou ils meurent jeune comme un mythe comme James Dean, ou il faut durer. Et durer, c’est passionnant, mais c’est dur. Sans style personnel, il y a du souci à se faire. Jean-Claude l’avait, avec charisme, comme ses « collègues » cités plus haut.

La vie publique, il en a usé et peut-être abusé en personnalité du tout-Paris. Rire et humour pour plaire étaient ses envies, ses soucis et ses obsessions. Les journalistes aimaient l’interviewer et lui ne disait, encore une fois, pas « non ». Sa verve passait bien et son rire se partageait avec le plus grand bonheur des deux côtés de la table.

Sollicité de partout pour ses connaissances étendues comme aux Grosses Têtes de Bouvard.

Son livre « Le Ruisseau des singes » en 2000 et surtout celui de 2004, reprennent les étapes de sa vie bien serrée en événements mêlés à la haute société. « J’ai oublié de vous dire » avant de devenir un bouquin, il l’a défendu sur les planches. Eternel jeune premier, rien ne lui allait aussi bien.

Sa voix douce mouilleuse, pas mielleuse, ne laisse pas indifférent. Ses bons mots, ses rappels de dictons en rapprochement avec l’explication, l’interprétation qu’il faisait des événements de la vie, sont d’une profondeur d’homme mûr.

Il n’était pas avare de distinctions. Commandeur de la Légion d’honneur, de l’Ordre national du mérite, des Arts et des Lettres. Le cancer l’a emporté après une période où visiblement la morphine avait fait ses ravages.

Sa devise « Courir plus vite que les nuages ». Ces maudits nuages font de l’ombre même au soleil.

Philippe Noiret qui s’en est allé un peu plus tôt et maintenant lui-même, deux événements qui nous laissent, spectateurs, orphelins de ces zéphyrs de la parole française en moins d’un an.

On vous aimait bien, Messieurs aux bons mots. Vos voix sont en nous, imprégnées. Les films seront toujours là pour rafraîchir l’"alzemerisation" de la vie de tous les jours.

  • Sa citation préférée était  : « Il y a des gens qui parlent, qui parlent - jusqu’à ce qu’ils aient enfin trouvé quelque chose à dire. », reprise dans "Mon père avait raison".




29 réactions


  • slowgun slowgun 31 mai 2007 12:51

    Bel hommage.

    Il restera François, ce beau garçon, copain du beau Serge qu’il aime en secret. Ce premier vrai rôle révèle déjà tout sur lui : Chabrol avait su capter l’invisible.


  • del Toro Kabyle d’Espagne 31 mai 2007 13:11

    ... Il n’a pas supporté la dernière édition de Cannes ?

    C’est Laurent Gerra qui sera triste, ça c’est sûr :(

    Ciao l’artiste.


  • LE CHAT LE CHAT 31 mai 2007 13:31

    lui qui avait tourné dans le 4eme pouvoir en 1985 , il n’a pas eu le temps de faire le 5eme smiley

    un grand comédien nous a quitté smiley


  • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 13:38

    Bonjour à tous ceux qui ont aimé ce Zéphyr,

    Oui, j’étais très surpris d’apprendre la nouvelle ce matin. Je n’étais pas le seul et les hommages d’émotions ont suivi chez ceux qui l’ont connu, gentleman cambrioleur de nos heures de présence au cinéma et à la télé. Je ne pouvais que le comparer à Philippe Noiret. Destins d’exceptions parfois en demi-teintes à leurs yeux quand on veut se placer dans l’extrème de la perfection. Gentillesse, aussi. J’ai écouté un interview repassé à la radio de 2004, ce matin. Y a pas photo, pardon, y avaitles mots pour ressentir un homme plein de justesse.  smiley


  • TSS 31 mai 2007 14:00

    j’aimais bien Brialy mais faire autant de bruit autour de son decès alors que les medias n’ont pratiquement pas parlé de pierre Gilles de Gennes prix nobel de physique !et pourtant !

    si les amoureux de brialy le voient aussi beau sur leurs ecrans plats c’est grace à lui(les cristaux liquides c’est lui)


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 14:09

      @TSS,

      Bien sûr que tu as raison quelque part. C’est sûr que tu auras la (mal)chance de le voir encore longtemps programmé sur nos petits écrans bien plats. Platitude des programmes auxquels certains ont essayé d’ajouter du relief.

      Il faudra s’y habitué le grand show bise et remise les autres sujets aux nième plan plus vite qu’on ne l’espérerait par la seule volonté de remercier pour les bienfaits physiques. Le fonctionnel dépasse en longévité le technique. Dure loi de notre vie moderne.


  • La Taverne des Poètes 31 mai 2007 14:32

    Mon hommage au beau gosse qui pratiquait l’humour sera une contrepèterie :

    « Le Clan Pasquier, le plan casse-pied ! »

    Cela n’a pas de rapport, c’est décalé, l’humour comme il l’affectionne.

    (*) Le Clan Pasquier est le nom d’une série française acteullement diffusée sur France Télévision.


  • lloran 31 mai 2007 14:57

    Il s’en est allé ...

    Quelques mots lancés pour ce grand Monsieur qui a su montré que la vie était belle.

    Quelques larmes le long du visage pour ce grand Monsieur qui va beaucoup nous manquer.

    Quelques pensées les prochaines années pour ce grand Monsieur pour se rappeler qu’il a existé.

    Quelques aurevoirs du monde entier pour ce grand Monsieur pour lui dire qu’on l’aime.

    Bye Jean Claude, tu vas beaucoup nous manquer ....


  • Dr Rached Trimèche Dr Rached Trimèche 31 mai 2007 15:02

    Bel hommage à un homme assez spetial et excepionnel ! Un homme de coeur et de talent ! Il était Membre du CIGV, avec nous, depuis plus de 15 ans !

    Cordialement www.cigv-online.com


  • Pierre R. Chantelois Pierre R. - Montréal 31 mai 2007 16:05

    @ L’enfoiré

    Bizarrement, quand un être exceptionnel nous quitte et qu’il a appartenu au monde des artistes, l’oeuvre resurgit d’un déclin pour briller à nouveau au grand jour. Il sera intéressant de suivre les rééditions des grands films de Jean-Claude Brialy car il reviendra nous hanter en pleine lumière pour nous rappeler qu’il ne faut point l’oublier.

    Ainsi va la vie.

    Pierre R.


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 16:15

      Salut Pierre,

      Et, oui, cruelle est la vie. Chacun fait son entrée, son exposé de lui-même et sa sortie en catimini ou sous les phares de l’actualité. C’est une des seules justices dans ce monde.

      Le principal, c’est que dans l’interstice, l’ « être vivant » aura eu la chance d’être motivé et d’avoir pu faire ce qu’il désirait le plus souvent pendant le laps de temps. C’est ce qu’on appelle un vie bien pleine. On ne voit pas passé le temps, ça s’est le revers de la médaille. smiley


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 16:44

      @Jeremy,

      J’ai dû raté quelque chose ou t’es-tu trompé d’histoire d’amour ?

      J’ai regardé tes vidéos et je suis resté sur ma faim de savoir.

      Jean-Claude pas vu. Mais il y a peut-être un truc. Alors explique. smiley


  • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 19:37

    Juste pour info. Mon article a été écrit assez vite. Depuis, j’ai écouté un interview de J-C et mon article s’est complémenté. Sur mon site, où j’ai toujours accès, il se trouve plus complet. (URL) smiley


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 20:19

      @Demian,

      Merci, pour cette information. Figure toi que j’ai en stock un article sur ce grand comédien aussi. Je le sortirai lors d’un anniversaire. smiley


  • Thucydide Thucydide 31 mai 2007 22:02

    Salut, l’Enfoiré, et merci pour ce bel hommage.

    Brialy est parti sur la pointe des pieds, j’entendais une interview de ses voisins qui le croisaient dans sa commune, notamment le jour du vote récent, et qui ne se doutaient pas de son état. Quelqu’un d’assez effacé, d’après eux, et loin du personnage qui apparaissait dans les émissions télé.

    Et en effet, c’est Laurent Gerra qui doit s’en trouver fort marri. Il devra trouver une nouvelle tête de turc pour remplacer son « Merveilleuse Jeanne ».


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 23:12

      Hello Thucydide,

      C’est vrai, on était habitué à sa voix. Son image, il se la réservait un peu plus pour lui seul. J’ai suivi le journal de 20h à Fr2 et en effet, les voisins comme les autres ne se doutaient pas de ce qui se passait à deux pas de chez eux. La discrétion est affaire de grand homme (dixit Arditi). Comme je l’ai écrit d’après sa propre interview de 2004 à la radio belge, Edith Piaf avait comme toujours, présenti ceux qui iraient loin. Cette fois, elle lui reconnaissait son humour et son humilité. Rien que pour cela, je me devais de sortir un billet.


  • L'enfoiré L’enfoiré 31 mai 2007 23:18

    Au fait, si ça intéresse quelqu’un l’enregistrement de l’interview de 2004 peut être obtenu si vous avez une adresse email. Le podcast fait bien les choses. Même le son sans l’image valent le détour. smiley


  • claude claude 1er juin 2007 00:28

    cher enfoiré,

    merci pour cet article,

    j’ai toujours aimé l’élégance, l’érudition, la gentillesse, l’esprit et la classe de jc brialy.

    jeune fille, il m’a un temps séduite par sa légèreté. il était beau et drôle à la fois... le rêve, pour l’adolescente que j’étais....

    je garderai de lui le souvenir d’un homme charmant. c’est le 3° gentleman qu’on nous enlève ces temps-ci, après noiret et jp cassel... ces dames là haut doivent être aux anges...


  • bouffon(s) du roi bouffon(s) du roi 1er juin 2007 10:38

    pourquoi toujours attendre qu’un homme ou une femme soit mort(e) pour lui rendre hommage ?

    enfin ...

    salut l’artiste


    • L'enfoiré L’enfoiré 1er juin 2007 10:44

      Les hommages, il ne faut pas l’oublier, il en a eu de tous types. Pas de lézard de ce côté. Il aimait être aimé. Les amateurs n’ont pas manqué. A la mort, on rassemble tout une dernière fois. La conclusion d’une vie en somme.


    • bouffon(s) du roi bouffon(s) du roi 1er juin 2007 15:18

      Certes enfoiré, c’est vrai mais souvent on ne revient sur le parcours d’un homme ou d’une femme, sur son « oeuvre », une fois qu’ils ont disparu. Dommage ...


    • L'enfoiré L’enfoiré 2 juin 2007 13:17

      @Furtif,

      Merci, pour cette correction. Cette subtilité m’avait échappé. Tu as raison, il faut corriger. Le langage parlé est plus insouciant de ce croisement d’idées. Souvent, j’utilise mon correcteur orthographique et dans ce cas, l’erreur serait passée au bleu. smiley


    • L'enfoiré L’enfoiré 2 juin 2007 14:14

      Furtif,

      Juste pour me remettre en mémoire. Tu écris : « J’eusse préféré que vous écrivissiez » ; Ne serait-ce pas : « J’eusse préféré que vous écrivassiez » ?

      J’ai cherché sur l’« Oracle Internet » et je n’ai trouvé ni l’un ni l’autre. Subj. Passé : « Que vous auriez écrit » Subj. P.Q. Parfait : « que vous eussiez écrit »

      Alors, je sais que j em’écarte du sujet... Jean-Claude aurait probablement aimé ce genre de mise au moins, donc je m’y risque. smiley


  • Christoff_M Christoff_M 3 juin 2007 00:45

    C’est un personnage aux multiples facettes plus complexe que ne le laisse supposer son image sage et lisse...

    Je retiens les larmes sincères de Line Renaud, parlant de son engagement dans la lutte contre le SIDA au milieu des années 80, alors que personne n’en parlait, peu de monde s’y intéressait, et tout cela n’était pas encore marketisé comme maintenant...

    Je retiens le jeune homme impertinent des films en noir et blanc, qui laissait échapper des pics plein d’impertinence et d’humour, dans son costume de gendre idéal, de premier de la classe. Il laissa échapper son sens de la dérision dans un film délirant ou il jouait le role d’un nanti faisant nager les autres dans sa piscine privée, le maitre nageur épuisé étant l’excellent Guy Marchand, un film à l’humour noir décapant, mais dont j’ai oublié le titre, s’il y en a qui peuvent me rafraichir la mémoire !!

    En tout cas je tire mon chapeau à ce monsieur dont je retiendrais le visage le sourire et une manière d’exprimer des maximes, des vers, des citations incomparables...


  • WalterK WalterK 5 juin 2007 05:36

    J’aimais bien l’émission que faisait J.-C. Brialy sur Europe-1. C’était je crois, au début des années 1990, le samedi après-midi : Une grande courtoisie et gentillesse dans ses interviews, sans pour autant cirer les pompes.

    En arrivant au Ciel, il a dû s’exclamer, comme dans l’imitation de Laurent Gerra : « Ah, merveilleux, tous mes amis sont là ! » smiley


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