lundi 29 novembre 2021 - par Theothea.com

« L’Importance d’être Constant » l’humour Victorien fait florès à l’Hébertot

La pièce d’Oscar Wilde triomphait à Londres alors que, déchu de ses droits d’auteur, celui-ci avait été incarcéré en raison de ses mœurs alors réprouvés…

 

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L’IMPORTANCE D’ÊTRE CONSTANT
© LOT

  

L’époque Victorienne étant ainsi à l’origine du meilleur comme du pire, l’idée d’Arnaud Denis d’en transposer sa scénographie française vers celle des « Années Folles » avait tout à gagner en ne conservant que le meilleur d’un contexte où subtilité, esprit, jeu de langage auraient la part belle à faire jaillir la folie hors des convenances.

Fallait-il encore réussir, après ces mois de confinement, à tordre l’inertie incitant à se contenter du théâtre à la maison via le numérique !

En suscitant une intimité communicative des comédiens sur les planches jusqu’aux spectateurs dans la salle, Arnaud Denis se démultipliait, comme souvent à son habitude, en faisant lien de sa personne entre réalisation & jeu, entre conception & interprétation scéniques.

D’emblée, lors de la rentrée de septembre accompagné d’un équipage flamboyant, le succès fut au rendez-vous et ne fit qu’embellir pour les neuf artistes réunis lors de chaque lever de rideau jusqu’à ce soir d’octobre où Arnaud Denis dut laisser sa place vacante, sans doute définitivement pour l’année 2021, contraint par un accident domestique lui ayant cassé le genou.

 

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L’IMPORTANCE D’ÊTRE CONSTANT
© LOT

  

Le miracle, selon les spectateurs présents lors de cette représentation improbable, c’est que le comédien qui le remplaça au pied levé n’en connaissait pas le rôle et fit donc sa prestation texte à la main sans autre filet de protection... pour être en définitive acclamé à tout rompre aux saluts.

Trois semaines plus tard celui-ci évolue plus que jamais comme un poisson dans l’eau et paraît être tellement en osmose avec ce rôle qu’il semblerait en être le détenteur choisi initialement par le metteur en scène avec qui, il faut le dire, il a quelques ressemblances.

Bref, s’il fallait accorder des Molières à cette création pour la cérémonie 2022, Jeoffrey Bourdenet (à l’affiche conjointement de « 12 hommes en colère ») ne serait pas le dernier de ceux qui mériteraient mais il faut dire que ses compagnons de scène sont tous raccord pour un triomphe.

 

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L’IMPORTANCE D’ÊTRE CONSTANT
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Évidemment, la magistrale Evelyne Buyle atteindrait en toute légitimité ce Graal mais Olivier Sitruk est si désopilant et Delphine Depardieu tellement malicieuse qu’Arnaud Denis n’a aucun souci à se faire, la trajectoire de sa mise en scène enjouée n’a pas décroché d’un iota de son orbite nominale et, même mieux, elle a acquise, avec ces tribulations, une dynamique que le public, allègre, plébiscite sans forcément en connaître ces péripéties.

D’ailleurs Jack & Algernon, les deux amis qui ont respectivement recours à un prénom d’emprunt pour mieux profiter de leur double vie de jeune homme, qu’ils se fassent appeler « Constant » en français ou « Ernest » en anglais, n’est pas un problème en soi puisque la confusion qu’ils sèment autour d’eux s’avèrent être en phase plutôt opportune ; cependant le véritable obstacle à leurs escapades est à rechercher davantage du côté de la tante Lady Bracknell, prototype exemplaire de la vieille aristocratie à cheval sur l’ensemble des conventions anglaises avec lesquelles on ne transige point.

 

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L’IMPORTANCE D’ÊTRE CONSTANT
© LOT

  

Les échanges sont savoureux comme une tasse de thé que les années folles auraient catapulté au rayon de la perfidie cynique la mieux partagée par cette société encore corsetée.

De fait, à défaut d’être un refuge pleinement garanti, « L’Importance d’être Constant » est devenu, au diapason du spectacle vivant, une valeur éminemment sûre.

   
photos 1 à 4 © LOT
photo 5 © Theothea.com
  
L'IMPORTANCE D'ETRE CONSTANT - **** Theothea.com - d'Oscar Wilde - mise en scène Arnaud Denis - avec Evelyne Buyle, Olivier Sitruk, Delphine Depardieu, Arnaud Denis ou Jeoffrey Bourdenet, Nicole Dubois, Marie Coutance, Jean-Pierre Couturier, Gaston Richard, Fabrice Talon - Théâtre Hébertot

 

  

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L’IMPORTANCE D’ÊTRE CONSTANT
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2 réactions


  • Fergus Fergus 29 novembre 2021 16:57

    Bonjour, Theothea

    J’ai vu et apprécié cette pièce  pourtant pas la meilleure d’Osacr Wilde en 2007 au théâtre Antoine avec Lorant Deutsch, Frédéric Diefenthal, Macha Méril et Gwendoline Hamon.

    Mais la manière dont vous décrivez cette nouvelle mouture très pétillante donne une grande envie de la revoir.

    Hélas ! ce sera sans moi ni mon épouse : nous ne retournerons pas au théâtre (i au concert) tant que l’on sera obligés d’y porter un masque !


    • Theothea.com Theothea.com 29 novembre 2021 18:41

      @Fergus

      Bonjour Fergus ;

      J’avais également vu, apprécié et chroniqué cette version de Pierre Laville que vous nous rappelez à juste titre. 
      Mais effectivement la mise en scène et la direction d’acteurs d’Arnaud Denis actuellement au Théâtre Hébertot est particulièrement brillante !...
      Enfin, espérons que les choix existentiels puissent coexister avec les modalités imposées au spectacle vivant.
      Bien à vous
      JM / Theothea.com

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