lundi 25 janvier 2010 - par Fergus

La Folle Journée de Nantes : Chopin à l’honneur

Mercredi débutera à Nantes la 16e édition de La Folle Journée, l’incontournable rendez-vous annuel des amoureux de la musique classique du Grand Ouest. Une Folle Journée qui s’étale depuis quelques années sur… 5 jours ! Au programme : 1700 musiciens et 281 concerts centrés cette année sur Frédéric Chopin – dont on fête le bicentenaire – et les compositeurs romantiques.

Fils de commerçants et passionné de musique, le batteur de rock René Martin, concepteur de ce festival hors du commun, était sans doute très loin d’imaginer, en organisant la 1ere édition de La Folle Journée, que le retentissement de cet évènement en ferait vite un incontournable rendez-vous de la musique classique en France et qu’il essaimerait non seulement dans d’autres villes du Grand Ouest mais également en divers lieux de la planète : Lisbonne, Bilbao, Tokyo (et désormais Niigata, Biwako et Kanasawa), Rio de Janeiro et, Chopin oblige, Varsovie à partir de cette année.

Prudemment consacrée au génial et consensuel Mozart, la 1ere édition avait proposé au public 37 concerts dans le cadre de la Cité Internationale des Congrès les 4 et 5 janvier 1995. 18238 spectateurs avaient répondu à l’appel. Malgré un taux de remplissage relativement moyen (59 %), le Comité d’organisation et la Ville de Nantes avaient persévéré l’année suivante en mettant Beethoven – autre valeur sûre – à l’affiche de La Folle Journée 1996. Organisée les 10 et 11 janvier, cette manifestation comptait 49 concerts à son programme. Pari réussi : avec 30159 billets vendus et un taux de remplissage de 84 %, René Martin pouvait arborer un grand sourire : La Folle Journée était durablement sur les rails.

13 autres éditions ont succédé à ces deux premières, toujours dans le cadre de la Cité Internationale des Congrès de Nantes, transformé pour la circonstance en Palais de la Musique. Avec, pour accueillir les musiciens et un public toujours plus nombreux, 7 salles de concerts (de 80 places pour la plus petite à 1900 places pour le grand auditorium), des salles de conférences, un hall transformé en lieu de démonstration pour des artistes émergents* ou des écoles de musique, un studio de radio, un lieu de ventes de CD en rapport avec le thème choisi, sans oublier quelques stands pratiques dont un bureau de poste provisoire disposant d’une oblitération évènementielle.

Avec les 281 concerts programmés cette année sur 5 jours (du mercredi 27 janvier au dimanche 31) et les 120 à 130000 spectateurs attendus, La Folle Journée n’est évidemment pas une manifestation élitiste. Ce n’est ni le Festival de Bayreuth ni celui de Salzbourg. Rien à voir non plus avec les concerts donnés dans les salles prestigieuses que sont Pleyel, l’Albert Hall, le Gewandhaus de Leipzig ou le Musikverein de Vienne. La Folle Journée est avant tout un évènement populaire destiné à faire connaître la musique classique au plus grand nombre, et soucieux d’en faire profiter des gens qui n’auraient pas les moyens d’accéder aux salles de prestige, ou qui seraient trop complexés pour franchir le pas.

À de rares exceptions près (les concerts retransmis en direct sur Arte ou l’exécution d’une œuvre plus longue), les concerts durent 45 minutes et les prix varient, selon le nombre des musiciens en scène, de 7 à 22 euros. Dans un souci d’ouverture des jeunes à la musique classique – une constante depuis la création de La Folle Journée – de nombreux concerts sont en outre ouverts aux scolaires à un tarif particulièrement attractif de 4,5 euros.

Le programme est cette année résolument tourné vers Chopin en cette année du bicentenaire de sa naissance, et l’intégrale de son œuvre sera jouée sur les différentes scènes : les nocturnes, mazurkas, marches, polonaises, polkas ou impromptus au piano qui ont fait sa réputation, mais également ses deux concertos pour piano, œuvres plus rarement mises au répertoire des grandes formations, et ses compositions de chambre.

Chopin ne sera évidemment pas le seul héros de la fête, et c’est avec un très grand plaisir que l’on pourra entendre, entre autres compositeurs, des œuvres de Berlioz, Hummel, Liszt, Mendelssohn, Paganini ou Schumann. Une condition cette année : aimer le piano car il sera omniprésent. La musique de chambre et la musique symphonique seront également programmées, notamment sous la forme d’ouvertures et de concertos. Avec, pour servir ces œuvres des artistes aussi confirmés que le violoniste Régis Pasquier, le violoncelliste Pieter Wispelwey, les pianistes Boris Berezovsky, Zhu Xiao-Mei, Claire Désert ou Anne Queffelec, le Trio Chausson et le Trio Wanderer, le Quatuor Modigliani, l’Ensemble Vocal de Lausanne, l’orchestre de Chambre du Würtemberg, la Simphonie du Marais, la Sinfonia Varsovia, l’Ensemble orchestral de Paris, l’orchestre national de Bordeaux-Aquitaine, l’orchestre national des Pays de Loire, l’orchestre Philharmonique de l’Oural et bien d’autres artistes de très grand qualité…

Mais chut, les instruments sont accordés, l’orchestre s’est tu, le maestro vient de lever sa baguette… Place à la musique !

* C’est dans ce hall que le public a pu, en 2008, découvrir les étonnants musiciens trinitéens du Renegades Steel Band Orchestra et leurs drôles de bidons musicaux. Dès 2009, ils figuraient au programme officiel en interprétant notamment du Bach : extraits musicaux (Schubert et Bach), d’où cette ovation du public dans le grand auditorium. Ils seront de nouveau présents en 2010 pour le plus grand plaisir du public.

Lien avec le Site officiel de La Folle Journée.



13 réactions


  • ZEN ZEN 25 janvier 2010 11:26

    Bonjour, Fergus
    Et merci pour ce rappel
    Je crois que je vais me réserver une semaine à Nantes
    Je ferais des km pour écouter Chopin


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 11:44

      Salut, Zen.

      Dépêche-toi car de très nombreux concerts sont déjà complets. Mais il doit rester ici et là des places sur internet.

      Cela dit, le bon plan consiste pour les gens qui n’ont pas de billets, à se rendre, dès le début de La Folle Journée, à la billetterie à différents moments de la journée, notamment le matin et en début d’après-midi. Car il y a des retours de billets rendus par des collectivités et remis en vente. Autre possibilité : acheter des billets aux revendeurs venus là céder des places de concerts où ils ne pourront aller pour des raisons personnelles (problème de santé par exemple) ; à noter que, contrairement à ce qui se passe avec le marché noir lors des concerts rock, ces billets sont revendus à leur valeur nominale.

      Et en l’absence de billets, cela laisse du temps pour visiter la ville de Nantes, ses musées ou sa biscuiterie Lu reconvertie en lieu branché.

      Bonne journée.


  • Voris 25 janvier 2010 11:42

    Merci Fergus, bon article quoi que j’aurais préféré que l’article parle un peu plus de musique et un peu moins de chiffres.

    Voici ma très-très-très modeste contribution musicale d’amateur mais l’essentiel c’est de participer non ? Et de faire partie d’un Tout même si l’on n’est qu’une infime particule de cet ensemble. Vive la musique ! smiley Je rassure, c’est quand même très écoutable et il n’y a pas ma voix (« ah ! ouf ! »)


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 11:49

      Salut, Voris.

      En réalité, j’avais pensé écrire un article plus axé sur la musique, mais cela aurait surchargé mon propos, en l’occurrence plus informatif. 

      Cela dit, je n’ai pas renoncé à écrire sur la musique et je publierai prochainement des articles sur ce thème dans les prochains mois si AgoraVox m’en donne la possibilité.

      Et d’accord avec toi : vive la musqiue !

      Ar wech all !


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 25 janvier 2010 11:52

    Merci Fergus vive la musique .

    Zen j’ ai écouté la nocturne hier soir . Joli .

    Y z’ aurait mieux fait d’ inventer que la musique et non la parole .


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 12:54

      Salut, Capitaine.

      Il est vrai que les paroles sont souvent bien médiocres comparées à la musique, et cela vaut pour tous les genres, classique compris. D’où l’intérêt d’écouter « Peer Gynt » (l’opéra de Grieg est en norvégien) ou certains groupes de hard-rock aux paroles totalement inaudibles !

      Bonne journée.


  • Yannick Harrel Yannick Harrel 25 janvier 2010 13:30

    Bonjour Fergus,

    Vous faites remonter quelques souvenirs à la surface où effectivement j’avais eu le grand plaisir d’assister à l’une de ces manifestations lors de mon séjour depuis le fief Vendéen voisin.

    C’est très populaire comme festif, pour le côté compassé on repassera, ce qui fait que j’en ai conservé un excellent souvenir lors de mon passage dans la cité des Ducs. Une initiative citoyenne pérenne qui en remontre à bien des initiatives institutionnelles avaleuses de fonds publics !

    Cordialement


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 13:55

      Bonjour, Yannick, et merci pour ce commentaire.

      La Folle Journée est en effet un évènement à part dans le calendrier de la musique classique dans la mesure où elle draîne vers la Cité des Congrès des milliers de personnes qui ne vont jamais assister à un concert. Et au delà de la qualité des artistes et des oeuvres interprétées, l’intérêt de cette manifestation est dans ce brassage entre ’initiés« et »béotiens« venus découvrir là d’autres sensations. Quant à être festif, ça l’est également dans la découverte des démonstrations du hall d’accueil, et jusque dans les »rallyes« que s’imposent certains participants jonglant avec les horaires pour passer dans les temps et la bonne humeur d’une salle à l’autre.
       
      La Folle Journée est en outre très appréciée des artistes qui s’y produisent, d’une part pour l’accueil du public nantais, d’autre part en raison de la possibilité unique qui s’offre à eux d’aller écouter en concert d’autres artistes renommés présents sur un même lieu.

      Côté financement, j’ignore comment René Martin et son équipe bouclent leur budget. Je sais qu’il comporte, ce qui est bien normal vu la dimension de l’évènement, des fonds publics et privés en complément des entrées et des droits de retransmission. Mais une chose est sûre : l’argent est ici bien placé car il contribue à la popularisation d’un genre musique injustement méconnu du grand nombre.

      Personnellement, mon épouse et moi y retournerons cette année pour la 5e fois, non pour y écouter du Chopin, mais le concerto pour violon en la de Mendelssohn, le concerto pour piano en ré de Hummel et , si nous pouvons obtenir des places, le concerto pour violon »la Campanella" de Paganini. Cela ne m’empêchera pas de continuer à aller voir les concerts de l’orchestre de Bretagne à Rennes.

      Cordiales salutations. 


  • L'enfoiré L’enfoiré 25 janvier 2010 16:28

    Salut Fergus,
     Cela donne envie d’aller voir sur place.
     Actuellement, chez nous c’est Mozart qui est à l’honneur dans un opéra rock.
     A la sortie, les puristes « mozartiens » ne s’y sont pas retrouvés.
     Pour les autres ce fut un enthousiasme sans bornes.
     smiley 


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 16:59


      Salut, L’enfoiré.

      Les mots « rock » et « bobo » sont décidément mis à toutes les sauces.

      Sauce marketing en l’occurrence pour cet « opéra-rock » kitsch et commercial qui est à l’oeuvre de Mozart ce qu’est Féfé de Brodway au Phèdre de Racine !

      Mais pourquoi pas si cela peut amener des spectateurs au classique ? Après tout, même la publicité a contribué à faire connaître certaines oeuvres, tel le fameux air des Bohémiennes de La Traviata de Verdi utilisé pour les superbes spots... Vania (serviettes périodiques).

      Bonne journée.


  • ZEN ZEN 25 janvier 2010 17:34

    Fergus
    On n’oubliera pas que Django Reinhardt aurait eu 100 ans cette année
    Les manifestations, à Samois et ailleurs...
    Bonne année manouche !


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 17:52

      Exact, Zen.

      Merci pour ce lien et ce bel hommage à ce grand monsieur du jazz manouche.
      Un Django Reinhardt auquel Woody Allen avait lui-même rendu, à sa manière et avec son talent, un bel hommage dans son superbe film « Accords et désaccords ».


    • Fergus Fergus 25 janvier 2010 22:59

      Bonsoir, Waldgänger.

      Le succès de La Folle Journée est en effet d’autant plus réjouissant que ce festival mêle des publics divers faits de véritables « mélomanes » (je n’aime pas trop ce mot) et de personnes désireuses de s’initier à des musiques qu’elles connaissent peu. Réjouissant également parce que l’ambiance y est particulièrement détendue et favorise les échanges entre les spectateurs et parfois avec les musiciens présents sur le site. Pas grand chose à voir avec les concerts de Pleyel (il m’arrive d’y aller) !

      Personnellement, bien qu’allant à Nantes cette année encore, je ne verrai aucun des concerts consacrés à Chopin durant cette Folle Journée. Car si le Polonais a composé quelques oeuvres remarquables pour le piano, il en a écrit un nombre encore plus grand d’ennuyeuses. Quant à ses concertos pour piano, ils ne me procurent strictement aucune émotion. Infiniment moins que ceux, grandioses, de son aîné Beethoven ou que ceux qu’écrira plus tard Rachmaninov. Comme vous, je suis avant tout un amateur de musique baroque, mais aussi des compositions pré-classiques et classiques. 

      Malgré mon peu de goût personnel pour Chopin, dont la réputation est à mon avis beaucoup plus due à sa romantique idylle avec George Sand, je n’en souhaite pas moins un franc succès à René Martin et à tous ceux, professionnels et bénévoles, qui contribuent à l’organisation de cette manifestation si particulière et si attachante.


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