vendredi 14 octobre 2005 - par Cioran

Le cargo, une autre façon de voyager

Du Havre à Hong Kong, sillonner les eaux à bord d’un cargo constitue une expérience inoubliable. Les mers et les océans se succèdent dans une diversité d’odeurs et de couleurs. Un voyage initiatique, où l’on oublie les affres de la vie terrestre, pour se plonger dans le monde fascinant de la marine marchande.

Tout commence quai des Amériques, au Havre. Le « Ravel », navire appartenant à la CMA-CGM, premier armateur français, est là, monumental au milieu des montagnes de conteneurs. Des milliers de ces boîtes seront chargées et déchargées avant que ce géant des mers, long de 300 mètres, ne soit prêt à larguer ses amarres. Au petit matin, le plus gros porte-conteneurs français se fraie un chemin dans la brume dense et part en direction de Rotterdam, premier port de la tournée d’Europe du Nord. Il y arrivera à peine douze heures plus tard. Pour le passager, c’est la première escale. Mais impossible de descendre, le centre ville est trop éloigné et le transport en taxi trop onéreux. L’occasion de se familiariser avec le quotidien du bord, et de participer aux exercices d’abandon et d’incendie dirigés par le second capitaine. Vingt-quatre heures plus tard, le « Ravel » met le cap sur Hambourg. Il remonte l’Elbe de nuit et c’est à l’aube qu’il arrivera en vue de l’immense port allemand. Cette fois, la ville est accessible. Les officiers de quart appellent la navette du port qui conduit les passagers aux portes du terminal. De là il est alors possible d’appeler un taxi, ou de prendre un bus. La frénésie de la vie terrestre paraît bien curieuse, à seulement trois jours du départ. Le passager ne doit pas pour autant se laisser étourdir par l’agitation de la grande ville ; il doit veiller à revenir à l’échelle de coupée au moins une heure avant le départ. Le cargo n’attendra pas. La marchandise et la tenue du planning priment. Les opérations commerciales ont cette fois encore duré vingt-quatre heures, et le navire part en direction de Zeebrugge. Ce sera ensuite Southampton pour une étape éclair.

Les frissons du canal de Suez.

La tournée d’Europe du Nord est finie, et le « CMA-CGM Ravel » met cap au Sud. Après quatre jours de mer, Malte et le port de la petite ville de Birzebbugia seront la prochaine escale. Le bus n°6 conduit au centre de La Valette, ville chargée d’histoire et emplie des influences des nombreuses civilisations qui se sont succédées. Le mythique canal de Suez est maintenant prévu dans trois jours, et le navire ne doit pas prendre de retard. De son heure d’arrivée au point de mouillage à l’entrée du canal face à Port-Saïd, dépendra son heure de passage. C’est avec une extrême lenteur que les cargos passent le canal avant de rejoindre la Mer Rouge et sa température tropicale. Le Canal est passé, et le redouté détroit de Malacca est encore loin. Le commandant choisit alors ce moment pour organiser la très attendue soirée brochettes sur le pont, pour l’équipage et pour les passagers. Une occasion rêvée pour partager les récits toujours passionnants des marins et des officiers.

Le calme et le repos du grand large.

A bord, le temps est une obsession permanente. Sauf pour le passager, qui se réapproprie enfin la véritable échelle de valeur du temps. La réalité terrestre est oubliée, et avec elle cette sensation d’urgence et de course permanente. Les journées passent, s’étirent, rythmées par les heures de repas. Le passager peut choisir de se promener le long des coursives, ou de flâner à l’avant du navire, loin du bruit de la machine. Il peut aussi monter à la passerelle, ou visiter la salle des machines, où le chef mécanicien le reçoit volontiers. Si le temps se montre trop capricieux, un salon est mis à sa disposition, ainsi qu’une salle de sports et une bibliothèque. L’ennui ne vient jamais. La mer offre un spectacle toujours renouvelé, toujours rassérénant, toujours enivrant.

Hong Kong, première escale chinoise.

Huit jours de pleine mer, et une totale perte de repères terrestres, et voilà le « CMA-CGM Ravel » dans le port de Khor Fakkan, aux Emirats Arabes Unis. L’agent maritime local trouve assez étrange que l’on ait envie de visiter ce petit port de pêche situé sur le golfe d’Oman. Il conseille plutôt de se rendre à la ville voisine de Fujairah, en plein essor. Le « CMA-CGM Ravel » navigue maintenant sur l’Océan indien. La tension monte un peu à l’approche du détroit de Malacca, et plus précisément du détroit de Singapour. Des attaques de pirates ont été en effet signalées, et la peur de la panne est dans tous les esprits. Mais c’est sans encombres que huit jours après Khor Fakkan, le « Ravel » arrive dans le port de Hong-Kong. Il poursuivra ensuite sa route vers les ports du nord de la Chine : Shanghai, Ningbo, Yangtian, avant de revenir au Havre, via Port Kelang en Malaisie et Malte. Pour les marins du « Ravel », le voyage continue. Le passager, lui, doit doucement atterrir et se réhabituer à la vie terrestre.

Cioran

Voyage en cargo : mode d’emploi (encadré)

Aujourd’hui les navires de la marine marchande embarquant des passagers, pour la plupart des retraités, disposent de cabines luxueuses et de services de qualité. Pour rallier un port à un autre, les compagnies pourront suivre des routes différentes, ce qui impliquera alors des durées de transport très variables. C’est pourquoi le prix d’une traversée devra toujours être calculé d’après le nombre de jours prévus à bord, et non par rapport à la distance directe entre chaque port. Il faut compter environ 100 euros par journée.

Où se renseigner ?

Sites :

http://www.cargo-voyages.com

http://www.mer-et-voyages.com

http://www.marine-marchande.com

http://www.cma-cgm.com/products_services/voyage_fr.asp

http://www.abm.fr/pratique/cargo.html



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